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la nourriture des hommes qu'à celle des animaux. Il est devenu un objet important de commerce dans plufieurs départemens de la France. C'eft avec lui qu'on engraiffe les chapons de Breffe, ff recherchés par les amateurs de bonne chere. Les pigeons de voliere, qu'on en nourrit, ont une viande blanche, tendre, & leur graiffe eft ferme & favoureufe. On prétend qu'il donne aux cochons un lard confiftant, & que les fameux cochons de Naples, qui pefent jufqu'à cinq cents livres, lui doivent leur embonpoint & leur réputation.

Le maïs convient aux tempéramens robuftes; aux gens de la campagne, aux matelots, aux perfonnes, en un inot, qui s'exercent à de rudes travaux. Sa farine eft très-blanche il paroît, d'après les expériences nombreuses, auxquelles l'a foumife M. Parmentier, qu'elle n'eft fufceptible, par elle-même & fans mélange d'autres farineux, que de fe convertir en un pain lourd, groffier, indigefte; mais que foumife à la fermentation panaire avec un mélange de farine de froment dans la proportion de moitié, ou bien avec parties égales de farine de froment & de pâte de pomme de terre, elle donne un pain affez agréa ble à l'oeil & au goût, qui, fans être léger, eft parfaitement levé, & beaucoup meilleur que celui dont s'alimentent la plupart des vignerons.

Ce n'eft pas feulement dans l'état de pain & de galette qu'on mange le maïs on le prépare encore de diverfes autres manieres. On en fait coinmimément des bouillies très nourriffantes, & qu'on rend plus ou moins agréables, felon les

divers apprêts qu'on leur donne. Les Indiens en mangent les grains en vert, comme les petits pois, ou grillés, ou cuits dans l'eau. On a même trouvé le moyen d'en faire un mets délicat : on cueille les fruits très-jeunes, lorfqu'ils ne font que commencer à groffir; on les fend en deux, & on les fait frire avec de la pâte comme les artichauts. On les confit auffi à la maniere des cornichons.

On lit dans François Hernandés, que le maïs eft pour les Indiens un aliment fort fain qu'ils digerent parfaitement; qu'on l'emploie au Mexique pour les maladies aiguës, auffi fréquemment que l'orge eft ufité parmi nous, foit dans les bouillons, dans les tifannes, foit fous une forme un peu plus confiftante.

Le mais n'eft employé que très-rarement en Europe à des ufages médicinaux. Néanmoins on en peut fubftituer la farine à celle d'orge. Elle'convient particuliérement dans les cataplafmes émolliens & fuppuratifs; car en bouchant les pores par fa vifcofité, elle eft très-propre à amener à fuppuration les tumeurs inflammatoires. J. Rai

dit que le fuc des feuilles vertes eft rafraichif fant, & s'applique utilement sur les éréfipeles. Les femences paffent chez plufieurs auteurs, pour être légérement apéritives, diurétiques, propre à nettoyer les voies urinaires : elles paffent même pour avoir beaucoup contribué à garantir de la lithiafie, les peuples de l'Amérique avant l'établiffement des Européens dans cette partie du monde. Mais ces dernieres propriétés paroiffent au moins fort douteuses.

La tige du maïs a une faveur fucrée; on en peut faire un fyrop très-doux, qui a le véritable goût du fucre. Les Américains favent former avec les graines de maïs, pilées & macérées dans de l'eau, une liqueur vineufe, qui enivre, & dont on peut extraire un efprit ardent.

29. MANCENILLIER VÉNÉNEUX. (Hippomane mancinella. L.) Arbre très-vénéneux, qui fe plaît dans les lieux fablonneux. Il croît ordinairement fur les bords de la mer dans les Antilles, & fur les côtes du continent qui avoifinent ces ifles. Quelquefois, pendant la floraison, il eft prefque dénué de feuilles. Les fruits du mancenillier fe détachent spontanément lors de leur maturité. Leur abondance eft telle qu'alors de fol, que recouvre l'arbre qui les a produits, en est toujours jonché. Ces amas de fruits, laiffés à euxmêmes, ne fe putréfient pas, mais leur écorce fe confume, & leur chair devient feche, brune, fpongieufe, crevafsée.

