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sur le chemin de La Valette à Toulon, ont été repris dans la suite, surtout dans la dernière guerre, en 1746 et en 1747. Ils ont même été portés plus loin, mais exécutés seulement en partie et imparfaitement, parce qu'on n'avait ni le temps, ni les moyens suffi

sants. »

En 1793, la ville fut attaquée du côté de la terre, par l'ouest; l'armée assiégeante avait débouché des gorges d'Ollioules, et elle dut s'emparer du fort Mulgrave (fort Napoléon actuel), pour pouvoir bloquer la ville du côté de la mer.

En 1752, l'opinion admise était que Toulon ne pouvait être assiégé qu'après une bataille perdue ou une retraite ; la ville aurait été alors tout naturellement défendue par les débris d'une armée, mais il fallait également envisager le cas où l'ennemi pourrait disposer de forces supérieures, serait maître de la mer, tenterait des débarquements, tirerait ses approvisionnements de sa flotte et où ses opérations maritimes seraient facilitées par ses troupes de

terre.

Du côté de la terre, la ville avait une fortification régulière et en bon état; en 1746, on avait établi un camp retranché au nord, daus le double but de forcer l'ennemi à reculer ses approches et de loger l'excédent de la garnison. En 1746 et 1747, on avait installé un second camp à La Malgue.

Ces camps parurent inutiles, et le projet de défense proposé par le marquis de Paulmy comprend la construction de deux redoutes, l'une entre le Faron et le fort d'Artigues, l'autre entre Sainte-Catherine et le fort La Malgue; la mise en état de la redoute SainteCatherine; la construction d'un fort sérieux à La Malgue; de nombreuses améliorations au fort des Pomets.

Ces projets, adoptés pour la plupart, n'ont presque pas été modifiés aujourd'hui; on a conservé les forts Rouge, d'Artigues, de Sainte-Catherine, de La Malgue, du Cap-Brun et des Pomets. L'enceinte a été reconstruite à grands frais et reliée à l'ouest avec le fort Malbousquet.

Le Faron a été compris dans la défense et couvert de nombreux ouvrages (fort Faron, fort de la Croix-Faron, tour du Beaumont, la batterie à Crémaillère, reliant le fort Faron à la Croix-Faron, les batteries du pas de La Masque et de la tour du Beaumont).

Enfin, on a construit la redoute de Saint-André, au sud du fort des Pomets, et le fort Saint-Antoine, un peu au sud du fort Rouge.

« Ces lignes, avec leur multiplicité d'ouvrages d'une défense étendue, sont d'un entretien dispendieux, et, par cet endroit, Toulon pourrait, en quelque sorte, être comparé à Briançon, dont j'ai déjà remarqué que les défenses extérieures et accessoires étaient accumulées les unes sur les autres; du reste, ce défaut est aussi inévitable qu'il est sensible, et l'on doit faire attention que l'on trouve très peu de places dans des pays de montagne qui ne soient dominées, qui n'aient par conséquent besoin de s'étendre hors d'elles-mêmes et d'emprunter des forces étrangères dans leurs environs. »

Pour les besoins de la défense, Toulon devait faire fonds sur les approvisionnements de l'arsenal; en 1746, il y avait plus de 500 canons en batterie sur les remparts; mais ce pouvait-être un danger de ne pas séparer nettement les attributions de la guerre et de la marine.« Il ne faudrait pas cependant se reposer entièrement sur la marine, ni pour l'artillerie, qui pourrait se trouver presque toute employée pour des armements subits, ni pour les munitions de guerre, et encore moins pour les préparatifs à faire et les services à rendre en temps de guerre. »

Du côté de la mer, la défense dépendait du département de la marine; la rade était inattaquable et les vaisseaux y trouvaient un abri à la fois et contre le mauvais temps et contre l'ennemi. Les défenses actuelles sont à l'est, le fort Sainte-Marguerite, le fort et la batterie du Cap-Brun, le fort Saint-Louis et la batterie de la Grosse-Tour; à l'ouest, la batterie et le fort de l'Éguillette, le fort Balaguier et le fort Napoléon.

