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SUITE des Obfervations néceffaires, fur le Mémoire de M. Necker.

On

y examine les propofitions du Bureau de la Ville de Paris, relativement aux Biens Eccléfiaftiques & Domaniaux; on y prouve la néceffité d'une feule espèce d'affignats, & lon continue à combattre les objections qu'on oppofe à cette mefure, &c.

LES

20 Mars 1790.

ES propofitions du bureau de la ville de Paris, relativement à la vente des biens eccléfiaftiques & domaniaux, ont été fuivies d'un décret de l'affemblée nationale, par lequel une partie de ces propositions a été acceptée, en les étendant à toutes les autres municipalités du royaume. L'autre partie eft restée en fufpens,

L'intention du bureau de la municipalité de Paris eft d'acheter une partie de ces biens, jufqu'à concurrence de deux cents millions. Le choix & l'estimation en feront faits par des commiffaires de l'affemblée nationale & de la municipalité, Celle-ci dépofera dans la caiffe de l'extraordinaite, quinze promeffes de dix millions chacune, payables d'année en année. Elle paiera l'intérêt de ces quinze promeffes, fur le pied de quatre pour cent Fan. Mais cet intérêt fera converti en une loterie

L

de cinq cents mille livres par mois, en faveur des porteurs des coupures qui feront faites des quinze obligations, en billets de 1000, 600, 400, 300 & 200 liv.; & ces billets prendront la place de ceux de la caiffe d'efcompte. Ils feront, comme ceux-ci, l'office de papier-monnoie. La municipalité revendra, le plus promptement poffible, les biens qui lui auront été aliénés, & rendra compte de leur produit, de clerc à maître. Elle retiendra le quart du produit defdits biens, pardelà cent cinquante millions. S'ils en produifent deux cents, la ville profitera de douze millions & demi; & ce fera le prix, foit des frais de cette opération, foit du crédit qu'elle aura prêté à la nation, attendu que les coupures de fes obligations circuleront comme effets municipaux.

Telle eft la fubftance du plan du bureau de la ville. Le projet du décret propofé par M. le comte de la Blache, pour l'exécution de ce plan, a été adopté, à l'exception du préambule, par lequel l'affemblée auroit approuvé les bases du plan, & fous la réserve que l'aliénation définitive des biens feta faite aux claufes & conditions qui feront définitivement arrêtées.

eb Ce changement laiffe en fufpens toute la partie du plan qui concerne les arrangemens de finance. L'affemblée n'a définitivement décrété que l'intervention des municipalités dans la difpofition des biens eccléfiaftiques & domaniaux, fpécialement deftinés à l'hypothèque des affignats qui feront donnés fur ces biens, foit aux créanciers de l'Etat, foit à ceux de la caiffe d'efcompte. M

Les arrangemens de finance qui restent à décréter, font de la plus grande importance; d'abord i

pour le fuccès de la réfolution de l'affemblée qui tranfporte fur les biens eccléfiaftiques & dómaniaux, une partie des créances de l'Etat ; enfuite, pour la commune de Paris, à l'égard de laquelle le plan du bureau de la ville n'eft qu'un projet non encore propofé à fon approbation.

Il est donc encore temps de mettre fous les yeux de l'Affemblée nationale, les remarques que le plan du bureau de la ville fait naître dans fon rapport avec la chofe publique, & avec les difpofitions que les circonftances actuelles follicitent

vivement.

Peut-être que fi ce plan eût été précédé d'une difcuffion fur les affignats, confidérés dans leur rapport immédiat avec la circulation, & avec les befoins de l'Etat; peut-être que fi l'affemblée' eût examiné, avant tout, jufqu'à quelle fomme elle devoit les porter, de quelle manière le public en feroit ufage; quelles précautions, ou quelles formes affureroient le mieux le but de ces affignats; peut-être, dis-je, que la vente des biens eccléfiaftiques & domaniaux eût été fimplement confiée" aux administrations des départemens. Les ménagemens que cette vente exige, felon les lieux, les temps, & la nature de chaque objet, font du reffort de l'économie politique; &, fi je ne me trompe, les affemblées adminiftratives font plus fpécialement chargées que toute autre corporation, de tout ce qui concerne la profpérité publique. Peut-être même cût-on confié cette opération, qui exige beaucoup de foins éclairés & patriotiques, à des commiffions locales, & compofées de commiffaires permanens, mais fubordonnés à la plus férieuse inspection; puifque fon

fuccès dépend, en partie, d'une fuite de vues qui s'accordent difficilement avec l'amovibilité des adminiftrateurs. Peut-être, enfin, que fi l'affemblée eut traité les queftions générales avant de s'occuper d'aucun plan d'exécution, elle auroit mis moins d'importance à deux confidérations qui femblent avoir déterminé fon décret.

On a cru que la vente des biens du clergé ne pouvoit être affurée qu'en fe hâtant de les démembrer en faveur des municipalités ; & l'on s'eft confirmé dans cette idée, en obfervant la réfiftance & le mécontentement de plufieurs députés, qui tiennent à la poffeffion de ces biens. Mais outre que cette manière de juger eft fufceptible de grandes méprifes, & de conduire à des réfolutions qui peuvent donner des regrets, qui ne voit que la sûreté de cette vente eft foute entière dans l'émiffion des affignats? C'eft fous ce point de vue particulier, la précaution la plus sûre & la plus preffante; puifqu'en couvrant, pour ainfi dire, le royaume, de créanciers porteurs de titres, fpécialement hypothéqués fur ces biens, on met la néceffité de les vendre fous la plus puiffante des fauve-gardes, celle de l'intérêt général.

Il en eft de même de l'autre confidération. On s'eft imaginé que les acquéreurs fe croiroient plus en sûreté, s'ils tenoient leur acquifition des municipalités, que s'ils fuccédoient directement aux titulaires actuels des biens dont la vente fera réfolue. Mais, pourquoi les municipalités auroient-elles plus de force pour maintenir la tranquille poffeffion des biens qu'elles revendroient elles-mêmes, que celle des biens qui feroient

achetés directement de la nation, fous l'autorité de la loi ? Cette différence répugne à toutes les idées d'ordre, de sûreté, & de bonne police, qui doivent réfulter de la conftitution du royaume; c'eft chercher des doutes où il ne doit point y en avoir; c'est careffer des préjugés qu'il est important de détruire. S'il y a de mauvaises intentions à redouter elles fe manifefteront dans un cas comme dans l'autre. On n'en fera pas garanti par un peu plus, ou un peu moins de formalités; car les municipalités ne pouvant être que des propriétaires occafionnels & inftantanés, elles ne fauroient tirer de cet arrangement, aucune force de protection, qu'elles n'aient pas au même degré, dans leur qualité d'officiers chargés, par la loi, de maintenir le bon ordre. Ainfi, cette confidération ne fauroit avoir aucun poids. Les acquéreurs ne fe détermineront que par l'accord de la force publique avec l'intérêt général.

Il eft donc important de faire inceffamment l'émiffion des affignats, & de la faire dans la plus grande quantité poffible. Il est important qu'ils circulent comme monnoie. Leur ufage général, rétablira par-tout l'aifance; & rendant à la circulation des valeurs qui, jufqu'ici font arrêtées par l'immobilité du tréfor public, il multipliera les acquéreurs des propriétés qui doivent fervir à l'extinction de ces affignats.

La fûreté de cette reffource, dont j'ai démontré la néceffité fous fes autres rapports avec le commerce, les manufactures & l'agriculture, n'exige point que ces propriétés foyent avant tout aliénées aux municipalités.

M. de la Blache a dit que les billets que la

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