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lérer le retour de l'ordre que je veux établir et maintenir dans l'administration des finances.

Les états que demande mon parlement ont été communiqués aux notables que j'ai assemblés, au nombre desquels étaient plusieurs membres de mon parlement: ils ont constaté le déficit qui existe entre mes revenus ordinaires et les charges annuelles. Je leur ai aussi annoncé la somme à laquelle je me propose d'élever au moins les retranchements et bonifications.

Un nouvel examen ne procurera pas plus de lumières ; d'ailleurs, il n'est pas dans l'ordre des fonctions confiées à mon parlement. Il ne peut se dissimuler mes résolutions et moins encore se permettre de douter de leur accomplissement.

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L'engagement que j'ai pris de rendre public, à la fin de cette année, l'état de recette et dépense, en est un gage certain; il indique en même temps que ce n'est qu'à cette époque qu'il sera possible de publier ces états avec la précision que je dois leur donner.

Je vous charge de dire à mon parlement que mon intention est qu'il procède, sans délai, à l'enregistrement de ma déclaration. Le bien de mon service, l'intérêt de mes sujets, celui des créanciers de l'état, et la considération, si nécessaire à un grand royaume, l'exigent et lui en font un devoir.

Si l'expérience offre des adoucissements conciliables avec la nécessité des impôts auxquels je suis forcé d'avoir recours, je n'aurai pas besoin d'être excité pour les procurer à mon peuple.

Arrêté du parlement de Paris, du 3 mai 1788.

Le samedi, 3 mai 1788, les chambres assemblées, les pairs y séant, un de messieurs pria M. le premier

président de vouloir bien mettre en délibération ce qu'il convenait de faire sur l'état où se trouvait la chose publique, et sur les malheurs qui paraissaient menacer la magistrature.

La matière mise en délibération

La cour, toutes les chambres assemblées, les pairs y séant, avertie par la notoriété publique, et par un concours de circonstances suffisamment connues, des coups qui menacent la nation, en frappant la magis

trature;

Considérant que les entreprises des ministres, sur la magistrature, ont évidemment pour cause le parti qu'a pris la cour de résister à deux impôts désastreux, de se reconnaître incompétente en matière de subsides, de solliciter la convocation des états-généraux, et de réclamer la liberté individuelle des citoyens;

Que ces mêmes entreprises ne peuvent par conséquent avoir d'autres objets que de couvrir, s'il est possible, sans recourir aux états-généraux, les anciennes dissiFations, par des moyens dont la cour ne serait pas le témoin, sans y mettre obstacle; son devoir l'oblige d'opposer, avec une constance inébranlable, l'autorité des lois, la parole du roi, la foi publique, et l'hypothèque assignée sur les impóts, à tous les plans qui pourraient compromettre les droits et les engagements de la nation;

Considérant enfin que le système de la seule volonté, clairement exprimé dans les différentes réponses surprises au seigneur roi, annonce, de la part des ministres, le funeste projet d'anéantir les principes de la monarchie, et ne laisse à la nation d'autre ressource qu'une déclaration précise par la cour des maximes qu'elle est chargée de maintenir, et des sentiments qu'elle ne ces era pas de professer :

Déclare que la France est une monarchie gouvernée par le roi, suivant les lois :

Que de ces lois, plusieurs, qui sont fondamentales, embrassent et consacrent,

Le droit de la maison régnante au trône, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, à l'exclusion des filles et de leurs descendants;

Le droit de la nation, d'accorder librement des subsides, par l'organe des états-généraux, régulièrement Convoqués et composés;

Les coutumes et les capitulations des provinces;
L'inamovibilité des magistrats;

Le droit des cours, de vérifier, dans chaque province, Jes volontés du roi, et de n'en ordonner l'enregistrement qu'autant qu'elles sont conformes aux lois constitutives de la province, ainsi qu'aux lois fondamentales de l'état;

Le droit de chaque citoyen, de n'être jamais traduit, en aucune manière, pardevant d'autres que ses juges naturels, qui sont ceux que la loi lui désigne ;

Et le droit, sans lequel tous les autres sont inutiles, celui de n'être arrêté par quelque ordre que ce soit, que pour être remis, sans délai, entre les mains de juges compétents.

