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nous faudrait trop de temps et de place pour en aborder les détails; nous dirons seulement un mot du recrutement de cette troupe d'élite.

D'après le décret de l'an XII qui se référait à l'arrêté de l'an XI dont nous avons parlé, le bataillon comprenait cinq équipages de matelots et un dépôt de marins formé à Paris pour maintenir constamment les équipages au complet.

Ces marins devaient être levés dans les différents quartiers des classes, mais en majeure partie pour la première formation, dans ceux du Midi et de l'île de Corse.

Un décret impérial du 16 septembre 1810 porta à 1,136 hommes, officiers compris, l'équipage de marins de la Garde impériale et composa le corps d'un état-major et de 8 compagnies. L'article 5 du décret disposait :

Pour la formation de cet équipage, 5 compagnies seront fournies par les marins faisant actuellement partie de notre Garde Impériale.

Pour les autres compagnies l'Austerlitz, le Majestueux et le Commerce de Paris fourniront, chacun de son équipage actuel, les quatre cinquièmes, choisis par l'officier général qui monte chacun de ces vaisseaux.

Le cinquième de chacune de ces trois dernières compagnies sera fourni par une levée faite dans les quartiers d'inscription maritime, parmi les marins d'élite ayant fait au moins trois campagnes sur nos vaisseaux de guerre.

Les loups de mer de la flotte venaient rivaliser de prestance et de vaillance avec les grognards, élite de l'armée. Ils rivalisèrent aussi de dévouement, et fournirent leur contingent à l'île d'Elbe, avec les grenadiers, les chasseurs, l'artillerie et les Polonais de la Garde.

Gal V.

LA NOUVELLE SALLE DU MUSÉE DE L'ARMÉE

Le dimanche 25 décembre, jour de Noël, la seconde des salles du musée, baptisée salle Bugeaud, présentée trois jours auparavant à la commission d'organisation, a, sur l'autorisation expresse du ministre de la guerre, ouvert ses portes au public. Débutant par la prise d'Alger pour suivre en finissant nos troupes de marine et coloniales dans leur marche aventureuse en Asie et en Afrique, cette salle ferme le cycle militaire résumé dans les deux grandes salles dites des Armées, et qui commence aux régiments d'Henri IV. L'image du Béarnais et des vaillants compagnons de sa fortune, les armes de leurs soldats manquent cependant encore au seuil de la salle Turenne, dont elles devront compléter la signification historique. Plus on remonte vers les origines de l'armée permanente, plus naturellement les trophées et les souvenirs authentiques deviennent rares, mais le musée de l'armée ne fait que de naître, il a l'avenir pour lui et ne saurait se meubler que peu à peu. Les dons qu'il ne cesse de recevoir, depuis les plus modestes jusqu'aux plus importants, prouvent que son but est compris et lui a conquis une population comme la nôtre, dont le cœur vibrera toujours, quoi qu'on fasse, à l'unisson des flottements du drapeau.

Impossible de citer ici tous ces dons dont l'ensemble est une preuve émouvante de ce sentiment. Le directeur du musée a cependant le devoir de signaler ici les plus importants: ils viennent de l'État lui-même. L'administration des beaux-arts s'est dessaisie en faveur du musée de deux meubles faisant partie des équipages de campagne de l'empereur Napoléon Ier: un fauteuil pliant et un tabouret en fort cuir rouge. Les solides étuis qui les accompagnent prouvent bien leur destination guerrière; qui sait de quel bivouac ils sont revenus ici ?

La magnifique draperie de velours violet toute bordée d'or qui recouvrit le cercueil impérial lors du retour des cendres, venant également du garde-meuble, prendra place non loin des deux premiers objets. Près d'elle une sorte de corbillard improvisé, char funèbre d'une fabrication assez rustique, mais que signale à l'attention l'empreinte ou plutôt l'encadrement d'un cercueil sur sa plate-forme. Conservée avec le mobilier de la couronne, cette grande voiture noire fut, d'après la tradition, employée à Sainte-Hélène pour transporter le corps exhumé de Napoléon Ir de la tombe de Longwood à la frégate La Belle Poule, où ces restes, toujours reconnaissables à l'ouverture du cercueil, rentrèrent sur un sol français, salués de nouveau par des salves françaises, premier écho de lointaines victoires et qui durent les faire tressaillir.

En arrière de la vitrine centrale contenant un chapeau de l'Empereur, vient d'être placée une autre vitrine renfermant des reliques de quelques-uns de ses principaux lieutenants. Au premier rang brille le superbe uniforme brodé du maréchal Lannes, le baudrier, tout couvert de riches attributs, de son glaive d'apparat, son ceinturon antérieur de divisionnaire, dont les hiéroglyphes brodés sur drap écarlate rappellent la campagne d'Égypte. Le musée doit ce don précieux à un petit-fils du maréchal, M. de Montebello, ancien chef d'escadron d'artillerie. Presque en même temps, le grand uniforme et la ceinture blanche du maréchal Regnaud de Saint-Jeand'Angély, qui commanda la seconde garde impériale, donnés par sa fille et son gendre, M. le comte Davilliers, prenaient place dans la vitrine des maréchaux de la salle Bugeaud.

L'espace nous manque malheureusement, en ce dernier fascicule de 1898, pour continuer cette énumération, que tous les visiteurs du musée pourront facilement poursuivre en lisant les petits écriteaux placés au pied de chaque objet.

La tâche du musée en 1899 est devenue maintenant d'entreprendre l'organisation des quatre salles consacrées à l'histoire de nos. différentes armes et aux trophées régimentaires, reconstitution difficile mais essentielle, qui réclamera plus d'un concours; là pourrait se manifester toute l'efficacité de l'entente appelée de tous nos vœux dans le Carnet de novembre et qu'il serait si désirable d'organiser sans tarder, au profit de la prochaine exposition rétrospec

tive, comme à celui du musée. Les symptômes favorables signalés déjà se sont d'ailleurs continués au sujet du régiment de Berchény. M. le marquis de Pange a fait revenir de Lorraine un beau portrait du dernier fils du maréchal, qui lui succéda dans le commandement de son régiment. Le musée espère en avoir une copie fidèle grâce à la courtoisie de son possesseur. M. le général Belbèze nous a fait parvenir, de son côté, la photographie d'un vieux portrait gravé du maréchal lui-même, conservé à la mairie de La Ferté-sous-Jouarre. Il existe encore au moins un autre portrait du premier inspecteur permanent des hussards; malheureusement, nous a-t-on dit, il ne porte pas non plus l'uniforme de Berchény.

La trouvaille la plus inattendue est certainement celle d'une ceinture ou écharpe des soldats de ce régiment fameux, telle que la décrit le règlement de 1776: le fond jaune avec les boutons bleu céleste. M. le colonel de Mandat-Grancey a bien voulu nous envoyer d'un château de la Haute-Marne cette rareté unique, qui s'y est conservée par miracle. Avec les divers objets provenant du régiment de L'Hôpital-dragons, venus du même donataire, ce sont actuellement les pièces d'uniforme les plus anciennes du musée.

La suite des notices du musée dira les groupes très importants d'objets donnés ou promis par les familles de deux des membres que la Sabretache eut le chagrin de perdre en 1898. La raison d'être de la présente note, rédigée trop à la håte, était surtout le devoir d'enregistrer ici l'ouverture de la salle Bugeaud, que la presse quotidienne a signalée déjà.

Gal V.

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