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bruit du piftolet, venoient d'entrer chez l'infortuné, qui n'étoit déjà plus.

Depuis le mois de Juin de l'année derniere jufqu'au 16 Janvier de cette année, on avoit reffenti, dans les environs de Clanfayes, & principalement dans ce village, fitué fur une montagne, à une demi-lieue de St. Paul - Trois - Châteaux en Dauphiné, de légeres fecouffes de tremblement de terre; mais elles ont été très-violentes depuis cette époque. Il y en a eu le 18, à 8 heures 10 minutes, & à 9 heures 20 minutes du matin; le 23, à 4 heures après-midi & à 7 heures 40 minutes du foir; le 24, à 5 heures 55 minutes du natin; le 30, à 6 heures du matin, & le 31, à la même heure. Chaque fecouffe a duré environ 3 fecondes, & les mouvemens étoient du levant au couchant. Pendant celle du 23, à 4 heures après-midi, l'horloge de St. Paul-Trois-Châteaux, à une grande demi-lieue de diftance du Dauphiné, a frappé fix coups fur le timbre; le couronnement du clocher de l'églife paroiffiale de Clanfayes s'eft écroulé; une partie des murs qui environnoient ce village, eft tombée, & la commotion s'eft fait fentir, dans le même inftant, à Pierre-Latte, diftant d'une demi-lieue, à Grignan & dans quelques autres villages du comtat. Pour prévenir la chûte des bâtimens ébranlés, le subdélégué du département a envoyé fur les lieux des maçons qui, pendant plufieurs jours, ont démoli ou étayé les parties qui menaçoient ruine. Cette précaution a empêché quelques jours la défertion des habitans, & les avoit raffurés fur la crainte de voir détruire leur village. Ils commençoient à revenir de leur frayeur, quoiqu'ils fuffent toujours étonnés des bruits fourds qu'ils entendoient le jour & la nuit, femblables à des coups de canon; mais le 7, à une heure & trois quarts du matin, entre plufieurs fecouffes, on en a remar

qué une plus violente, & qui a été de plus longue durée que les précédentes. Le marteau de l'horloge de St. Paul-Trois-Châteaux a frappé 6 ou 7 coups fur le timbre. Les habitans fe font fauvés précipitamment dans la campagne, & le lendemain`, la plûpart d'entr'eux ont abandonné leurs demeures. Le mouvement a toujours eu la même direction. Le curé, qui a été le plus en danger par la chûte d'une partie de l'églife, dans la commotion du 23 Janvier, n'a point quitté fes paroiffiens, & n'a ceffé de leur fournir des fecours & des confolations: il feroit refté prefque feul dans le village, d'où la frayeur chaffoit tous les habitans, fans les foins du fubdélégué de St. PaulTrois-Châteaux, qui s'y eft tranfporté pour prévenir une plus grande défertion. Il a ordonné de conftruire, dans la plaine, un grand nombre de cabanes, afin de procurer aux habitans un afyle auprès de leurs poffeffions.

On écrit de Boulogne-fur-Mer qu'un bateau pêcheur de ce port a été englouti, à deux lieues au large par un tourbillon, & que cinq hommes ont péri. Deux ont été fauvés par un autre bateau du même port.

Vers la fin du mois dernier, on effuya à Dieppe une affreuse tempête qui dura 22 heures. Le vent étoit fi violent qu'il enleva beaucoup de toits, & renverfa un grand nombre de cheminées : 16 maifons furent inondées par les vagues, malgré une forte digue qui les garantiffoit de la mer. La tour de l'églife étoit ébranlée par l'impétuofité du vent, & l'on craignoit qu'elle ne fût abattue. Dix matelots des plus robuftes qui haloient un petit bateau vers le petit baffin, furent renversés fur le terre-plein de la jettée, par une lame d'eau qui les engloutit, & qui les eût entrainés dans le cou rant, fi on ne les eût retenus en amarrant la corde, qu'ils eurent la prudence de ne point lâcher.

On eft dans la plus grande inquiétudé pour les batimens qui peuvent s'être trouvés fur la côte pendant cet ouragan.

On dit que l'abbé d'Expilly a remis au gouvernement un mémoire très-détaillé de fa compofition, dans lequel il propofe & indique le moyen de foutenir, dans toute l'étendue du royaume, en tout tems, en toute faifon (quelles que puiffent être à l'avenir les récoltes en France) la livre de pain, y compris la main-d'œuvre du boulanger; fçavoir, du meilleur froment, à 2 fol 3 deniers; de meteil, froment & feigle, à un fols 9 deniers; de bled noir & d'orge, à un fol, fans gêner le commerce des grains, qui deviendroit même plus libre qu'il ne l'eft à-préfent, & beaucoup plus avantageux à l'agriculture, fans qu'il fût néceffaire de former des magazins, en donnant aux journaliers, qui ne poffedent abfolument rien, le moyen de payer comptant le pain de leur fubfiftance; ce qui banniroit à jamais la mendicité, & procureroit à l'état un bénéfice réel de plus de 25 millions par an. Ce moyen ne couteroit abfolument rien au gouvernement, & ne préjudicieroit à perfonne. L'objet de ce mémoire, qui intéreffe fi effentiellement l'humanité, fait defirer ardemment que le moyen proposé par l'abbé d'Expilly, s'accorde avec les principes actuels de l'adminiftration, & qu'en conféquence, il foit adopté. Les lumieres & l'intelligence de cet écriyain, véritablement citoyen & ami de l'humanité, jointes aux connoiffances immenfes qu'il poffede fur la population, les récoltes & les confommations du royaume, font déjà d'un très-bon augure en fa faveur.

