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DES EXPÉRIENCES RELATIVES A L'ADHÉSION;

Par M. DUTOUR, Correfpondant de l'Académie des Sciences (1).
TROISIÈME PARTIE.

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Sur les différentes difpofitions de l'eau & du mercure à l'adhésion avec le verre,

Jere Exp. CXXV. LE mercure a été fubftitué à l'eau dans le vase V de 11 lignes de diamètre, employé dans la première expérience de l'article V. Le difque du verre A, fufpendu en équilibre au trébuchet, y au trébuchet, y fut appliqué; mais je ne pus réuffir à produire aucune adhéfion entre ce verre & le fluide, à caufe fans doute de fa difpofition à fe ramaffer fous une fuperficie convexe, qui l'eft d'autant plus, que l'efpace qui le renferme eft plus étroit. Elle prévaloit, malgré la contiguité du verre & du mercure, fur l'action des caufes qui s'exercent avec une énergie fi marquée dans les autres circonftances dont il a été queftion ci-devant.

2. Exp. CXXVI. J'avois déjà remarqué qu'un verre de montre, fufpendu auffi en équilibre au trébuchet, & appliqué fur une maffe de mercure peu étendue, avoit été enlevé par un poids de 10 grains, ajouté par parties dans le baffin oppofé; & que la maffe de mercure ayant été accrue au point que le diamètre de fa surface étoit de 21 à 22 lignes, il fallut 35 grains pour en détacher le verre de montre.

Dans la première de ces deux épreuves, le plan de contact, au commencement de l'expérience, étoit d'environ 4 lignes de diamètre; dans la feconde, d'environ 12 lignes: dans l'une & dans l'autre il diminuoit par degrés, à mesure qu'on accumuloit les poids.

CXXVII. Ces faits, comparés enfemble, m'ont conduit à foupçonner que des circonftances analogues pouvoient avoir concouru à occafionner la grande difproportion de la réfiftance oppofée par le verre de 30 lignes de diamètre de M. de Morveau à la féparation de mercure, à celles op

(1) Voyez le commencement de ce Mémoire, Journal de Phyfique, 1780, T. XV, pag. 234.

Tome XIX, Part. I, 1782. FÉVRIER.

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pofées par les miens, eu égard à l'excès de fon diamètre fur les diamètres de ceux-ci. Ces circonftances analogues paroiffent devoir s'être rencon trées dans la fameufe expérience de ce favant Phyficien, confignée dans les Elémens de Chymie de l'Académie de Dijon. Son objet étoit de reconnoître fi la preffion de l'atmosphère contribupit ou non à l'adhésion ou résistance oppofée à la féparation. L'appareil dont il s'eft fervi, devoit être placé fous le récipient de la machine pneumatique. Un efpace auffi refferré exigeoit très-vraisemblablement que le diamètre du vafe, qui contenoit le mercure, n'excédât que de très-peu celui du difque de verre, qui étoit de 30 lignes. Une couronne plus ou moins large de ce difque, appliquée fur la fuperficie de ce fluide, plane dans fon milieu, mais convexe vers les bords jufqu'à une certaine diftance, dut alors correfpondre à la portion annulaire convexe de cette fuperficie. La contiguité réciproque en étoit d'autant moindre, & fut reftreinte au point, qu'il fut enlevé par un poids beaucoup inférieur à celui qui eût été néceffaire, fi la fuperficie du mercure eût été plane dans toute fon étendue (1).

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3. Exp. CXXVIII. Mes préfomptions, à ce dernier égard, ont été confirmées par une expérience exécutée avec un difque de glace que j'ai fait tailler exprès, mais qui qui n'eft pas exactement rond. Son plus grand diamètre

au plus petit comme 30 lignes à 29, & partant, fon diamètre moyen peut être réputé de 29 lignes. Les quarrés des diamètres de ce verre & de celui de M. de Morveau font à-peu - près dans le rapport de 870 lignes quarrées à 900. Ce nouveau difque, que je défignerai par la lettre P, n'a été enlevé de deffus une maffe de mercure, dont la fuperficie avoit 4 pouces de diamètre, que par un effort de plus de 855 grains, qui excé doit de 189 grains, c'eft-à-dire, de près d'un tiers, celui qui a fuffi pour détacher le difque de M. de Morveau, qui le furpaffe cependant un peu

en étendue.

