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en responsabilité dirigée contre les administrateurs l'une à l'insu de l'autre, ne prononcent involontaid'une société anonyme et basée sur une infraction à l'article 72 de la loi du 18 mai 1873, quand les bilans ayant été approuvés et publiés, l'un des administrateurs est poursuivi du chef de faux bilans. Trib. corr. Gand, 26 octobre 1901, Pas. 1902, III, 73.

CHAPITRE HUITIÈME.

Du caractère préjudiciel de l'action publique à l'égard de l'action civile. - De l'influence de la chose jugée, tant à l'égard des intérêts civils que des poursuites nouvelles. Le criminel emporte

le civil.

§ 1er.

96.

De l'influence du criminel sur le civil.
Principes généraux.

rement des sentences contradictoires; enfin, ce n'est
pas seulement pour prévenir l'influence que le juge-
ment civil pourrait avoir sur la décision de la juri-
diction répressive que la loi ordonne, dans l'hypo-
thèse indiquée, de surseoir à la poursuite de l'action
civile, c'est principalement parce que le jugement
criminel doit avoir à l'égard de cette action l'auto-
rité de la chose jugée. Il résulte donc de la dispo-
sition de l'article 3 du code d'instruction crimi-

nelle et de l'article 4 de la loi de 1878 que l'action
du même fait.
publique est préjudicielle à l'action civile résultant

Cette doctrine a été confirmée par un remarquable arrêt rendu par la cour de cassation de France, le 7 mars 1855, sous la présidence de M. Troplong et sur les conclusions conformes de M. Nicias-Gaillard; et elle est également admise par la cour de cassation Lorsque l'action civile, résultant d'une de Belgique qui, dans son arrêt du 4 juillet 1878, infraction, est poursuivie séparément, il s'agit de l'applique aux jugements des tribunaux militaires. savoir quelle influence le jugement de l'action pu- Cette autorité de la chose jugée est attribuée au blique exerce sur l'action privée qui n'est pas jugement criminel, non seulement en cas de domencore jugée, soit qu'elle ait été suspendue pen-mages-intérêts démandés séparément, mais quelque dant la poursuite de la première, ou qu'elle ne soit pas encore intentée. Si le droit commun devait servir de base à la solution de cette question, l'une des plus graves et des plus controversées de la science, le jugement criminel n'aurait aucune autorité sur l'action civile intentée séparement, puisque les juges ne sont pas les mêmes et qu'il n'y a ni identité de cause ni identité d'objet. Mais le droit commun est ici sans application. En effet, des principes d'un ordre superieur commandaient d'accorder aux décisions pénales sur les décisions civiles une influence qu'elles n'ont pas suivant les règles ordi-l'offense. Ce que la société a fait juger, est done naires concernant la chose jugée.

Pour assurer cette influence, l'article 3 du code d'instruction criminelle et l'article 4 de la loi du 17 avril 1878 ordonnent que l'exercice de l'action civile, intentée séparément, soit suspendu, tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique, intentée avant ou pendant la poursuite de l'action civile.

soit l'objet de l'action civile née du même fait, et, en thèse générale, à l'égard de toutes les questions civiles décidées par ce jugement. HAUS, 1413, 1414.

97. Le jugement criminel a sur l'action civile, née du même fait et non encore jugée, une influence nécessaire et forcée, en ce qui concerne les questions soulevées par l'action publique et décidées par ce jugement. En effet, cette action est exercée par le ministère public qui représente la société et qui poursuit, au nom de celle-ci, la répression de

