Page images
PDF
EPUB

payer mille deux cents deniers ou trente sous d'or.

« S'il a porté sa main au dessus du coude, il sera condamné à payer mille quatre cents deniers ou trente-cinq sous d'or.

<< S'il lui a pressé le sein, il sera condamné à payer mille huit cents deniers ou quarante-cinq sous d'or1. »>

La pudeur des rédacteurs de la loi salique leur interdit de continuer cette énumération. Cette scrupuleuse retenue montre bien que leur vertu était celle de la nation.

Le christianisme fut l'instituteur de ces peuples enfants, et leur apprit que les bonnes mœurs sont la sauvegarde des empires comme celle des familles. A peine convertis à la foi chrétienne, ils font rédiger par quatre des plus anciens de leur race ces coutumes barbares, qui devaient dominer la civilisation dépravée des Romains. L'œuvre de Dieu s'avançait dans le monde; l'empire d'Occident tremblait sur ses fondements, c'est alors que le peuple prédestiné à détruire et à renouveler s'écrie:

« Gloire à la nation des Francs! que JésusChrist, le souverain des rois, veille sur les destinées de cet empire; qu'il prodigue à ses chefs les trésors de sa grâce; qu'il protége ses armées et fortifie ses peuples dans la foi chrétienne; qu'il leur accorde des jours de paix et de bonheur2. »

1. Lex Salica, tit. XXII.—2. Lex Salica, initio.

Jamais prière adressée au Souverain maître de l'univers ne fut plus magnifiquement exaucée. Les barbares eurent deux vertus, qui font les peuples conquérants.

L'idée de Dieu et de l'immortalité de l'âme profondément enracinée dans le cœur; une grande pureté de mœurs.

La foi leur inspirait le mépris de la mort.

La chasteté les douait de constitutions robustes et de caractères énergiquement trempés.

Les Francs, nos pères ont montré comment on est vainqueur.

Nous savons comment on est vaincu.

[ocr errors]

ANGLO-SAXONS. INFLUENCE DE LA RÉFORME.
COLONISATIONS.

Le pape saint Grégoire, écrivant à saint Augustin de Cantorbéry qui avait converti l'Angleterre à la foi chrétienne, interdit le mariage entre cousinsgermains; c'était à la fin du sixième siècle, ou, au plus tard au commencement du septième. Le droit romain plaçait cette parenté au quatrième

degré mais le droit canonique seulement au second1.

L'empêchement de parenté devint absolu dans toute la catholicité après le second concile romain tenu sous Grégoire II; le canon qui prohibe le mariage entre parents aux degrés les plus éloignés, se trouve dans le recueil d'Egbert archevêque d'York et était par conséquent reçu en Angleterre dans le huitième siècle. On jugea cependant nécessaire de déterminer la défense illimitée portée par ce concile, et de la borner au cinquième degré inclusivement.

Les mariages n'étaient pas encore défendus en Angleterre au delà de ce degré, dans le déclin du dixième siècle; mais, dans le onzième l'interdiction s'étendit jusqu'au sixième degré; c'est ce qui paraît par les lois du roi Canut publiées en 1032'.

Qu'on n'oublie pas que ce degré de parenté n'était pas celui du droit romain, mais celui du droit canonique, degré qui n'a de nom dans aucune langue.

Cette discipline qui eut de si immenses avantages, était aussi sujette à de graves inconvénients; elle entraînait de fréquentes demandes de cassation de mariage, et sous le prétexte de l'inceste, la loi sanctionnait le divorce. Innocent III semble

1. Voy. POTHIER, Traité du contrat de mariage, part. III, chap. III, tome 1er, p. 151 de l'édit. de 1771.

2. Reinhold Schmid, die Gesetze der Angelsachsen, 143. C. POTHIER, ibid., p. 185. « Ne christiana fide tinctus, intra sextum suæ cognationis gradum nuptias contrahat. »

l'avoir reconnu; le concile de Latran tenu l'an 1215 borna la défense au quatrième degré; ce fut dès lors, la règle observée dans l'Église latine.

Mais un système complaisant de dispenses tendit de plus en plus à laisser tomber en désuétude et à abroger ces sévères restrictions. L'Angleterre en offrit le plus mémorable exemple.

Henri VIII monte sur le trône en 1509 et épouse Catherine d'Aragon, veuve de son frère. Devenu• éperdument épris d'Anna Boleyn, il demande la cassation de son mariage sous le prétexte de scrupules religieux. Le pape, qui avait accordé des dispenses pour épouser la belle-sœur refusa de sanctionner le divorce. Henri VIII divorça avec la reine et avec l'Église de Rome.

La réforme anglaise s'appuya également sur le Lévitique. Le statut 32, Henri VIII, c. 38, déclare que toutes personnes peuvent légalement se marier à l'exception de celles à qui la loi de Dieu le défend.

«< Entre collatéraux, dit l'annotateur de Blackstone (Christian), il est universellement vrai qu'il est permis de se marier entre parents au quatrième degré (du droit romain) ou à un degré plus éloigné. Les cousins et les cousines au degré de germain, le neveu et la grand'tante ou la nièce et le grand-oncle, sont au quatrième degré, et peuvent, dès lors, s'épouser respectivement, et, quoique un homme ne puisse se marier à sa grand'

mère, il est certain qu'il peut en épouser la sœur1. >>

A l'époque de Henri VIII, le droit canonique sur les empêchements de la parenté, avait produit tous ses effets en Angleterre; les dispenses n'y avaient apporté que peu ou point d'obstacle; il fallait les acheter et les grands seuls le pouvaient.

Au commencement du treizième siècle, il n'y avait plus de Bretons, de Saxons, de Normands en Angleterre il n'y avait que des Anglais.

:

Mais il y a de nos jours des Écossais et des Irlandais. Quelles sont les conséquences des lois du Lévitique sur l'union des trois nations de la Grande-Bretagne ?

Les lois sur les empêchements de la parenté n'ont d'efficacité pour produire l'unité des peuples, que lorsqu'elles agissent sur des populations superposées, vivant sur un même territoire, dans une même ville; dans ce cas, les populations indigènes s'unissent plus intimement entre elles, et les populations étrangères finissent, après quelques générations, par oublier leur origine et leur ancienne nationalité.

Mais ces dispositions restrictives des mariages dans la famille, n'auraient que peu d'action sur des populations même soumises au même gouvernement, si elles avaient des croyances religieuses différentes, et si elles n'habitaient pas le même

territoire.

1. BLAKSTONE, Lois anglaises, tome II, p. 198, 199.

« PreviousContinue »