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excessif à quelqu'un que cette répression soit poursuivie, sans égard à la circonstance que le fait a été commis hors de notre territoire.

L'honorable M. Thonissen a montré combien il serait intolérable et scandaleux de voir un étranger, coauteur ou complice d'un crime commis par un Belge et qui a amené la condamnation de celui-ci, braver impunément l'action de la justice en Belgique même, y jouir librement des fruits du forfait commun, de le voir même rendant visite au bagne à son complice moins heureux que lui. L'honorable M. Olin répond que l'honorable rapporteur ne lit pas l'article tout entier : l'article ne s'occupe pas seulement du cas où l'étranger est trouvé en Belgique après la condamnation du Belge, mais aussi du cas où l'étranger est poursuivi en Belgique, conjointement avec le Belge.

Il me semble que, dans ce cas, il y a une raison de plus pour que la loi belge soit seule appliquée et le soit à la fois au Belge et à l'étranger. Voyez, en effet, quel singulier spectacle serait celui-ci un crime a été commis à l'étranger par un Belge et un étranger; ils comparaissent devant la cour d'assises en même temps, et il pourrait se faire que la législation du pays de l'étranger frappant le même fait d'une peine moindre que la loi belge, le Belge serait puni d'une peine plus sévère que

l'étranger.

Cela froisserait le sentiment public. Le bon sens demande que la même justice frappe d'une même peine, à raison du même crime, les deux coupables. L'honorable M. Olin fait observer encore que, dans le cas actuel, il n'y a aucune nécessité pour la justice belge de poursuivre l'étranger. Le gouvernement, en effet, a contre lui la ressource de l'expulsion et celle de l'extradition.

L'expulsion est évidemment suffisante, on ne le conteste pas.

Quant à l'extradition, l'honorable membre voudra bien remarquer que nous ne disposons pas de cette arme. Il ne dépend pas de nous d'extrader ceux dont on ne demande pas l'extradition et je ne vois pas comment nous pourrions imposer aux gouvernements étrangers l'obligation de nous la demander. D'autre part, il peut se faire qu'il s'agisse d'un fait qui n'est pas prévu par le traité d'extradition. Je pense donc que les dispositions des articles 10 et 12(11 et 14), telles que M. le rapporteur les a expliquées et commentées devant la Chambre, sont parfaitement justifiées.

M. THONISSEN, rapporteur. Je n'ajouterai qu'une simple considération de fait. Les délinquants étrangers n'ont pas à craindre une rigueur exagérée en Belgique. Notre code est beaucoup plus indulgent que la plupart des codes étrangers. Les craintes manifestées par l'honorable M. Olin ne sont pas fondées. L'article 12 (14) est adopté. Séance de la Chambre du 4 décembre 1877, Législ. crim., no 15, p. 52.

3. Lorsque le détournement a été commis à l'étranger et que les valeurs soustraites ont été revendiquées en Belgique, la question de savoir s'il y a eu vol doit être résolue d'après la loi belge en vigueur à l'époque du fait délictueux.

Si la preuve de ce fait ne résulte pas suffisamment de la production d'un arrêt de condamnation rendu par un tribunal étranger, au moins est-il permis d'en tenir compte à titre de présomption, s'il s'agit d'une cause où la preuve testimoniale est admissible. Bruxelles, 26 novembre 1868, Pas. 1869, II, 88.

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1. « Le juge appelé à connaître d'une infrac- | absolue. Quelquefois, en effet, la loi veut qu'un des tion est naturellement investi du pouvoir de véri- éléments de l'infraction soit préalablement consfier l'existence de tous les éléments constitutifs de cette infraction, et, par conséquent, de décider, en statuant sur le fond du procès, toutes les questions relatives à ces éléments. Mais la règle n'est pas

taté et apprécié par un autre juge. On comprend aisément que la décision de la question qui fait l'objet de cet examen distinct et séparé, doit juger d'avance ou préjuger les autres questions qui en

