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Copie de la lettre du général Thurault au quartier général de Cholet, le 12 pluviose.

CITOYEN,

J'ignore quelles sont les raisons qui vous portent à croire que les a habitants des campagnes aient emmené avec eux dans leur fuite leurs «bestiaux et leurs voitures, vous ne penseriez pas ainsi si vous réflé«chissiez à la marche précipitée de ces coquins, qui les empêche de se « faire suivre d'aucunes voitures.

« Je suis loin de me repentir d'avoir forcé le reste des brigands à se réunir, en incendiant leurs habitations; je voudrais qu'ils se crussent «<assez forts pour m'attendre ; je serais plus sûr de les anéantir.

५ Salut et fraternité.

«Le général en chef,
THURAULT. >>

Pour copie conforme,

LOMBARDEL. »

DÉNONCIATIONS LOCALES CONTRE GRIGNON

La première est celle des officiers municipaux de la commune de Saint-Amant, district de Bressuire. Ils certifient le fait suivant :

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Lors de l'apparition du général Bouret à Saint-Amant, la garde municipale ou citoyens reconnus au nombre de trente-cinq, faisant le «service de la garde dans cette commune, ainsi qu'ils en avaient été requis par l'administration du district de Bressuire, par la lettre adressée « à la commune le 2 pluviôse, le général donna ordre à la municipalité de faire retirer la garde sous-prétexte qu'il y avait à craindre que ses « soldats méconnussent ces citoyens et qu'ils pourraient être tués pour « des brigands, et de faire également porter les armes, dont ils étaient nantis, à la municipalité pour ensuite lui être remises, ce qui fut en « effet exécuté.

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«Le général, ayant pris de la municipalité les renseignements qu'il croyait nécessaires, les engagea de se rendre de suite à leur district avec « les bons citoyens de cette commune ; qu'il allait livrer aux flammes "toutes les habitations de cette commune, et que s'il s'en trouvait après

<<< qu'il serait parti, qu'il y porterait une autre colonne qui écraserait tous «< ceux qu'elle trouverait. Pour satisfaire à sa réquisition, nous nous re«pliâmes sur Cerizais pour ensuite joindre Bressuire, lieu de notre <<< district.

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«En chemin faisant, partie de la municipalité accompagnée de plu«<sieurs citoyens de cette commune, plusieurs charretiers chargés d'effets << rencontrèrent la colonne commandée par le général Grignon; plusieurs <<< femmes et différents hommes qui se rendaient à Bressuire furent «<<massacrés; le citoyen maire ne fut pas non plus épargné; il était accompagné d'environ vingt personnes tant hommes que femmes ; on «<lui arracha sa montre, ses assignats, ainsi qu'à ceux qui l'accompa<<< gnaient, les traitant de brigands et les voulant faire mettre sur trois <<< colonnes pour les fusiller; mais l'un deux, frappé de voir plusieurs «femmes enceintes, leur fit entrevoir que ce serait peut-être faire des << victimes, puisque d'ailleurs ils produisaient de bons certificats et furent, après plusieurs instantes prières, délivrés.

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<< Rendus à Cerizais, nous y fùmes quelques jours. Des habitants des <<< environs, au nombre de deux cents au plus, dès qu'ils surent que leurs «< habitations venaient d'ètre brûlées, se portèrent sur Cerizais.

<< Les habitants de cette même commune avec ceux de la commune <«<< de Saint-Amant furent au-devant d'eux pour les attaquer, mais le si << peu d'armes et de munitions dont ils étaient nantis, la révolution des << rebelles qui étaient eux, bien armés, força les défenseurs de la Répu«<blique de se replier à la forêt avec perte d'une dizaine d'hommes de la «< commune de Saint-Amant et à peu près autant de Cerizais. Les cito<< yennes de Saint-Amant ainsi que les enfants et vieillards sont mainte<«<<nant restés au pouvoir des rebelles. Tout porte à croire, d'après les <<< renseignements que nous en avons reçus, que les brigands ont renvoyé « les femmes et filles, citoyennes, dans les communes respectives.

Signé CHASSERIAU, maire de Saint-Amant; Mathurin SOULLARD, <<< officier; BACLE, officier de la commune de Saint-Amant. »

« Pour copie conforme à l'original demeuré entre les mains du soussigné. « JARRY, administrateur du district de Bressuire. »

Voici maintenant le rapport des officiers municipaux, du capitaine de la garde nationale et du juge de paix du canton de Cerizais.

