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nier. Décret qui ordonne la formation d'une nouvelle compagnie sous la dénomination de volontaires de gardes nationaux à cheval.

Les

Ibid. Séance du soir. Décret relatif à la suspension du payement des créances au-dessus de 10 mille liv. députés de la section de la Fontaine de Grenelle et plusieurs citoyens désavouent leurs signatures surprises pour la pétition dite des huit mille.

13 juin. Lettre de J. Servan. Le roi la chassé du ministère. Il demande la permission d'aller sur les froutières, dès qu'il aura rendu ses comptes, combattre des ennemis moins vils et moins dangereux. Le venérable Dussaulx monte à la tribune pour la première fois, rappelle au corps législatif la confiance que lui inspiroient le civisme et les vertus de J. Servan. Vaublanc et Robecourt, qui regardent également ce ministre comme irréprochable, demandent l'ajournement. Cependant le ministre obtient la permission qu'il sollicite, et les représentans du peuple déclarent qu'il emporte les de la nation. regrets Une lettre du roi, contresignée Duranthon, prévient l'assemblée qu'il vient de renvoyer le ministre de l'intérieur Roland, et aussi Etienne Claviere, ministre des contributious publiques: le portefeuille de la guerre est remis à Dumourier qui cédera le sien à M. Naillac, chargé d'affaires auprès des deux ponts. Je veux (1), dit le roi, (remarquez la douceur de ces expressions à la royale) Je veux la constitution, mais JE VEUX aussi l'ordre et l'exécution dans toutes les parties de l'administration: tous mes efforts sont dirigés vers ce but. -Citoyens, il l'ose dire, et l'on voit bien qu'il espère que le jour n'est pas loin où il saura vous forcer de le

croire.

Peuple lâche en effet et né pour l'esclavage.

C'est du peuple, qui gouverne que je parle, certes il ne faut pas

(1) Les mots Je veux et Constitution d'un peuple libre ne se trouvent jamais ensemble que là où il y a un roi qui veut et tout un peuple dont la volonté est encore enchaînée.

s'y tromper!-Les deux ministres qui ont eu l'honneur d'être renvoyés avec Servan, protestent à l'essemblée de leurs intentions civiques, dont ne doutoit personne, pas même le parti autrichien qui les renvoie, Ce qui frappe singulièrement, c'est la copie d'une lettre, écrite ces jours derniers au roi, par J. M. Roland; dignité, vérité, franchise, conseils d'un ami à un ami; il lui expose que si des actions palpables ne dissipent pas les trop justes allarmes que sa conduite répand daus tous les cœurs des citoyens, les plus grands malheurs le menacent, et qu'il aura à répondre un jour des horreurs de l'anarchie et de la guerre civile. Roland et Clavière emportent les regrets de la nation. La lettre de Roland, insérée au procès-verbal, envoyée, au nom de l'assemblée, dans tous les départemens.

Dumourier arrive et il est très-mal accueilli. -- Relation offi cielle de l'attaquedu camp où commandoit Gouvion. Autrichiens repoussés avec perte. Mort de Gouvion. Silence douloureux. Le président écrira, au nom de l'assemblée, à la famille de Gouvion, et sur-tout à son père qui a perdu ses deux fils, l'un combattant pour la loi à Nancy, et l'autre contre les ennemis de l'état. Rapport de Dumourier su l'état de nos armemens, de nos fortifications, de nos approvisionnemens où il semble réprouver cette guerre que lui-même a tant précipitée. Ses assertions sont démenties. On veut con

noître les coupables, car ici il en existe; douze membres sont à l'instant chargés d'examiner les détails de ce compte rendu, après l'avoir comparé avec la correspondance des généraux, et les pièces sur lesquelles il a du dresser son mémoire, et qu'il est tenu de déposer comme des actes qui appartiennent. à ses juges. L'administrateur de la caisse de l'extraordinaire est autorisé à émettre la quantité d'assignats nécessaire pour les dépenses et les versemens décrétés, jusqu'à ce que la somme des assignats en circulation s'élève à dix-huit cents millions.

Ibid. Séance du soir. Dons patriotiques au nom de la ville de Sezanne 104 liv., et des amis de la constitution de Bayonne 2124 liv. Rapport de N. Fouquet, au nom du comité de

l'extraordinaire des finances. Administration particu lière, pour la fabrication des assiguats, composée de trois commissaires indépendans du ministère. Un citoyen de Strasbourg, se trouvant au-delà du Rhin pour affaire de commerce, est arrêté par un officier autrichien, comme prisonnier de guerre, en ce que son passe-port attestoit qu'il étoit inscrit dans la garde nationale; ces officiers allemands ne savent pas tous encore qu'il n'est en France que des citoyens armés, ou brûlans de l'ètre, tous inscrits sur la liste des combattans, et qui demandens à grands cris la liberté ou la mort!

