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II. Ep ter une pétition à l'assemblée nationale pour

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pour réclamer des changements dans leur constitution militaire, et lors des premiers événements, le régiment des gardes-françaises, dans lequel toutes ces causes de dissolution étaient plus prononcées et plus agissantes, avait, le premier, donné l'exemple: il fut donc aisé de détacher l'armée de ses chefs et de la rattacher à la révolution; et lorsque les chefs du parti opposé virent que l'armée était perdue pour lui, ils en hâtèrent euxmêmes la désorganisation, afin d'ôter ce moyen de résistance aux efforts qu'ils combinaient déja avec l'étranger; on mit donc l'organisation de 7 juill. l'armée à l'ordre du jour. Peu de jours après les événements du 14 juillet, une lettre du roi, envoyée aux armées, d'après un décret de l'assemblée, avait commandé aux troupes un serment à la nation, au roi et à loi; les officiers devaient le prêter d'abord ès-mains des officiers municipaux; ensuite, adoucissant l'expression, on avait substitué ces mots en présence des officiers municipaux ce serment portait de ne jamais employer ceux qui seraient à leurs ordres, contre les citoyens, que sur la réquisition des autorités civiles.

Cette mesure, dans un moment de révolution, était de justice et de droit, et peut-être de plus grandes calamités eussent été les suites de la disposition contraire qui eût laissé illimitée l'action de la force armée sur l'état civil, des citoyens;

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mais l'effet de ce serment n'en fut pas moins de II. Ep préparer l'armée à reconnaître une autre autorité elle mit l'officier en crainte et en réserve et le soklat en méfiance; elle avertit le parti opposé à la révolution, que, ne pouvant plus compter sur l'armée, son intérêt n'était plus de la défendre, et le parti exagéré et exagérant y vit une facilité pour s'emparer d'elle en la décomposant. Ce plan, commencé alors, fut continué jusqu'au temps ou le système d'émigration en compléta le succès. Par une suite du même système, les gardes nationales s'organisaient dans tout le royaume ; celles de la ville de Paris étaient déja sur un pied imposant, l'ordre et la discipline s'y établissaient, les meilleurs citoyens se faisaient honneur d'y prendre rang. Paris, après leur avoir dû son salut aux premiers mouvements de l'insurrection, leur devait sa sûreté et sa police journalière. Lafayette était à la tête. de trente mille hommes armés et équipés ; le premier coup de tambour pouvait en doubler le nombre; il avait et méritait leur confiance: mais comme il arrive à tous les chefs populaires, luimême était souvent aux ordres de l'armée qu'il commandait et ne les commandait souvent qu'à condition de leur faire exécuter leur propre vofonté; il avait plus de peine encore à ne leur faire vouloir que ce qui était bon, qu'à le leur faire exécuter quand ils l'avaient voulu.

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Dans une ville immense comme Paris, où tant de moyens secrets pouvaient se dérober à la vigilance de toute police, il était facile de lui susciter chaque jour de nouveaux embarras: il avait à combattre la cour qui ne pouvait se le résoudre à lui accorder aucune confiance, parti de l'étranger, qui voyait en lui un moyen d'ordre public contraire à ses desseins et les deux partis extrêmes de l'assemblée : l'un voyait en lui un ennemi, l'autre, un ami qui n'était pas assez à ses ordres ; mais de plus encore ses faux amis lui nuisirent plus que ses ennemis connus.

La garde nationale Parisienne s'était déja organisée par bataillons, un pour chaque district: les chefs étaient élus, le service de la police publique se fesait avec ordre et ressortait exactement de l'autorité civile et municipale; mais celle-ci était plus lente et plus incertaine dans ses opérations: il est plus aisé de commander aux hommes que de les gouverner. L'assemblée électorale qui, aux premiers moments de la révolution, s'était réunie spontanément, avait déposé ensuite ses pouvoirs, et fut remplacée par une assemblée de la commune, composée de cinq membres par chaque district ils s'intitulèrent les représentants de Paris et se déclarèrent chargés de faire une constitution pour la capitale, comme l'assemblée nationale en ferait une pour toute la France. Le sage Bailli lui-même leur avait, en sa qualité

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de maire annoncé cette mission. Les districts II. Ep. cependant continuèrent leur surveillance et leur assemblée délibérante.

Paris était dans cet état d'anxiété et de trouble qui précède et suit les orages; l'air est calme, mais les flots sont agités. Une députation de la commune vint demander la réforme des lois criminelles, et spécialement la publicité des procédures et l'établissement d'un juri provisoire pour tous les délits qui pouvaient avoir rapport à la révolution; c'était leur assurer une protection devenue nécessaire: car, en même temps qu'un parti voulait faire un délit de tous les actes révolutionnaires, le parti opposé voulait mettre sous l'abri de la révolution tous les délits qui pouvaient y avoir rapport; mais l'effet n'en était pas moins d'encourager les entreprises et d'enhardir l'audace. La fermentation dans Paris n'était que contenue par la police et les précautions journalières ; les subsistances n'en étaient plus le prétexte, elles étaient un véritable motif: que la disette et la cherté fussent véritables ou factices, l'effet était le même. Indiquer une cause au peuple était la lui persuader: on répandit d'abord sourdement que l'origine du mal était à Versailles et qu'il cesserait si le roi venait établir sa demeure à Paris. Les délais apportés à la sanction ou à l'acceptation des décrets du 4 août, furent encore présentés comme un refus formel Tome I.

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1. Ep. de la part du roi, la malveillance publique n'était cependant pas dirigée contre lui; mais on le disait entouré de conseils dangereux et ennemis de la révolution, et, en cela, on disait vrai.

L'état de Paris commençait à inquiéter. Depuis le départ des troupes et la défection des gardesfrançaises, la garde nationale de Versailles faisait le service du château ; cette surcharge fut, pour la municipalité, un motif de faire venir deux bataillons de ligne du régiment de Flandre. La forme légale fut suivie ; la municipalité requit et vint en rendre compte à l'assemblée; cette disposition n'y produisit aucun effet défavorable; on ne fut même pas fâché de voir autour de l'assemblée, une force publique qui rassurât contre les invasions du Palais-Royal, dont les menaces n'étaient pas oubliées; et de bons esprits, tout en voulant lutter contre l'autorité royale, ne voulaient pas qu'elle fût abattue et hors d'état de se défendre. On vit même encore arriver ensuite quelques escadrons de troupes à cheval, sans témoigner d'inquiétude.

Mais l'effet ne fut pas le même à Paris; on ne manqua pas d'y représenter ces deux bataillons comme l'avant-garde d'une nouvelle armée. On supposa des propos offensants entre les gardes - françaises et les soldats de Flandre. Ce moyen est toujours d'un effet sûr pour armer deux troupes l'une contre l'autre ; mais, comme

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