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Le Mémorial catholique renfermera des bulletins religieux, politiques et littéraires, qui présenteront Panalyse des événements les plus intéressants sous ce triple rapport, et une revue des journaux, qui offrira chaque mois la statistique de l'opinion.

Enfin, il est un objet d'une importance extrême, et sur lequel tous les journaux se taisent. Chacun sait qu'au milieu de la société publique se sont formées une multitude de sociétés secrètes, qui couvrent le globe entier, et préparent avec activité une dissolution universelle. Ces puissances occultes maîtrisent le monde, et l'on dirait, au silence qu'on observe à leur égard, qu'elles ne sont pour rien dans le mouvement qui l'entraîne. Les rédacteurs du Mémorial catholique rendront compte des ouvrages les plus remarquables qui ont été publiés sur ces sociétés, et, en s'en tenant aux faits mêmes avoués par leurs apologistes, ils espèrent fixer l'opinion de tous les honnêtes gens sur ces mystères d'iniquité, en détourner les imprudents qui s'y jettent sans les connoître, et faire pénétrer peut-être quelques rayons de lumière au fond de ces antres, au-dessous desquels il n'y a que les enfers.

Tel sera le Mémorial catholique en suivant invariablement la ligne qu'il s'est tracée, il croit pouvoir espérer que tous les ennemis de Dieu et de la société l'honoreront de leur

haine, et que tous les gens de bien l'accompagneront de leurs suffrages.

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J'ai lu avec un vif intérêt l'introduction de l'écrit périodi- ` que que vous vous proposez de publier, et dont l'importance me paroît dévoir être universellement sentie. Il est temps, et grand temps, qu'on s'occupe, avec plus d'activité qu'on ne l'a fait jusqu'ici, de combattre toutes les fausses doctrines de notre siècle, si vain de ses lumières, et qui devroit être si honteux de ses ténèbres, puisqu'il en est réduit à chercher encore les plus indispensables notions et les idées premières en toutes choses, en religion, en morale, en politique. Ses funestes erreurs, combinées avec l'orgueil, menacent de renverser tout ce qui reste encore debout dans la société; et, en considérant l'effet qu'elles produisent chaque jour sur un trop grand nombre d'esprits, je ne sais si elles ne finiroient pas même par vicier l'intelligence humaine dans son principe: car tout ce qu'il y a de vérité, d'ordre et de raison dans le monde a sa racine dans le christianisme; et le christianisme anéanti, s'il pouvoit l'être,

il ne resteroit que la nuit et le chaos. Tous les gens de bien ne sauroient donc qu'applaudir à votre entreprise, et former des vœux pour qu'elle obtienne un succès qui seroit le triomphe de la religion et de la société. Vous rencontrerez, sans doute, des obstacles; mais qu'ils ne vous découragent point: aucun bien ne se fait sans peine, et c'est déjà un bien réel que de tenter seulement d'arrêter le progrès du mal.

Recevez, Monsieur, l'assurance de la considération très distinguée avec laquelle j'ai l'honneur d'être, etc.

La Chenaye, le 31 décembre 1823.

L'abbé F. de LA MENNAIS.

DE L'AUTORITÉ SPIRITUELLE

DANS SES RAPPORTS AVEC L'ORDRE POLITIQUE.

L'Europe, en proie à une discorde universelle, est avertie qu'elle est sous l'empire d'une grande erreur, et semble appeler par ses gémissements la vérité méconnue qui peut la délivrer. Si la société doit périr, cette vérité ne lui en sera pas moins manifestée; car, sous la haute justice de la Providence, les nations ne sont jamais punies de mort pour n'avoir pu connoitre l'ordre nécessaire, mais pour s'être révoltées contre sa lumière; et si la société doit être vivifiée de nouveau, c'est par l'excès même du désordre qu'elle sera ramenée à la connoisance de l'ordre éternel dont elle s'est écartée ; et dès lors les convulsions qui la déchirent sont comme l'enfantement douloureux de la vérité qui la sauvera.

