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quel S. M. a daigné m'attacher à vous " augmenteroit encore, s'il étoit poffible, les vœux que j'ai, de tout tems, formés pour votre bonheur. Puiffiez-vous, par vos foins, votre vigilance & furtout votre équité, en accélérer l'époque, & moi, par ma conduite & mon travail, me fatter d'y avoir coopéré !

On fçait que le gouvernement de France met tout en œuvre pour faire régner dans la Corfe cette heureufe tranquillité, ce bon ordre, foit dans le politique, foit dans le civil, qu'elle paroit n'avoir jamais connus, & qu'on peut néanmoins, regarder comme le vrai fondement de la profpérité publique & particuliere. S. M. T. Chr. voulant donner aux habitans de cette ifle une nou velle preuve de fon zele & de fes foins paternels pour tout ce qui peut concourir à leur bonheur a rendu, le 15 Août dernier, un édit portant création de quatre juntes nationales & d'une jurifdiction prévotale contre les bandits & fugitifs en Corfe, & qui a été enregistré au confeil - fupérieur de Baftia, au mois de Novembre fuivant. Nous allons le rapporter en entier.

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Louis, &c. En recevant fous notre obéiffance la nation corfe, nous avons dû préfumer que détrompée par 40 années de troubles & de malheurs, des idées fauffes qu'elle s'étoit faites du repos & de la liberté, elle n'en feroit que mieux difpofée à fentir bientôt tout le prix de notre adoption, & les avantages qu'elle retireroit de fa foumiffion à notre gouvernement. La partie faine & nombreufe d'un peuple clairvoyant, n'a pas pu être longtems à s'appercevoir que fon bonheur dépendant déformais de l'ordre que nous avons établi dans toutes les parties de l'adminiftration de l'ifle, ceux qui tendoient à en troubler l'harmonie étoient bien plus encore les ennemis de fa tranquillité & de fa gloire que de notre autorité; & les transfuges, cette portion malheureufe du même peuple, ne pouvoient pas tarder à fe convaincre que leurs efpérances n'étoient que des chimeres, leur fuite une erreur, leur éloignement un exil, & leur abfence une privation dont chaque jour augmente pour eux l'amertume. Nous trouvons dans notre penchant à la clémence un motif fuffifant de tendre aux fugitifs une main fe

courable, fi leur repentir eft fincere ; & les difpofitions actuelles de la nation nous inspirent la confiance de l'affocier aux foins que nous prenons pour détruire jufqu'au germe des préjugés ou des haines qui peuplent les makis d'infortunés ou de malfaiteurs. En érigeant dans quatre points principaux de l'intérieur de l'ifle, des juntes nationales pour exercer, en notre nom & à nos frais, fous l'autorité de nos commiffaires, une jurisdiction de discipline & de correction, qui prévienne ou qui 'châtie des fautes que nous defirons n'avoir pas à punir, nous plaçons entre ceux qui pourroient troubler l'ordre public & la loi qui les maintient ou qui en réprime l'infraction, un tribunal paternel & patriotique, destiné à les fuivre, en quelque forte, pas à pas, pour les rendre à la fociété, en les ramenant à leurs foyers; ou, ff fes efforts devoient être infructueux, pour convenir, au nom de la nation, que ceux qu'elle n'auroit pu retenir ou rappeller, fout juftement livrés à la profcription que nous allons prononcer contre eux; & qu'ayant renoncé à être fujets & citoyens pour devenir à la fois vagabonds déferteurs & rébelles, ils doivent être jugés & punis fuivant la rigueur des loix établies dans toutes les fociétés contre ceux qui ont ceffé d'en être les membres, pour s'en rendre la terreur & l'opprobre. A ces caufes, &c.

TITRE I. Jurifdiction correctionnelle.

ART. I. Nous avons créé & établi, créons & établiffons pour la Corfe, quatre juntes nationales, qui auront leurs fieges à Orezza, Caccia, Quenza & Guagno, & qui exerceront contre les bandits & fugitifs, chacu ne dans les provinces & pieves de fon diftrict, la jurif diction dont il fera parlé ci-après, fous l'autorité du com mandant en chef pour nous dans l'ifle, du premier-préfident & du procureur - général du confeil-fupérieur de Baftia, auxquelfdits commandant, premier - préfident & procureur général conjointement, nous attribuons, à cet effet toute cour & jurifdi&tion, icelle interdifant à nos autres cours & juges.

