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nelle, sur les troubles excités dans plusieurs départemens du royaume, par les ennemis du bien public, sous prétexte de la religion : - Considérant que le contrat social doit lier, comme il doit également protéger tous les membres de l'état ;-Qu'il importe de définir, sans équivoque, les termes de cet engagement, afin qu'une confusion dans les mots n'en puisse opérer une dans les idées; que le serment, purement civique, est la caution que tout citoyen doit donner de sa fidélité à la loi, et de son attachement à la société, et que la différence des opinions religieuses ne peut être un empêchement de prêter ce serment, puisque la constitution assure à tout citoyen la liberté entière de ses opinions en matière de religion, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre, ou ne porte pas à des actes nuisibles à la sûreté publique; Que le ministre d'un culte, en refusant de reconnaitre l'acte constitutionnel qui l'autorise à professer ses opinions religieuses, sans lui imposer d'autre obligation que le respect pour l'ordre établi par la loi, et pour la sûreté publique, annoncerait, par ce refus-là même, que son intention n'est pas de les respecter;-Qu'en ne voulant pas reconnaître la loi, il abdique volontairement les avantages que cette loi seule peut lui garantir; —Que l'assemblée nationale, pressée de se livrer aux grands objets qui appellent son attention, pour l'affermissement du crédit et du système des finances, s'est vue, avec regret, obligée de tourner ses premiers regards sur des désordres qui tendent à compromettre toutes les parties du service public, en empêchant l'assiette prompte et le recouvrement paisible des contributions; - Qu'en remontant à la source de ces désordres, elle a entendu la voix de tous les citoyens éclairés proclamer l'empire de cette grande vérité, que la religion n'est pour les ennemis de la constitution qu'un prétexte dont ils abusent, et un instrument dont ils osent se servir pour troubler la terre au nom du ciel; Que leurs délits mystérieux échappent aisément aux mesures ordinaires, qui n'ont point de prise sur les cérémonies clandestines, dans lesquelles leurs trames sont enveloppées, et par lesquelles ils exercent sur les consciences un empire invisible; -Qu'il est temps, enfin, de percer ces ténèbres, afin que l'on puisse discerner le citoyen paisible et de bonne foi du prêtre turbulent et machinateur qui regrette les anciens abus, et ne peut pardonner à la révolution de les avoir détruits; Que ces motifs exigent impérieusement que le corps législatif prenne de grandes mesures politiques pour réprimer les factieux qui couvrent leurs complots d'un voile sacré; Que l'efficacité de ces nouvelles mesures dépend, en grande partie, du patriotisme, de la prudence et de la fermeté des corps municipaux et administratifs, et de l'énergie que leur impulsion peut communiquer à toutes les autres autorités constituées ;-Que les administrations de département, surtout, peuvent dans ces circonstances, rendre le plus grand service à la nation, et se couvrir de gloire en s'empressant de répondre à la confiance de l'assemblée nationale, qui se plaira toujours à distinguer leur zèle, mais qui, en même temps, réprimera sévèrement les fonctionnaires publics dont la tiédeur, dans l'exécution de la loi, ressemblerait à une connivence tacite avec les ennemis de la constitution;

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Qu'enfin, c'est surtout aux progrès de la saine raison, et à l'opinion publique bien dirigée, qu'il est réservé d'achever le triomphe de la loi, d'ouvrir les yeux des habitans des campagnes sur la perfidie intéressée de ceux qui veulent leur faire croire que les législateurs constituans ont touché à la religion de leurs pères, et de prévenir, pour l'honneur français, dans ce siècle de lumières, le renouvellement des scènes horribles dont la superstition n'a malheureusement que trop souillé leur histoire, dans les siècles où l'ignorance des peuples était un des ressorts du gouvernement; L'assemblée nationale, ayant décrété préalablement l'urgence, décrète ce qui suit :

Art. 1er. Dans la huitaine, à compter de la publication du présent décret, tous les ecclésiastiques, autres que ceux qui se sont conformés au décret du 27 novembre dernier, seront tenus de se représenter par-devant la municipalité du lieu de leur domicile, d'y prêter le serment civique, dans les termes de l'article 5 du titre II de la constitution, et de signer le procès-verbal qui en sera dressé sans frais.

2. A l'expiration du délai ci-dessus, chaque municipalité fera parvenir au directoire de département, par la voie du district, un tableau des ecclésiastiques domiciliés dans son territoire, en distinguant ceux qui auront prêté le serment civique, et ceux qui l'auront refuse. Ces tableaux serviront a former les listes dont il sera parlé ci-apres.

