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ne voit pas pourquoi ce Citoyen chargé de Ja défenfe de la Ville vient hors des portes fe livrer à des plaintes & à des terreurs qui ne conviennent ni à la fituation ni au carac tère qu'on lui a donné. Il y a apparence que ces incohérences font en partie l'effet des fuppreffions nombreufes que l'Auteur a été obligé de faire à fa Pièce, & qui pour fauver des longueurs, ont mis dans les Scènes un défaut de liaifon deftructif de tout intérêt..

Nous n'entrerons dans aucun détail fur le ftyle de cet Ouvrage; nous dirons feulement qu'on devoit s'attendre à y trouver moins de négligences. On pourroit croire que rien n'eft difficile à bien écrire qu'un Opéra, fi l'on en juge par ceux qui fortent de la plume d'Écri vains qui fe font exercés avec fuccès dans des Ouvrages plus difficiles & plus importans. Aufli ce n'eft pas fur le Poëme de Péronne fauvée qu'on jugera M. de S***. qui a donné dans d'autres Ouvrages en profe & en vers des preuves de goût & de talent que le fuccès a confirmées.

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Nous n'ajouterons qu'une réflexion fur le genre de fon Opéra. Nous fommes bien éloignés d'en profcrire aucun; & nous croyons même qu'on doit encourager toutes les nouveautés, & laiffer à chaque Auteur la liberté, d'ouvrir, à fes tifques, péril & for rune, des routes nouvelles dans la carrière des Arts; mais nous croyons en même temps qu'il y a des bornes que le goût des Auteurs doit refpecter, & que le goût du Public

ne devroit pas laiffer franchir. L'appareil du Spectacle, des décorations & de la Pantomime eft effentiel au Théâtre Lyrique, mais comme acceffoire; c'eft dégrader le genre que d'en faire l'objet principal. Une action intéreffante conduite avec vraisemblance, des fentimens vrais naturellement exprimés, une poéfie favorable au chant & des détails propres à mettre en œuvre toutes les reffources de la Mufique; voilà ce quit devroit toujours former l'intérêt dominant d'un Poëme Lyrique; les décorations & les machines ne font faites que pour donner plus de mouvement & d'illufion au Spectacle; & la danfe, pour le varier & l'embellir. Ce n'eft pas aux hommes d'efprit & de talent à encourager le mauvais goût qui tend à fubftituer la Pantomime à la Scène, & des manœuvres militaires à une action dramatique. Il faut laiffer ces reffources aux Spectacles fubalternes, auxquels le chant & l'efprit font interdits.

Nous ne dirons ici que peu de chose de la Mufique de Péronne fauvée. Il nous a paru qu'on l'a jugée trop rigoureufement à la première représentation. Nous y avons trouvé de l'imagination & de l'originalité, des chants agréables & des morceaux d'harmonie fupérieurs à ce qu'on attendoit d'un Compofiteur qui n'étoit encore connu que par des Ouvrages d'un genre moins favant. Nous croyons en même-temps qu'elle eft fufceptible de critiques graves & bien

fondées; mais nous attendrons que plufieurs repréfentations fuivies avec attention nous ayent mis à portée de recueillir les opinions des gens de goût, & de motiver nos propres obfervations, pour entrer dans l'examen fuivi de cette partie de l'Ouvrage.

Nous renverrons au Mercure prochain les détails de l'exécution.

VARIÉTÉ S.

REPONSE de la Comédie Françoise à celle de Madame MIGNOT DU VIVIER, datée du 1 Mai 1783.

MADAME

ADAME,

« La Comédie Françoife a reçu votre Lettre, qui a produit le plus grand étonnement. Son amour, fon refpect pour M. de Voltaire ont fi fort éclaté dans tous les temps, qu'il lui étoit imposible de prévoir qu'elle recevroit un jour des reproches aufli amers & fi peu fondés. Sa réponse fera, Madame, une fimple expofition des faits.

