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Introd. de leurs armes; mais avec cette différence

*787-88.

qu'ici, c'était la suite et la fin d'une ancienne habitude d'obéir; et là, le début et le commencement d'un nouvel effort: le lendemain, les états - géneraux s'ouvrirent.

OUVERTURE des Etats-Généraux. Séance du Jeu-de-Paume. Séance royale. Événements du 14 juillet.

1789.

RIEN n'avait été négligé pour rendre solennel, 1."Epoque. imposant et auguste ce grand acte de la réunion du pouvoir monarchique à la puissance nationale. Quoiqu'il se fût écoulé plus d'un siècle et demi depuis la dernière convocation d'étatsgénéraux, quoique leurs dernières sessions se fussent tenues à de grands intervalles, que même alors ils fussent déchus de leur antique majesté, et que leurs pouvoirs fussent déja presque en désuétude, cependant le souvenir en était conservé, comme d'un droit imprescriptible, et comme un dépôt inaliénable, dans les archives de la nation.

On avait construit à Versailles une salle vaste, et décorée avec grandeur et avec élégance; les préparatifs avaient quelquefois servi de motif ou de prétexte à des retards; le roi même s'était occupé, avec une sorte de complaisance, des détails de construction et d'ornements, plus en

1." Ep.

core par un sentiment naturel qui lui faisait 1789. espérer la fin des tracasseries qui le fatiguaient autour de lui, que par calcul politique; il se faisait une fête de cet appareil majestueux, dont il allait s'environner; le jour même de la cérémonie d'ouverture, il s'y porta avec plus d'aisance et de dignité qu'il n'avait coutume d'en affecter dans sa personne et dans son maintien ; 5 mai. pendant le discours qu'il lut, sa voix prit un accent de sensibilité et d'expression qui ne lui était pas ordinaire. On avait déployé tout l'appareil de la magnificence dans le cortége et dans le costume; la reine siégeait près du roi, aujustifi- tour de lui ses frères, les princes de sa famille, (1). à l'exception du duc d'Orléans, seul député,

Piéces

catives.

Une suite nombreuse et désignée formait une cour composée des grandes charges de la couronne et de personnages admis; un théâtre exhaussé partageait la salle, et contenait tout ce qui était de la suite du roi; l'autre partie de la salle était occupée par les bancs des trois ordres ; les deux premiers placés latéralement; au fond, les places de ce qu'on appelait encore le tiersétat, dont la simplicité contrastait avec la somptuosité de tout le reste; et des loges élevées derrière la colonnade qui formait l'enceinte, étaient remplies d'un nombre considérable de spectateurs. Toute la France était à Paris, et tout Paris était à Versailles. Le roi parla le premier,

1. Ep. 1789.

Pièces j.

(2).

et se couvrit; aussitôt le premier signal de liberté publique' fut donné : contre l'usage antérieur, les députés du tiers-état se couvrirent comme ceux des premiers ordres ; il leur était enjoint, même par leurs cahiers, de n'admettre aucune distinction de cérémonie et d'étiquette. Le discours du roi fut simple, court et convenable à la circonstance; l'usage était que les présidents de chaque ordre haranguaient le roi, l'orateur du tiers parlait un genou en terre : on se doutait bien que cette formalité ne serait pas conservée; et, pour s'échapper à l'étiquette, il avait été convenu que le président du clergé P. haranguerait au nom des trois ordres. Ensuite le garde-des-sceaux parla; et, après lui, le principal ministre, Necker, lut un discours trèsétendu sur l'état actuel des finances, sur les causes du désordre, sur les moyens d'y remédier: enfin, des avis aux trois ordres sur les espérances publiques. Il touchait légèrement la grande question de la réunion des ordres, indiquant une ou deux chambres; on remarqua cette expression, en parlant du tiers, la longue souffrance Pièces jo de cet ordre le discours dura plus de deux heures, avec de grands développements sur la situation des affaires, et des aperçus sur l'avenir. Necker, outre de grands talents pour une administration calme et réglée, sera toujours compté parmi les grands écrivains. Son discours,

(3).

I Fp. 1789.

4 mai.

trop profond pour être saisi à une simple lecture, ne laissa que peu de traces, et point de ces émotions profondes qui agissent sur une assemblée nombreuse, où, pour produire un grand effet, il faut parler aux passions plutôt qu'à l'esprit. La séance fut levée, et chacun en sortit avec les mêmes dispositions qu'il y avait apportées.

Cette séance avait, selon l'usage, été précédée par un acte de religion; les députés s'étaient rendus la veille processionnellement à l'église paroissiale de Versailles, pour assister, en corps d'état, à la messe du Saint - Esprit. Philippe d'Orléans se trouvait, selon l'ordre des cérémonies à la première place de la noblesse, c'est-à-dire, à la première file; l'or-. dre du tiers précédent immédiatement avec un très-petit intervalle, il fut remarqué que Philippe affecta, pendant la marche, de régler souvent son pas de manière à se trouver réuni à l'ordre du tiers. Un discours fut prononcé en chaire, par l'évêque de Nancy; à quelques expressions de civisme, au mot de liberté publique, de nombreux applaudissements s'éle-. vèrent, et des battements de mains unanimes et redoublés firent retentir la voûte de l'église; cet incident, peu remarquable dans une autre circonstance, mérita d'être observé; jamais on ne s'était permis d'applaudir au sermon; l'usage ne permettait même pas d'applaudir au specta

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