3. Ceux des ministres du culte catholique qui ont donné l'exemple de la soumission aux lois, et de l'attachement à leur patrie, en prêtant le serment civique, suivant la formule prescrite par le décret du 27 novembre 1790, et qui ne l'ont pas rétracté, sont dispensés de toute formalité nouvelle; ils sont invariablement maintenus dans tous les droits qui leur ont été attribués par les décrets précédens.

4. Quant aux autres ecclésiastiques, aucun d'eux ne pourra désormais toucher, réclamer ni obtenir de pension ou de traitement sur le trésor public, qu'en représentant la preuve de la prestation du serment civique, conformément à l'article 1er ci-dessus. Les trésoriers, receveurs ou payeurs qui auront fait des paiemens contre la teneur du présent décret, seront condamnés à en restituer le montant, et privés de leur état.

5. Il sera composé, tous les ans, une masse des pensions dont les ecclésiastiques auront été privés par leur refus ou leur rétractation du serment. Cette masse sera répartie entre les quatre-vingt-trois départemens, pour être employée par les conseils généraux des communes, soit en travaux de charité pour les indigens valides, soit en secours pour les indigens invalides.

6. Outre la déchéance de tout traitement et pension, les ecclésiastiques qui auront refusé de prêter le serment civique, ou qui le rétracteront après l'avoir prêté, seront, par ce refus ou cette rétractation même, réputés suspects de révolte contre la loi, et de mauvaise intention contre la patrie, et, comme tels, plus particulièrement soumis et recommandés à la surveillance de toutes les autorités constituées.

7. En conséquence, tout ecclésiastique ayant refusé de prêter le serment civique (ou qui le rétractera après l'avoir prêté), qui se trouvera dans une commune où il surviendra des troubles dont les opinions religieuses seront la cause ou le prétexte, pourra, en vertu d'un arrêté du directoire du département, sur l'avis de celui du district, être éloigné provisoirement du lieu de son domicile ordinaire, sans préjudice de la dénonciation aux tribunaux, suivant la gravité des circonstances.

8. En cas de désobéissance à l'arrêté du directoire de département, les contrevenans seront poursuivis dans les tribunaux, et punis de l'emprisonnement dans le chef-lieu du département. Le terme de cet emprisonnement ne pourra excéder une année.

9. Tout ecclésiastique qui sera convaincu d'avoir provoqué la désobéissance à la loi et aux autorités constituées, sera puni de deux années de détention.

10. Si, à l'occasion des troubles religieux, il s'élève dans une commune des séditions qui nécessitent le déplacement de la force armée, les frais avancés par le trésor public, pour cet objet, seront supportés par les citoyens domiciliés dans la commune, sauf leur recours contre les chefs instigateurs et complices des émeutes.

11. Si des corps ou des individus, chargés de fonctions publiques, négligent ou refusent d'employer les moyens que la loi leur confie pour prévenir ou pour réprimer une émeute, ils en seront personnellement responsables; ils seront poursuivis, jugés et punis conformément à la loi du 3 août 1791.

12. Les églises et édifices employés au culte dont les frais sont payés par l'état, ne pourront servir à aucun autre culte. Les églises et oratoires nationaux, que les corps administratifs auront déclarés n'être pas nécessaires pour l'exercice du culte dont les frais sont payés par la nation, pourront être achetés ou affermés par les citoyens attachés à un autre culte quelconque, pour y exercer publiquement ce culte sous la surveillance de la police et de l'administration; mais cette faculté ne pourra s'étendre aux ecclésiastiques qui se seront refusés au serment civique exigé par l'article 1er du présent décret (ou qui l'auront rétracté), et qui, par ce refus ou cette rétractation, sont déclarés, suivant l'article 6, suspects de révolte contre la loi, et de mauvaise intention contre la patrie.

13. La vente ou la location des églises ou oratoires dont il est parlé dans l'article précédent, ne peuvent s'appliquer aux églises dont sont en possession soit privée, soit simultanée avec les catholiques, les citoyens qui suivent les confessions d'Ausbourg et helvétique, lesquels sont conservés en leurs droits respectifs dans les départemens du Haut et du Bas-Rhin, du Doubs et de la Haute-Saône, conformément aux décrets des 17 août, 9 septembre et 1er décembre 1790.

