Page images
PDF
EPUB

fonctions publiques une instruction théorique et pratique qui serait à la fois une garantie de l'habitude du travail qu'ils auraient contractée, et une preuve de l'aptitude administrative qu'ils auraient acquise.

L'établissement de la hiérarchie administrative serait un grand pas de fait vers l'établissement de la hiérarchie sociale et de l'aristocratie nouvelle, telles que nous les comprenons, tout intellectuelles et sans autres priviléges ni démarcations qu'une aptitude éprouvée, qu'une supériorité reconnue, que des services incontestés et que des droits incontestables.

Dans notre pensée, la hiérarchie et l'égalité ne s'excluent pas; elles se fortifient au contraire mutuellement : il est vrai que par l'expression d'égalité nous n'entendons pas une surface unie comme le niveau d'un lac; encore moins l'action d'un rustre qui renverse un passant en lui disant : «Nous sommes égaux. » Nous définissons l'égalité : - la liberté du concours, c'est-à-dire que tous soient admis à soutenir leurs prétentions; mais ce n'est pas à dire que tous soient aptes à les justifier. Ainsi, deux concurrents cessent d'être égaux lorsque la présomption de l'un a montré son infériorité sur l'autre.-Un homme sans moralité et sans instruction n'est pas l'égal d'un homme moral et instruit, mais il aurait pu l'être.

Les hommes qui ne conçoivent pas l'égalité sociale ainsi entendue se rejettent alors sur l'égalité naturelle, qu'ils croient mieux comprendre; mais, à notre avis, sur ce point comme sur l'autre, ils ne raisonnent pas plus juste, car la nature n'est ni moins arbitraire ni moins variée que la société dans les avantages qu'elle dispense.

Enfin, selon nous, l'égalité absolue, c'est le libre et l'entier développement des facultés humaines et des supériorités sociales, c'est l'application inflexible de ce principe essentiellement conservateur et progressif, que toutes les supériorités de fait soient reconnues de droit.

CONCLUSION.

Le jour où la Charte fut donnée, l'instruction universelle fut promise, car elle fut nécessaire.

ROYER-COLLARD.

Exiger d'un jeune homme des connaissances si diverses pour l'admettre dans une carrière, c'est risquer de priver l'État des grands hommes que cette carrière pourrait produire un jour : car, par une bizarrerie de l'esprit humain, tel est un grand médecin ou un grand jurisconsulte, qui n'a jamais su apprendre une division complexe.

NAPOLÉON.

Il ne s'agit pas de substituer l'éducation professionnelle à l'éducation classique, il s'agit simplement de mettre à côté de l'éducation classique l'éducation professionnelle, d'établir par conséquent différentes études correspondantes à la diversité des professions sociales.

SAINT-MARC-GIRARDIN. Moniteur, 5 juin 1838.

CONCLUSION.

La France a les principaux éléments d'un bon système d'instruction publique, mais il manque aux vastes établissements qu'elle possède un lien, une direction, un but; ils sont assez nombreux, mais ils ne sont pas assez variés; aussi leur ensemble laisse-t-il d'importantes lacunes à combler. L'unité et l'uniformité ne doivent pas être prises l'une pour l'autre. L'unité est le fondement de toute hiérarchie, l'uniformité en est au contraire l'exclusion.

L'instruction publique se compose en France de trois degrés :

1° Enseignement primaire; 2o Enseignement secondaire; 3o Enseignement supérieur.

Mais cette division, systématique en apparence, n'est qu'arbitraire dans la réalité; elle ne se fonde sur rien de solide, elle ne correspond à rien de ce qui est dans la société; ce sont trois embranchements qui n'aboutissent pas.

Au lieu de trois degrés, nous proposons d'en réduire le nombre à deux, mais complets l'un et l'autre :

1° Enseignement élémentaire,— généṛul,— national; 2o Enseignement complémentaire, - spécial,-professionnel, laissant à choisir, pour chacun de ces deux degrés, entre l'une des trois dénominations, que nous n'avons ainsi agglomérées qu'afin de mieux préciser notre pensée et d'en rendre le sens abstrait plus facile à saisir.

Nous demandons que d'abord tous les Français, déclarés successivement par deux chartes égaux devant la loi, reçoivent gratuitement une instruction judicieusement déterminée, et qui soit UNE pour tous; — plus ou moins variée dans son programme, selon les exigences du temps, mais invariablement d'accord avec l'esprit des institutions politiques qu'elle doit toujours avoir pour but et pour effet de perpétuer et de consolider;-qui soit le point de départ commun de toutes les carrières diverses; — qui soit enfin pour chacune d'elles ce qu'est le centre d'un cercle à ses rayons.

Ainsi conçue, l'instruction élémentaire serait alors ce qu'est, dans un autre ordre d'idées et pour un autre àge, la garde nationale; le service du soldat citoyen acquitterait la dette de l'enfant. L'école et le corps-de-garde se compléteraient ainsi l'un par l'autre; tous deux auraient l'égalité pour fondement, l'élection pour principe, le tambour pour rappel.

Si nous insistons autant sur ce point, c'est qu'il n'en est aucun qui se recommande plus fortement à l'attention du gouvernement que le défaut absolu de concordance de nos établissements d'instruction publique avec notre régime municipal et nos institutions politiques; c'est qu'aussi longtemps que cette concordance ne sera pas établie, nous n'aurons pas d'éducation nationale; et par éducation nationale nous entendons la fin dont les moyens sont l'enseignement public.

S'il y avait en France une éducation nationale, c'est-à

« PreviousContinue »