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Dans la plupart des Etats de l'Europe, c'est sous la direction immédiate de ce ministre que sont placés les consuls, et c'est lui qui délivre l'exequatur aux agents commerciaux étrangers. Dans les pays où les consuls sont plus particulièrement subordonnés au ministère de la marine, ils n'en reçoivent pas moins des instructions spéciales du ministre des affaires étrangères.

Les attributions de ce ministre s'étendent quelquefois aussi à la garde des archives de l'État; mais, plus ordinairement, les archives générales sont placées sous la surveillance du ministre de la justice ou du ministre de l'intérieur. Les archives particulières du département des affaires étrangères conservent, dans tous les cas, le dépôt non-seulement des documents importants qui concernent les engagements du souverain et de l'État, leurs droits ou leurs prétentions, mais encore toutes les notes et offices diplomatiques relatifs aux négociations, la correspondance du ministre avec ses agents au dehors et avec les ministres accrédités auprès de son gouvernement (').

et au protocole, aux priviléges, immunités et franchises des ambassadeurs et ministres étrangers.

(1) Quant au mode de travail du ministre des relations extérieures, M. de FLASSAN, dans son Histoire générale de la diplomatie française, en parlant de la méthode adoptée par M. d'Argenson, ministre de Louis XV, comme pouvant servir d'instruction aux diplomates, s'exprime ainsi : « M. d'Argenson, pendant tout le temps de son ministère, » se piqua d'une grande assiduité au travail. Levé à cinq heures, il >> commençait sa correspondance; et à neuf heures, il renvoyait à ses >> quatre chefs de bureau tout le travail du jour préparé et arrêté. Il » avait habitué ses employés à faire des extraits de toutes les dépê>>ches et offices; ce qui lui servait à rapporter sommairement au conseil

Comme chaque cour en particulier observe un cérémonial déterminé dans ses rapports avec les autres c'est encore aux archives du département des affaires étrangères que se trouvent réunis les formulaires pour tout ce qui regarde les titres, les expressions de courtoisie, la forme et les usages à observer dans les divers offices diplomatiques (').

» les affaires qui méritaient moins de discussion. Quant aux réponses » à faire, ce ministre en écrivait l'esprit en marge; et avec ses apos» tilles, on composait les dépêches pour les ministres du dehors. In» dépendamment de ce travail des bureaux, le ministre écrivait les » lettres les plus essentielles ou les plus délicates. Il rédigeait encore » des mémoires et des récapitulations pour le roi; des projets, des >> plans, des agenda pour sa propre conduite, pour ses avis au conseil, » et plus particulièrement pour le travail avec le roi, ainsi que pour » ce qu'il avait à demander ou à répondre aux ministres étrangers. >>

(1) Aussi l'authenticité d'un document, lors même qu'il ne se trouverait déposé que dans les archives d'une seule des parties intéressées, pourrait-elle difficilement être mise en doute.

CHAPITRE II.

DES MINISTRES PUBLICS ET DES MISSIONS DIPLOMATIQUES EN GÉNÉRAL.

§ 4.

Des ministres publics en général.

Quoique le titre de ministre serve en général à désigner tout fonctionnaire de l'État qui préside en chef un département de l'administration publique, tel que celui de la guerre, de l'intérieur, de la justice, etc., il est également affecté à l'agent diplomatique qu'un souverain ou un gouvernement envoie auprès d'un Etat étranger, ou à un congrès, pour y traiter des affaires publiques, et qui, muni de lettres de créance ou de pleins-pouvoirs, jouit des priviléges que le droit des gens accorde au caractère public dont il est revêtu. C'est dans cette dernière acception que le droit des gens universel parle des ministres publics et de leurs droits, immunités et prérogatives. Aujourd'hui encore on envoie quelquefois des ministres pour un simple objet de cérémonie; mais depuis l'introduction des missions permanentes, les ministres accrédités auprès d'un gouvernement ou d'un souverain étranger le sont spécialement pour veiller au maintien de l'entente réciproque, pour protéger leurs nationaux, et informer

leur cour ou leur gouvernement de tout ce qui peut être pour l'État d'un intérêt sérieux, sans être chargés toujours d'une négociation déterminée. Le droit des gens coutumier accorde, dans la règle, à ces agents diplomatiques les mêmes prérogatives que celles dont jouit un négociateur effectif (').