14. Le directoire de chaque département fera dresser deux listes; la première comprenant les noms et demeures des ecclésiastiques sermentés, avec la note de ceux qui seront sans emploi, et qui voudront se rendre utiles; la seconde comprenant les noms et demeures de ceux qui auront refusé de prêter le serment civique, avec les plaintes et les procès-verbaux qui auront été dressés contre eux. Ces deux listes seront arrêtées incessamment, de manière à être présentées, s'il est possible, aux conseils généraux de département, avant la fin de leur session actuelle.

15. A la suite de ces listes, les procureurs-généraux-syndics rendront compte aux conseils de département (ou aux directoires, si les conseils sont séparés), des diligences qui ont été faites dans leur ressort, pour l'exécution des décrets de l'assemblée nationale constituante, des 12, 24 juillet et 27 novembre 1790, concernant l'exercice du culte catholique salarié par la nation; ce compte rendu présentera le détail des obstacles qu'a pu éprouver l'exécution de ces lois, et la dénonciation de ceux qui, depuis l'amnistie, ont fait naître de nouveaux obstacles, ou les ont favorisés par prévarication ou par négligence.

16. Le conseil général de chaque département (ou le directoire, si le conseil est séparé) prendra, sur ce sujet, un arrêté motivé, qui sera adressé sur-lechamp à l'assemblée nationale, avec les listes des ecclésiastiques sermentés ou non assermentés (ou qui se seront rétractés), et les observations du département sur la conduite individuelle de ces derniers, ou sur leur coalition séditieuse, soit entre eux, soit avec les Français transfuges et déserteurs.

17. A mesure que ces procès-verbaux, listes et arrêtés seront adressés à l'assemblée nationale, ils seront remis au comité de législation, pour en faire un rapport général, et mettre le corps législatif à portee de prendre un dernier parti, afin d'extirper la rébellion qui se déguise sous le prétexte d'une prétendue dissidence dans l'exercice du culte catholique; dans un mois, le comité présentera l'état des administrations qui auront satisfait aux articles précédens. et proposera les mesures à prendre contre celles qui seront en

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18. Comme il importe surtout d'éclairer le peuple sur les piéges qu'on ne cesse de lui tendre au sujet d'opinions prétendues religieuses, l'assemblée nationale exhorte tous les bons esprits à renouveler leurs efforts et à multiplier leurs instructions contre le fanatisme; elle déclare qu'elle regardera comme un bienfait public les bons ouvrages à la portée des citoyens des campagnes, qui lui seront adressés sur cette matière importante; et, d'après le rapport qui lui en sera fait, elle fera imprimer ces ouvrages aux frais de l'état, et récompensera leurs auteurs.

N° 27.

29 novembre 1791. =

DÉCRET relatif aux rassemblemens des émigrés (1). (B., XIX, 162.)

L'assemblée nationale, ayant entendu le rapport de son comité diplomatique, décrète qu'une députation, de vingt-quatre de ses membres se rendra auprès du roi pour lui communiquer, au nom de l'assemblée, sa sollicitude sur les dangers dont menacent la patrie les combinaisons perfides des Français armés et attroupés hors du royaume, et de ceux qui trament des complots au dedans, ou excitent les citoyens à la révolte contre la loi; et pour déclarer au roi que l'assemblée regarde comme essentiellement convenables aux intérêts et à la dignité de la nation toutes les mesures que le roi pourra prendre, afin de requérir les électeurs de Trèves, Mayence, et autres princes de l'Empire qui accueillent les Français fugitifs, de mettre fin aux attroupemens et aux enrôlemens qu'ils tolèrent sur la frontière, et d'accorder réparation à tous les citoyens français, et notamment à ceux de Strasbourg, des outrages qui leur ont été faits dans leurs territoires respectifs; que ce sera avec la même confiance dans la sagesse de ces mesures, que les représentans de la nation verront rassembler les forces nécessaires pour contraindre, par la voie des armes, ces princes à respecter le droit des gens, au cas qu'ils persistent à protéger ces attroupemens et assurer la justice qu'on réclame; Et, enfin, que l'assemblée nationale a cru devoir faire cette déclaration solennelle, pour que le roi fût à même de prouver, tant à la cour impériale qu'à Ja diète de Ratisbonne, et à toutes les cours de l'Europe, que ses intentions et celles de la nation française ne font qu'une. — Décrète, en outre, que la même députation exprimera au roi que l'assemblée nationale regarde comme une des mesures les plus propres à concilier ce qu'exige la dignité de la nation, et ce que commande sa justice, la prompte terminaison des négocia tions d'indemnités entamées avec les princes allemands possessionnés en France, en vertu de décrets de l'assemblée nationale constituante, et que les représentans de la nation, convaincus que les retards apportés aux négociations qui doivent assurer le repos de l'empire, pourraient être attribués en grande partie aux intentions douteuses d'agens peu disposés à seconder les intentions loyales du roi, lui dénoncent le besoin urgent de faire, dans le corps diplomatique, les changemens propres à assurer l'exécution fidèle et prompte de ses ordres. L'assemblée nationale a décrété aussi l'impression et l'envoi aux quatre-vingt-trois départemens du discours de M. ViennotVaublanc, après qu'il aura été prononcé au roi. Ce discours est ainsi conçu : — Sire, à peine l'assemblée nationale a-t-elle porté ses regards sur la situation du royaume, qu'elle s'est aperçue que les troubles qui l'agitent encore ont leur source dans les préparatifs criminels des Français émigrés. — Leur audace est soutenue par des princes allemands, qui méconnaissent les traités signés entre eux et la France, et qui affectent d'oublier qu'ils doivent à cet