jugé à l'égard de tous ses membres; la décision qu'elle a provoquée par l'action de ses mandataires, doit être considérée comme la vérité pour tous les citoyens, car tous ont été parties en cause. Ensuite, la justice pénale a besoin d'une autorité qui, seule, lui permet d'atteindre son but et sans laquelle la peine sociale ne pourrait produire les effets préventifs et réparateurs qui la rendent utile au maintien de l'ordre. La foi que la société réclame pour les décisions des tribunaux répressifs ne serait-elle pas ébranlée, si ces décisions pouvaient être combattues dans un intérêt privé, si elles étaient exposées au contrôle et aux démentis des juridictions civiles? Enfin, l'autorité publique, partie dans les procès criminels, a des moyens plus étendus et plus nombreux que ne peuvent avoir les particuliers devant les tribunaux civils, pour arriver à la preuve des infractions. Le jugement rendu par la juridiction pénale sur les questions relatives à l'existence du fait et la culpabilité de l'agent sera donc rendue avec plus de connaissance de cause, il offrira plus de garantie que le jugement prononcé sur ces mêmes questions par la juridiction civile. D'ailleurs, les tribunaux de répression sont les juges naturels de ces questions, puisqu'ils sont spécialement établis pour les décider. Le principe en vertu duquel le jugement criminel Ce n'est donc pas uniquement pour que les a l'autorité de la chose jugée à l'égard de l'action lumières plus abondantes qui jaillissent de l'ins-civile résultant du même fait, est consacré, non en truction criminelle puissent servir à éclairer l'ins- termes formels, mais virtuellement, par toutes nos tance civile; ce n'est pas non plus dans le seul but lois, qui le reconnaissent en l'appliquant dans d'empêcher que les deux juridictions, statuant diverses circonstances. HAUS, loc. cit., n" 1415.

Puisque le jugement de l'action publique exerce une influence souveraine sur le sort de l'action civile, née du même fait et non encore jugée, il en résulte que la première est préjudicielle à l'autre toutes les fois que les deux actions sont poursuivies séparément. Dans la rigueur des principes, l'action publique est préjudicielle à l'exercice de l'action civile; de même que celle-ci est préjudicielle à l'exercice de celle-là, lorsqu'il s'agit d'un délit de suppression d'état. Mais, sous l'empire de notre législation, l'action publique est seulement préjudicielle au jugement de l'action privée, et elle n'a ce caractère que dans le cas où elle est intentée avant ou pendant la poursuite de cette dernière, qui reste suspendue jusqu'à ce qu'il soit définitivement prononcé sur l'action publique.

Ainsi, tant que l'action publique n'est pas mise en mouvement, l'action civile peut être intentée et jugée sans obstacle.

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§ II. Conditions de l'influence du criminel

-

sur le civil.

Chose jugée.

d'assises a décidé la question incidente sans instruction préalable et d'urgence pour assurer le cours des débats. HAUS, loc. cit., no 1418.