§ 5.

Du droit de légation.

Les États souverains dont l'indépendance est universellement reconnue ont, par une conséquence nécessaire, le droit de s'envoyer des plénipotentiaires respectifs. Mais si l'indépendance souveraine constitue seule ce droit (2), il s'ensuit nécessairement que des États dépendants ou mi-souverains(3) ne peuvent en au

() G.-F. de MARTENS, Précis du droit des gens moderne de l'Europe, § 486.

(2) Lorsque, par suite d'un système de confédération, les États libres se réunissent, et s'imposent réciproquement des obligations, l'indépendance de chacun d'eux ne peut point en souffrir. De nos jours, la Confédération germanique offre un exemple de cette nature.

Il en était de même des princes membres du Corps germanique, durant l'existence de l'empire d'Allemagne, et des ci-devant ducs de Courlande. - VATTEL, liv. IV, § 58, dit : « Une alliance inégale, et même un traité de protection n'étant pas incompatible avec la souveraineté, ces sortes de traités ne dépouillent point par eux-mêmes un État du droit d'envoyer et de recevoir des ministres publics, si l'allié inégal, ou le protégé, n'a pas renoncé expressément au droit d'entretenir des relations et de traiter avec d'autres puissances. »>

(3) Les États mi-souverains sont ceux qui n'exercent pas la souveraineté par eux-mêmes, bien que régis par une constitution qui leur est propre et pourvus d'une administration intérieure spéciale :

cun cas accréditer des agents diplomatiques, lors même qu'ils y seraient autorisés par l'État sous le protectorat duquel ils se trouvent placés (1). Lorsque le droit de légation est contesté ou douteux, ou que les circonstances politiques en rendent l'exercice public compromettant ou difficile, soit d'un côté, soit de l'autre, on envoie et on reçoit quelquefois des agents n'ayant pas le caractère de ministre public (2).

L'exercice du droit de légation n'appartient qu'au représentant de l'État; son pouvoir à cet égard peut néanmoins être limité de diverses manières par les

tels sont notamment les divers États de l'Amérique du Nord dont la confédération a pris le nom d'États-Unis, les divers cantons de la Confédération suisse, les îles Ioniennes, les principautés de Valachie, Moldavie et Servie; la Pologne, la Norvége, le grand-duché de Luxembourg, les divers royaumes qui composent la vaste monarchie autrichienne, etc., etc.

(1) Il suit de là que, quand un peuple faisant partie d'une nation n'est pas nation, c'est-à-dire toutes les fois qu'en vertu du pacte social qui le lie à un autre peuple il est convenu de ne traiter avec les tiers que par l'entremise du gouvernement commun à tous les deux, il n'y a que ce gouvernement qui soit autorisé à nommer les agents diplomatiques, pour négocier, au nom de la communauté, sur les intérêts mêmes qui ne concernent exclusivement que l'un des deux peuples; car, en se liant par un pareil contrat, ils ont cessé d'être indépendants. (PINHEIRO.) Voy. VATTEL, L. II, § 155.

(2) Tels étaient autrefois les Chargés d'affaires secrets des princes protestants à Rome, qui y jouissaient de la sûreté et de plusieurs priviléges du droit des gens (BIELFELD, Instit. polit., T. II, p. 173, §17, in-40); tels étaient ou sont encore les agents de certains princes du sang, de prétendants au trône, de souverains détrônés, de rois titulaires, etc.

L'agent que les hospodars de Valachie et de Moldavie entretiennent à Constantinople, bien que placé sous la protection du droit des gens n'est point admis par la Porte-Ottomane sur le pied et avec le caractère public des Chargés d'affaires. (Voy. § 47.)

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