ART. II. Chaque junte fera compofée de 6 commisfaires corfes, domiciliés dans fon diftrict, & en outre d'un fecrétaire-greffier & de 2 gardes; les commiffaires feront choifis par la nation, ainfi qu'il fera dit ci-après, & pris indiftin&tement dans l'ordre de la noblesse ou du tiers-état, fans autre titre de préférence que le fuffrage le plus général; ils exerceront leurs fonctions en vertu

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des brevets que nous leur en ferons expédier par le fecrétaire d'état ayant la Corfe dans fon département, & qui feront révocables à notre bon plaifir. Les greffiers & gardes feront commis par le commandant en chef, le premier-préfident & le procureur-général.

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ART. III. Nous pourvoirons inceffamment, & fur l'avis defdits fieurs commandant en chef, premier-préfi, dent & procureur-général, à la nomination des 24 commiffaires qui font à choifir pour la premiere formation defdites 4 juntes; & voulant que le tiers en foit renouvellé chaque année, nous ordonnons qu'à chaque af femblée générale, il foit fait un choix, par la nation de 4 fujets dans chacun des 4 diftricts pour les places qui devront s'y trouver vacantes dans l'année fuivante; defquels 4 fujets ainfi défignés, nous en choifirons deux pour remplir lefdites places, de maniere qu'entre l'époque de leur préfentation & celle de l'entrée en exercice des deux que nous aurons choifis, il fe foit écoulé un tems fuffifant pour nous affurer de leur difpofition; qu'à compter des états prochains, aucun defdits commiffaires n'exerce plus de 3 années confécutives, s'il n'en eft par nous autrement ordonné; & que chaque junte fe trouve compofée de deux commiffaires, de la 3me. année, deux de la 2me. & deux de la ire.

ART. IV. Il y aura toujours deux commiffaires dans le lieu du fiege de chaque junte; à l'effet de quoi chacun des fix commiffaires fera tenu d'y réfider, tous les ans pendant 4 mois entiers & confécutifs, & le fervice fe répartira entr'eux de la maniere fuivante. Le plus âgé de la 3me. année & le plus jeune de la 2me. année, ferviront les 4 premiers mois. Le plus jeune de la 3me. année & le plus agé de la ire. année, ferviront les 4 mois fuivans. Le plus âgé de la 2me. année & le plus jeune de la Ire, année, ferviront les 4 derniers mois. Pourront lefdits deux commiffaires faire tous les actes qui n feront que d'inftruction, le plus an ien des deux rempliffant les fonctions du juge, & l'autre les fonctions du fyndic.

ART. V.Tous les jugemens de junte feront rendus par 5 commiffaires, le 6e. devant faire les fonctions de fyndic. Voulons en conféquence, que tous s'affemblent dans le lieu du siege, toutes les fois que le bien du fervice l'exigera, qu'ils en feront requis par les commiffaires en exer cices, ou que lefdits fieurs commandant en chef, premier-préfideat & procureur-general ordonneront la convocation. L'affemblée fera préfidée par le plus âgé des

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deux anciens, & le plus jeune de ceux qui feront de réfidence actuelle, fera les fonctions de fyndic. Et en cas d'abfence, récufation ou autre empêchement légitime d'aucun defdits commiffaires, on appellera à fa place le plus ancien des notables du diftris qui aura exercé précédemment les mêmes fonctions de commiffaire de junte, & à défaut de commiffaires anciens, un commissaire de la junte la plus voifinc.

ART. VI. Au moyen du traitement que nous ferons payer chaque année aux 24 commiffaires de la junte, à leurs greffiers & gardes, ils ne pourront exiger aucune rétribution, fous quelque titre que ce foit, ni des communautés ni des particuliers; voulant que leurs fonctions foient gratuites', comme celles de tous les autres tribunaux de l'ife.