98. Le jugement émané de la juridiction 101. Pour que le jugement émané de la répressive a une influence souveraine sur le sort juridiction répressive puisse avoir une influence de l'action civile poursuivie séparément, en tant souveraine sur le sort de l'action civile, il faut que qu'il statue sur le fond de l'action publique, c'est-ce jugement statuant sur le fond de l'action à-dire sur la question de savoir si l'accusé ou le publique soit irrévocable. Il est évident, en effet, prévenu est coupable du fait mis à sa charge. que ce jugement ne peut exercer, à l'égard de L'ordonnance de la chambre du conseil et l'arrêt l'action civile, une autorité qu'il n'a pas encore de la chambre d'accusation, portant qu'il n'y a pas acquise. Telle est la condamnation par contumace lieu de poursuivre, mettent un terme au sursis qui n'a qu'un caractère provisoire. Cette condamdans le cas où l'exercice de l'action civile a été nation, il est vrai, écarte l'obstacle qui arrêtait la suspendu; mais ils n'ont aucun effet sur le juge- poursuite séparée de l'action civile. S'il en était ment de cette action, quel que soit le motif sur autrement, la suspension se prolongerait pendant lequel ils sont fondés. vingt ans, à moins que le contumax condamné ne Les considérations d'ordre public qui attribuent fùt arrêté ou ne se présentat spontanément dans à la chose jugée au criminel une autorité absolue l'intervalle. A l'expiration de ce délai, la condamsur les intérêts civils, s'appliquent dans toute leur nation ayant acquis une autorité définitive, la force aux sentences des juridictions de jugement prescription éteint non seulement la peine, mais qui statuent sur la culpabilité des prévenus ou des encore l'action publique, l'accusé condamné n'étant accusés, après un débat oral et public, en pleine pas admis à se présenter pour purger sa contuconnaissance de cause, et non pas aux décisions des inace (art. 641 du code d'inst. crim.). Or, la presjuridictions d'instruction rendues sur une informa-cription de l'action publique entraîne la prescription écrite et secrète et n'ayant généralement tion de l'action en dommages-intérêts, celle-ci ne qu'un caractère provisoire. HAUS, loc. cit., pouvant survivre à celle-là. Suspendre cette action n' 1416. jusqu'à ce que la condamnation eût acquis force de 99. L'autorité que la loi attache à la chose chose jugée, serait donc l'annuler. Quant aux jugée au criminel suppose un jugement statuant autres actions civiles résultant du même fait et sur le fond, et non pas seulement sur la recevabi- ayant une durée plus longue, on ne peut raisonnalité de l'action publique. En conséquence, le juge-blement admettre que le législateur ait voulu en ment criminel est sans influence sur l'action civile, lorsqu'il déclare l'action publique éteinte par la prescription. Ce jugement n'empêche ni la personne lésée qui ne s'était pas constituée partie civile devant la juridiction répressive d'exercer son action devant le juge civil, ni ce juge de statuer sur la prescription opposée par le défendeur qui invoque le jugement criminel, comme si la question n'avait pas encore été décidée. Mais la personne lésée qui s'était portée partie civile, ne pourrait plus intenter devant le tribunal civil son action, qui serait repoussée par l'exception rei judicata. En effet, les deux actions étant soumises à la même «Si la partie civile, dit à son tour M. Thonissen prescription, le jugement qui admet la prescrip- dans son rapport, p. 228, lors de la revision du code tion de l'action publique décide en même temps que de procédure pénale, obtient une condamnation, l'action civile est éteinte; et comme il a été renduelle pourra l'exécuter quand l'arrêt rendu par concontradictoirement avec la partie civile, il a l'auto-tumace aura un caractère indélibile par l'expirarité de la chose jugée à son égard comme à l'égard du ministère public. - HAUS, loc. cit., n 1417.

100. Puisque le jugement criminel doit statuer sur le fond de l'action publique, les décisions des tribunaux de répression sur les incidents de procédure ne peuvent avoir autorité au civil. Ainsi, lorsque l'opposition de l'accusé à l'audition d'un témoin soulève une question d'état, celle-ci doit être résolue par la cour d'assises appelée à adinettre ou à rejeter cette opposition. Mais l'arrêt qui décide la question d'état, n'a d'effet que sur L'admissibilité du témoignage dans l'instance criminelle; cette question peut donc être débattue de nouveau devant la juridiction civile et jugée par celle-ci dans le sens contraire. D'abord, le conflit entre les deux jugements n'est pas de nature à ébranler la foi sociale dans la condamnation ou l'acquittement de l'accusé. Ensuite, la cour

arrêter la poursuite pendant vingt ans. Mais si elle a pour effet de mettre un terme à la suspension de l'action civile, la condamnation par contumace est sans influence sur le sort de cette action. La condamnation n'exerce son autorité qu'après être devenue irrévocable, et elle ne peut l'exercer qu'à l'égard des actions civiles autres que l'action en dommages-intérêts et nées du même crime, pourvu qu'elles soient soumises à une prescription de plus de vingt ans et qu'elles n'aient pas encore été jugées, ce qui arrivera bien rarement. HAUS, loc. cit., no 1419.

tion du délai de la prescription. La condamnation est alors irrévocable et le débiteur des dommagesintérêts ne saurait invoquer la prescription pénale. Les condamnations civiles prononcées par les tribunaux correctionnels se prescrivent par trente ans.