De la tour de Balaguier au cap Cépet, la côte est assez propice à un débarquement; en 1746, on y avait installé cinq batteries, abandonnées aujourd'hui. La partie sud de la presqu'île est d'un abord relativement facile, et l'ennemi aurait pu être tenté d'y débarquer pour prendre les batteries à revers et contrebattre les forts de Balaguier et de l'Éguillette. On y avait remédié au moyen de batteries établies au cap Cépet, à la Condoulière, à Saint-Elme, à la Verne et à Faubregas, batteries conservées encore aujourd'hui.

« Du cap Sicié à la plage de Bandol, les débarquements sont peu à redouter; il serait bon cependant, pour plus de sécurité, d'y laisser les batteries qui y avaient été installées en 1746.

«

Quand j'ai dit que les descentes sur les plages à l'ouest de Toulon n'étaient pas fort à craindre, c'était en supposant qu'avec de la vigilance à les prévenir, on aurait des forces suffisantes pour les empêcher ou les repousser; sinon, elles auraient toutes les suites qu'il en faut appréhender et ne seraient même pas difficiles dans l'exécution, car il est évident que ces batteries nombreuses, dont la côte est semée, ne la défendraient qu'autant qu'elles seraient soutenues par des troupes. On sait que la plupart sont fortifiées médiocrèment ou point du tout, qu'elles sont presque toutes placées dans des endroits bas et soumis à des hauteurs qu'on ne peut éviter, par conséquent exposées à être enlevées sans beaucoup de peine par des détachements ennemis débarqués furtivement. Le remède que l'on a proposé, qui serait de retrancher la gorge de ces batteries et d'en faire des espèces de redoutes, et d'occuper par des ouvrages les hauteurs qui les dominent, ne serait cependant point praticable, et il ne serait guères moins ridicule de mettre toute une côte en fortifications qu'en ports de mer. »

Le 11 août, le marquis de Paulmy part pour Marseille, en suivant la route de terre.

On avait choisi, pour couvrir les trois villes de Toulon, Marseille et Aix, une ligne allant depuis le village de Peyrolles, sur la Durance, jusqu'au fort des Pomets, à Toulon. Les ingénieurs avaient proposé de lui faire suivre les sinuosités de la montagne; mais sa longueur qui, à vol d'oiseau, n'était que de 15 ou 16 lieues, en mesurait plus de 23 sur le terrain; elle avait en outre le grave. inconvénient d'être accessible sur plus de moitié de sa longueur, partie qu'il serait nécessaire ou de fortifier ou de garder en forces. A la grande rigueur, on aurait pu la réduire à 16 lieues, dont les deux cinquièmes environ auraient seuls été accessibles.

En 1746 et 1747, on avait proposé au maréchal de Belle-Isle une position un peu moins étendue, improprement appelée le camp de Roquevaire. Cette ligne fut choisie comme position centrale : on admit que, si elle ne permettait pas de couvrir les trois villes,

elle donnerait du moins la possibilité de secourir celle qui serait la plus menacée; elle avait enfin l'avantage de n'être pas très éloignée de Tarascon et d'Arles, où l'on faisait débarquer les secours.

On y exécuta toute une série de travaux de campagne : mais, malgré tout, le camp de Roquevaire ne fut pas utilisé. On s'aperçut que, déjà très faible par elle-même, la position était exposée à être tournée; elle eût peut-être été un peu meilleure si le maréchal de Belle-Isle avait pu disposer de plus de monde: mais, avec les faibles effectifs de ses troupes, le parti le plus sage, à la moindre menace sérieuse de l'ennemi, eût été de battre en retraite sur Toulon.

