Page images
PDF
EPUB

LES MARINS DE LA GARDE

(Avec une planche en couleur.)

Dans l'aquarelle dont il a eu la délicate pensée d'orner le dernier Carnet de 1898, M. Édouard Detaille tenait à montrer les marins de la garde sous un aspect nouveau et cependant authentique. Ceux qui revivent ici sous son pinceau ont en conséquence la tenue de route; ils ne portent pas le grand uniforme, d'ordre absolument composite, popularisé par les grands artistes français qui prirent successivement à tâche de léguer à la postérité la série des uniformes de l'immortelle garde de Napoléon Ier.

Le président de la Sabretache s'est basé, en cette occasion, sur le dessin colorié d'un témoin oculaire, contenu avec beaucoup d'autres du même auteur, dans un fort curieux volume de la collection réunie jadis par M. de Marbot. D'après la publication déjà considérable du peintre prussien Knötel sur l'histoire des uniformes européens, les documents en question seraient dus à un dessinateur de Hambourg nommé Suhr, qui eut la bonne idée de croquer, au jour le jour, les troupes de toute espèce, françaises ou alliées, traversant sa ville natale dans les plus belles années du premier Empire. La Commerzbibliotek de Hambourg possède, paraît-il, beaucoup de ces croquis; j'en connais de lithographiés, mais ils ne le furent pas tous et sont, dans tous les cas, devenus fort rares. Il suffit de les voir dans leur simplicité, parfois presque enfantine, pour être convaincu que l'auteur a réellement vu les nombreuses et singulières tenues dont il nous a laissé l'image. Son œuvre modeste est une source précieuse d'informations.

Indépendamment de la planche transformée par le talent d'Édouard Detaille, le livre de M. de Marbot en contient trois

CARNET DE LA SABRET, No 72.

47

autres représentant aussi des marins de la garde ou des marins de la ligne débarqués, ceux-ci faisant route sac au dos, à la suite de la Grande-Armée. La planche la plus curieuse montre l'Aigle des Marins de la Garde portée par un sous-officier, escorté de deux marins. Tous trois sont revêtus de la même tenue de route que les précédents, c'est-à-dire d'une vareuse ou veste large, à deux rangs de boutons, dont le collet, les parements et les poches sont seuls galonnés. L'Aigle, placée au bout d'une hampe en bois bleu, n'est accompagnée que d'une très petite draperie violette brodée en or et de deux cordons à glands d'or.

Dans le travail aussi nouveau que documenté publié en 1895 par M. le commandant Saski dans le 3 volume du Carnet, figure l'arrêté consulaire daté de Saint-Cloud le 30 fructidor an XI (17 novembre 1803) prescrivant la formation du bataillon de Matelots de la Garde; le lecteur y trouvera (pp. 149 et 150) la description de leur uniforme c'était déjà le dolman bleu tressé en jaune et qui est bien connu. La vareuse de petite tenue n'y est point mentionnée; en revanche il est spécifié que « l'habillement des trompettes. sera le même que celui des trompettes de la Garde ». La cavalerie de la Garde Consulaire ne comprenait, à cette époque, que des grenadiers à cheval et des guides, corps dans lesquels l'uniforme des trompettes était bleu clair et cramoisi. Le trompette des marins du document de Hambourg est en effet entièrement vêtu de bleu clair, et les cordons qui ornent son schako ou garnissent sa trompette sont mélangés de cramoisi. Le citoyen de Hambourg a donc vu juste. Les aiguillettes de l'officier sont également prescrites par l'arrêté de création.

L'ouvrage de Knötel cité tout à l'heure reproduit aussi un marin de la Garde en tenue de route, mais d'après une autre source allemande également contemporaine, consistant dans des gravures coloriées publiées à Berlin en 1806 par les frères Henschel. La tenue est la même que celle dessinée par M. Édouard Detaille, si ce n'est que le schako porte le plumet rouge ordinaire.

Nous n'essaierons pas de retracer ici, même en abrégé, l'histoire des Marins de la Garde, elle est bien connue dans sa généralité, il

[graphic][merged small][ocr errors][merged small][merged small]
« PreviousContinue »