Mais la partie civile ne sera pas forcée d'attendre, pour agir, l'expiration du délai de la prescription pénale. Aussitôt qu'elle sera nantie de l'expédition de l'arrêt qui lui alloue des dommages-intérêts, elle pourra saisir et faire vendre les biens des condamnés. A ce point de vue, l'arrêt par contumace doit être considéré comme définitif quoique révocable.

Il est rendu, non sous la condition suspensive de la non-comparution du condamné pendant les délais de la prescription, mais sous la condition résolutoire de sa comparution, dans les mêmes délais. Aussi longtemps que le condamné ne se présente pas ou n'est pas arrêté, l'arrêt produit tous les effets

dont il est susceptible. Aux termes des articles 471 | entièrement disparu de la législation. Elle est conet suivants du code d'instruction criminelle, des sacrée dans une certaine mesure par les articles 19 résultats certains et déterminés existent avant à 24, 31, 32, 33 du code pénal, et, dès lors, on peut l'expiration des délais de la prescription. Rien se demander si les dispositions du code civil dont ne s'oppose donc, en droit, à ce que la partie civile il s'agit ne sont pas restées en vigueur en ce exige le payement de sa créance pendant le délai qu'elles ont de conciliable avec l'abolition de la accordé au condamné pour purger sa contumace. mort civile? Tel est le cas de l'article 31 cité par L'Etat pourra agir de même pour le recouvrement M. Hoffmann. Cet article ne vise pas expressément de ses amendes. la mort civile et se concilie avec la législation transitoire établie par le décret du 11 février 1831, comme avec la législation actuelle; aucune disposition expresse ne l'ayant abrogé, nous croyons qu'il a encore force de loi et qu'ainsi la solution que nous avons rapportée est parfaitement juridique. Nous sommes confirmés dans cette opinion par cette circonstance que, lorsque les tribunaux ont à s'occuper des effets de la contumace, ils ont été amenés le plus souvent à puiser des arguments dans les dispositions dont il s'agit, qui ont précédé dans l'ordre chronologique celles du code d'instruction criminelle sur le même objet et qui ont avec elles une étroite liaison.

Puisque l'arrêt par contumace est rendu sous condition résolutoire, pour déterminer ses effets ainsi que les conséquences de la comparution du condamné, on n'a qu'à appliquer l'article 1183 du code civil, qui porte: «La condition résolutoire est celle qui, lorsqu'elle s'accomplit, opère la révocation de l'obligation, et qui remet les choses au même état que si l'obligation n'avait pas existé. Elle ne suspend point l'exécution de l'obligation; elle oblige seulement le créancier à restituer ce qu'il a reçu dans le cas où l'événement prévu par la condition arrive. »

