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lui fouhaiter la bonne année au coup de minuit, qui lui avoit mal-adroitement tiré la bourre de fon fufil à la jambe, & lui avoit coupé l'artere; on emporta l'infortuné jeune homme; on lui donna tous les fecours poffibles; mais il expira peu d'heures après. Cet accident terrible a fait la plus vive impreffion fur les habitans de Sultzbach; ils ont juré folemnellement de renoncer pour toujours à un ufage ridicule, qui a produit un fi fupefte effet.

RATISBONNE ( le 25 Janvier. ) On est informé que l'empereur n'a point approuvé les propofitions que le fubdélégué de Brandebourg avoit remifes à la commiffion principale de Wetzlar, dans la vue d'ajufter le différend entre les fubdélégués. S. M. I, a auffi répondu au baron d'Edelsheim, miniftre du roi de Pruffe à Vienne, lequel avoit préfenté les mêmes propofitions, qu'ayant tout épuisé par fa déclaration du 24 Septembre de l'année derniere, que le tems étant trop court, & Londres trop éloignée pour entamer une nouvelle négociation à ce fujet; S. M. I. insistoit qu'on se conformât à fa déclaration, & qu'au cas que l'on s'y refusât, fa commiffion fe retireroit définitivement de Wetzlar au commencement du mois dẹ Février prochain. Il eft étonnant que cette difcuffion, qui n'a pour motif que quelques expreflions peu mefurées de deux fubdélégués, dure depuis près de 9 mois, & qu'elle prive l'empire des avantages d'une inftitution fi falutaire. On peut dire que cette affaire pourra former un nouveau chapitre dans le recueil des grands événemens produits par de petites caufes.

Le baron de Schneid, envoyé du duc de Baviere, & chargé du fuffrage de Bamberg, a donné avis à quelques miniftres de la diete, que la garnifon de Philippsbourg avoit évacué cette for

tereffe de l'empire, & que l'empereur vouloit feul la faire occuper par fes troupes. Au refte, on remettra bientôt fur le tapis les prétentions du cercle de Franconie, relativement à Philippsbourg; &, felon toute apparence, les princes directeurs de ce cercle ne tarderont point à donner leurs réfolutions fur ce point.

On apprend de Caffel que le directeur des monnoies a fait publier qu'il rouloit dans le pays de faux écus de France de 1726, 1729 & 1740, & qu'il invitoit les habitans à y faire attention. Ces écus ont le fon auffi fort & auffi clair que ceux qui font de bon aloi; mais ils ont l'air d'avoir eu cours depuis long-tems; ils font faciles à rompre; la matiere dont ils font compofés eft jaunâtre en dedans. On ignore d'où eft venue cette fauffe monnoie.

Copie d'une lettre de Landshut en Baviere, en date du 14 de ce mois.

Les chefs des confédérés font bien éloignés de vouloir fe réconcilier avec leur roi, comme vous vous l'étiez fauffement imaginé. Ceux qui font affemblés ici, au nombre de 18, ont enjoyé, ces jours-ci, une lettre au comte Wilhorski à Paris, & l'ont chargé de la remettre, de leur part, au miniftere de France. Ils déclarent dans cette lettre, qu'ils ne fe réuniront point à S. M. Polonoife, pour faire caufe commune avec elle dans les circonftances préfentes où eft réduite la Pologne ; & ils proteftent qu'ils ne feront même aucune démarche tendante à cet effet, parcequ'en leur qualité de membres de la véritable confédération, à eux feuls appartient la défenfe de la liberté & des privileges de leur patre, en conféquence des loix fondamentales de la conflitution du royaume & de la république de Pologne,

On voit ici la traduction d'une lettre, écrite en langue arabe par le grand-vifir, à un des principaux feigneurs polonois confédérés : cette lettre, qui eft écrite fur du fatin bleu, & munie du fceau de la Sublime Porte, eft datée (felon l'ére chrétienne) du 2 Novembre 1772. Elle porte en fubftance ce qui fuit: Par ordre du très-puiffant, très-jufte empereur, mon maitre, plein de vertus royales, d'amour pour l'humanité, de zele pour le fervice de la ville fainte (la Mecque), duquel la puiffance s'étend fur des peuples de toutes les nations qui habitent le continent & les mers, le plus fage des Sultans, le chef le plus glorieux de la tige la plus illuftre parmi les hommes, à qui tous fes fujets rendent de perpétuelles actions de gra ces, &c. faifons fçavoir au très-refpectable & trèsilluftre notre ami le comte de... qui foit conduit fur les voies du ciel, & dont la fin foit heureufe, &c. que la Sublime Porte étant fermement réfolue de ne fe départir jamais de fes engagemens pris avee l'illuftre nation polonoife, notre chere voifine, ni de donner la paix à ceux avec qui nous fommes en guerre, à moins que la Pologne ne foit guérie de fes bleffures, & le repos établi dans cette infortu née république nous ne laifferons pas de faire dans toutes les mofquées de notre domination, de ferventes prieres, afin que les vœux de tous les illuftres Polonois foient efficacement accomplis. Vous ferez donc part, s'il vous plaît, des dignes fentimens кез d'honneur de mon maitre à tous vos chers compatriotes difperfés par toute l'Europe. Nous vous confirmons ces mêmes fentimens par notre propre main en y appofant le grand fceau du divan, pour y pouvoir ajouter foi.

