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gne de fon caur bas & vil. Alors Minval dit à Georgette qu'il venoit d'obtenir un ordre pour le faire arrêter. Quoique Georgette ne pût pardonner au fils de Minval l'état cruel où il réduifoit fon père, ce mot la fit frémir. Le voilà, cet ordre, ajouta Minval. S'il ne le corrige pas, il me vengera du moins. Un cachot, & ma malédiction voilà l'héritage qu'il aura de moi, & le feul qu'il ait mérité. Mais avant de faire exécuter cet ordre, j'ai voulu vous voir, ma fille; vous prendre à témoin comme je n'ai rien oublié pour le ramener à fon devoir. Me trouvez vous injufte, barbare? Non, lui difoit en pleurant Georgette, qui craignoit de le voir expirer de douleur, non, vous n'êtes pas un barbare. Ce malheureux, reprit Minval, court, dit on, le plus grand danger. Je crois le voir dans fes honteux égaremens. Cette image me pourfuit; & tant qu'on ne fe fera pas affuré de fa perfonne, je ne vivrai pas. Vous voyez qu'il a mérité fon fort.

Remarquons ici que Minval, au milieu de fa colère, fembloit encore avoir befoin de s'exciter à punir. Remarquons encore qu'en fe vengeant de fon fils, il s'occupoit auffi fans y fonger, de l'arracher au péril dont il le croyoit menacé. La vengeance d'un père a toujours un caractère particulier. Enfin l'ordre partit. Minval avoit commandé qu'on lui amenât le coupable avant de l'emptifonner, & qu'on le faisît par-tout où on le trouveroit, & tel qu'on le trouveroit. En

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attendant il retint Georgette chez lui. On fit la plus grande diligence; & dès le lendemain d'Orly fut arrêté. On le furprit justement comme il venoit de prendre fon coftume villageois ; & c'eft fous cet habit qu'il fut conduit devant fon père. Malheureux, s'écria Minal en le voyant! dans quel état tu parois devant moi? C'en eft fait, tu n'as plus de père; je n'ai plus de fils; mais j'ai une fille. Regarde la, fcélérat; toute fenfible qu'elle eft, elle applaudit à ma vengeance. Elle fait tout.

Figurez-vous, à ces terribles mots, d'Orly reconnoiffant Georgette, & Georgette rencontrant les yeux de fon amant. D'Orly demeure comme pétrifié. L'idée de Georgette qui le trahit, qui le fait deshériter, eft une idée horrible, monftrueuse, accablante; & c'eft pourtant la feule alors que puiffe admettre fon efprit. Il alloit répondre aux reproches de fon père; mais à cette nouvelle il demeure immobile & fans voix. Quant à Georgette, fes forces ne peuvent fuffire à une furprife auffi cruelle & auffi imprévue; elle tombe fans connoiffance. Revenue de cer accident, que Minval n'attribue qu'à un excès de fenfibilité, elle conçoit quel effet a dû produire fur l'efprit de d'Orly le difcours qu'il vient d'entendre. O mon bienfaiteur! s'écria-t'elle en tombant aux pieds de Minval, un coup de foudre vient de m'éclairer tout à coup. Puniffez moi; c'eft moi feule qui fuis coupable. Vous coupable, répond

Minval en la relevant, vous! - Oui, c'eft moi qui ai rendu votre fils rébelle à vos vo lontés. Mais ce fils m'étoit inconnu. Ces habits qui m'ont trompée, il les a pris fans doute pour le rapprocher de moi. Je n'étois pas fa complice; mais je vous ai rendu malheureux, je fuis criminelle. Ce peu de mots fuffit pour défabufer & pour éclairer d'Orly; mais ils ne fuffifoit pas pour inftruire Minval, qui venoit de tomber dans le plus pro fond éronnement. Alors d'Orly, à qui Geor gette vient de rendre la vie & la force de parler, tombe à fon tour aux pieds de fon père, & lui raconte l'hiftoire de fes amours. O mon père, ajouta t'il, j'ai adoré la beauté, la vertu. L'excès de mon bonheur m'a rendu coupable. Mais pourrez vous connoître Georgette, & ne pas me pardonner ? J'avois choifi pour femme celle que vous aviez adop tée pour fille. Si c'eft un crime, puniffezmoi. Non, s'écrioit Georgette, c'eft moi feule qu'il faut punir; mais pardonnez à votre fils. L'un & l'autre en parlant ainsi,tenoient embraffés les genoux de Minval. Minval ou blie alors de les relever, & fes yeux & fon cœur fe repaiffent de ce fpectacle; il les regarde, & fes larmes coulent fur eux; enfin il leur pardonne en fe jetant dans leurs bras. Il fit plus; il les unit le même jour. Pour comble de bonheur,on lui apporta la nouvelle du gain de fon procès; & il ne craignit plus de voir enlever fa fortune à fes enfans. Il vécut avec eux; parvint jufqu'à une extrême vicilleffe

fans chagrin & fans maladie; & il eut le bonheur de mourir fans avoir vu troubler un feul jour la paix & l'union des deux époux. (Par M. Imbert.)

Explication de la Charade, de l'Enigme & du Logogryphe du Mercure précédent. LE mot de la Charade eft Cornemufe; celui de l'Enigme eft Crédit ; celui du Logogryphe eft Bélier, où fe trouvent Bélier, figne du Zodiaque, Bélier, mouton, Belier, inftrument de guerre, Élie, Prophète.

CHARADE.

AIR de Marlbouroug.

CET air, qui par-tout traîne,

Ε

Miron ton, ton, ton, mirontaine;
En G, Ré, Sol ramène

Dix-huit fois mon premier.
Un inftrument guerrier
Vous donne mon dernier ;
Et mon tout, à la gêne,

ton, mirontaine;

Miron ton, ton, ton,

En claffe, plus qu'en plaine,

Tient le

pauvre Écolier.

(Par M. le Comte de Rogles.)

ENIG ME.

E fuis fous un feul nom trois différentes choses:
D'abord j'habite dans les bois ;
A mes pieds même quelquefois,
Ami Lecteur, tu te repofes.

Si l'on me voit fous un fecond

rapport

De l'art fouvent trompeur que l'on nomme magie,

Je fais le principal reffort:

Par mon fecours on rappelle à la vie ;

Par mon fecours on commande à la mort. Sous mon troisième aspect je suis très-féduifante ; Chacun me voit dans ce qu'il aine mieux ; Sur un beau fein, dans de beaux yeux, Dans le fvelte contour d'une taille élégante, Dans ce qu'on voit & ne voit pas; De ta Bergère enfin j'exprime les appas.

LOGO GRYPHE.

QUELQUEFOIS très-timide & foible en mon en

fance,.

Ma force ne s'accroît que par la résistance;
Toujours vif en naiffant, toujours ardent, fougueux,
Le plaifir qui me fuit diffipe tous mes feux.
De cet obfcur début qui peint mon caractère,
Veux-tu, mon cher Lecteur, pénétrer le mystère,
Je vais, fous divers traits tour-à-tour m'expofer,

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