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Quand la condition résolutoire sous laquelle l'arrêt a été prononcé se réalise, en d'autres Si l'on n'admettait pas que ces dispositions du termes quand l'accusé se présente ou est saisi par code civil fussent encore en vigueur, on devrait les agents de la force publique, l'arrêt de condam- décider, d'après ce que nous avons dit suprà, nation est anéanti de plein droit. Le titre en vertuno 103 (ce sont les Pandectes belges qui parlent), duquel le payement à été effectué disparaît et la que, à quelque époque que meurt le condamné, partie qui a reçu des dommages-intérêts est obli- avant d'avoir purgé sa contumace, les condamnagée de les restituer. La combinaison des ar- tions prononcées contre lui deviennent irrévocables, ticles 1183 et 1235 du code civil rend cette solu- puisque la condition résolutoire ne peut se réaliser. tion inévitable. Le citoyen qui se prétend victime Si la partie civile ne s'est pas constituée devant du crime n'a d'autre ressource que de se constituer la cour d'assises et que, après la condamnation par partie civile dans la procédure nouvelle et con- contumace, elle porte son action devant les tributradictoire. >> Rapport de Thonissen, loc. cit.,naux civils, l'arrêt rendu par contumace ne pourra p. 228; Pand. B., v Contumace, nos 102 à 105. être invoqué pour ou contre elle. En effet, il suffi« Quel sera le sort des condamnations pronon-rait de la seule présence du contumace pour cées au profit de la partie civile si l'accusé contu- anéantir cet arrêt de plein droit et remettre en max meurt avant l'expiration du délai de la pres-question tous les faits qu'il constate. Il est dés cription? M. HOFFMANN (Traité des questions pré-lors impossible de dire que ces faits constituent la judicielles) pose la question et la résoud par une distinction. Si, dit-il, le condamné meurt dans le délai de grâce des cinq années qui lui ont été données pour se présenter (code civ., art. 31 et décret transitoire du Congrès du 11 février 1831), comme il est réputé mort dans l'intégrité de ses droits, la condamnation est anéantie de plein droit, et la partie civile est obligée d'intenter, devant les tribunaux civils, une nouvelle action contre les héritiers du condamné.

Si, au contraire, le condamné par contumace meurt après ce délai, tout étant consommé à l'expiration des cinq ans, les plaignants pourront poursuivre les héritiers du condamné, en vertu de l'arrêt de condamnation, et sans qu'ils soient obligés d'intenter une nouvelle action au civil.

vérité judiciairement établie et il s'ensuit qu'ils ne peuvent être opposés aux tiers comme chose jugée.

Conformément à ces principes, la cour de Gand a jugé que, bien qu'une condamnation par contumace ait été prononcée du chef de faux dans un acte authentique, cette condamnation ne pouvait être opposée aux tiers comme chose jugée, l'acte incriminé continue de faire entre parties, et jusqu'à inscription de faux, pleine foi de la convention qu'il renferme. Gand, 5 mai 1883, Pas. 1883,

-

II, 397; B. J. 1883, 967.

Mais, ainsi que le décide le même arrêt, si la condamnation par contumace peut être invoquée à l'appui de l'action civile introduite séparément, l'exercice de cette action n'est pas suspendu jusqu'à ce que cette condamnation soit devenue irrévocable. Cette solution soulève la question de savoir si L'article 4 de la loi du 17 avril 1878, qui dispose les articles 27 et 31 du code civil peuvent être que l'exercice de l'action civile poursuivie séparéencore invoqués en matière de contumace. Tous ment est suspendu tant qu'il n'a pas été prononcé les annotateurs et commentateurs belges des codes définitivement sur l'action publique intentée avant sont unanimes à les considérer comme abrogés par ou pendant la poursuite de l'action civile, n'a pas l'article 13 de la Constitution, qui abolit la mort cette portée. Il résulte des discussions de cette loi, civile, et ne les citent que pour mémoire. Il est à dit l'arrêt précité, que les mots définitivement remarquer cependant que la section qui comprend prononcé sur l'action publique, ne doivent pas être ces dispositions ne traite pas de la mort civile seule-pris à la lettre, dans le sens d'une décision passée ment, mais est intitulée d'une manière générale De la privation des droits civils par suite de condamnation judiciaire. Or, cette privation n'a pas

en force de chose jugée, sur le fond du droit, mais seulement dans le sens d'une décision définitive quant à la procédure et dessaisissant de la cause