<< Lors de l'apparition à Cerizais du général de brigade Grignon, il y << reconnut le patriotisme des citoyens ; il désarma la garde nationale et «dit au capitaine : <«<Je vais faire faire ici, par six commissaires que

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« je laisse, un magasin de blé. Vous ferez escorter les convois et garderez

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le magasin! » Avec quoi ? lui répondit-on ; Avec des fourches, « des faulx, etc... Avez-vous peur des brigands, dit Grignon? Je les fauche devant moi !

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<< Les commissaires laissés à Cerizais par Grignon, escortés par les citoyens de Cerizais ont formé un magasin d'environ mille charges de blé et quarante charges d'avoine, et en le faisant, un convoi fût arrêté au bourg du Pin, où on tua deux brigands; après cela les commissaires de Grignon quittèrent Cerizais en y laissant le dit magasin.

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Deux jours après le départ des commissaires, le commissaire de guerre, David, qui était à Bressuire, fit passer à Cerizais, pour l'armée de Grignon alors au Puy-Belliard, cinq milles rations de pain, qui font 15000 livres pesant; ce pain fut déposé à la municipalité de Cerizais, qui attendait de jour à autre des ordres de Grignon pour le lui faire parvenir; mais il ne parvint aucun ordre.

« Le magasin de blé et celui de pain inquiétaient d'autant plus la municipalité de Cerizais que la garde nationale entendait journellement dire que les brigrands se porteraient sur Cerizais pour enlever le blé et le pain. On instruisit de ceci le commissaire des guerres et le commandant de la place de Bressuire et on leur demanda des forces ; l'un et l'autre en promirent, mais ils n'en envoyèrent point.

Le 22 pluviose dernier, les brigands se sont portés à Cerizais au nombre d'environ deux cents hommes qui se sont battus avec les citoyens de Cerizais et de Saint-Amand, qui y étaient réfugiés; ils n'avaient que huit fusils pris chez les brigands en escortant les convois de grain; mais il ne fut pas possible que huit fusils pussent se défendre de deux cents brigands armés; c'est pourquoi les citoyens de Cerizais furent chassés de leurs foyers avec perte de plusieurs d'entre eux. Les magasins de pain et blé de Cerizais sont par là restés au pouvoir des brigands.

Le même jour, 22 pluviôse, les citoyens de Cerizais se replièrent à la Forêt, y restèrent jusqu'au lendemain qu'ils se disposèrent à se replier sur leur district à Bressuire avec les citoyens de la Forèt. Ils apprirent que Bressuire était évacué et se replièrent sur Moncoutant qui se trouva également évacué; enfin ils se replièrent sur la commune de L'Argeasse, où on fut très surpris de les voir et d'apprendre la malheureuse affaire de Cerizais et les évacuations de Bressuire et Moncoutant. « Les citoyens de Cerizais, la Forêt et L'Argeasse réunis résolurent d'instruire le département des Deux-Sèvres des faits ci-dessus détaillés « et de lui demander le parti qu'ils avaient à prendre. La réponse qui leur fut faite le 27 pluviose fut de plaindre leur sort et de les engager « à soustraire à la rapacité des brigands les subsistances de Cerizais ;

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<< qu'ils envoient la lettre qu'on leur avait écrite au Comité de Salut

<< public.

«De suite et dès le lendemain les gardes Nationales de Cerizais, la «Forêt, l'Argeasse, paroisses circonvoisines, les citoyens, formèrent un << peloton de trois cents et quelques hommes, furent attaquer les brigands qui étaient en nombre bien plus considérable à la Forêt, où ils entrèrent 64, prirent sept chevaux et ne perdirent que deux hommes; - ils ont vengé la perte des citoyens de Cerizais, mais ils n'ont pu en approcher depuis.

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Enfin on ne peut se dispenser d'observer que la colonne de Grignon << ayant massacré les femmes, les enfants, incendié les grains, les fourrages et enlevé les bestiaux, n'a pas peu contribué au nouveau soulè«vement de la Vendée.

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Signé BILIARD, juge de paix ; BALAIN, officier; COUTANT, officier ; PAINEAU, capitaine de la garde nationale. >>

« Pour copie conforme à l'original resté entre les mains du soussigné : JARRY, administrateur du district de Bressuire ».

