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Spectacles comme très-propres à fournir une ocfion favorable, & me pria de lui procurer une place à l'opéra. Ayant été moi-même invité pour une représentation d'Orphée, j'obtins pour lui une place vacante dans la même loge. «

Le comte rend grace au ciel de la non-réuffite de ce projet, qui étoit d'ailleurs affez plaufible. Il dit en avoir pris occafion de faire observer à Ankarfiram combien la providence veilloir pour la confervation du roi; & perfuadé de la vérité de cette réflexion, le comte étoit lui-même devenu indifférent fur les entreprises d'Ankarftram, qu'il regardoit dès ce moment comme impraticables. Quant à leur correfpondance pendant la diete, le comte déclaré qu'elle ne regardoit que les affaires du royaume en général; qu'il recommandoit à Ankarftram d'être ferme dans les principes de fon ordre, en lui repréfentant la gloire dont lui & fes confreres alloient fe couvrir par une telle conduite. Après la fin de la diete, Ankarfram & les deux comtes s'étoient fouvent trouvés ensemble, mais plus pour paffer le tems que pour parler politique. Il convient pourtant de s'être apperçu de tems-en-tems qu'Ankarftram n'avoit pas encore perdu de vue fon ancien projet, il s'étoit même expliqué que, toute réflexion faire, les mafcarades étoient les plus propres pour fournir des occafions favorables, d'autant plus qu'on étoit toujours fûr d'y trouver le roi. Le jour défaftrueux marqué par l'exécution du crime, le comte Horn avoit, pour la premiere fois, entendu parler d'un plan de révolution, qui auroit pour objet d'établir une régence compolée de fé

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mateurs, pendant la minorité du prince royal, après qu'on fe feroit affuré des perfonnes de S. A. R, le duc de Sudermanie & de quelques feigneurs attachés au roi, jufqu'à ce que le calme fût retabli. Ces particularités lui avoient été commuquées par le comte Ribbing, qui dit les avoir appris du baron de Pechlin; mais pour fa part, le comte Horn prend le ciel à témoin qu'il n'a. voit aucune connoiffance d'un complot pareil, & qu'il n'avoit jamais foupçonné d'autres complices qu'Ankarftroam & le comte de Ribbing. Quant aux paroles de ce dernier, que l'affaire ne Jouffroit plus le moindre délai, & que nous courions rifque d'être découverts, (ajoute le comte Horn) c'est à lui-même à les expliquer. Que la bonté célefte lui fasse éprouver les mêmes remords falutaires dont mon cœur eft pénétré! Son repentir fera plus pur que le mien, qui eft mêlé des regrets que doit fentir un époux & un pere.-Enfans, qui ne connoiffez point encore votre malheur, puiffent une fois vos larmes & vos vertus effacer le crime de votre pere! «..............

Interrogé s'il n'avoit point fait confidence à fon propre pere, le général comte de Horn, de quelque chofe qui pût avoir rapport à cette affaire, le jeune, comte a répondu que non ; je ne peux pas cacher, a-t-il dit, que mon pere a eu des fujets de mécontentemens, & que c'est le dépit que j'ai reffenti de fa difgrace qui m'a fait quitter le grand monde. Mais les principes qu'il a tâché de m'infpirer depuis la plus tendre enfance, font fi contraires à une entreprise de la nature de eelle dans laquelle j'ai eu le malheur

de prendre part, que je n'aurois jamais eu le front de me préfenter devant lui, s'il avoit pu me croire capable d'une lâche vengeance. Et quoique j'aie pu m'oublier, j'ose me vanter d'être revenu de mon erreur, & d'être animé en ce moment de ce respect pour les préceptes de la religion, de cette foumiffion au fouverain, & de cet amour pour la patrie, dont mon pere m'a toujours donné l'exemple, & c'eft dans ces fen. timens que j'irai au-devant de la mort. «