dépendent. C'est principalement pour ce motif celle-ci exclut la poursuite sans effacer le crime. qu'on la nomme question prejudicielle. On désigne ; Le jury ne peut même admettre l'excuse qu'apres donc par ce terme, en matere repressive, la ques- avoir declare l'accuse coupable du fait qui lui" est tion qui se rattache à l'existence d'une infraction impute art. 134 et 136 du code pen.). et qui doit être jugée dans une instance séparée et La question d'identité d'un individu condamné, préalable. La partie qui soulève une question pré- évadé et repris (art. 518 a 520 du code d'instr. judicielle devant la juridiction répressive, oppose crim. est aussi une question préalable et non pas a l'action publique une exception dite préjudicielle. une question prejudicielle, comme la qualitie Par cette exception qui est temporaire ou dilatoire l'arrêt de cassation belge du 21 octobre 1861 (fin de non-proceder), elle demande que la pour-Pas. 1862, I 218. Pour être prejudicielle, il ne snite soit suspendue jusqu'au jugement définitif de suffit pas que la question s'applique a un fait sans la question préjudicielle. lequel l'infraction ne peut se concevoir; il faut, de Toute question préjudicielle a pour objet un fait plus, qu'elle donne lieu à une instance et à un jugequi est une condition essentielle de l'infraction |ment préalables (præjudicium. Les questions que dont il s'agit; elle se rattache, par conséquent, ale tribunal doit décider dans la même instance, en l'existence même du délit. On ne peut donc compter statuant au fond, ne peuvent donc être rangées parmi les questions préjudicielles, les questions dans la catégorie des questions prejudicielles, qui nécessitent aussi un jugement préalable, mais quand même elles concernent un élément essentiel qui, étrangeres au délit même, ne concernent que de l'infraction. Telles sont, d'abord, toutes les la recevabilité de l'action publique et, par suite, questions de droit civil qui, bien qu'elles se ratl'application de la peine. On appelle préalables ces tachent à l'existence même du délit, doivent être sortes de questions, pour les distinguer des ques-décidées par le tribunal de répression. Telles sont tions préjudicielles proprement dites. Le ravisseur qui a épousé la fille qu'il avait enlevée ou fait enlever, et ceux qui ont participé à l'enlèvement ne peuvent être poursuivis qu'après que la nullité du mariage aura été définitivement prononcée par le tribunal civil. Ainsi, lorsque l'enlèvement n'a pas été suivi de mariage, le ministère public peut librement poursuivre le ravisseur et ses complices. Mais si celui-ci a épousé la personne enlevée, l'exercice de l'action publique est suspendu par la question de validité ou de nullité du mariage contracté, question qui est simplement préalable et non pas préjudicielle à cette action, car elle ne se rattache par aucun lien au rapt même, qui n'en constitue pas moins un crime ou un délit bien que le mariage n'ait pas été attaqué ou que sa validité ait été reconnue par le tribunal civil. Remarquez 3. Il y a question préjudicielle pénale et disque cette question suspend non seulement le juge-ciplinaire dans le cas de l'article 447, § 3, du code ment de l'action publique, mais l'exercice même de pénal, calomnie, dénonciation colomnieuse. Nous cette action, qui ne peut être intentée par le minis- renvoyons à notre commentaire de cette disposition. tère public tant que la nullité du mariage n'est pas prononcée.

Le code de 1810 subordonnait la poursuite du ravisseur à une double condition: l'annulation du mariage et une plainte des personnes qui ont le droit de demander cette annulation. Le législateur belge a supprimé la soconde condition. Législ. crim. de la Belgique, t. III, p. XI et XII, notes sur l'art. 371.

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C'est par erreur que NYPELS (Code pénal interprété, art. 371, no 23) considère la question de validité du mariage contracté par le ravisseur avec la personne enlevée comme une question préjudicielle. En effet, le délit d'enlèvement subsiste bien que, dans le cas où le mariage a été déclaré valable, l'action publique et, par suite, la peine soient écartées. Le fait incriminé par la loi ne perd pas son caractère délictueux lorsqu'il cesse d'être punissable, soit parce que l'action publique n'est pas ou n'est plus recevable, soit parce que l'accusé peut invoquer une excuse péremptoire. Ainsi, les soustractions entre conjoints, proches parents ou alliés ne sont pas moins des vols, quoiqu'elles restent impunies, l'action publique étant supprimée art. 452 du code pén). La prescription de

ensuite les questions de savoir si l'accusé ou le prévenu a agi avec discernement, dans le cas où il était àgé de moins de seize ans au moment du fait; s'il a été en démence ou contraint par une force à laquelle il n'a pu résister; s'il a connu ou ignoré la criminalité de l'ordre donné ou exécuté, etc. » HAUS, 3e édit., nos 1180 à 1182, p. 397 et s. Cons. GARRAUD, Précis de droit criminel, édit. de 1901, p. 592, no 432.