Il faudra bien le leur apprendre et d'autres choses encore, qui ne leur déplairont pas, quand l'assemblée législative, bien pénétrée des devoirs que lui impose le salut d'un peuple trahi, opprimé, ne se bornera pas à déclarer comme ses prédécesseurs, que l'insurrection est le plus saint des devoirs, mais qu'elle s'occupera en vérité d'organiser constitutionnellement les moyens faciles d'une insurrection générale, afin que le peuple, saus s'exposer à périr sous les colonnes du temple des faux dieux, puisse avec sécurité jouir de son droit imprescriptible de changer, quand il lui plaît, son gouvernement.

La seul raison qu'oz pisse en demander au véritable souverain est bien simple: Il nous plaît ainsi.

Fin de la 7. livraison.

L

§. II I.

Observations sur Helvitius.

PAR J. P. BRISSOT.

Cet auteur, dans son 3°. discours, prétend faire voir que toutes les passions ont leur origine dans la sensibilité physique, et que toutes se réduisent à ces deux points amour de plaisir, aversion de la douleur. Il en donne pour exemple l'avarice, l'ambition, l'orgueil, et l'amitié même.

Il y a infiniment d'adresse dans les raisonnemens qu'il employe; cependant pour peu qu'on veuille descendre dans soi-même, il est aisé d'appercevoir son erreur.

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En

s'observant on voit, qu'indépendamment du plaisir physique, et de la peine physique, il est des plaisirs d'une autre espèce, bien supérieurs et qui appartiennent à l'ame seule ou au principe pensant qui existe en nous. Peut-elle les avoir sans être unie au corps,

c'est ce que nous ne pouvons déterminer, puisque nous ne connoissons pas sa nature? mais quoique les sens ou le corps influent súr ses plaisirs propres, cependant on doit sentir par soi-même qu'elle en dispose en souveraine, en créatrice,

il en

résulteroit

Je ne conçois pas comment Helvétius a pu soutenir une opinion aussi fausse et aussi décourageante ; si l'on ne recherche point l'estime pour l'estime, mais pour les plaisirs qu'elle procure; si ces plaisirs en dernière analyse se réduisoient à ceux des sens, que les plus grands génies, les héros les plus célèbres, les législateurs les plus profonds, les hommes les plus vertueux devoient aimer avec ardeur ou les femmes ou la table, ou toutes les jouissances les plus rafinées des sens. Il en résulteroit que les épicuriens, les voluptucux devroient être à leur tour des génies, des héros ; il en résulteroit enfin qu'avec une belle femme et une excellente table on devroit créer le génie et l'héOr, qu'on lise l'histoire, qu'y trouvera-t-on ?

roïsme.

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Un Charles XII qui détestoit les femmes, passoit cinq à six jours sans manger, se nourrissoit le plus souvent de pain grossier, couchoit sur la terre au milieu du froid le plus rigoureux et jamais guerrier ne fut plus insatiable de gloire que Charles XII.

Parcourez l'histoire des génies anciens et modernes, en verrez-vous un seul qui n'ait pas méprisé les plaisirs des sens, ou qui ne les ait pas subordonnés à ses travaux, à sa gloire. Diogène, Zenon, Démocrite,

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Heraclite, Epitecte étoient-ils amoureux des femmes ou de la bonne chère ? non-sculement ils ne recherchoient pas ces plaisirs, mais ils les proscrivoient, mais ils se faisoient gloire d'une entière indépendance de presque tous les besoins du corps.

Helvétius trouvera-t-il plus de goût pour les plaisirs des sens parmi les grands hommes modernes, parmi ces savans du 16. siècle qui ne trouvoient de plaisirs déli cieux qu'à déchiffrer des manuscrits, parmi ces théologiens réformateurs qui ont opéré une révolution dans le monde, Calvin aimoit à dominer les esprits, à grossir sa secte et il se sévroit de tous les plaisirs. Descartes même disoit naïvement à sa maîtresse, tu es belle, je t'aime; mais j'aime encore plus la vérité que toi.

Qui fut plus fanatique pour la gloire que Voltaire ? et qui aima moins les plaisirs sensuels que lui? Il sembloit qu'il étoit tout âme. Il ne devoit rien, ne donnoit rien à son corps. Il eût un goût dans sa jeunesse ; il passa rapidement. Sa santé foible le força de bonne heure à être sobre, et cependant toute sa vie il brûla pour la gloire. Sur les bords de sa fosse il haletoit encore pour elle. Dira-t-on donc que le prix qu'il cherchoit étoit dans le plaisirs des sens.

Rousseau aima la gloire aussi, malgré ses protestations. S'il cherchoit une femme sous son voile, au moins il fut bien trompé. Pour les autres plaisirs du monde ce n'étoit pas dans la solitude qu'il les eut trouvés, ce n'étoit pas en refusant les richesses qu'on lui offroit.

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Helvétius a voulu calomnier l'ame et l'anéantir. Comme son systême eût été plus solide, plus beau, plus consolant, si d'une part il eût montré que les plaisirs du cœur, de l'imagination, de la gloire, de l'estime publique, surtout les plaisis d'une conscience pure n'appartiennent qu'à l'ame, que c'est l'ame qui se les crée, qui en étend la sphère, qui en prolonge les douceurs, la jouissance; si de l'autre il eût prouvé

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