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la juridiction criminelle; si l'action civile reprend | néanmoins être condamné à des dommages-intérêts sa liberté en vertu d'une ordonnance de non-lieu, par le juge civil. En effet, le verdict de non-culpail doit en être ainsi, à plus forte raison, d'un arrêt bilité prononcé par le jury ne décide pas nécessairendu par contumace, lequel, non seulement des-rement que le fait n'existe point, ou que l'accusé saisit la juridiction criminelle, mais statue sur le n'en est pas l'auteur; il résulte seulement de cette fond mème de l'action publique et impose des con- déclaration générale et non motivée que, si l'acdamnations qui, après l'expiration des délais légaux cusé a commis le fait qui est l'objet des poursuites, deviendront définitives dans le sens des décisions il n'a pas agi dans une intention criminelle. Or, que nous avons citées v Action civile, no 241. » chacun est responsable du dommage qu'il a causé — Pand. B., vo Contumace, nos 106 à 114. par autrui, même par simple faute. Le demandeur 102. L'autorité du jugement criminel à peut donc soutenir devant le juge civil que le l'égard des intérêts privés n'est pas illimitée; elle défendeur a commis le fait dommageable à raison ne s'applique qu'aux questions de fait qui ont réel- duquel il a été acquitté et qu'il l'a commis par lement et nécessairement été jugées par la juri-inattention ou négligence. En cas de dénégation de diction répressive. Ces questions ne peuvent plus la part de ce dernier, le demandeur doit être admis être l'objet d'aucune contestation devant les tribu-à prouver ce qu'il affirme. Si cette preuve est naux civils, qui sont incompétents pour les examiner fournie, le juge civil déclarera le défendeur coupable et pour les résoudre. Mais, quant aux points de fait qui n'ont pas été décidés par le jugement rendu sur l'action publique, le juge civil conserve toute latitude pour les apprécier dans leur rapport avec la demande qui lui est soumise. Tout ce que l'on peut et doit exiger, c'est que le jugement de l'action privée puisse se concilier avec le jugement de l'action publique et qu'il ne contredise point ce que ce dernier a décidé. La chose jugée par les tribunaux de répression ne lie donc pas indistinctement les tribunaux civils et l'application de la maxime: le criminel emporte le civil, doit se renfermer dans les limites que nous venons d'indiquer. HAUS, loc. cit., no 1420.

CHAPITRE NEUVIÈME.

De l'influence du criminel sur les diverses actions

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et questions civiles.

En cas de

d'avoir causé, par sa faute, du préjudice au demandeur et le condamnera à le réparer. Ce jugement se concilie fort bien avec la déclaration antérieure du jury; mais il la contredirait et devrait, par conséquent, être réformé ou annulé, s'il décidait que le défendeur avait intentionnellement causé le dommage, le jury ayant positivement déclaré le contraire. Toutefois, lorsque la loi exige, comme condition du crime, une intention méchante ou frauduleuse, et que l'accusé a été acquitté, le demandeur peut même soutenir devant le juge civil que, si le défendeur n'a pas agi méchamment ou frauduleusement, il a cependant causé le dommage sciemment et volontairement. HAUS, loc. cit., n° 1422.

§ II.

De l'influence du jugement répressif en cas de poursuite devant les tribunaux correctionnels, de police et les tribunaux militaires.

104. Si le jury répond à la question générale

De l'influence du jugement criminel sur de culpabilité sans indiquer les motifs de sa rél'action en dommages-intérêts. poursuites derant la cour d'assises.

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ponse, c'est-à-dire sans décider séparément chacune des questions spéciales que renferme cette

N. B. Les annotations des articles 3-5 rela-question complexe, les tribunaux correctionnels et tives à l'influence de la chose jugée au criminel, doivent être complétées par celles de l'article 366

du code d'instruction criminelle.

de police, chargés de prononcer à la fois sur la culpabilité et sur l'application de la peine, rendent d'ordinaire des jugements motivés, en décidant expressément et spécialement toutes les questions qui sont comprises dans la question générale de culpabilité. Les jugements motivés de la sorte ne permettent aucune incertitude sur les points de fait.