Donnons une troisième dénonciation contre Grignon, faite et signée par la municipalité de Saint-André sur Sèvre.

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Le citoyen J. B. Garreau, maire et Pierre Beraud, agent national de << la commune de Saint-André, déclarent qu'ayant été requis de se rendre à leur poste par l'administration d› Bressuire en date du 2 pluviôse, pour y mettre en réquisition tous les charretiers de la commune, ils s'y étaient effectivement rendus pour y attendre le passage de la colonne, que même ils avaient fait partir toutes les charrettes afin de «faire enlever les grains et les fourrages; Qu'ils avaient fait la liste de << tous les rebelles de leur commune afin de la donner au général de « l'armée et faire brùler leur maison et épargner celles des patriotes; Qu'ayant été avertis que la colonne arrivait, la municipalité avait été en écharpes au-devant d'elle et à la tête de tous les charretiers ; Que par une horreur, qui n'a pas d'excuses, on fit massacrer sous les yeux << de la municipalité les charretiers qui étaient là par son ordre; que lui, maire, ne fut sauvé du massacre qu'au moyen de son porte-feuille qui contenait environ trois mille livres, et qu'il donna pour sauver sa

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vie à trois volontaires qui voulaient l'assassiner. On observe que la colonne,qui a fait tous ces massacres, est la colonne de Grignon.

«Signé GARREAU, maire de Saint-André; BERAUD, agent national de la commune de Saint-André-sur-Sèvre. »

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Pour copie conforme à l'original resté entre les mains du soussigné :

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JARRY, administraleur du district de Bressuire. »

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Le mémoire de la Société Populaire de Niort est ainsi conçu :

« Placés en quelque sorte, aux avant-postes de la Vendée, notre position nous a mis en mesure de connaître les événements de cette guerre désastreuse, d'en juger les causes et d'observer les hommes. >>

Il s'élève contre l'affirmation donnée par les Carrier, les Francastel et autres que la guerre de Vendée n'existait plus depuis le désastre de Savenay... et fait un historique des derniers événements qui ont suivi la fin de la grande guerre, c'est-à-dire l'affaire de Noirmoutier, de l'île de Bouin, etc.....

Enfin après avoir rendu hommage aux braves généraux qui comme Westermann, Tunq et Haxo ont servi glorieusement et noblement la République, il s'attaque aux généraux qui leur ont succédé, à Grignon, qui au dire du Mémoire, a été marchand de bœufs; à Guillaume et Commairi, d'anciens perruquiers; à Huchet, un ancien recruteur; à Carpentier, prêtre défroqué. Il s'exprime ainsi :

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« Ces hommes ignorants ou perfides, immoraux et ambitieux, aveuglés « par le dépôt inattendu de l'immense autorité que l'intrigue leur avait confiée, en firent l'abus le plus révoltant. Sans principes d'humanité «<et de justice, sans amour de la patrie, ils n'eurent pas assez de vertus ❝ pour s'enorgueillir de leur pauvreté. Ils ne virent dans cette guerre que les moyens de s'enrichir par le pillage, de conserver longtemps leur puissance et la riche paye qui était attachée à leur grade. Ces moyens ne furent pas négligés et la liberté fut sacrifiée à leur avarice <<et à leur ambition. Dès lors, les exemples funestes des débauches scandaleuses, des vols publics et des atrocités des chefs furent imités par une foule d'hommes crapuleux qui auraient déshonoré l'intrépide armée de l'Ouest et flétri ses lauriers, si les crimes de la minorité pouvaient dégrader le grand nombre. Dès lors il n'y eut plus ni discipline, « ni règle, ni subordination: chacun ne songea qu'à s'enrichir et, pour y réussir, on commit tous les crimes, assassinats, viols, dévastations, incendies.....

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Quelques généraux, autant orgueilleux qu'ineptes, voulurent avoir seuls l'honneur de finir une guerre qui n'existait plus. Ici la patrie disparut encore devant la vanité; de là le défaut de concordance dans les opérations; de là les haines, les jalousies, les mésintelligences et les atrocités qui ont si puissamment concouru à rallumer cette guerre « totalement éteinte. Des colonnes prétendues révolutionnaires avaient

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