Voici des lumieres fuffifantes fur l'attentat com. mis fur la perfonne du roi. On voit que, comme nous l'avons déja affuré, le projet en étoit conçu entre trois ou quatre jeunes mécontens, & exécuté par la feule force du fanatifme. Mais indépendamment de celui-ci, exiftoit-il un autre plan de révolution, dont le baron de Pechlin étoit le chef? ou ce politique habile avoit-il feint des fecrets qu'il n'avoit pas pour mieux pénétrer ceux des autres ? Les juges n'ont pas prononcé, & cela par refpect pour les loix du pays, qui exigent des preuves complettes, & n'autorifent pas des moyens violens pour arracher l'aveu de l'accufé. On pourra donc feulement former des conjectures d'après la vraîsemblance, & pour cela il faudroit avoir tous les actes devant les yeux, ce que nous n'avons pas encore. Si, par la fuite, il nous parvient là-deffus des éclairciffemens, nous ne manquerons pas d'en faire part à. nos lecteurs.

POÉSIES FUGITIVES.

LA VENGEANCE D'APOLLON.

POUR

OUR une faute affez légere,

Chez les mortels encor je me vois exilé!....
Eh bien! j'en fuis tout confolé.

Eft-ce un fi grand malheur que d'habiter le terre?
Je me fouviens qu'au féjour du tonnerre
J'ai fouvent regretté les plaifirs d'ici-bas....

Mais en quels lieux porter mes pas?...
Gardons-nous d'approcher des eaux de Caftalie;
Que les mufes, fans moi, gouvernent l'Hélicon;
Et la profe & les vers, tout à présent m'ennuie.
Il faut pourtant choifir.... Loin du facré vallon,
Si j'allois vifiter les champs de l'Arcadie!
On dit que le bonheur y fixe fon féjour;
Là, voltigeant de conquête en conquête,
(Car je m'attends que le fripon d'Amour
Viendra fe mêler de la fète)

Je pourrai plaire, aimer, & changer chaque jour.

1

Ainfi le dieu que Délos a vu naître
S'applaudiffoit déja de fon bonheur.
A fes dépens il va bientôt connoître
Que trop fouvent l'espoir eft fuivi de l'erreur,
On faura donc que cette épidémie
Qui parmi nous a fait tant de progrès,
Le bel-efprit enfin, ayoit en Arcadie
Propagé fon venin jufqu'au fond des forêts,

1

Ce n'étoit plus qu'affêterie,

Style guindé, mots précieux;

Adieu franchife & bonhommie;

Ce poifon corrupteur, dans ces tems malheureux,
Avoit, fans nul efpoir, gâté la bergerie.
Chaque jour éclairoit quelques travers nouveaux.
Un berger fat & parfumé d'effence,
Avoit le pas fur fes humbles rivaux ;
Et pour comble d'extravagance,
La bergere exigeoit qu'il fît des madrigaux.

Mon lecteur aifément devine

Qu'en arrivant Apollon fut furpris.
Pour des couplets, dit-il, dans ce maudit pays,
A droite, à gauche on me lutine;

Et tandis que, pour vivre en paix,

Je fuis neuf beaux efprits femelles,

Je retrouve en ces lieux mille autres Péronnelles
Pour qui fans ceffe il faut me mettre en fraix,
Non par le Styx.... Le dieu n'en dit pas davantage,
Et ne penfoit qu'à déloger,

Lorfqu'au moment de fe mettre en voyage
Il trouva par hafard moyen de fe venger.
Un petit maître d'Arcadie

Sans pitié, de fes vers, ennuyoit Apollon.
Un jour il l'apperçur affis dans un vallon;
Je vous trouve, dit-il, mon ame en eft ravie.
Je veux vous régaler.

APOLLON.

Oh difpenfez-moi..........

LE BERGER.

Vons écouterez ma chanson.

APOLLO. N...

Je connois vos talens, & je la crois jo1ie;

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Noni

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