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encore un autre emploi de la terre cuite, qu'il eft avantageux de rappeller dans cet inflant où les colonnes font multipliées à l'infini, même pour l'ornement feul des maifons. Les colonnes de ces cafernes font formées d'un maffif de briques cuites recouvert de ftuc ou de cette espece de ciment dont on fabriquoit les pierres factices. Les tailloirs des chapiteaux faifoient à leur égard le même effet, que les corniches dont nous venons de parler, à l'égard des murs; c'eft-à-dire, qu'ils en éloignoient la pluie & les égoûts.

La terre cuite a fervi auffi aux Romains à confolider des terreins nouveaux pour la conftruction des chemins. Mais ce n'étoit pas feulement fous la forme de briques. J'ai à rappeller ici une maniere de fonder avec des morceaux de terre cuite, qui eft des plus extraordinaires, & qui a été imaginée fans doute pour fuppléer aux cailloux dans un fol argilleux. On trouve en fouillant à une certaine profondeur, à Marfal en Lorraine & aux environs, ce que l'on appelle communément briquetage. C'eft un amas de morceaux de terre cuite rougeâtre, semblables par la matiere aux briques cuites. Ils n'ont pas été moulés; mais on leur a donné, en les pêtriffant avec les mains, toutes fortes de formes bizarres ; les uns font des cylindres, d'autres des cônes. irréguliers, quelques-uns approchent des parallelipipedes. On en voit plufieurs où l'empreinte de la main eft parfaitement marquée; on a obs fervé auffi fur d'autres les empreintes d'un mor. ceau de bois qui a servi à battre & à preffer la serre. Les plus gros morceaux de ce briquetage ons

dix à douze ponces de circonférence; les autres d'une moindre groffeur, ont toutes fortes de dimenfion, & quelques-uns font très-petits. Tous ces morceaux jettés confusément fur les marais, fans mortier ni chaux, mais avec la cendre & les autres débris qui fe trouvent dans les fours àbriques, forment un mafif très-folide fur lequel les Romains avoient fondé Marfal. M. Darteze a décrit avec foin cette ancienne & fingtliere confuction.

Je pourrois encore faire mention des basreliefs en terre cuite, que les Romains encaftroient dans les murs de leurs maifons. Ces ofBemens ne coûtoient que les dépenses premieres du deffin & du moule. Ils avoient l'avantage de pouvoir être répétés un grand nombre de fois, & de plus celui d'être affez durs pour réfifter au choc des corps étrangers; car on en trouve qui étincellent fous le briquet. Le cardinal Alexandre Albani en avoit raffemblé plu fieurs dans fa helle Villa, & Winkelman en a publié quelques-unes dans fes monumenti antichi, inediti. Le luxe de notre tems, qui veut étaler tout l'éclat des richeffes, en économifant fur le prix des matieres, & qui a fubftitué les papiers peints aux tapifferies précieufes fabriquées autrefois aux Gobelins, en Flandre & à Aubuffon, devroit employer ces bas-reliefs de terre cuite, auxquels ils donneroient ensuite avec l'or & les couleurs l'éclat des marbres les plus précieux.

Avant que de finir ces recherches fur les divers emplois de la terre cuite qu'il feroit avansageux de renouveller, je dois faire une remar

que importante & relative aux noms des légions ou des ouvriers infcrits fur les briques crues & cuites. On fe plaint avec raifon du peu de fo. lidité de nos briques cuites, qui offrent encore ce défaut d'une maniere plus fenfible, lorfqu'on les compare avec les briques tirées des conftruc tions romaines. On fe plaint auffi du mêlange des particules calcaires ou pyriteules, qui les font entrer dans une demi-fufion. Ce défaut de folidité dépend en partie du degré de cuiffon qui a été trop foible, & qu'on ne pouvoit augmenter fans un furcroît de dépenfes. Mais on peut l'at tribuer en général au mêlange des parties hétérogenes, que les ouvriers craignent de voir réduire en verre par un feu plus violent. Le meilleur moyen de remédier au défaut de nos briques cuites, feroit donc d'apporter un grand foin au choix des matieres qui doivent les compofer. On fait que les artiftes, à quelque claffe qu'ils appartiennent, font jaloux de la portion de gloire ou plutôt de la célébrité, qui peut être attachée à la perfection de leur travail. En obligeant ceux qui font des tuiles à y imprimer leurs noms, ou celui de leurs fabriques, comme le pratiquoient les Romains, on leur ôteroit la reffource de la pareffe & de l'infidélité, je veux dire, l'obscurité qui les fouftrait aux loix & à l'opinion publique. Ce moyen, auquel les Romains ont dû peut-être une partie de la folidité des matériaux de leurs conftructions, ne paroîtra dépourvu d'efficacité, qu'à ceux qui s'obftineroient à refuter aux dernieres claffes du peuple un degré d'amour-propre ou de fenfibilité, dont plufieurs traits de

vertu & de délicateffe même, nous atteftent cependant l'exiftence.

C'est ainsi que les Romains ont trouvé dans les pierres factices, dans le charbon, l'huile, & l'argile cuite fous toutes les formes, des matériaux éternels & peu coûteux, dont je propose l'emploi à nos architectes. Quant aux moyens po litiques détaillés dans le commencement de ce mémoire, & qui facilitoient aux Romains la conftruction des monumens les plus vaftes, je fuis forcé de convenir qu'ils ne fouloient pas la nation, & ne la furchargeoient pas de dépenses & d'impofitions onéreufes; mais je crois qu'un véritable ami du bien public feroit coupable de leur donner la préférence fur notre maniere de bauir, quoique celle-ci foit auffi longue que difpendicule. L'emploi des criminels, & la noble Emulation des grands & des riches, dirigée par le gouvernement vers les conftructions utiles, font

les feuls de ces moyens que je défire de voir

employer.

(Obfervations fur la physique, fur l'histoires
naturelle & les arts.)

1

ENCYCLOPÉDIE METHODIQUE. Botanique. Iu-4to.; par M. le chevalier de LA MARCK, ancien officier au régiment de Beaujolois, de l'académie royale des fciences Tones I, II & III. A Paris, chez Panckoucke; à Liege, chez Plomieux; & à Nancy, chez Matthieu. 1783 à 1792.

TANDIS que nous jouiffons de la belle fai

fon, entretenons-nous des objets qui appartienment à l'empire de Flore.

&

La fcience qui a pour objet la connoiffance des végétaux, & à laquelle on a donné particuliérement le nom de Botanique, eft, fans contredit, de toutes les parties qu'embraffe l'étude l'hiftoire-naturelle, celle qui préfente en mêmie-tems & les objets d'utilité les plus nombreux & les agrémens les plus variés; les alimens fains & de tout genre que les plantes offrent à l'homme pour les befoins les plus effentiels; les reffources innombrables qu'elles fourniffent à la médecine dans le traitement des maladies; les tributs multipliés dont elles enrichiffent prefque tous les arts; enfin, leurs variétés, jouiffons, foit à la campagne, foit dans nos jardins, fous mille afpects divers. Tout, en un mot, concourt à affurer une prééminence marquée à l'étude de cette branche étendue des connoiffances humaines, & à en faire fentir les attraiss inépuisables.

dont nous

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