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» nes richeffes, n'avoit pour reffource, dans des befoins toûjours nouveaux,. », que les Impofitions & les Emprunts; ,, celle-ci, au contraire, ayant pour "ame le crédit, unique fource de la ,, circulation & de l'abondance, acquitte le Roi par la fuppreffion des Impôts, & change en Bureau de » Prêt, la Caiffe décréditée de fes Em-» prunts.

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Si l'on vous avoit, Monfieur, propofé & expliqué ce Syftême avant qu'il fût feulement connu du Public »je vous aurois cru obligé de l'ap» prouver : je ne vous demande aujour-d'hui que d'en juger par l'expérien»ce, & d'en avouer les effets. Je vois » que vous m'allez attaquer d'abord par » une objection qui me touche, parce » qu'elle vous regarde perfonnellement. » Tout votre bien confiftoit en Rentes » conftituées, dont les Rembourfemens » vous ont déja été faits, ou le feront ,, dans la fuite. Ces deux cas, qui ,, font les mêmes dans votre efprit, fönt » très-différens dans le mien. Car je » n'ai rien à vous reprocher fur l'argent » qui n'eft pas encore entre vos mains; » mais pour celui dont vous avez été » le maître, il ne tenoit qu'à vous de

2. Vous

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» vous en faire des fortunes; je ne dis " pas en devinant les chofes dès leur première origine, mais en voyant. » les gains immenfes qui fe font faits » d'un jour à l'autre.

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"Mais remontons au principe gé» néral, dans lequel même vous êtes ,, encore à tems de trouver votre confeil & votre reffource. Une des pre» mières loix d'un Gouvernement qui ,, roule fur le Crédit & fur la Circu-,,lation, eft, de ne laiffer dans un E» tat que les biens-fonds & le commer»ce, en regardant même les Terres, ,, non comme une retraite ou un port », en cas de naufrage, mais comme u ,, ne des fources du commerce, par» les fruits qu'elles produifent. Le. ,, bien de Conftitution eft directement » oppofé à ce principe. Celui qui prête, ftipule que fon argent ne fera employé en aucune forte de marchan,, difes, mais il le veut voir affis fur ,, un fonds marqué & déterminé. Le capital meurt pour le Prêteur, & il ?? confent de ne jamais le ravoir. Ain,, fi l'argent conftitué demeure immo

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bile entre deux hommes qui fe font », enchaînés l'un l'autre. Cette efpe

» ce d'emploi rend plus rare & plus » cher l'argent du Commerce.

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,, Comme il y a toûjours dans un Etat un certain nombre d'hommes timides & pareffeux, qui ne fongent » qu'à leur intérêt perfonnel, & pour qui le bien général de leur Nation est », une chimère; le repos d'efprit dont » ils paroiffent jouir dans leur bien de ,, Constitution, détourne ceux qui mettroient leur argent dans le commer,,ce, ou qui le prêteroient à des Com,, merçans. Or il n'eft point de marque plus füre d'un Etat peu aifé, & penchant vers la mifere, que la cherté de l'argent. Il feroit à fouhaiter qu'il fe prêtât toûjours pour rien, ou dans la feule vûë de partager avec l'Emprunteur le profit qu'il en tirec'eft le commerce que tout le ,,monde peut faire fans être Marchand; & c'eft auffi la feule manière d'em» prunter & de prêter qui ne foit point ,, onéreufe au Prêteur ni à l'Emprun» teur. J'ai regardé long-tems avec "compaffion le joug que fubiffoit l'Em» prunteur à Constitution de rente: Il

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» ra:

donne ordinairement au Prêteur tout le prix que l'argent est eftimé, & », demeu

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» demeure, pour ainfi dire, fon Commif,, fionaire ou fon Agent, au péril même de fa fortune. C'eft bien pis en,, core, s'il place l'argent qu'il vient ,, d'emprunter, fur des Terres, dont le ,, revenu eft toûjours au- deffous du de,, nier de la Conftitution, ou fur des » Offices de Judicature, qui ne rendent rien; de forte qu'on peut affu-. »rer en général, qu'on ne fe charge de Conftitution, que pour fe tirer d'u"ne fâcheufe affaire, fouvent pour un »tems fort court, au par une vanité » ruineufe qui trouble l'intérieur de » tant de familles. On en est au com,,mencement fi perfuadé, qu'on évite le plus qu'on peut d'acquerir des

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bien chargés de rentes foncieres; & » qu'au lieu qu'un Marchand ne rend qu'à regret à l'échéance l'argent qu'il doit, parce qu'il le feroit profiter ,, encore, le Débiteur d'une rente s'en défait le plutôt qu'il peut, comme ,, d'un poids infupportable. Ainfi, être ,, fâché de ne pouvoir plus placer fon " bien à Conftitution, c'eft être fâché que l'argent foit devenu commun, & " qu'il n'y ait plus de malheureux.

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Je ne fçais fi, dans la fituation préfente de votre efprit, vous me

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pardon

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"pardonnerez l'exemple rifible de ce Médecin, qui donna fa malédiction » à une ville où tout le monde fe por» toit bien. Les Auteurs de Droit " nous ont confervé la mémoire des oppofitions qu'effuya la Conftitution de rente, quand elle commença à s'établir en France. L'injuftice & la ty» rannie des Prêteurs, à laquelle on » s'eft depuis accoûtumé, étoit alors » traitée d'ufure publique; & les fcru» pules ont encore duré long-tems » après que les Puiffances eccléfiafti» ques & féculieres ont permis cet em» ploi de l'argent. Auffi pourroit - on » dire, que l'idée naturelle de l'Ufure , enferme tout Prêt, qui, fous l'appa,,rence d'un bienfait, met le Bienfai

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teur plus à fon aife, & conduit à fa » perte l'Emprunteur qu'il faloit foulager. Mais fans toucher au cas de confcience, le Prince ne fçauroit rien faire de plus loüable, que d'abolir un ufage qui opprime une partie de fes fujets, qui font les Débiteurs. De » plus, on ne fçauroit pourvoir en général à leur foulagement, qu'on ne » pourvoye en même tems à la fûreté » des Créanciers. Ne voit-on pas où » aboutissent la plupart des Conftitu» tions ?

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