CXXIX. Ce difque P, par cette fupériorité de réfiftance, nous fournit un résultat bien plus conforme à ceux fournis par les autres verres D, C, B, A, EE, que ne le fait le verre. M. Cette réfiftance de 855 grains eft felon l'ordre des réfiftances de ces autres verres 65, 1414, 164, 194› 629(2), qui vont en croiffant, ainfi que leurs furfaces; au lieu celle du verre M, de (66 grains, fe trouve être décroiffante à l'égard de celle de 855

que

(1) Nota. Suppofé même que le difque fût d'abord complètement contigu au mercure, cela ne pourroit être, dans ces circonftances, qu'autant que la convexité quelconque de la fuperficie du fluide feroit rendue plane par-tout au-deffous du difque ; & alors le fluide, en vertu de fa tendance à la convexité, doit être difpofé à concourir avec l'effort du poids pour opérer la féparation. Voyez ci-après le n°. 132.

(2) Voyez la Table 3° de l'Art. 4.

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grains du verre P de moindre diamètre: ce qui eft diamétralement contraire
à cet ordre.

CXXX. Nous avons vu que l'adhésion ou réfiftance à la féparation a
toujours été plus confidérable quand les difques de verre ont été appliqués
fur le mercure, que quand ils l'étoient fur l'eau; que le difque A, par
exemple, n'a été détaché du mercure que par un effort de 195 grains, &
que 34 grains l'ont détaché de l'eau ; que par conféquent le mercure fem-
ble tenir alors plus au verre, qui s'en détache immédiatement, que les deux
tranches d'eau entre lefquelles fe doit faire la féparation, ne tiennent l'une à
l'autre.

CXXXI. L'inégalité des denfités de ces deux fluides influe fans doute ici; mais ce n'eft point en ce que la plus grande denfité du mercure (comme je l'avois donné à entendre dans l'article 4, no. 35) multiplie les points de contact du folide & du fluide; & cela eft bien conftaté par la première expérience de l'art. 9, n°. 99, felon laquelle l'orifice de la bouteille V, qui n'a que 11 lignes quarrées de furface, oppofe une résistance trèsfupérieure à celle oppofée par le difque A, qui a plus de 90 lignes quarrées de furface; & d'ailleurs feroit-on fuffifamment fondé à admettre égalité de furface, la contiguité feroit plus complète entre le verre & le mercure qu'entre le verre & l'eau

qu'a

CXXXII. Ce n'eft pas non-plus parce que le mercure s'attache ou fe colle au verre plus aifément que l'eau; on fait qu'il ne le mouille pas, & que le plus petit globule de mercure comprimé entre deux lames de glace, & applati par-là, fe rétablit (dès que la compreffion ne fubfifte plus) fous fa première forme de globule, en foulevant la lame de glace fupérieure, même affez pefante. Mais quelque chofe de plus rapproché des réfiftances à la féparation, c'eft ce qui vient d'être dit, que le difque A peut être appliqué pour fon orifice fur ce fluide, fans qu'il en résulte aucune adhésion fen fible

CXXXIII. Mais comment une preffion, qui eft la même à égalité d'aire de féparation, y fait-elle oppofer, dans des expériences faites avec le même difque, une plus grande réfiftance de la part du mercure que de celle de l'eau Les aires de feparation pourroient n'être pas égales dans ces deux cas. Cependant je ne m'arrêterai pas ici à difcuter les rapports de leur inégalité, pour en affigner les résultats relativement à celle des réfiftances des deux fluides, que je préfume dériver ultérieurement de leurs difpofitions refpectives à l'égard du verre.

CXXXIV. Les molécules des fluides étant fphériques, ou approchant beaucoup de l'être, & peut-être les unes plus & les autres moins, doivent vraisemblablement fe prêter d'autant plus aifément, qu'ils en approchent davantage à l'action de la preffion extérieure, qui tend à les refferrer dans le moindre espace poffible, & par conféquent à les ramaffer, autant que Tome XIX, Pars. I, 1782. FÉVRIER.

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les circonstances le permettent, fous une forme fphérique, qui eft celle où ils occuperoient le moins de place; & fi en effet les molécules des différens fluides font, en vertu de leurs formes particulières, difpofées inégalement à fe laiffer réduire par la preffion extérieure dans un espace plus refferré, l'action de la même preffion en fera plus ou moins efficace, & leur cohérence plus ou moins intime & énergique : elle le fera d'autant plus, que la réduction de l'efpace aura pu être pouffée plus loin.

CXXXV. De là dériveroient les inégalités de la cohérence des molécules à l'égard des différens fluides, qui, en petit volume, prennent la forme de globules. Les plus fphériques font ceux du mercure; ce qui indique que fes molécules font fufceptibles d'être réduites dans un moindre efpace que celles de l'eau & de tout autre fluide, & dès-lors d'une cohérence fupérieure à celle des molécules de tous ces fluides.

