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regler fur les Inftructions anterieures qu'ils auront reçûs.

Après avoir parlé des Affaires du Continent d'Espagne, vous me dites, que pour ce qui eft des Indes, Sa Majefté Cath. eft prête de donner des ordres, pour que dans le terme de trois Mois, à compter du jour de la Depêche, on y cefle toutes Hoftilitez, & qu'on reftitue aux Anglois les Prifes qu'on leur a faites depuis le jour de la Signature des Preliminaires, Sa Majefté Catholique ne trouvant point à propos, & n'entendant point de faire la même chofe pour ce qui aura été pris auparavant, parce, dites-vous, Monfieur qu'il n'y a rien dans les Preliminaires qui ftipule telle chofe, & mêine Sa Majefté Catholique en exclut la Reftitution du Vaifleau le Prince Frederic, comme une chose a devoir être renvoyée en Difcution au futur Congres, &c. J'ai déja amplement parlé de ce qui regarde ce Vaiffeau, & je ne puis que vous reiterer la même chofe, en vous priant de vouloir bien encore faire attention, qu'à l'Article V. des Preliminaires, avant que de venir à ce qui regarde la Retraite de l'Escadre de Sa Majefté Britannique des Indes, il eft dit les mots que j'ai ci-devant citez; favoir: Que les Vaiffeaux qui pourront avoir été pris, feront rendus de bonne foi avec leur Cargaifon ; & que c'eft enfuite de cette Claufe qu'il eft dit: Qu'on laiffera librement revenir les Gallions. C'eft une Condition, fine quâ non, & fans l'execution de laquelle l'Amiral Hozier ne fauroit permettre le depart des Gallions, autant qu'il le pourra empêcher. Cette idée toute naturelle a été faifie également par l'Angleterre & par

la France, avec laquelle Sa Majesté Britannique a été communicativement dans l'expedition de fes Ordres pour la Ceffation des Hoftilitez; & je ne comprens pas bien pourquoi on veut donner une Explication contraire au Sens Litteral des Preliminaires, qui n'ont eu pour but que de faire ceffer d'abord la Guerre, & de remettre un chacun dans fes Droits, de la même maniere qu'on y étoit avant la Rupture entre Sa Majefté Catholique & Sa Majefté Britannique, afin d'être en état de porter au futur Congrès, non pas les Points clairs & folidement établis par des Traitez autentiques, mais feulement ceux qui font litigieux, équivoques, ou obfcurs & s'il y a dans le fufdit V. Article quelques Paroles qu'on veuille confondre, comme fi elles regardoient feulement l'Empereur & les vaiffeaux d'Oftende, il eft aifé de voir, qu'on veut bien fe laifir de l'équivoque, & ne point aller au but. Les termes des Preliminaires ont dû être fimples & courts, pour ne point trainer les affaires en longueur. Dans l'Article V., les Interêts de Sa Majesté Catholique font mêlez avec ceux de Sa Majefté Imperiale, avec cependant une distinction, qui marque, Que du moment que les Articles feront fignez, toutes les boftilitez cefferont ; & à l'égard de l'Espagne, buit jours après que les Preliminaires lui auront été communiquez; & que les Vailleaux Oftendois, qui feront partis avant la Ceflation pourront librement revenir: Voilà pour l'Empereur. Les Vaiffeaux qui pourront avoir été pris, feront rendus de bonne foi avec leur Cargaifon, & les Gallions pourront librement revenir en Efpagne: Voilà pour l'Espagne. Etla

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confequence eft jufte, que c'eft en vertu de l'un que l'autre doit avoir fon effet: Tout comme en vertu de la Ceffation des Hoftilitez, les Vaiffeaux Oftendois pourront revenir chez eux, &c.

J'ai cru devoir réduire tout ceci le plus fuccintement qu'il m'a été poffible, & j'y ajouterai une Reflexion naturelle: c'eft que ti dès aujourd'hui, nous trouvons de fi grandes difficultez fur de fimples Preliminaires, que ne devons-nous pas attendre de celles qui furviendront au futur Congrès, où, fans doute, bien loin d'y rien conclure, on ne manquera pas de tomber dans un cahos, & dans un embarras beaucoup plus grand que celui où l'on eft aujourd'hui. Mais en attendant que cela arrive, ce que je trouve de plus fâcheux, c'eft que fi Sa Majesté Catholique perfifte à ne fe pas relâcher fur les Points dont il s'agit, je crains que nous ne perdions le fruit des bonnes intentions de ceux qui ont toujours été portez pour la Paix, & que les Soins & le Zéle particulier, avec lequel Monfieur le Cardinal de Fleuri s'eft employé, pour concilier des Affaires fi delicates & ti difficiles, n'ayent pas tout le fuccès que lui & les Puiffances refpectives auroient pû s'en promettre.