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1)Voyez, ci-dessus, le décret du 9 novembre 1791, et la note,

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empire le traité de Westphalie, qui garantit leurs droits et leur sûreté. - Ces préparatifs hostiles, ces menaces d'invasion commandent des armemens qui absorbent des sommes immenses, que la nation aurait versées avec joie dans les mains de ses créanciers. - C'est à vous, Sire, de les faire cesser; c'est à vous de tenir aux puissances étrangères le langage qui convient au roi des Français. Dites-leur que partout où l'on souffre des préparatifs contre la France, la France ne peut voir que des ennemis; que nous garderons religieusement le serment de ne faire aucune conquête; que nous leur offrons le bon voisinage, l'amitié inviolable d'un peuple libre et puissant; que nous respecterons leurs lois, leurs usages, leurs constitutions, mais que nous voulons que la nôtre soit respectée ; dites-leur enfin, que si des princes d'Allemagne continuent de favoriser des préparatifs dirigés contre les Français, les Français porteront chez eux, non pas le fer et la flamme, mais la liberté. C'est à eux de calculer quelles peuvent être les suites du réveil des nations. -Depuis deux ans que les Français patriotes sont persécutés près des frontières, et que les rebelles y trouvent des secours, quel ambassadeur a parlé comme il le devait en votre nom?.... aucun. Si les Français chassés de leur patrie, par la révocation de l'édit de Nantes, s'étaient rassemblés en armes sur les frontières, s'ils avaient été protégés par des princes d'Allemagne Sire, nous vous le demandons, quelle eût été la conduite de Louis XIV? Eût-il souffert ces rassemblemens? eût-il souffert les secours donnés par des princes, qui, sous le nom d'alliés, se conduisent en ennemis ? Ce qu'il eût fait pour son autorité, que Votre Majesté le fasse pour le salut de l'empire, pour le maintien de la constitution. - Sire, votre intérêt, votre dignité, la grandeur de la nation outragée, tout vous prescrit un langage différent de celui de la diplomatie. La nation attend de vous des déclarations énergiques auprès des cercles du Haut et du Bas-Rhin, des électeurs de Trèves, Mayence et autres princes d'Allemagne. — Qu'elles soient telles que les hordes des émigrés soient à l'instant dissipées; prescrivez un terme prochain au-delà duquel nulle réponse dilatoire ne sera reçue; que votre déclaration soit appuyée par les mouvemens des forces qui vous sont confiées, et que la nation sache quels sont ses amis et ses ennemis. Nous reconnaîtrons à cette éclatante démarche le défenseur de la constitution. Vous assurerez ainsi la tranquillité de l'empire, inséparable de la vôtre, et vous hâterez ces jours de la prospérité nationale, où la paix fera renaître l'ordre et le règne des lois, où votre bonheur se confondra dans celui de tous les Français.

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DÉCRET relatif au rempla

cement des officiers de l'armée dont les places se trouvent vacantes. (B., XIX, 151.)

=

No 29. 29 novembre 1791 -8 janvier 1792. DÉCRET Concernant l'admission aux emplois de l'armée, en faveur de Français qui ont servi dans les armées des puissances étrangeres (1). (B., XIX, 168.)

N° 30.

=

=

1er-4 décembre 1791. DÉCRET relatif aux lois, proclamations et réglemens à fournir au sieur Baudouin, imprimeur de l'assemblée nationale, par le directeur de l'imprimerie royale. (B., XIX, 173.)

(1) Voyez la loi du 4-20 mars 1791.

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