103. Le jugement criminel a, dans les limites indiquées, une autorité absolue à l'égard de l'action en réparation du dommage causé par le fait sur lequel la justice pénale vient de statuer. En conséquence, lorsque la poursuite a eu Ainsi, la culpabilité du défendeur ne peut plus lien devant la cour d'assises, l'accusé déclaré cou-être contestée devant la juridiction civile s'il a été pable par le jury n'est plus recevable à soutenir condamné par le tribunal correctionnel ou de podevant la juridiction civile, que le fait n'existe lice. Lorsque le tribunal l'a déchargé de la prévenpoint, ou qu'il n'a pas commis ce fait, ou, enfin, que celui-ci ne lui est pas imputable. La culpabilité du défendeur ne peut plus être mise en question; il ne reste plus au juge civil qu'à apprécier si l'infraction a réellement porté préjudice au demandeur et quelle est l'étendue de ce préjudice. Peu importe, en ce qui concerne les intérêts civils, que l'accusé, dont la culpabilité a été reconnue par le jury, ait été condamné ou absous par la cour d'assises, puisque le fait peut être dommageable et illicite, sans constituer une infraction. HAUS, no 1421. 103bis. L'accusé déclaré non coupable par le jury et, par suite, acquitté de l'accusation peut

tion, en déclarant soit que le fait n'existe point, soit que le prévenu n'en est pas l'auteur, soit, enfin, qu'on ne peut lui reprocher aucune faute dans le cas où la loi punit l'infraction alors même qu'elle est le résultat d'un défaut de prévoyance ou de précaution, le juge civil doit tenir ces points pour constants et absoudre le défendeur; tandis qu'il pourrait le condamner, si la juridiction répressive avait seulement déclaré que le prévenu avait agi sans intention criminelle. Que si celui-ci était renvoyé de toute poursuite pour insuffisance de charges, en d'autres termes parce que la culpabilité n'est pas prouvée ou parce que le fait n'est

pas incriminé par la loi, le jugement du tribunal de répression n'aurait aucun effet sur le jugement de

l'action civile.

Ainsi, le jugement du tribunal correctionnel qui renvoie le prévenu de la poursuite dirigée contre lui pour escroquerie ou abus de confiance, par le motif les faits imputés ne réunissent pas que les caractères de ces délits tels qu'ils sont définis par le code pénal, n'empêche pas que les mêmes faits puissent être articulés et établis devant la juridiction civile, à l'appui soit d'une action en dommages-intérêts, soit d'une demande en nullité de convention du chef de dol.

quel que soit son objet est suspendu, lorsque le fait ou quelques-uns des faits sur lesquels cette action est fondée, ont mis formellement en mouvement l'action publique. Voyez entre autres l'article 235 du code civil;" HAUS, loc. cit., no 1425.

§ IV.
De l'influence du jugement criminel sur
toutes les questions civiles decidées par ce
jugement.

106. Le jugement de condamnation a même, en these générale, l'autorité de la chose jugée à l'égard de toutes les questions civiles soulevées par Cependant le jugement correctionnel ou de police l'exercice de l'action publique et nécessairement laisserait planer de l'incertitude sur les questions décidées par ce jugement, pourvu que la juridiction de fait, s'il se bornait à motiver le renvoi du pré-répressive soit compétente pour les décider. Le venu sur ce qu'il n'est pas coupable de l'infraction prévenu poursuivi pour une infraction attentatoire mis à sa charge. Dans ce cas, on devrait suivre la aux propriétés immobilières, invoque, pour se jusrègle qui concerne l'autorité des déclarations de tifier, soit le droit de propriété ou tout autre droit non-culpabilité faites par le jury. En conséquence, réel immobilier, soit la possession légale. Si dans si l'infraction dont il s'agit suppose une résolution ce cas, nonobstant la question préjudicielle soulevée criminelle, le jugement ne fait pas obstacle à la par le prévenu, la juridiction répressive passe condamnation du défendeur à des dommages-inté-outre au jugement en décidant elle-même la quesrêts. Mais si, dans l'espèce, la simple faute était tion civile, le jugement n'a pas l'autorité de la punissable, le prévenu acquitté ne pourrait plus chose jugée en ce qui concerne cette question être condamné par le juge civil. - HAUS, no 1424. (Cass., 30 avril 1874, B. J. 1874, 690 et s). Il en 104bis. Les considérations d'ordre public serait de même si, dans une poursuite ayant pour qui commandent d'attribuer à la sentence pénale objet un crime ou un délit de suppression d'état, une influence souveraine sur le sort de l'action la question de filiation, directement soulevée par la civile, intentée séparément et non encore jugée, poursuite, était décidée par la cour d'assises ou le s'appliquent aux décisions de toutes les juridictions tribunal correctionnel. HAUS, loc. cit., no 1426. répressives. Les jugements des tribunaux militaires ont donc la même autorité que les jugements des tribunaux ordinaires en ce qui concerne l'action en dommages-intérêts. — HAUS, loc. cit., no 1424bis.

