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ARCHIVES DES HUSSARDS

LES MANUSCRITS DU MARECHAL DE BERCHINY

(Avec une planche.)

Plusieurs officiers, tout spécialement M. le général Belbèze, commandant la 2° brigade de hussards, à Meaux, avaient successivement signalé au Carnet de la Sabretache l'existence, à la bibliothèque publique de cette ville, de deux volumes manuscrits provenant du maréchal de Berchiny, et presque tout entiers relatifs aux hussards de son temps, dont il fut l'inspecteur permanent. Grâce à l'entente des deux ministères intéressés et à la courtoisie de l'autorité locale, il a été possible d'étudier ces deux recueils à Paris et d'en extraire la copie d'assez nombreuses lettres, d'un véritable intérêt pour l'histoire de l'arme, que ne possédaient pas jusqu'ici les Archives de la guerre. Fidèle au rôle ambitionné par lui dès son origine, le Carnet reproduira les plus significatives de ces pièces pour ceux qu'intéressent les origines des hussards de France et leurs premiers uniformes.

La découverte des manuscrits de Berchiny est, par surcroît, une bonne fortune pour le Musée historique de l'armée, parce qu'en jetant un jour nouveau sur l'état de nos régiments de hussards sous Louis XV, elle vient en aide à une tâche longue et laborieuse, celle de reconstituer au Musée, à force de persévérance, la série des uniformes compliqués de cette arme, autrefois si variée de couleurs. C'est à ce dernier point de vue que nous nous placerons aujourd'hui.

Le premier des deux volumes de Meaux contient en original les CARNET DE LA SABRET. N° 68.

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lettres adressées par le ministre de la guerre au maréchal Berchiny, du 22 mai 1743 au 30 décembre 1766. Le second présente l'enregistrement de la correspondance particulière du maréchal pendant dix années, du 14 novembre 1746 au 9 octobre 1756. Il serait fort à désirer que l'on retrouvât d'autres volumes de ces deux séries; d'après les numéros d'ordre des volumes conservés, ils étaient loin d'être uniques, chacun dans son genre. Berchiny mourut en 1778, dans sa terre de Buzancy, ce qui explique la présence à Meaux d'une partie des papiers et des objets provenant de cette propriété du maréchal.

I.

La première ordonnance sur l'uniforme des hussards.

La plus ancienne ordonnance de ce genre paraît être celle du 26 octobre 1744, dont les manuscrits de Meaux nous ont seuls jusqu'ici conservé le texte. Elle est d'ailleurs très courte, et n'a guère pour but que d'imposer à tous nos régiments de hussards la tenue complète en bleu céleste. Nous reproduisons plus loin ce document, mais il convient auparavant d'expliquer la décision prise, en résumant l'état de choses antérieur.

Dans son 2 volume (1894), p. 484, le Carnet a reproduit des pièces d'archives faisant connaître les six régiments de hussards sur pied en 1744, sous les noms de Lynden (ex-Rattky), Berchiny, Esterhazy (futur Chamborant), Beausobre, Raugrave et Pollereczki; les trois derniers ne dataient que de 1743. Nous ne sommes point en mesure d'indiquer avec certitude les uniformes, voire même les couleurs que ces six régiments avaient portés depuis leur création, les documents précis étant fort rares sur ce sujet avant l'ordonnance de 1744; aussi rappellerons-nous seulement, pour commencer, les notions les mieux établies sur le costume primitif des hussards de France, heureux si nous provoquons, en réponse à cette courte énumération, la communication de renseignements nouveaux sur les points restés obscurs.

Les types les plus connus et les plus souvent représentés dans ces ouvrages spéciaux, dérivent plus ou moins directement de quelques figures peintes à la gouache par Delaistre vers 1721, contenues dans l'un des précieux volumes conservés, sous le titre de

Recueil d'Hermand, à la bibliothèque de la guerre; les hussards de France y apparaissent tous vêtus en bleu clair et coiffés de bonnets rouges garnis de fourrure. Il est cependant douteux que ces petites figures soient dues à une observation directe du sujet, car elles. sont visiblement imitées d'estampes antérieures de Rugendas, publiées à Augsbourg à partir de la fin du xvII° siècle. Rien d'étounant d'ailleurs à ce que les hussards aient été à cette époque mieux connus en Allemagne, où ils avaient longuement guerroyé, qu'en France, dont ils n'avaient pas dépassé souvent la zone frontière. Les scènes militaires de Rugendas et les nombreuses gravures analogues, que l'on éditait alors à Nuremberg comme à Augsbourg, présentent donc probablement d'une manière assez fidèle l'aspect général de nos hussards, mais, pour le sujet qui nous occupe, les couleurs et les détails auraient besoin d'être précisés. Le présent Carnet a reproduit déjà, en 1895, deux des plus anciennes de ces estampes', pour accompagner le très intéressant travail qu'avait bien voulu lui confier, peu de temps avant sa mort, M. le baron de Noirmont, l'un des membres les plus érudits et les plus aimables de la Sabretache'. Ayant trouvé, depuis lors, d'autres planches de provenance analogue, caractérisant également les modes hongroises religieusement conservées par nos premiers hussards, je profite de l'occasion actuelle pour reproduire encore ici la plus ancienne d'entre elles, que je crois peu connue. Elle représente le fameux colonel Paul Deack (ou Poldéak), chef du régiment formé le 25 septembre 1705 des compagnies de hussards servant à l'armée d'Italie.

Toute médiocre qu'elle soit, cette estampe de Jeremias Wolf est curieuse, en ce qu'elle montre Poldéak portant à l'avant-bras droit un reste d'armure à la hongroise et décoré de tous les insigues particuliers attestant la noblesse ou les exploits des chefs qui savaient entraîner à leur suite les cavaliers hongrois. Nous re

1. Sans parler d'une autre petite gravure française de Guérard, dont il importe de tenir comple, parce qu'elle est antérieure au recueil d'Hermand.

2. se volume du Carnet, p. 63 et 253.

3. Qu'on se rappelle ce passage de l'Histoire de la milice française, du père Daniel :

Les officiers ornent leurs bonnets de belles aigrettes. Il y en a qui ont quelques lames de vermillon d'argent qui se plaquent du côté droit pour marquer par là le nombre des combats où ils se sont trouvés, et une boule d'argent sur la poitrine pour marque de noblesse. »>

La masse d'armes, ou le marteau d'armes à bec de corbin, était également l'un des

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