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la Nation élit fes Repréfentans, fât au moins raifonnable? Mon respect pour le Peuple anglois ne me permet d'entrer ici dans aucun détail.

III. Ne peut on pas juger de la bonté d'une Conftitution par celle des Loix qui en fout le réfultat? Comment donc eft il poffible que l'admirable Conftitution angloise laisse subfifter une foule de mauvaises loix inconnues & abrogées dans plufieurs États de l'Europe, dont perfonne ne vante la Conftitution? Comment les droits des hommes y font ils ouvertement violés par l'ufage barbare de la preffe, par la loi qui enchaîne l'Artifan à la boutique de fon Maître, au village où une fois il s'eft établi, par les loix oppreffives du commerce, par un régime fifcal auffi contraire à la liberté du Citoyen qu'à la profpérité publique.

IV. La difficulté de former une bonne Conftitution républicaine, ne confifte-t-elle pas à favoir accorder la confervation entière des droits de l'homme avec la sûreté & la tranquillité, à faire enforte que le Citoyen foit libre fans que fa liberté nuife à l'exercice de la force publique : a-t-on réfolu cette difficulté en Angleterre ?

Les grands chemins, toujours infeftés de voleurs, la populace mettant le feu à la Capitale parce que le Parlement a fait une loi raisonnable, &c. ces défordres & tant d'autres ne feroient-ils pas des motifs fuffifans pour admirer un peu moins la Conftitution Britannique ?

V. On répond à ceux qui objectent à cette Conftitution la vénalité dont on accufe le Parlement d'Angleterre, que fi fes Membres fe vendent, c'eft qu'on a befoin de les acheter; cette réponse eft - elle bien péremptoire ? La corruption de la Chambre des Communes, cette divifion publique avouée en quatre ou cinq partis formés non par une différence d'opinions mais par des intérêts particuliers, n'au

roient-elles pas pour caufe première quelques défauts de la Conftitution même, ceux par exemple dont on a parlé dans les deux premières quef

tions?

VI. On répond encore que cette corruption ceffe, ou du moins qu'elle cefferoit fi les droits effentiels de la Nation étoient attaqués. Cela prouve-t-il que la Conftitution foit bonne, ou feulement qu'il feroit poflible qu'elle fût plus mauvaise?

VII. Quand la Conftitution angloife auroit oppofé des barrières fuffifantes à l'extenfion de la prérogative Royale, n'auroit-on aucun autre reproche à lui faire? L'autorité de la populace eft - elle absoJument fans danger: Eft-il bien jufte que le fage & paifible habitant des campagnes de l'Angleterre, gémiffe fous les loix que dicte au Parlement la populace de Londres & de quelques grandes Villes?

VIII. Comment fe fait-il que cette admirable Conftitution foit fi coûteufe, & que l'Angleterre foit un des pays de l'Europe où un plus grand nombre de geus inutiles font nourris aux dépens du Peuple? comment enfin la réforme d'un abus Y eftelle plus impoffible que dans tout autre pays?

IX. Je demande la liberté de ne pas admirer la Chambre héréditaire des Pairs (ingrédient peut-être peu néceffaire dans une Conftitution libre); mais enfin une loi ne peut paffer fans la volonté réunie des deux Chambres & du Roi. Il est évident que c'eft un moyen de préserver des mauvaises loix nouvelles. Mais eft-il bien rigoureufement prouvé qu'il foit impoffible de trouver une Conftitution où les mauvaises loix nouvelles foient auffi peu à craindre, & où l'on puiffe efpérer davantage ou la réforme des mauvaises loix anciennes, ou de bonnes loix ?

X. La Conftitution angloise a vetllé fur la confervation de la liberté politique ; mais la liberté civile y eft elle respectée ? Elle confste à ce que

chacun puiffe faire librement tout ce qui n'eft pas contraire aux droits d'un autre. Le Peuple anglois jouit il de cet avantage? Et s'il n'en jouit pas, est-il dédommagé de ce facrifice de tous les jours, par le droit d'élire une fois tous les fept ans un Représentant qui vote à fon gré pour ou contre les intérêts & la volonté de ceux qui l'ont choifi? Ce facrifice étoit-il indifpenfable? n'eft-il pas plutôt une fuite des vices de la Conftitution?