2. On distingue les questions préjudicielles pénales, les questions préjudicielles disciplinaires, les questions préjudicielles administratives et les questions préjudicielles civiles.

Le titre préliminaire du code de procédure pénale traité uniquement des questions préjudicielles civiles.

Les questions préjudicielles pénales et disciplinaires ne surgissent que dans les procès en calomnie et elles ne sont préjudicielles qu'au jugement de ces procès, intentés devant le tribunal de répression ou devant la juridiction répressive.

4. Les questions administratives se rattachant à l'existence d'une infraction sont préjudicielles à cette action en vertu du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, principe qui ne permet pas aux tribunaux de constater des faits dont la vérification appartient à l'autorité administrative.

Nous trouvons une question préjudicielle administrative dans l'article 210 de la loi électorale de 1894 qui, dans le cas qu'il spécifie, édicte que la poursuite ne peut avoir lieu que dans le cas où la demande d'inscription ou de radiation aura été rejetée par une décision devenue définitive et motivée sur des faits impliquant la fraude.

Nous voyons également une question préjudicielle administrative, lorsqu'un fonctionnaire ou agent comptable de deniers publics est poursuivi du chef de détournement de ces deniers avant que le déficit dans la caisse ait été constaté par l'autorité administrative compétente et que le prévenu

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en conteste l'existence; dans ce cas, le tribunal de | La loi déroge au principe dans un seul cas : celui répression doit surseoir jusqu'à ce que la compta- où le ravisseur a épousé la fille qu'il a enlevée. bilité de l'inculpé ait été vérifiée par cette autorité. Dans ce cas, en effet, l'action publique ne peut être Si l'apurement des comptes fait disparaître le reli- intentée par le ministère public qu'après que le quat, le prévenu doit être acquitté. Si l'existence mariage a été annulé par le tribunal civil (art. 371 du déficit est déclarée, le juge répressif aura à du code pénal). apprécier la moralité du fait, c'est-à-dire l'inNous verrons sous l'article 16 du titre tention frauduleuse du comptable. Il n'y aura préliminaire du code de procédure pénale que pas lieu à surseoir, lorsque ce dernier a été lorsque l'existence d'un fait dont l'appréciation dénoncé comme coupable de détournement au soulève une question de droit civil, les tribunaux ministère public, par l'autorité administrative de répression ont également le pouvoir de décider ayant qualité pour examiner et juger la comptabi- cette question, à moins qu'elle ne soit réservée lité, dénonciation qui suppose la vérification du à la juridiction civile par une disposition expresse fait matériel par cette autorité, pourvu, toutefois, de la loi. Dans ce cas, la question devient préjudique le montant du déficit y soit indiqué, puisque la cielle et l'exercice ou le jugement de l'action loi en fait dépendre le taux de la peine (art. 420 du publique est suspendu jusqu'à ce que le tribunal code pénal, auquel nous renvoyons). civil ait définitivement prononcé sur cette question. Telles sont les questions d'état de filiation, lorsqu'il s'agit d'un crime de suppression d'état. Telles sont aussi les questions de propriété ou de tout autre droit réel ou de possession légale, qui Nous verrons sous l'article 15 du titre prélimi- s'élèvent dans les poursuites ayant pour objet des naire du code de procédure pénale, que cette dis-délits attentatoires aux propriétés immobilières. position proclame le principe que tout juge compé- Telle est enfin la question d'admissibilité de la tent pour statuer sur le procès dont il est saisi est preuve testimoniale, lorsqu'elle dépend d'un écrit également compétent pour décider les questions désavoué par celui auquel on l'oppose (art. 327 du qui s'élèvent dans ce procès; que ce principe n'ad-code civil; art. 16, § 2 et 17 de la loi du 17 avril met des exceptions que dans les cas où une disposition formelle de la loi réserve le jugement de ces questions à la juridiction civile. Le civil tient alors le criminel en état.

5. Il y a, nous l'avons dit, des questions préjudicielles civiles en matière répressive. Elles font l'objet du code de procédure pénale (loi de 1878).

1878). Les premières sont préjudicielles à l'exercice de l'action publique, les autres sont préjudicielles au jugement de cette action.HAUS, 3e édit., nos 1193 à 1195.