ART. VII. Tout fugitif actuellement aux makis ou hors de l'ifle, qui depuis la reddition totale de la Corfe, ne s'eft rendu coupable d'aucun crime capital, & qui fe préfentera dans 6 mois, après la publication du préfent édit, participera au bénéfice de l'abolition portée par nos lettres-patentes du mois de Septembre 1769; dérogeant, à cet effet, à notre déclaration du mois de Février fuivant. N'entendons néanmoins, jamais comprendre dans ladite grace les auteurs de la confpiration d'Oletta.

ART VIII. Ceux des fugitifs qui pourront & voudrone profiter du bénéfice de la préfente amnistie, chargeront de leur pouvoir, par écrit, une perfonne con le & domiciliée en Corfe, qui fe pourvoira en leur nom près du commandant en chef dans l'ifle, pour en obtenir un pafseport figné de fui; lequel paffeport ledit fieur commandant pourra accorder ou refufer, fuivant fes connoiffances particulieres, auxquelles nous déclarons vouloir nous en rapporter. Au moyen defdits paffeports, qui ne pourront être valables que pour deux mois, ceux defdits fugitifs qui les auront obtenus, fe présenteront en personne, dans ledit délai, audit commandant, pour, après examen fait de leurs difpofitions, en recevoir le fauf-conduit porté par notredite déclaration.

ART. IX. Ledit fauf-conduit ne pourra être accordé & délivré qu'à la condition expreffe que l'impétrant fixera fon domicile en Corfe, dans le lieu qu'il aura déclaré choifir, pour y vivre paifiblement en bon & fidele fujet, fans s'immifcer en chofe aucune qui puiffe nuire au bon ordre, à la tranquillité publique & à notre service; de tout quoi il donnera fa foumiffion, & fournira caution, fur l'engagement de laquelle il fera renvoyé en poffeffion

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de fes biens, s'ils ont été confifqués en notre nom, ou fi l'ayant été de quelque maniere que ce foit, ils fe trouvent en nos mains, & régis à notre profit.

ART. X. Les cautions à fournir, en exécution de l'article précédent, feront reçues par les commiffaires de la junte du diftrict dans lequel le fugitif aura déclaré vouloir s'établir; le fyndic en exercice préalablement ouï fur les facultés defdites cautions. La fomme en deniers de leurs cautionnemens fera fixée par lefdits commissaires, fuivant la qualité & la fortune des impétrans, de la conduite defquels elles répondront à fins civiles, jufqu'à la concurrence de ladite fomme, fans qu'elles puiffent prétendre la décharge de leurs cautionnemens, qu'après un terme suffisant & jugé tel par la junte, pour s'affurer de la fidélité de ceux dont elles auront ainfi répondu, & fans que le jugement de la junte par lequel une caution aura été déchargée, puiffe être exécuté, qu'il n'ait été approuvé par le commandant en chef, le premier-préfident & le procureur-général du confeil-fupé

rieur.

ART. XI. Pour mettre lefdits commiffaires de la junte à portée de connoitre les qualités & facultés des fugitifs, voulons que, dans un mois, à compter de la publication du préfent édit, tous les officiers municipaux des villes, podeftats-majors, podeftats particuliers, & pe res du commun, déclarent à la junte de leur diftrict, les noms, furnoms & qualités de ceux des habitans de leurs villes, pieves ou communautés qui, s'en étant abfentés fans caufe légitime & avouée, & n'ayant pas repris leur état & domicile, font notoirement regardés comme fugitifs laquelle déclaration contiendra en outre, l'énumération exacte & détaillée de tous les biens dont lefdits fugitifs étoient en poffeffion au moment de leur fuite, & fera fignée & affirmée véritable par lefdits officiers mu nicipaux elle fera adreffée au commiffaire en exercice. lequel en rendra compte au commandant en chef.

ART. XII. Faifons défenfes à tous nos fujets Corfes, autres que les eccléfiaftiques, la nobleffe de nobleffe reconnue au confeil-fupérieur, & ceux de nofdits sujets qui feront fpécialement attachés & employés à notre fervice, de s'abfenter de leur communauté, fans un congé des podeftats, lequel leur fera délivré fur leur fimple déclaration qu'ils veulent s'abfenter pour leurs affaires avec promeffe de n'attenter en rien au repos public; voulons que 8 jours au plus tard après le départ fans ledit congé, de toute perfonne fujeste à s'en pourvoir, les po

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