<< M. Gerbier vint en 1782 à l'Affemblée, nous dire qu'il favoir que M. Houdon avoit fait en marbre la Statue de M. de Voltaire; qu'il étoit instruit que, fi la Comédie defiroit en orner fon Foyer Madame Denis en feroit avec plaifir un préfent au Théâtre François. Quoique nous eufsions acheté le Bufte de Voltaire en même-temps que ceux de Molière & de Corneille, nous crûmes pouvoir nous livier au plaifir de le multiplier aux yeux du Public; ais lorfque jouifant de l'idée de tranfmettre à nos

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fucceffeurs cet objet de notre admiration, nous nous fomines portés à le demander, nous ne croyions pas folliciter d'avance des entraves & des loix. »

» Le Théâtre François appartient au Roi, & les em belliffemens ou déplacemens ne dépendent point de nous. Sans entrer dans une difcuffion littéraire, noUS avons pu croire que Molière avoit des droits à la place qu'il occupe. Le Bufte de. M. de Voltaire cít placé avec ceux de Corneille & de Racine. Dans le veftibule d'en-bas, le poële ne pourroit pas foutenir unc Statue d'un fi grand poids; & fi l'on en conftruifoit un autre pour la recevoir, elle feroit bientôt altérée par le feu & la fumée. La falle où on l'a tranfportée, & où elle eft placée avec foin & avantage, n'eft ni notre Chambre,comme vous le dites, Madame, ni notre Salle d'Affemblée : c'eft une Salle deftinée à recevoir MM. les Auteurs, à tenir les A Nemblées extraordinaires lorfque Noffeigneurs les Gentilshommes de la Chambre jugent à propos de les convoquer; enfin c'eft un fecond Foyer pour les jours de grande affluence, une galerie, dont cette Statue fera le principal ornement, ouverte en tout temps au Public Il eft poffible cependant que les voûtes ne puiffent pas fupporter fon poids énorme ; &, s'il eft néceffaire de la déplacer encore, nous tâcherons d'obtenir qu'elle foit dépofée dans le jour le plus avantageux. »

Dans la demande que l'on nous a engagés à vous faire lorsque vous avez fait ce don fi précieux. au Théâtre François, il n'a pas été convenu que M. de Voltaire auroit la préféance far tous les autres buftes contre les arrangemens les plus néceffaires. Tour eft fournis à des loix, & notre amour exceffif pour M. de Voltaire,ne fauroit nous porter propofer un bouleversement difficile & peut-être injufte dans le Théâtre de la Nation. M. votre Oncle a

à

reçu, Madame, de fon vivant des preuves d'um

jufte enthoufiafine de tous les Comédiens François; il ne doutoit pas de nos fentimens. Nous rendons à fa mémoire les hommages qu'il a fi bien mérités; nous mettrons notre gloire à préfenter avec foin, & le plus fouvent poffible, tous fes chef-d'œuvres au Public. Le nominer,c'eft faire parler à-la-fois toutes les voix de la Renommée ; & s'il vous plaifoit encore d'avoir quelques doutes fur la pureté des hommages que nous rendons à ce grand Gépie, nous vous prions de vous fouvenir & de la Lettre que vous nous avez écrite, & de celle que nous avons l'honneur de vous adreffer. »

Nous avons l'honneur d'être, &c.

P. S. Quant au quart de loge en payant dong vous vous plaignez fi amèrement, la Comédie', animée du vif defir non de s'acquitter envers M. de Voltaire, ce qui lui paroît impoffible, mais voulant lui donner une foible marque de fa refpectueufe reconnoiffance, vous a fait l'hommage purement gratuit d'une loge: vous oubliez, Madame, fes démarches, fes regrets, & combien elle eft foumife à l'autorité.

ANNONCES ET NOTICES.

CHARLES PREMIER, Roi d'Angleterre, accom pagné de fon époufe Henriette de France, fille de Henri IV, & de fes deux enfans le Duc d'Yorck, & de Henriette-Marie, première femme de Philippe, Duc d'Anjou & d'Orléans; Eftampe, d'après VanDick, qui fera terminée dans le courant de 1783, par M. David.

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Nous avons annoncé la fuperbe Eftampe de Charles Premier, par M. Strange. M. Maffard promet de livrer le même tableau gravé par lui. Voici un troifième concurrent, M. David, Auteur des

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