Je vous fuplie, Monfieur, de vouloir bien. representer ceci à Sa Majesté Catholique, & la porter à furmonter les Difficultez qu'Elle-même a fait naitre. I eft de l'interêt de toutes les Puiflances de l'Europe, de contribuer refpe&ivement à faciliter toutes chofes pour parvenir au Bien general d'une Paix fi avidemment defirée. Les Preliminaires en font le premier fondement s'ils n'ont pas lieu,

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lieu, dans quelle confufion n'allons-nous pas tomber? Et après avoir furmonté des obftacles qu'on croyoit invincibles, un fi grand travail ne recevra-t-il qu'on Salaire infructueux? Independamment de l'Interêt general, que toutes les Puiffances doivent avoir à conferver l'Union & la Paix, c'eft en particulier celui de l'Espagne, de la France & de l'Angleterre, & de Leurs Hautes Puiflances mes Maitres, de chercher les moyens d'établir un Equilibre dans l'Europe, qui mette en fureté les Droits & les Poffeffions de chaque Potentat. Il n'y a que la promte tenue d'un Congres qui puiffe mener à ce but: Eft-il poffible que Sa Majefté Catholique en voulût retarder l'effet par des longueurs? Je ne faurois me le perfuader, & je me flatte encore, qu'après ces juftes Reprefentations, Sa Majefté Catholique ayant bien voulu foufcrire aux Preliminaires, Elle voudra bien auffi confentir à ce qu'on lui demande en confequence de fon Acceptation.

Si vous croyez, que Sa Majefté Catholique, ayant égard à ce que je viens de dire voulût bien entrer dans mes Raifons, & expedier des Ordres tels que je les ai demandez, & conformement à ceux de Sa Majesté Britannique, en ce cas, j'attendrai d'expedier mon Courier; mais fi Sa Majefté Catholique perfifte dans la Refolution que vous m'avez marquée, je vous prie d'avoir la bonté de m'envoyer une permiffion pour avoir des Chevaux de Pofte, afin que je le depêche demain, ne m'étant pas poffible de le retarder plus long

tems.

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Je vous fuplie auffi, Monfieur, avant de

finir ma Lettre, de vouloir bien remarquer, que dans l'Article V. des Preliminaires, il eft dit, Que fi depuis leur Signature, il arrivoit des Troubles ou des Hoftilitez qui caufaffent du dommage, les Puiffances refpectives feroient de con cert, reparer les torts & pertes que les Parties auroient fouffertes. Or comme il se pourroit, (ce que je n'efpere pourtant pas,) que le refus de Sa Majesté Catholique meneroit à de nouvelles Hoftilitez, ce ne feroit pas, en ce cas, à l'Angleterre qu'on pourroit s'en prendre

J'ai l'honneur d'être avec une parfaite confideration, &c.

A Madrid le 5. Juillet 1727.

VANDER MEER.

La mort du Roi de la Grande-Bretagne George I. de glorieufe memoire, qui arriva le 22. de Juin, & qui fut fçue en Efpagne peu de tems après, contribua en quelque maniere à rendre la Cour d'Efpagne moins maniable fur ces difficultez; Elle fe flatoit, & c'étoit l'opinion de la plus grande Partie de l'Europe, que la mort inopinée de ce Prince, qui étoit l'ame de toutes les Negociations qui étoient alors fur le tapis, feroit fuivie de quelque revolution, au moins dans le Miniftere Britannique. Perfonne n'ignore les fuites de ces revolations : le parti qui reprend le deffus, prend une route contraire à celle des Miniftres difgraciez. Cet avenir, que l'on croyoit fort prochain, flatoit agreablement les Ennemis de la Grande-Bretagne & de l'Alliance d'Hanovre, mais le Roi George II. commença fon Regne par remporter fur lui-même une

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