SIII.

105.

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107.- La condamnation pour faux en écriture fait loi non seulement contre le condamné, mais encore contre les tiers qui n'ont pas été ou qui, à défaut de qualité, n'ont pu être parties au procès criminel, et qui ne peuvent plus, devant la juridicDe l'influence du jugement criminel sur tion civile, présenter comme vrai ce que la juriles actions civiles autres que les actions en dom-diction répressive a déclaré faux. Ainsi, lorsque mages-intérêts. l'accusé a été condamné pour fabrication d'un faux testament, celui-ci ne peut plus être invoqué par Le principe de l'autorité absolue du les légataires, bien qu'ils n'aient pas été appelés jugement de condamnation rendu au criminel s'ap-aux débats (art. 463 du code d'inst. crim.). L'acplique non seulement à l'action en réparation du quittement de l'accusé poursuivi pour crime de dommage causé par les faits qui ont motivé la faux, implique seulement la négation de toute condamnation, mais encore aux autres actions intention criminelle de la part de l'agent, sans rien civiles qui résultent des mêmes faits, quel qu'en décider quant à la vérité de la pièce. L'arrêt qui soit l'objet, telles que les actions en divorce, en condamné l'accusé pour avoir détruit ou altéré la séparation de corps, en désaveu, en déchéance de preuve d'un mariage légalement contracté, en consla puissance paternelle, en révocation de donation tate l'existence; et son inscription sur les registres pour cause d'ingratitude, en rescision de conven-de l'état civil assure au mariage, à compter du tion, etc. La partie qui fonde son action sur ces faits est dispensée de les prouver, et le juge civil est obligé de les tenir pour constants. Son office se réduit donc à examiner si ces faits sont de nature En vertu du même principe, une conà justifier la demande. Quant à l'effet de l'acquit- damnation pour parricide établit la filiation du tement du prévenu sur l'action civile, il faut dis- condamné, sans décider si elle est légitime ou natutinguer. Lorsque celle-ci est uniquement fondée relle, à moins que l'accusé n'ait été condamné sur le fait ou les faits qui ont été l'objet de la pour avoir volontairement donné la mort à un poursuite répressive, le jugement fournit au défen-ascendant autre que le père ou la mère. deur une fin de non-recevoir contre le demandeur. Une condamnation pour bigamie établit que le Mais si un ou quelques-uns seulement des faits premier mariage n'est entaché d'aucune nullité abarticulés par le demandeur à l'appui de sa demande solue, ni d'aucune nullité relative et personnelle au ont provoqué l'exercice de l'action publique, l'ac- condamné; car ce crime ne peut se commettre que quittement du prévenu est sans influence sur l'action par celui qui est encore engagé dans les liens du civile, parce que celle-ci peut être fondée sur d'au-mariage au moment où il en contracte un autre. tres faits que ceux qui ont motivé la poursuite Sous ce rapport, le mariage est jugé valable vis-àrépressive. Au reste, l'exercice de l'action civile, vis du condamné et vis-à-vis de son premier époux;

jour de sa célébration, tous les effets civils, tant à l'égard des époux qu'à l'égard des enfants issus de ce mariage.

108.

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