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Le fuc laiteux que rendent toutes les parties du mancenillier, eft très-blanc, très-abondant, très cauftique, & conféquemment très-vénéneux. Une goutte de ce fuc, reçue fur le dos de la main, y produit bientôt une ampoule pleine de férofité, comme feroit un charbon ardent; co qui peut donner une idée des ravages qu'il cauLeroit, fi on en prenoit à l'intérieur. Les Indiens trempent dedans les bouts de leurs fleches qu'ils veulent empoifonner pour s'en fervir dans les combats, & ces fleches confervent très-longtems leur qualité vénéneufe.

Le mancenillier fournit un bois dur, com

pacte, de très-longue darée, d'un beau grain, prenant aifément le poli. Ce bois eft d'un gris cendré, veiné de brun, avec des nuances de jaune. On l'emploie en Amérique affez fréquemment à des boiferies & autres ufages domeftiques. Mais comme fon exploitation eft difficile par le danger auquel s'expofent ceux qui abatteur les arbres; & que d'ailleurs les ouvriers qui le scient & le mettent en œuvre, font fujets à être incommodés par la pouffiere qui s'en dégage, on n'en tire pas tout le parti qu'on en tireroit, fi l'on n'avoit pas à redouter ces inconvéniens. Quand on veut abattre un mancenillier, on commence par environner le pied de l'arbre d'un grand feu de bois fec, afin de priver la base du Honc d'une partie de fon fuc laiteux délétere, & l'on a foin d'éviter la fumée qui s'exhale durant cette opération. Ce n'eft que lorsqu'on juge qu'il s'eft évaporé fuffisamment d'humidité qu'on le permet de fe fervir de la hache; & néanmoins les ouvriers ont la fage précaution d'entourer leurs yeux de gaze, de crainte que des molécules ligneufes, ou des gouttes de liqueur ne s'y introduifent & n'y excitent des inflammations dangereufes. Autrefois les habitans. de la Martinique ont confumé par le feu des forêts entieres de mancenilliers, afin de purger leurs habitations de ce végétal malfaifant.

C'eft dans les huileux, les mucilagineux & les adoucifans qu'il faut chercher des remedes aux mauvais effets du mancenillier. On dit qu'un gobelet d'eau de la mer bu fur le champ & à longs traits, fuffit pour guérir promptement ceux qui

ont eu le malheur d'avaler quelques parcelles du fruit de cet arbre.

M. Nicollon prétend, contre l'affertion de beaucoup de voyageurs, qu'on ne doit pas beaucoup appréhender que les nouveaux débarquès s'incommodent en mangeant des fruits de mancenillier. Ils ne flattent, dit-il, que la vue; il y a peu de fubftance dans chaque fruit; on ne le détache qu'avec peine du noyau; elle eft dabord d'une grande fadeur qui n'engage pas à redoubler; l'irritation fubite, qui, affecte auffi-tôt la langue, les levres, & le palais, en dégoûte pour toujours.

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3. MAGNOLIEN A GRANDES FLEURS. ( Magnolia grandi flora. L.). De tous les arbres, inIroduits dans nos climats, & capables de ré-fifter à la rigueur de nos hivers, au moins dans nos départemens méridionaux, il n'en eft pas d'auffi beaux que celui-ci. L'amplitude de fes fleurs, leur éclat, l'odeur agréable qu'elles exhalent, la finguliere flructure de fes fruits, qui font des cônes purpurins, d'où l'on voit pendre des femences d'une vive écarlate, fes feuilles grandes & toujours vertes, tout cela le rend infiniment intéreffant, & en fait le plus bel ornement des forêts antiques de l'Amérique Seprentrionale. Auffi les curieux & les amateurs de culture le recherchent-ils beaucoup. Leur induftrie d'ailleurs les flatte qu'ils parviendront à le naturalifer complettement en Europe, où leur imagination le leur peint d'avance s'élevant à plus de quatre vingt pieds de hauteur, comme dans les lieux où les mains de la nature l'ont

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