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l'ordre de garder la route de Paris à Varennes 1791. et à Verdun, et de n'y laisser passer absolument qui que ce soit, soit en allant, soit en venant. Je lui remis entre les mains des ordres signés par le roi, qui lui enjoignoiènt, et à tous les officiers auxquels il commandoit, et cela sous leur responsabilité, d'employer toutes les forces dont ils disposoient, à défendre et à protéger sa majesté et la famille royale. Je le chargeai de plus, en cas que le roi fût arrêté à Châlons, ou dans un autre endroit après avoir dépassé cette ville, de réunir toutes les troupes qui se trouveroient à Varennes, Clermont et Sainte-Menehould, et de faire tous ses efforts pour délivrer sa majesté, en l'assurant en même tems, que je marcherois à l'instant à son secours, avec toutes les troupes que je pourrois rassembler.

Je lui donnai cinq ou six cents louis en or, afin qu'il les distribuât aux soldats à l'instant où on appercevroit le roi. Avec ces instructions, il partit pour Paris.

J'ordonnai au comte Charles de Damas de mettre son régiment en marche, de manière à ce qu'il fût rendu à Sainte-Menehould le 19, et d'y rester jusqu'au 20, le roi devant passer ce jour-là par cette ville. Je lui remis de même

1791. un ordre du roi, qui déterminoit avec précision la conduite à suivre par les deux escadrons auxquels il commandoit, et qui étoient destinés à servir d'escorte à sa majesté. Je lui répétai les instructions que j'avois déja donné à M. de N***, en cas que le roi fût arrêté à Châlons, ou ailleurs.

Deux jours après, je dépêchai M. de Goguelas au roi, chargé de l'instruire de toutes les particularités qui pourroient contribuer à assurer sa retraite. J'ordonnai à cet officier de prendre, pour se rendre à Paris, par Stenay, Dun, Varennes et Sainte-Menehould, afin d'examiner de nouveau cette route, et qu'on n'eût pas à se reprocher d'avoir négligé la moindre des précautions. Je lui recommandai de me rejoindre, soit à Longwi, soit à Montmédi, ou à Stenay, quelques jours avant le départ du roi, pour me communiquer les instructions définitives de sa majesté.

Le 13 juin, je partis de Metz, sous le prétexte de visiter les places frontières voisines de Luxembourg. J'avois si bien persuadé au peuple que les autrichiens rassembloient un corps de troupes de ce côté (quoique, dans le fait, ils n'eussent pas fait le moindre mouvement), que je pus, sans exciter le moindre

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soupçon, réunir dans les environs de Mont- 1791. 1791. médi, le petit nombre de régimens qui me restoit. Je ne pus disposer que de deux bataillons suisses de la garnison de Metz, et de quelques escadrons tirés des garnisons de Thionville, Longwy, Mézieres et Sedan. Toute l'infanterie française étoit, je l'ai déja observé, entiérement mauvaise.

Le 15, je reçus à Longwy, une lettre du roi, par laquelle il m'apprit que son départ étoit différé jusqu'au 20, à l'heure déja convenue. Il me dit qu'il ne pourroit pas avoir avec lui, dans la même voiture, le marquis d'Agout, parce que la gouvernante de ses enfans, qui devoit les accompagner, avoit absolument refusé de renoncer au privilège de sa place, de ne pas les quitter un seul instant. Ce délai, dans le départ du roi, déconcerta extrêmement mes mesures. Une partie des troupes, et en particulier les deux escadrons qui devoient se trouver à Clermont le jour de son passage, avoient déja reçu mes ordres. Obligé de doubler le tems de leur séjour dans cette ville, les soupçons commencèrent à s'élever. Ils augmentèrent encore par la faute de M. de N***, qui négligea d'instruire de cette circonstance, l'officier chargé de placer le relai à Varennes.

1791.

M. de Goguelas revint alors de Paris. Il me dit que le roi, auquel il avoit donné les plus minutieux détails sur la route qu'l devoit parcourir, étoit très- satisfait des dispositions que j'avois faites, et qu'il se conformeroit à tout ce qui étoit antérieurement convenu entre lui et moi.

Le 20 juin, je me rendis à Stenay. Le 21, j'assemblai les officiers généraux qui se trouvoient dans les environs de cette place. Je leur appris qu'il étoit probable que le roi passeroit dans la nuit par Stenay, et seroit arrivé à Montmédi à la pointe du jour. Je chargeai le général Klinglin de préparer un camp sous le canon de cette ville, pour huit bataillons et trente escadrons, en lui désignant l'endroit où

voulois qu'il fût placé. Je lui ordonnai aussi de tout préparer pour recevoir le roi. Je destinai un château, situé derrière le camp, pour le lieu de sa résidence, et de celle de la famille royale, persuadé que sa majesté seroit plus en sûreté au milieu de son armée, qu'enfermée dans une ville. J'envoyai le général Heyman chercher deux régimens de hussards cantonnés sur la Sarre, dans la crainte que le mouvement que je prévoyois devoir être excité par la fuite du roi, parmi les troupes des différentes garnisons, et parmi le peuple, ne l'em

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pêchât de gagner Montmédi. Je lui enjoi- 1791 gnis de prendre une route de traverse que je lui indiquai, par laquelle il éviteroit Metz, Thionville et Longwy, qu'il eût fallu traverser en suivant la route ordinaire. Je laissai le général d'Hoffelize à Stenay, avec Royal-Allemand, en lui ordonnant de faire seller les chevaux de ce régiment au commencement de la nuit, et de se tenir prêt lui-même à marcher à la pointe du jour. Je lui donnai aussi l'ordre d'envoyer, vers les dix heures du matin, un détachement de cinquante hommes se poster entre Stenay et Dun, pour y attendre l'arrivée de sa majesté.

Je remis à M. de Goguelas les ordres adressés par le roi aux commandans des différens détachemens, en lui recommandant de partir le même jour, 20 juin, pour Pont-de- Somvele, avec cinquante hussards tirés des escadrons qui étoient à Varennes, d'y rester jusqu'au 21; et aussi-tôt l'arrivée du courier qui devoit précéder le roi, de quitter cette place, afin de distribuer les ordres de sa majesté aux différens commandans des troupes stationnées sur la route, qui ignoroient encore leur véritable destination. Il eut ordre de placer le relai de Varennes en dehors de la ville, du côté par

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