Proteste ladite cour contre toute atteinte qui serait portée aux principes ci-dessus exprimés;

Déclare unanimement qu'elle ne peut, en aucun cas, s'en écarter : que ces principes également certains obligent tous les membres de la cour, et sont compris dans leur serment; qu'en conséquence, aucun des membres qui la composent, ne doit, ni n'entend autoriser, par sa conduite, la moindre innovation à cet égard, ni prendre place dans aucune compagnie qui ne serait pas la cour elle-même, composée des mêmes personnages, et revêtue des mêmes droits; et, dans le cas où la force,

en dispersant la cour, la réduirait à l'impuissance de maintenir par elle-même les principes contenus au présent arrêté, ladite cour déclare qu'elle en remet, desà-présent, le dépôt inviolable entre les mains du roi, de son auguste famille, des pairs du royaume, des étatsgénéraux, et de chacun des ordres réunis, ou séparés, qui forment la nation.

Cette déclaration, que l'opinion publique accueillit alors comme un acte de courage, et qui fut telle, semblait présager la déclaration des droits que l'on a tant reprochée comme la cause première de l'exagération des principes et des excès des révolutionnaires: on oublie trop que, si elle fut souvent une arme entre les mains des malveillants, elle fut aussi le moyen d'opposition à leurs entreprises. C'est par les principes vrais qu'elle contient qu'ont été combattus les principes faux ou captieux, ou exagérés: on a trop injustement reproché à lạ première assemblée toutes les calamités qui ont, après elle, affligė, tourmenté, déchiré la France; ce serait vouloir faire le procès à la mère de Robespierre pour l'avoir enfanté. Les malheurs publics n'ont point eu pour cause l'imperfection très-réelle de la première constitution faite en 1791, mais bien les efforts violents qu'il fallut pour la détruire, et pour faire, à la hâte et d'assaut, ce que le temps seul eût fait len

ement.

N. IV. (Page 12.)

Discours de M. d'Espréménil, au moment oùs il s'est remis entre les mains du sieur d'Agoust.

MESSIEURS,

Quand les Gaulois, victorieux, entrèrent dans Rome, qu'ils avaient emportée d'assaut, les sénateurs romains,

revêtus de la pourpre, et assis dans leurs chaises curules, attendaient, avec une contenance tranquille et fière, l'esclavage ou la mort. Tel est aussi le grand spectacle que vous donnez, en ce moment, à l'univers après avoir généreusement combattu pour la défense des lois constitutives de la monarchie; après avoir opposé aux efforts du despotisme, une résistance efficace et persévérante; après avoir, dans cette lutte trop inégale de la justice contre le pouvoir, allié la respectueuse soumission de fidelles sujets, à la sagesse courageuse de magistrats zélés; après avoir essuyé un exil qui pourtant n'en était pas un, par son rapprochement, sa briéveté, son universalité, et les honneurs qui en ont été les compagnes;

Après avoir revendiqué (mais en vain) deux de vos membres que l'autorité aurait frappés et punis avant qu'ils eussent été jugés, sans qu'ils fussent coupables; après avoir soutenu, comme vous le deviez, autant qu'il était en vous, la cause du peuple et les vrais intérêts du roi; enfin, après avoir déposé vos droits, vos dernières protestations, vos dispositions testamentaires entre les mains de la nation attentive et gémissante, vous vous étiez retranchés dans ce sanctuaire, comme dans une citadelle inexpugnable.

Mais, au milieu et au séjour de la paix, quel bruit de guerre s'est fait entendre? Tout est hérissé de baïonnettes; à l'ombre de la nuit, en silence, une armée s'avance en ordre de bataille; huit cents hommes et cavaliers et fantassins, soit étrangers, soit nationaux, tous étonnés, honteux de cette expédition clandestine et nouvelle, qui leur promet beaucoup de fatigues, quelques périls et point de gloire; huit cents soldats se sont emparés de toutes les avenues, de toutes les portes, de toutes les issues; déja les portes sont occupées, le

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