Lettre de la Dame Vanloo à l'auteur de ce journal.

Je viens de lire, Monfieur, dans le 1er. jour

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nat de Février, un article qui me concerne & dans lequel il n'y a pas un feul mot de vrai. Comme le fait dont il s'agit eft un de ceux fur la vérité & la fauffet duquel il n'eft pas indifférent pour moi que le public foit partagé, je n'ai pas cru devoir l'accréditer davantage par un filence que beaucoup de gens, toujours preffes de juger, ont déjà pris pour un aveu de ma part.

Il est dit, à la pag. 56, 57, que l'impératrice de Ruffie ayant offert à Madame Geoffrin 36 mille liv. de deux tableaux que mon mari avoit faits pour elle, Madame Geoffrin avoit confenti à les lui céder pour cette fomme, quoiqu'ils ne lui en euffert coûté que 4 mille, & qu'elle m'avoit envoyé fur le champ les 32 mille qui faifoient l'excédent du prix que ces deux tableaux avoient été payés.

J'ignore ce qui a pu donner lieu à de pareilles fuppofitions, & fi Madame Geoffrin a vendu ou non à Pimpératrice de Ruffie les deux tableaux en question; mais ce que je fçais, c'eft que Madame Geoffrin a payé ces deux tableaux 12 mille liv., & que fi elle les a vendus 36 mille liv. comme on l'aflure pofitivement dans se journal, elle n'a point fait, ni dû faire pour moi ce qu'on lui attribue fans aucune preuve, & vraifemblablement à fon infçu. La douce habitude que Madame Geoffrin a contractée depuis longtems de fair le bien, & les bonnes actions de toute espece dont fa vie femble n'être qu'un enchainement continuel, ont donné lieu de croire à plufieurs perfonnes, qu'elle pouvoit bien en avoir fait une de plus; & bientôt cente poffibilité eft devenue un fait, dont perfonne ne doute aujourd'hui, excepté Madame Geoffrin & moi. Mais elle eft trop honnéte pour vouloir qu'on lui fçache gré d'une action qu'elle n'a point faite, parce qu'elle n'a pas dû la faire, & je fuis perfuadée qu'elle verra avec plaifir une proteftation qu'elle auroit été la premiere à rendre publique, fi elle avoit eu connoiffante de l'am

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icle du Journal politique, auquel cette lettre do fervir de réponse. Dois-je craind e, en effet, que Mudame Geoffrin, qui ne permet jamais à fes amis de parler des fervices qu'elle leur rend, & qui les difpenJe même de la reconnoiffance, me blâme aujourd'huž de nier un bienfait que je n'ai pas reçu? Quand on eft affez défintereffe pour laiffer ignorer le bien qu'on fait, on ne peut être foupçonné de vouloir s'honorez de celui qu'on ne fait pas.

J'ai l'honneur d'étre, &c.

A Paris, ce 6 Mars 1773.

GRANDE-BRETAGNE

LONDRES (le 28 Février. ) Le 22 de ce mois, le roi tint à St. James, chapitre de l'ordre militaire du Bain; S. M. y conféra au Sr. Oughton, lieutenant-général de fes armées, le cordon de cet ordre, vacant par la mort du chevalier Gray..

Le 10 de ce mois, lorfque la chambre étoit occupée de l'examen des papiers relatifs à l'expédition de l'ifle de St. Vincent, le général Trapaud lut deux extraits de lettres, datées du 14 Sept., par lefquelles on apprend que des 1100 hommes que nous avons dans cette ifle, il s'en t trouvoit plus de 200 à l'hôpital; qu'il commençoit à mourir beaucoup de foldats, ce que l'on attribuoit aux fatigues dont ils font accablés, & aux pluies fréquentes qui ont regné dans cette faifon; qu'un officier avoit péri avec fa troupe, en voulant defcendre dans l'ifle; que les Caraïbes irrités cherchoient à fe venger du mal que nous leur avons fait; qu'ils s'enfoncoient dans les bois, & maffacroient les foldats qui leur tomboient fous la main, & qu'il étoit à craindre qu'ils ne nous détruififfent infenfiblement, fans courir de danger, par l'adreffe & la circonspection qu'ils emploient pour nous éviter, & qu'enfin, nous

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