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NOTE 8. Page 78.

Bouillé, dont j'ai déjà cité les mémoires, et qui était placé de manière à bien juger les intentions réelles des puissances, ne croyait pas du tout au zèle et à la sincérité de Catherine. Voici la manière dont il s'exprime à cet égard :

a On voit que ce prince (Gustave) comptait beaucoup sur les dispositions de l'impératrice de Russie, et sur la part active qu'elle prendrait dans la confédération, et qui s'est bornée à des démonstrations. Le roi de Suède était dans l'erreur, et je doute que Catherine lui eût jamais confié les dix-huit mille Russes qu'elle lui avait promis. Je suis persuadé, d'ailleurs, que l'empereur et le roi de Prusse ne lui avaient communiqué ni leurs vues, ni leurs projets. Ils avaient l'un et l'autre personnellement, plus que de l'éloignement pour lui, et ils désiraient qu'il ne prît aucune part active dans les affaires de France. »

(Bouillé, pag. 319.)

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NOTE 9. Page 80.

Madame Campan nous apprend, dans un même pas sage, la construction de l'armoire de fer, et l'existence d'une protestation secrète faite par le roi contre la déclaration de guerre. Cette appréhension du roi pour la guerre était extraordinaire, et il cherchait de toutes les manières à la rejeter sur le parti populaire.

« Le roi avait une quantité prodigieuse de papiers, et avait eu malheureusement l'idée de faire construire très-secrètement, par un serrurier qui travaillait près de lui depuis plus de dix ans, une cachette dans un corridor intérieur de son appartement. Cette cachette, sans la dénonciation de cet homme, eût été longtemps ignorée. Le mur, dans l'endroit où elle était placée, était peint en larges pierres, et l'ouverture se trouvait parfaitement dissimulée dans les rainures brunes qui formaient la partie ombrée de ces pierres peintes. Mais, avant que ce serrurier eût dénoncé à l'assemblée ce que l'on a depuis appelé l'armoire de fer, la reine avait su qu'il en avait parlé à quelques gens de ses amis; et que cet homme, auquel le roi, par habitude, accordait une trop grande confiance, était un jacobin. Elle en avertit le roi, et le décida à remplir un très-grand portefeuille de tous les papiers qu'il avait le plus d'intérêt à conserver, et à me le confier. Elle l'invita en ma présence à ne rien laisser dans cette armoire;

et le roi, pour la tranquilliser, lui répondit qu'il n'y avait rien laissé. Je voulus prendre le portefeuille et l'emporter dans mon appartement; il était trop lourd pour que je pusse le soulever. Le roi me dit qu'il allait le porter lui-même ; je le précédai pour lui ouvrir les portes. Quand il eut déposé ce portefeuille dans mon cabinet intérieur, il me dit seulement : « La reine vous » dira ce que cela contient. » Rentrée chez la reine, je le lui demandai, jugeant, par les paroles du roi, qu'il était nécessaire que j'en fusse instruite. « Ce sont, me >> répondit la reine, des pièces qui seraient des plus fu» nestes pour le roi, si on allait jusqu'à lui faire son procès. Mais ce qu'il veut sûrement que je vous dise, » c'est qu'il y a dans ce portefeuille le procès-verbal » d'un conseil-d'état, dans lequel le roi a donné son >> avis contre la guerre. Il l'a fait signer par tous les >> ministres, et, dans le cas même de ce procès, il » compte que cette pièce serait très-utile. » Je demandai à qui la reine croyait que je devais confier ce portefeuille. « A qui vous voudrez, me répondit-elle; vous » en êtes seule responsable: ne vous éloignez pas du » palais, même dans vos mois de repos; il y a des cir

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>> constances où il nous serait très-utile de le trouver à » l'instant même. »

(Madame Campan, tom. II, pag. 222.)

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Exposition des motifs qui ont déterminé l'assemblée nationale à décréter sur la proposition formelle du roi, qu'il y a lieu à déclarer la guerre au roi de Bohème et de Hongrie, par M. Condorcet. ( Séance du 20 avril 1792.)

« Forcée de consentir à la guerre par la plus impérieuse nécessité, l'assemblée nationale n'ignore pas qu'on l'accusera de l'avoir volontairement accélérée ou provoquée.

» Elle sait que la marche insidieuse de la cour de Vienne n'a eu d'autre objet que de donner une ombre de vraisemblance à cette imputation, dont les puissances étrangères ont besoin pour cacher à leurs peuples les motifs réels de l'attaque injuste préparée contre la France; elle sait que ce reproche sera répété par les ennemis intérieurs de notre constitution et de nos lois, dans l'espérance criminelle de ravir la bienveillance publique aux représentans de la nation.

» Une exposition simple de leur conduite est leur unique réponse, et ils l'adressent avec une confiance égale aux étrangers et aux Français, puisque la nature a mis au fond du cœur de tous les hommes les sentimens de la même justice.

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Chaque nation a seule le pouvoir de se donner des

lois, et le droit inalienable de les changer. Ce droit n'appartient à aucune ou leur appartient à toutes avec une entière égalité : l'attaquer dans une seule, c'est déclarer qu'on ne le reconnaît dans aucune autre ; vouloir le ravir par la force à un peuple étranger, c'est annoncer qu'on ne le respecte pas dans celui dont on est le citoyen ou le chef; c'est trahir sa patrie; c'est se proclamer l'ennemi du genre humain! La nation française devait croire que des vérités si simples seraient senties par tous les princes, et que, dans le dix-huitième siècle, personne n'oserait leur opposer les vieilles maximes de la tyrannie: son espérance a été trompée; une ligue a été formée contre son indépendance, et elle n'a eu que le choix d'éclairer ses ennemis sur la justice de sa cause, ou de leur opposer la force des armes.

» Instruite de cette ligue menaçante, mais jalouse de conserver la paix, l'assemblée nationale a d'abord demandé quel était l'objet de ce concert entre les puissances si long-temps rivales, et on lui a répondu qu'il avait pour motifle maintien de la tranquillité générale, la sûreté et l'honneur des couronnes, la crainte de voir se renouveler les événemens qu'ont présentés quelques époques de la révolution française.

» Mais comment la France menacerait-elle la tranquillité générale, puisqu'elle a pris la résolution solennelle de n'entreprendre aucune conquête, de n'attaquer la liberté d'aucun peuple; puisqu'au milieu de cette lutte longue et sanglante qui s'est élevée dans les PaysBas et dans les états de Liége, entre les gouvernemens et les citoyens, elle a gardé la neutralité la plus rigou

reuse ?

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