Toutes les questions relatives à la recevabilité Un principe qu'il ne faut jamais perdre de vue, de l'action publique sont de la compétence des juri-c'est que les questions et exceptions préjudicielles dictions répressives. dérogéant aux règles ordinaires de la compétence Ainsi, lorsque la poursuite a pour objet un ne peuvent résulter que d'un texte formel. Les crime ou un délit commis hors du territoire du procès de répression seraient, en effet, intermiroyaume et que l'inculpé traduit devant la juridic-nables, contrairement à l'intérêt public, si le juge tion belge prétend qu'il est étranger, la question devait s'arrêter, lorsqu'il rencontre une question de nationalité doit être décidée, non par le juge secondaire qui sortirait de sa compétence, en civil, mais par le tribunal de répression. Pareillement lorsque, dans une poursuite pour vol, l'inculpé soutient qu'il est conjoint, proche parent ou allié du propriétaire des objets soustraits, le jugement de la question d'état appartient à la loi pénale.

admettant qu'elle lui fut directement soumise. Par conséquent, à moins d'exception formelle d'interprétation stricte comme toute exception, le juge n'est pas tenu de se dessaisir d'un des éléments du procès porté devant lui. — GARRAUD, Précis de droit criminel, édit. de 1901, no 434, p. 593.

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Sauf les exceptions établies par la loi, les tribunaux de répression jugent les questions de droit civil qui sont soulevées devant eux incidemment, à l'occasion des infractions dont ils sont saisis.

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CHAPITRE UNIQUE.

Les tribunaux répressifs sont, en principe, competents pour juger les questions de droit civil soulevées devant eux incidemment ou à l'occasion des infractions dont ils sont saisis.

1. Nous lisons dans le rapport de M. Thonissen, au nom de la commission de la Chambre, ce qui suit (Législ. crim., p. 31, nos 21 à 26) :

de répression, en statuant sur l'existence de ce contrat ou sur son interprétation, se conformera aux règles du droit civil.

« Si l'admissibilité de la preuve testimoniale dépend d'un écrit désavoué par celui auquel on l'oppose, la vérification en sera ordonnée devant les juges civils compétents.

« III. Si le prévenu excipe d'un droit de propriété ou autre droit réel immobilier, le tribunal «Dans le projet élaboré par la première commis-saisi de l'action publique statue sur l'incident sion de revision du code de procédure pénale, en se conformant aux règles suivantes : instituée en 1850, le titre préliminaire contenait un chapitre sur les questions préjudicielles.

«Ce chapitre se composait de cinq articles, dont les trois premiers formulaient des règles générales. Le quatrième empruntait au code civil Guillaume, qui devait régir l'ancien royaume des Pays-Bas, la solution des controverses soulevées au sujet de la règle posée par l'article 327 du code civil. Le cinquième résolvait, conformément à la jurisprudence actuelle, les difficultés que rencontre le jugement des questions préjudicielles en matière de bigamie. «En formulant ces deux derniers articles, la commission avait commis une faute. D'une part, elle transportait dans le code de procédure pénale des dispositions qui appartiennent, par leur essence, au code civil; de l'autre, elle transformait en textes impératifs des règles spéciales que la jurisprudence avait seule établies, qu'elle pouvait modifier encore, et qui, du moins en partie, sont contestées par de savants jurisconsultes. Elle eût dû se contenter de proclamer les règles générales qui dominent la matière et ressortent clairement de l'ensemble de la législation nationale.

«Mais la seconde commission extra-parlementaire, qui a rédigé le projet soumis à nos délibérations, a versé dans un autre excès en rejetant le chapitre entier. Elle avait raison de repousser les deux articles relatifs aux crimes de bigamie et de suppression d'état; mais elle pouvait très utilement aborder l'examen des trois autres qui attribuaient à des règles générales, longuement discutées par les criminalistes, le caractère permanent et la force obligatoire d'une disposition législative.

«L'exception préjudicielle ne sera admise qu'autant qu'elle soit fondée sur un titre apparent ou sur des faits de possession précis. << Les titres produits ou les faits articulés devront être de nature à ôter au fait qui sert de base aux poursuites tout caractère d'infraction.

<< Dans le cas de renvoi à fins civiles, le jugement fixera un délai de deux mois, au plus, dans lequel la partie qui aura élevé la question préjudicielle devra saisir le juge compétent et justifier de ses diligences; sinon, il sera passé outre au jugement.

« Un autre membre de la commission (M. Pirmez), repoussant ces amendements et entrant dans une voie tout à fait opposée, a prétendu qu'on pourrait, sans inconvénient, attribuer aux tribunaux criminels le droit de résoudre toutes les questions préjudicielles civiles.