XI. Je vois bien qu'au moyen de beaucoup d'anarchie, de défordres, de divifions dans les efprits, de féditions dans la populaec, d'inertie & de foibleffe dans l'autorité publique, la Constitution angloife affure aux Citoyens la jouiffance de quelques-uns de leurs droits. Mais eft-il bien prouvé qu'on ne puiffe être libre fans tout cela? Il y avoit auffi, dit-on, beaucoup d'anarchie, de corruption, de tumulte à Rome & dans la Grèce. En réfulte-tque la Conftitution angloife eft admirable? J'en conclurois plutôt que celle de Rome & des Républiques grecques étoit très- défectueule. La machine de Marly poite l'eau au fommet de la montagnes mais comme une machine plus fimple y porteroit plus d'eau avec moins de dépenfe, je n'adinire ni la machine de Marly ni la Conftitution Britar nique.

J'aime la douceur, la juftice, la nobleffe qui règnent dans la jurifprudence criminelle de l'Angleterre, & qui corrigent en partie les défauts de fes loix pénales; j'aime dans le Peuple anglois l'efprit public qui l'anime, fon refpect pour la qualité d'homme, fon attachement inviolable à quelques principes importans dont dépend la confervation des droits de l'humanité. Je crois que ces trois ou quatre opinions auxquelles il tient plus qu'à la vie, & même aux richeffes, font une fauve-garde de fa liberté bien plus fûre que fa Conftitution, dont ces mêmes opinions fervent à rendre les défauts moins

funeftes à la profpérité de la Nation. Celui qui a dit le premier l'opinion eft la reine du monde ne favoit pas à quel point il avoit raison.

LETTRE du Rédacteur du Mercure.

J'AI vu, Monfieur, avec beaucoup de surprise &

de chagrin, une Lettre fignée de moi dans votre Journal, auquel elle n'avoit jamais été deftinée. Comme elle intéreffe la réputation de M. Ponfart & mon propre honneur, j'en dois au Public, à M. Ponfart & à moi-même, le défaveu le plus formel. Voici le fait au commencement de l'hiver dernier

j'éprouvai une violente attaque de goutte. M. Ponfart, qui me fut envoyé par un de mes amis, fut le feul qui parvint à me foulager. J'en eus une autre au mois de Janvier, & dans la crainte qu'on m'avoit inspirée du remède de M. Ponfart, j'en différai l'application. Cependant, après beaucoup d'autres tentatives, le mal augmentant toujours, fans ceffer de voir M. A. L. R., comme mon Médecin & comme mon ami, je recourus à M. Ponfart, & je lui dûs encore mon foulagement. Il parut dans le Mercure, après ma convalefcence, des vers adreffés à M. Ponfart fur ce fujet. M. A. L. R. mit quelque importance à ne pas laiffer croire au Public que je l'euffe abandonné. Il me demanda pour fes amis feulement une Lettre dans laquelle je convînfle de l'attachement que je continuois d'avoir pour lui. Comme cette Lettre devoit être vûe, & que je ne fuis pas encore affez familier avec la langue Françoife pour l'écrire, j'en chargeai un de mes amis, qui lui-même n'étant pas affez inftruit de l'état des chofes, me comprit mai; j'avoue auffi que je la fignai légèrement fans l'avoir bien entendue, & j'ai été fort étonné d'abord de la voir dans le Mercure fans mon aveu, & d'y

lire que je n'avois pas fait les remèdes de M. Ponfart. Tout cela n'eft qu'un mal-entendu; j'espère qu'on voudra bien le pardonner à un étranger qui n'a pas bien fenti la force des termes de la langue Françoife, mais qui fent très-bien les procédés de l'honneur, & qui n'a jamais eu l'intention de nuire à qui que ce foit. Je vous prie, Monfieur, de m'aider à réparer cette faute, en publiant mon défaveu le plutôt poffible. J'ai l'honneur d'être très-parfaitement, Monfieur,

Paris, ce 3 Juin 1783.

Votre très-humble & trèsobéiffant ferviteur, SACCHINI.

ANNONCES ET NOTICES.

TOUCHE

OUCHES Typographiques pour apprendre aux Enfans, par manière de jeu, à connoître les premiers Elémens de leur Langue, de l'invention de Royer, Maître d'Ecriture & de Penfion à Versailles, rue de la Parciffe Notre Dame, chez M. Chambert, père, Orfèvre.

Ces Touches, au nombre de 212, font d'ivoire & pofées dans une boëte portative, format in - 4o. & fi légère qu'on peut la tenir à la main & la porter à la promenade. Elles font défignées par les lettres ordinaires, les lettres doubles, accens & ponctuations, & arrangées par ordre alphabétique. Cet Ouvrage eft d'une très-grande utilité pour des enfans qui, ne fe rebutant que trop fouvent à étudier un livre, cherchent avec avidité tout ce qui peut les amufer. Cet Ouvrage eft auffi à l'ufage des Langues étrangères. La manière de fe fervir de ces Touches eft très-aifée; cependant l'Auteur en donnera une explication manuscrite aux Perfonnes qui s'adrefferous

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