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VIENNE (le 25 Janvier. ) Les mesures que le gouvernement a prifes pour faire ceffer les malheurs de la Bohême, n'ont pas produit jufqu'ici

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l'effet qu'on en avoit attendu. La mifere continue à fe faire fentir dans ce royaume, & la dépopulation y devient de jour en jour plus contidérable. La quantité de bled, de riz, &c. qu'on y a fait paffer, n'a été qu'un foible foulagement à fes maux, parce qu'ils tiennent encore à d'autres caufes qu'à la difette des grains. Cette vérité démontrée par une trifte expérience de deux ans engage cette cour à s'occuper d'autres moyens que ceux dont elle a fait ufage jufqu'à préfent. On fçait qu'elle s'eft déjà déterminée à fupprimer entierement le tiers des corvées que les payfans doivent à leurs feigneurs, & que le prince de Furftemberg, grand bourgrave (comes caftellanus, châtelain) de la province, eft retourné, ces jours derniers, à Prague, pour y noti fier aux états cette réfolution. Elle eft de nature à ne pas être agréable aux feigneurs; mais le gouvernement paroit décidé à foutenir un arrangement auffi utile au peuple.

Le prince-abbé de St. Blaise, qui a féjourné ici pendant quelques mois, eft retourné, ces jours derniers, dans fon abbaye en Souabe. Avant fon départ, il a eu l'honneur de présenter à L. M. Imp. une édition complette d'un ouvrage qui at pour titre Monumenta aug. Domus Aufiriaca. Ce recueil intéreffant avoit été commencé par le: pere Marquart Herrgot, & le prélat y a mis la derniere main. St. Blaife eit une fameufe & riche abbaye de bénédictins, en Souabe, dans la Forêt Noire, entre Waldshout & Villingen. Elle poffede la feigneurie de Boundorf, une mine d'argent à Tottnau, la juftice criminelle fur le village de Fietzen, la moitié de la feigneurie & de la fortereffe de Guttenberg, Betmoringuen, Berow & tout le val de Totnaw & de Schoenau. L'abbé a été élevé, en 1747, au rang de prince de l'empire.

On vient d'ordonner à tous les infpecteurs des magafins militaires & des arfenaux, de fournir, d'aujourd'hui au 30 de ce mois, une lifte exacte des provifions de toute efpece qui se trouvent dans leurs magasins.

On mande de Prague, que, le 28 du mois dernier, on y a vu faire une nouvelle moiffon, & qu'une infinité de perfonnes, attirées par un fpectacle auffi extraordinaire pour la faifon, ont été les témoins d'un fait auquel les circonftances fuivantes ont donné lieu. Un particulier avoit femé du feigle & de l'orge dans un champ dont il eft poffeffeur, auprès de la grande route qui conduit de Prague à Vienne. Lorfque ces grains furent coupés, il craignit que le voifinage du grand cheinin n'exposat fa récolte; il la fit tranfporter, & l'étendit dans un enclos qui lui appartient, auprès de la porte-neuve de Prague. Une partie du grain tomba des épis, & refta dans cet endroit; mais le propriétaire ayant fait bécher le terrein fur lequel fa moiffon avoit été étendue, pour y femer des navets, cette opération fit germer & pouffer les grains tombés, & les nouveaux épis font parvenus à une entiere maturité. Quoique depuis le moment où le bruit de cette réproduction s'eft répandu, plufieurs milliers d'épis aient été arrachés par les curieux qui vencient admirer cette fertilité de la nature, cependant le propriétaire a recueilli encore plufieurs gerbes complettes, & la farine qu'on a tirée de ce grain, a été trouvée d'une très-bonne qualité.

Il y a quelques jours que deux payfans, chargés de remettre une requête à l'empereur, de la part de leur communauté, vinrent fe pofter près des écuries où ils avoient appris que ce prince devoit venir. En effet, quelques inftans après, l'empereur paffa, & les payfans, qui ne le connoiffoient pas, lui demanderent, fi S. M. I. vien

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