«Il a développé son système dans les termes suivants :

«La matière des questions préjudicielles est pleine de difficultés.

«Elle a, dans le principe des lois nouvelles, donné lieu à tant de décisions contradictoires que la cour de cassation de France, par une mesure unique en son genre, s'est réunie en assemblée générale pour arrêter les règles qu'elle y suivrait. Ces règles ont généralement été adoptées par la doctrine et la jurisprudence, mais elles constituent un système dépourvu d'harmonie, contraire sur hérissé de complications que rien ne justifie. plusieurs points aux principes du droit pénal, et

« Le point de départ de ce système est vrai; il pose le principe général que le juge saisi d'une action pénale peut apprécier et statuer sur toutes les questions que cette action soulève; c'est ce qu'on exprime par cette formule plus exacte que le juge de l'action est le juge de l'exception.

«La commission parlementaire a cru qu'il y avait lieu de réparer l'erreur commise. Par quatre voix contre une, elle a décidé que les règles générales destinées à guider les juges dans la solution des questions préjudicielles civiles seraient formulées dans le texte du titre préliminaire du code de procédure pénale. Elle a cru que ce code devait être mis en harmonie avec ceux des nations étrangères, «Mais on a apporté à ce principe une double qui contiennent tous des dispositions sur les ques-restriction; on admet qu'il y a lieu à renvoi devant tions préjudicielles.

« A la suite de ce vote, un membre a proposé de placer, après l'article 12 du projet, un chapitre composé des amendements suivants :

le juge civil quand une question d'état ou quand une question de propriété immobilière est soulevée.

« Ces exceptions sont fondées surtout sur l'idée que la solution des questions d'état et de propriété << I. Les tribunaux de répression jugent les immobilière peuvent présenter des difficultés que la questions de droit civil qui sont soulevées juridiction criminelle est peu propre à résoudre et devant eux incidemment à l'occasion des in-qui, par leur importance, demandent à avoir des fractions dont ils sont saisis, sauf les disposi-garanties que la juridiction civile présente seule. tions des articles suivants.

<< II. Lorsque l'infraction se rattache à l'exécution d'un contrat dont l'existence est déniée ou dont l'interprétation est contestée, le juge

«Si cette idée était fondée, il semble qu'elle eût tion ou tout au moins être reçue sans restriction dû prévaloir dans toutes les parties de la législaen matière pénale.

« Il est loin d'en être ainsi.

LOI 17 AVRIL 1878.

« On ne fait nulle difficulté de laisser les ques- Mais la question préjudicielle ainsi réduite et tions de nationalité à la connaissance des tribunaux étudiée même isolément, sans s'arrêter à l'anomalie judiciaires ou administratifs devant lesquels elles qu'elle constitue dans la législation, se justifies'élèvent incidemment; il en est ainsi pour l'appli-t-elle? cation des lois sur l'électorat, sur la milice, sur «Rien n'est plus difficile à déterminer que la l'extradition; si même une question d'élection ou nature des faits dont la juridiction criminelle doit de milice faisait naître une question d'état, rien s'abstenir de connaître par respect pour le domaine n'autoriserait un renvoi devant les tribunaux. réservé à la juridiction civile; mais, sans entrer L'incompatibilité dérivant d'un certain degré de dans le dédale des distinctions et des hypothèses parenté entre conseillers communaux, l'exemption que la doctrine a créées pour sortir d'embarras, il du service pour le frère de celui qui a rempli la est facile de démontrer que ces dispositions sont charge militaire peuvent soulever ces questions. absolument contraires aux principes généraux de «Mais, en matière pénale, les questions d'état ne nos lois. doivent pas toutes être renvoyées devant la juridiction civile. En matière de filiation, ce n'est que lorsqu'un état, qui appartient à un enfant par sa naissance, a été supprimé et qu'il s'agit de la poursuite du délit de la suppression d'état que la question est préjudicielle. «Dans toutes les autres circonstances », dit M. HAUS (Principes généraux du droit pénal, nos 1127 et 1128), «les questions « d'état qui se rattachent à un crime ou à délit « n'ont aucun caractère préjudiciel; elles ne sus<< pendent ni l'exercice ni le jugement de l'action «publique; les tribunaux de répression ont le « pouvoir de vérifier les faits qu'elles ont pour « objet, parce qu'ils ont le droit d'apprécier tous « les éléments des infractions qui leur sont déférées « et que, dans le cas dont il s'agit, aucune dispo«sition légale ne leur enlève la connaissance de ces « faits pour la réserver à la juridiction civile. La « règle s'applique même aux questions d'état de «filiation qui ne sont pas formellement réservées « par la loi. Ainsi lorsque, dans une poursuite qui « a pour objet tout autre crime ou délit qu'une << suppression d'état, il s'élève incidemment une <«< question de filiation qui se rattache à ce crime «ou à ce délit, la question est décidée par le juge « de la culpabilité, par conséquent, en matière « criminelle, par le jury. Telle est, dans une accu-ment reconnue; c'est un crime de suppression «sation de parricide, la question de savoir si «l'accusé est le fils légitime ou naturel de la « victime. Telle est encore dans une poursuite pour «< attentat à la pudeur, pour prostitution ou cor«ruption de mineurs, la question de savoir si «l'accusé ou le prévenu est l'ascendant de la per«sonne qui a été l'objet de l'attentat, de la corrup-celui qu'elle soupçonne; mais ici, parce qu'il s'agit «<tion ou de la prostitution.

