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Répette qu'on l'adore,

Qu'elle fait naître & l'eftime & l'amour, tout dit encore.

Tu n'auras pas

Mes vers foyez glorieux,

Mon but vous décore;

Tout ce qui touche les Dieux
S'épure & s'honore:

Un petit préfent comme un grand,
Mérite leur clémence,

Et je dirai: le jour du fentiment
Le fut auffi de l'indulgence."

Nature, Hymen, de moitié,
T'offrent pour exemple;

Dans notre cœur l'amitié

A placé ton temple;

La raifon t'offre en ton printemps,
Les fruits mûrs de l'automne,

L'Hymen fourit, & les pleurs des Amansi
Ne font qu'embellir fa couronne.

Finiflons notre bouquet,

Le fujet m'entraîne,
Avec plaifir il fut fait,

Reçois-le fans peine ;.

A tant de vœux je n'en joins plus

Qu'un fur les deftinées...

Puifle le ciel régler fur tes vertus
La mesure de tes années!

NOUVELLES

LITTÉRAIRES.

Ermance, anecdote Françoife; par M. d'Arnaud. Vol. in-8°. avec figures. A Paris, chez Delalain, Libraire, rue de la Comédie Françoife.

ERMANCE, fortie de parens diftingués dans la Province, & qui, indépendamment des places & des biens, jouiffoient de la confidération perfonnelle, réuniffoit peut-être tous les avantages. S'atta» choit on à la beauté, il n'étoit pas pof

fible que rien de plus beau s'offrît aux » yeux. Les grâces étoient elles préférées, » c'étoient les grâces mêmes qui fe multiplioient à l'infini dans cette jeune perfonne; elle poffédoit tous les genres de » féduction : une brillante éducation étoit » venue ajouter aux riches préfens de la

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nature; les arts d'agrément, les con» noiffances même utiles & profondes, » un goût auffi folide que délicat, la rai» fon cachée fous la magie de l'efprit, » fur-tour une élévation d'âme à laquelle fa vertu eûr tout facrifié.: telle eft,

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ajoute l'Auteur de cette anecdote, l'idée » qu'on peut concevoir d'une espèce » d'héroïne dont fon fexe doit s'énorgueillir ».

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Ermance, feule héritière d'un bien aflez confidérable, étoit en droit de prétendre aux partis les plus élevés; mais fur le portrait qui nous en eft ici tracé, on doit croire que ni le rang, ni la fortune ne pouvoient toucher un cœur éclairé par le fentiment: & qui nous fait mieux connoître & aimer la vérité? Rarement, c'eft la réflexion de l'Ecrivain, la voix du fentiment nous trompe : mais la fociété a prononcé qu'il feroit l'efclave des conventions, & de là ces malheurs, ces foibleffes, ces égaremens, cet enchaînement de revers, fuite prefque inféparable d'une fenfibilité qui fe révolte contre le joug qu'on lui veut impofer. Ermance étoit déterminée à s'y foumettre : cette jeune perfonne avoit éprouvé tous les charmes du fentiment; elle voyoit dans le Chevalier de Lorménil, doué des

plus excellentes qualités, un amant, qui, par le don de fa foi, pouvoir la rendre heureufe; elle fçut néanmoins facrifier fesplus flatteufes efpérances à fes devoirs. Elle ne fe cachoit point que l'obligation

filiale l'enchaînoit fans réserve à l'autorité paternelle, & que la moindre réfiftence à cette autorité étoit une faute très-grave, qu'une fille, nourrie au fein de la fageffe, ne pouvoit fe pardonner. Conduite par. ces principes, elle n'oppofa que fes prières & fes larmes aux ordres impérieux d'un père qui vouloit être obéi, & croyoit tout faire pour fa fille en lui choififlant un époux opulent. « Daramant, c'est le nom » de cet époux, joignoit à une fortune » éclatante quelques qualités qui lui auroient prêté de l'agrément: il avoit en »effet un extérieur prévenant, un efprit » cultivé, de la vivacité dans l'imagina. » tion, de la dignité dans le caractère;

mais fon penchant à la jaloufie le por» toit à des excès dont il avoit déjà eu » lieu de fe repentir: plufieurs Demoi» felles de la ville qu'il avoit recherchées » en mariage, s'étoient apperçues de ce » défaut que les femmes ne pardonnent guères: elles le fuyoient... » Quand le père d'Ermance le préfenta à fa fille, fes compignes même la plaignirent, loin de lui porter envie.

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M. d'A. a voulu nous peindre, dans. cette jeune perfonne, le triomphe de l'obéiflance filiale & de la vertu. Mais.

comme il n'y a point de vertu fans combat, il nous repréfente Ermance ayant à fe défendre contre fon propre cœur & les, veux d'un amant qui lui étoit toujours cher. Cet amant, défefpéré de perdre fa maîtreffe, vouloit mourir à fes yeux. Elle s'arme alors d'une fermeté furnaturelle, & lui rappelle ce que le devoir & l'honneur prefcrivent. «J'avois, lui avoue t» elle, un cœur capable de s'attacher par » des nœuds durables: mais je vais for» mer d'autres liens que ceux dont la » nature fembloit nous avoir enchaînés. » Je me foumers au joug qui m'attend » le devoir me l'ordonne; oui, je dois ne point vous voir, vous refuser la » moindre pensée, vous oublier. Je vous » dirai plus: mon père a été instruit, par » ma propre bouche, d'un penchant que l'un & l'autre nous fommes obligés » d'étouffer. Je ne vous nierai point que j'euffe cru trouver mon bonheur dans »notre union: la volonté paternelle n'a, point été d'accord avec mes vœux; il » faut céder: je porterai ma chaîne ; il ne s'agit point ici de vous montrer » mon ame, mes combats, les chagrins. qui me font préparés: imitez-moi; ayez ma fermeté, & en nous plaignant

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