CXXXVI. Si certaines combinaifons de folide à fluide font fufceptibles d'être refferrées par la preffion dans un efpace moindre que celui que le fluide & le folide occupoient féparément, cette réduction produira une adhérence & une réfiftance à la féparation, d'autant plus confidérable, la réduction aura été pouffée plus loin.

que

CXXXVII. De là dériveroient les inégalités de l'adhérence dans les diverfes combinaifons de folide à fluide; & conféquemment à la grande adhérence de l'eau au verre, il y auroit à préfumer que la furface du verre offre à l'eau bien des interftices entre fes parties propres où elle peut pénétrer, & qui étoient inacceffibles à l'air : en forte que l'efpace que le verre & l'eau occupent entr'eux lors de la contiguité, puiffe être moins étendu que celui qu'ils occupoient féparément.

CXXXVIII. Dans ces combinaisons, l'adhérence au folide l'emporteroit en intensité sur la cohérence des molécules du fluide, lorsque là réduction de l'efpace, résultante du contact des deux corps, feroit plus grande que celle qui auroit lieu, fi le fluide, au lieu d'être appliqué fous le folide, l'étoit à une tranche du même fluide d'égale étendue que celle du folide; ce qui feroit le fort de l'eau appliquée fous le verre.

CXXXIX. Et au contraire, la cohérence des molécules du fluide feroit fupérieure à l'adhérence au folide, quand la réduction de l'espace, réfultante du contact de l'un avec l'autre, feroit moindre que celle qui auroit lieu, fi le fluide, au lieu d'être appliqué au folide, l'étoit à une tranche du même fluide, auffi étendue que le folide; c'eft le fort du mercure appliqué fous le verre.

CXL. Si dans d'autres combinaisons de folide à fluide les efpaces qu'ils occupoient féparément n'effuient aucune réduction, & que l'étendue en foit la même lors du contact, la preffion extérieure ne s'exercera pas avec le même avantage & la même efficacité que dans les combinaisons donc

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il eft question au n°. 136. Dans celles-ci, l'air atmosphérique doit être repouffé hors d'un efpace qu'il a ufurpé, lorfque ces corps fe font pénétrés; dans les autres, il n'eft que foulevé par la féparation du folide d'avec le fluide: il doit oppofer moins de réfiftance à un fimple déplacement qu'à un refoulement fur lui-même.

CXLI. Enfin, fi la combinaison du folide avec le fluide exigeoit un efpace plus étendu que celui qu'ils occupoient féparément, ce feroit une difpofition oppofée ou défavorable à l'adhésion. Cela peut avoir lieu dans la combinaison du verre avec le mercure, qui, fous une fuperficie convexe, & fur-tout fous la forme fphérique qu'il prend lorfqu'il eft en petit volume, occupe bien moins de place que fi fa convexité ou fa fphéricité vient à être applatie fous une lame de verre plane.

Confidérons cependant qu'en vertu de cette même difpofition à la fphéricité qu'il tient de l'éminente cohérence de fes molécules, il peút, lorfque le difque de verre appliqué fur la portion intermédiaire & plane de fa fuperficie affez étendue, eft élevé par degré au moyen de l'addition fuc ceffive des poids qui le contre-balancent, le fuivre jufqu'à un certain point en fe tenant comme collé au-deffous, puifqu'en cela il ne fait que fe prêter à l'action de fa cohérence, en prenant dans fa tranche foulevée la forme convexe qu'il eft naturellement difpofé à affecter; & plus le difque eft ample, & plus le fegment de mercure foulevé à fa fuite doit avoir d'étendue & de pefanteur avec moins de courbure.

Au refte, comme le mercure pèfe plus que l'eau, il n'eft pas étonnant que le poids, qui exprime la résistance contre-balancée, foit plus fort dans l'expérience faite avec le mercure que dans celle faite avec l'eau.

CXLII. Dans la première expérience de cet article, le mercure logé dans la bouteille V, n'a pu fuivre le difque de verte foulevé, parce que la fuperficie avoit devancé toute la convexité qu'il étoit fufceptible d'avoir dans ces

circonftances.

CXLIII. Ne feroit-ce pas dans ces inégales difpofitions à l'adhésion, dont font fufceptibles les combinaifons dont il vient d'être fait mention & que j'ai attribuées à ce que l'efpace qu'elles occupent eft ou plus ou moins étendu après le contact qu'il ne l'étoit avant, que confifteroit ce qui eft appelé en Chymie affinité & méfaffinité ? Peut-on leur affigner une caufe plus fimple? Les élémens provenus des décompofitions opérées par la preffion de l'atmosphère (1) étant une fois entremêlés, les nouvelles combinaifons qui en réfultent & qui font produites par la même preffion toujours fubfiftante, doivent naturellement être celles où la réduction de l'efpace pourra être pouffée le plus loin; & en effet, l'observation rend quelquefois cette réduction fenfible.

(1) Voyez Art. 8, no. 88 & fuiv.

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