« Telle est, enfin, dans une poursuite intentée « soit pour évasion d'un détenu, soit pour recèle«ment d'un criminel ou du cadavre d'une personne « homicidée, la question de savoir si le prévenu «est ascendant ou descendant du détenu dont il a « facilité l'évasion, du malfaiteur par lui recélé «< ou du complice de l'homicide. »

«On se demande pourquoi si, dans certains cas, la juridiction criminelle peut trancher des questions de filiation, elle ne le pourrait pas dans tous les cas. Toute distinction à cet égard ne constituet-elle pas une bizarrerie que des textes de loi peuvent imposer au jurisconsulte, mais que le législateur doit rejeter?

Les articles 326 et 327 du code civil réservent exclusivement les réclamations d'état aux tribunaux civils et veulent que l'action criminelle, contre un délit de suppression d'état, ne puisse commencer qu'après le jugement sur la question d'état.

« On admet que, dans les conflits qui s'élèvent entre les procédures criminelles et les procédures civiles, les premières doivent l'emporter; on admet la prééminence aux décisions provoquées par l'intérêt général sur celles qui ne touchent qu'à l'intérêt privé; les jugements rendus lorsque la société est en cause, par ses mandataires judiciaires, s'imposent à ceux qui doivent trancher des contestations entre particuliers. Mais ici, s'écartant complètement de ces principes, l'on veut que la poursuite publique soit subordonnée à une instance civile, et, par une injustifiable contradiction, on introduit cette dérogation précisément dans une matière où, les droits privés étant directement liés à l'ordre social, il serait plus légitime que partout ailleurs de les soumettre aux sentences provoquées par le ministère public. Il y a plus on paralyse l'action du ministère public quant à un crime dont les victimes sont presque toujours mineures et sont ainsi confiées à sa garde. N'est-ce pas une dérision, en pareille matière, de parler du respect de secrets que les familles ne veulent pas divulguer?

« Un crime de faux a été commis dans un acte de l'état civil; il a pour objet d'attribuer à un enfant une filiation qui n'est pas la sienne. Il faut surseoir jusqu'à ce que cette filiation ait été civile

d'état. Mais, dans l'instance civile, l'acte de naissance fait foi jusqu'à inscription de faux; s'il s'agissait d'une somme d'argent, d'une question purement privée, la juridiction civile devrait, si elle trouvait des indices accusateurs, renvoyer les faits au ministère public et même faire arrêter

d'un intérêt social, il faut exclure les poursuites publiques! Et pourquoi cependant? On parle de difficultés de preuve, de la longueur des instructions; mais pourquoi y aurait-il une procédure plus difficile ou plus longue quand il s'agit d'un acte de l'état civil que lorsqu'un autre acte est argué de faux?

<< Comme il arrive toujours quand la loi s'écarte des principes, elle ne maintient point partout l'inconséquence qu'elle commet. Nous venons de voir les articles 326, 327 du code civil subordonner les poursuites criminelles à une instance civile; l'article 198 du même code fait le contraire il veut que, si une procédure criminelle constate l'existence d'un mariage, elle assure aux époux et aux enfants tous les effets civils du mariage.

«Le système des questions préjudicielles n'offre pas moins de difficultés quand on l'applique à l'existence du lien conjugal.

«Si l'on invoque dans une poursuite d'adultère

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