< La nature a fait très peu de ces positions défensives à souhait, que l'on voudrait qui se soutinssent par elles-mêmes, presque sans secours humain, et il est aussi aisé que dangereux de s'y méprendre, soit en les jugeant plus fortes qu'elles ne sont, soit en estimant mal leur étendue; si elles sont trop courtes, il est possible et souvent aisé de les tourner; si elles sont trop longues, il sera facile de les forcer, parce qu'il y aura nécessairement un très grand nombre de débouchés, de parties accessibles et faibles qu'on ne pourra garder, ou bien il faudra une armée égale et même supérieure à celle des ennemis, ce qui changerait l'état de la guerre. En un mot, une position de défense, quelle qu'elle soit, ne peut être soutenue que par des troupes proportionnées à la position même et à la force des ennemis. Sinon, il ne faut prendre que des camps de passage, marcher sans cesse en attendant les secours que l'on peut recevoir ou les fautes que l'ennemi peut faire, ou, s'il est nécessaire, s'enfermer alors dans des places. »

A cette époque, Marseille devait être déjà considérée comme une ville ouverte, car son enceinte n'était formée que de vieilles murailles, totalement dépourvues de flanquement. Aujourd'hui, la ville ne serait couverte du côté de la terre que par des ouvrages de circonstance.

Quant au port, il était défendu par les forts Saint-Jean et SaintNicolas, tous deux en assez mauvais état d'entretien. Le fortin de Notre-Dame-de-la-Garde aurait pu être d'une bonne défense, à cause de la difficulté que l'on aurait eue à amener de l'artillerie contre lui; M. de Vauban avait même projeté d'y établir un fort régulier, dont le fortin actuel aurait été le donjon.

Les plages étaient défendues par onze batteries: cinq du cap Croizette à la citadelle et six du fort Saint-Jean au cap Couronne.

Les trois flots de Pomègue, Ratonneau et If étaient fortifiés : << il y a un intérêt majeur à conserver à tout prix le château d'lf et à ne le laisser jamais dégarni ni de canons ni des munitions nécessaires. >>

Du cap Couronne au port de Bouc, la côte est à peu près inabordable et ne se prête nullement à des descentes de quelque impor

tance.

Le 13 août, le marquis de Paulmy se rend à Aix, où il demeure deux jours et emploie la journée du 16 à visiter Arles; ces deux villes, n'étant point fortifiées et ne jouant aucun rôle dans la défense générale, ne lui offraient qu'un intérêt médiocre au point de vue militaire; pour le Rhône, de Tarascon à la mer, sa défense ne pouvait donner lieu à aucune inquiétude. Le 17, il part pour Nîmes, en traversant la Camargue.

« Le Languedoc est beaucoup moins important que la Provence et le Dauphiné; personne, que je sache, n'a encore considéré militairement cette belle province sous des vues rassemblées, et j'avouerai que j'ai vu les objets trop isolés, trop détachés les uns des autres et avec trop peu de secours pour entreprendre de les rapprocher dans un tableau général.

« Par ses frontières, le Languedoc ne pourrait être exposé à une invasion que par une suite d'infortunes qu'on ne doit ni craindre, ni prévoir.

<< Mais cette sécurité, quand elle serait encore mieux fondée, ne regarde que les entreprises du dehors, et le Languedoc renferme dans son sein des ennemis d'autant plus inquiétants, qu'on doit des ménagements à leur qualité de sujets et de concitoyens, de la compassion à leur aveuglement, et qu'on ne peut cependant veiller de trop près sur leur conduite, pour les contenir dans la soumission, les ramener insensiblement à la religion de l'État, pour les empêcher, du moins, de lever le masque et de se rendre coupables. Ces ennemis, cachés mais toujours prêts à se montrer, sont très dangesoit par le fanatisme qui les anime et qui tient lieu d'armes et de courage, soit par les ressources qu'ils ont dans la nature et

reux,

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