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I.

INSTRUCTION PUBLIQUE,

ÉLÉMENTAIRE, GÉNÉRALE, NATIONALE.

(Généralités. - Unité.)

Versez l'instruction sur la tête du peuple; vous lui devez ce baptême. LHERMINIER.

« On ne saurait ajourner l'éducation de la jeunesse comme on ajourne l'achèvement ou les embellissements d'un édifice monumental.

« Le gouvernement doit à toutes les classes de la nation, aux citoyens de tous les états, l'instruction portée au moins à ce degré où chacun peut gérer ses intérêts les plus ordinaires, et acquérir dès l'enfance, par quelques brèves études que les lectures fortifieront et développeront plus tard, ces principes de sagesse qui ne parlent pas moins au cœur qu'à l'esprit, qui dirigent avec sûreté dans les difficultés de la vie, et qui consolent, dans le malheur, par une céleste résignation.

« Une génération nombreuse parvient chaque année à l'âge où le gouvernement doit commencer à lui offrir le bienfait de l'instruction; mais une multitude de jeunes hommes â manqué à le recevoir. Elle ne ressort que trop de ces longues lacunes qui viennent d'être signalées dans l'enseignement. Ainsi c'est à la fois le présent qu'il faut satisfaire, et l'arriéré qu'il faut dédommager. Que notre vote sOIT ASSEZ GÉNÉREUX pour que les adultes comme les enfants y trouvent des moyens de solide et suffisante instruction, pour que les leçons préparent, par des idées simples sur nos arts les plus usuels et par une certaine rectitude de la main et de l'œil, à l'exercice de toutes les professions.

<< En France, l'intervention de la puissance publique est indispensable aux succès de l'instruction primaire ; l'esprit d'association n'y suffirait jamais. Si en Angleterre il a produit des succès merveilleux, c'est parce qu'il a pour aiguillon et pour aliment la propagation des idées religieuses, et que les sectes prennent pour instruments de leurs luttes continuelles les écoles qu'elles fondent et les livres qu'elles répandent à profusion. »

GILLON, député.

Rapport sur le budget du ministère de l'in

struction publique. (Session 1833.)

I.

INSTRUCTION PUBLIQUE,

ÉLÉMENTAIRE, GÉNÉRALE, NATIONALE.

(Généralités. - Unité.)

Les obstacles que toute loi sur l'instruction élémentaire ou primaire rencontrera dans son application sont de deux natures:

Matériels et moraux.

Les obstacles matériels sont :

L'isolement d'un grand nombre de hameaux; éloignement de la commune, siége de l'école;

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Le mauvais état des chemins vicinaux, qui, la moitié de l'année, ne permet pas aux enfants de venir à l'école, précisément à l'époque où la saison rigoureuse et la suspension des travaux agricoles les rendent moins utiles à leurs parents;

Les neiges, qui couvrent une assez grande étendue de la France pendant plusieurs mois;

La rétribution à payer, toujours trop élevée, quelque modique qu'elle soit, en raison de la condition peu aisée du plus grand nombre, et du peu de cas que les parents pauvres font de l'instruction donnée à leurs enfants;

Le défaut de méthodes expéditives, les méthodes en vigueur privant trop longtemps les familles de l'avantage qu'elles tirent du concours des enfants, dès l'âge de sept

ans;

En l'absence de mesures coercitives, le manque de primes d'encouragement distribuées;

1° Aux parents qui envoient soigneusement leurs enfants aux écoles;

2° Aux enfants qui se distinguent par leur aptitude et leur assiduité;

Enfin l'insuffisance du nombre des maisons d'école. Les obstacles moraux sont :

L'apathie des parents, qui, n'ayant pu apprécier par eux-mêmes l'avantage de l'instruction, la considèrent comme un moyen de désunion des familles, et craignent que leurs enfants, lorsqu'ils seront plus instruits qu'eux, ne les dédaignent ou ne s'écartent des errements qu'ils suivent;

L'état de dépendance des instituteurs et leur condition misérable, qui les déconsidèrent aux yeux des habitants de la commune, et s'opposent à ce qu'ils y acquièrent l'influence qui devrait les placer au premier rang, entre le maire et le curé;

L'opposition que, dans beaucoup de communes, les instituteurs rencontrent de la part des curés, qui tous ne comprennent pas que l'influence qu'ils possèdent peut encore s'augmenter, -que le respect qu'ils inspirent aux personnes les plus pieuses peut aussi s'étendre aux personnes qui le seraient le moins, que la route dans laquelle ils s'égarent est sans issue, -que leur saint ministère les appelle à travailler les premiers à l'émancipation intellectuelle des masses, à l'amélioration de leur sort, que marcher d'un pas ferme dans la voie du progrès, c'est suivre les traces du Christ, qui renversa l'idolatrie, abolit l'esclavage, et fonda sur leurs ruines la religion qui proclame tous les hommes frères;

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L'indifférence et la parcimonie d'un grand nombre de maires et de conseillers municipaux, à qui il est difficile de faire comprendre que la fondation d'une école ou le traitement d'un instituteur vaillent une allocation de la commune;

L'égoïsme des propriétaires ruraux et des fermiers ai

sés, qui, craignant de ne plus trouver aussi facilement des gens à gages, voient avec déplaisir et inquiétude qu'on instruise les indigents aux frais de la commune;

Enfin l'opinion, malheureusement trop fondée et trop généralement répandue, que les fonctions d'instituteur ne sauraient jamais être une profession, puisqu'elles ne suffisent point pour faire subsister ceux qui les exercent; d'où il suit qu'on ne se résigne à prendre cette carrière qu'en désespoir de toute autre, et que ce sont les moins capables qui la choisissent.

Ces obstacles ne sont pas de ceux qu'on peut vaincre en les abordant timidement.

Veut-on que le gouvernement représentatif soit autre chose qu'un despotisme légal, — que le régime municipal crée des mœurs parlementaires, que l'instituteur, le maire et le curé concourent également ensemble à la moralisation des masses, que l'agriculture et l'industrie

se prêtent des forces mutuelles,

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que l'impôt soit acquitté par les contribuables sans leur faire éprouver aussi vivement le regret d'argent donné sans équivalent reçu; veut-on enfin que l'instruction nécessaire au développement de l'intelligence humaine soit considérée comme une obligation de la société envers tout homme qui naît et vit, en compensation des devoirs qu'elle lui impose et en garantie des droits qu'elle lui donne ;

Alors il faut :

I. Assimiler, quant au traitement, l'instituteur au ministre du culte; faire de l'instruction élémentaire une dette de l'État;

II. Déterminer les divers objets et degrés dont l'instruction élémentaire devra se composer;

III. Encourager sans relâche le perfectionnement de toutes les méthodes expéditives;

IV. Priver de l'exercice de ses droits politiques tout contribuable âgé de moins de vingt ans, qui ne pourra pas justifier, à partir d'une époque à déterminer, qu'il sait lire et écrire;

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