Aussi, lorsque l'on considère attentivement l'état actuel de la société, tout porte à croire qu'une grande vérité, dont on sent partout l'absence, va reparoître partout. Après l'ébranlement universel qui a mis à nu les fondements du bien et du

mal, les gouvernements doivent comprendre le véritable principe de la révolution, et par conséquent aussi le véritable principe de restauration. Ils ne peuvent ignorer que l'anarchie n'a envahi la société politique que parcequ'au seizième siècle. on avoit établi l'anarchie en principe dans la société religieuse, et qu'ainsi l'obéissance ne peut renaître dans l'ordre politique qu'autant qu'elle renaîtra dans l'ordre religieux, par la soumission des esprits à l'autorité spirituelle. Cette vérité, d'où dépend le salut du monde, peut être encore obscurcie aux yeux de plusieurs gouvernements, même catholiques, par d'anciennes préventions: plusieurs gouvernements protestants, qui se l'avouent en secret, n'osent pas encore la proclamer, par la crainte des préjugés puissants qui les environnent: mais enfin elle résulte si clairement de l'état actuel du monde; elle se lève, pour ainsi dire, de toutes parts, sur les débris de l'ordre social, avec un éclat si frappant, que, si quelques peuples, s'obstinant à marcher à la mort, refusent de la reconnoître, ce n'est pas la lumière qui leur manquera, c'est la volonté.

En effet, la politique européenne a déjà commencé par établir un principe dont cette vérité n'est que la conséquence manifeste. On a reconnu, en fondant la sainte-alliance, qu'on ne pouvoit combattre la révolution sans s'appuyer sur le christianisme. Or, en appelant le christianisme au secours de la société mourante, a-t-on pú croire qu'il la protégeroit bien efficacement, si chaque esprit, abandonné à lui-même, se créoit une religion quelconque au gré de ses caprices? a-t-on pu vouloir que le christianisme ne devînt, suivant les dispositions de chaque homme, qu'une vague opinion ou un mysticisme fanatique ? a-t-on voulu établir l'indépendance, la souveraineté de chaque raison individuelle ? Assurément, ce ne seroit point, là combattre la révolution; mais au contraire en sanctionner le principe; ce seroit re

prendre la route des abîmes. Mais si le christianisme ne doit point être soumis aux opinions de chaque individu, il est nécessaire qu'il soit enseigné par voie d'autorité. Sera-ce par l'autorité politique? a-t-elle droit de commander aux esprits? la foi étoit-elle de son domaine ? quel gouvernement osera se déclarer infaillible? faudra-t-il assembler des congrès, où Ìes ministres de chaque puissance, devenus tout-a-coup les plenipotentiaires des croyances publiques, stipuleront des articles de foi et des traités de commerce, et tracerout`en même temps la limite des opinions et celle des territoires ? Non, jamais cette prétention absurde n'a pu se présenter à la pensée des augustes chefs de la politique européenne ; ils savent qu'il n'est pas au pouvoir des hommes, tous également faillibles, de créer cette infaillible autorité qui a droit à la soumission des esprits. Mais si le christianisme, par qui seul la société peut revivre, ne doit ni être livré en proie aux opinions individuelles, qui l'auroient bientôt détruit en le déchirant, ni être déterminé par le pouvoir politique, qui est nul pour cet objet, que reste-t-il à faire, sinon à tendre les bras vers cette autorité spirituelle qui a commencé avec le christianisme même, et sans laquelle la société religieuse est rigoureusement impossible?

Les souverains de l'Europe assistent, depuis un demi-siècle surtout, à une expérience si décisivé à cet égard, qu'il est impossible de concevoir par quelle leçon plus frappante la Providence pourroit instruire les rois et les peuples. D'une part, sous l'empire de l'autorité spirituelle, l'église catholique, non seulement conserve le dépôt de la foi pur de tout alliage philosophique, mais, de plus, proclame et défend partout, avec un succès proportionné à l'influence que les gouvernements lui accordent, les doctrines politiques pour lesquelles les gouvernements combattent. D'autre part, sous les bannières de la révolte contre l'autorité spirituelle, l'enseignement des églises

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