Page images
PDF
EPUB

furent envoyés au Fort-Louis pour se réorganiser, s'instruire et compléter leur grani équipement.

La revue du général Houchard, dont la figure balafrée et le renom étaient bien faits pour frapper le brigadier-fourrier Desvernois, fut suivie d'inspections détaillées, passées par un vieil officier de cavalerie, le maréchal de camp La Farelle; nous croyons utile de reproduire les observations de ce dernier; elles sont d'un homme du métier, et les quelques éloges accordés à la bonne volonté de la troupe n'en ont que plus de valeur.

Citoyen Ministre,

Conformément aux ordres du général Custine, j'ai l'honneur de vous adresser le résultat de la réforme qu'il m'a prescrit de faire des chevaux absolument hors d'état de servir au premier régiment dés Hussards de la Liberté; je ne sçaurais comprendre les désordres et le cahos où j'ai trouvé ce régiment sans chefs, sans discipline, etc. Je me suis transporté au chef-lieu du cantonnement de l'étatmajor, j'ai trouvé des chevaux dans une grange dite infirmerie, sans licols, la plus grande partie sans fers, les chevaux pêle-mêle, n'ayant pas été pansés depuis très longtemps. D'après l'examen que j'en ai fait faire par deux maréchaux-experts, vingt-cinq ont été jugés atteints de la maladie de la morve, je les ai fait tuer ainsi que le constate le procès-verbal ci-joint.

J'ai fait la visite de tous les autres chevaux, que j'ai trouvés dans un état pitoyable, également sans licols, sans avoir été pansés, la plupart déferrés, etc. Je me suis adressé aux commandants de compagnie qui, à toutes mes questions, n'ont eu d'autres réponses à me

que le défaut d'argent; n'ayant pu procurer aux hussards les ustensiles nécessaires, il leur avait été impossible de faire panser les chevaux. Enfin j'ai choisi ce qu'il y avait de moins mauvais pour compléter l'escadron soi-disant de guerre, car il s'en faut de beaucoup qu'il soit pourvu de tous les objets nécessaires.

J'ai réformé 73 chevaux absolument hors d'état de servir et quelques-uns de la taille de quatre pieds, d'un à trois ou quatre pouces; le reste des chevaux, quoique dans un état affreux, mais d'un âge à pouvoir se refaire, ont été marqués pour le dépôt établi

au fort Louis.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

Je ne finirais pas, Citoyen Ministre, si j'entrais dans tous les détails des dilapidations exercées dans ce régiment, qui paraît avoir été levé à la hâte et sans le moindre ordre. Les capitaines n'ont rien eu en compte des différents objets délivrés aux hussards de leur compagnie, je n'ai trouvé au bureau de l'état-major que le registre de la répartition de chaque prêt; les officiers m'ont dit avoir fait des représentations au commandant Rutteau et qu'il leur avait répondu qu'il n'était comptable qu'auprès du ministre de la guerre, il a quitté le régiment et n'a laissé que 400 # en assignats au commandant, somme fort insuffisante pour satisfaire les ouvriers qui sont rebutés de travailler.

Vous jugerez, Citoyen Ministre, par les notes ci-jointes, que je n'exagère en rien sur ce que j'ai vu et les comptes qui m'ont été rendus.

Les officiers m'ont paru de la meilleure volonté et remplis de zèle; ils ne demandent que des chefs qui les instruisent et le régiment est composé en grande partie d'une très belle jeunesse pleine d'ardeur, mais les hussards dénués d'armes, de buffleterie, quelques-uns de bottes ou autres effets de petite nécessité, abandonnent leurs travaux et se livrent à toutes espèces d'abus.

Si l'on veut conserver ce régiment, il est indispensable de lui donner des chefs à l'instar des autres troupes à cheval. Le capitaine Boué, commandant l'escadron de guerre, m'a paru susceptible d'occuper une place de lieutenant-colonel, tant pour la partie de l'administration que pour faire mouvoir sa troupe. J'ai été à même de le juger, ayant eu à faire directement à luy pour les détails de son escadron détaché près de Mannheim et dont je joins ici l'état. Quant à ceux du dépôt, je n'ai pu encore les obtenir.

Il serait aussi à propos d'envoyer à ce régiment un adjudant ainsi que deux sous-officiers par compagnie, tirés des troupes à cheval, lesquels auraient la perspective de passer aux grades d'officiers. Dans le cas contraire à la conservation de ce régiment, on pourrait en tirer parti en incorporant un escadron dans quelques régiments de chasseurs à cheval.

Je n'ai point trouvé au bureau de l'état-major des hussards de la Liberté, de décret de sa formation, levée, etc. Plusieurs officiers m'ont assuré qu'il portait qu'il devait jouir des mêmes

fonds de masse attribués aux autres régiments de hussards pour l'entretien, etc.

Il est étonnant que, depuis le mois de septembre, les payeurs se soient bornés à ne tenir compte au régiment que de la solde des officiers et hussards; plusieurs officiers ont fait des avances pour le cirage et autres objets de première nécessité; leurs réclamations sont fondées, mais nul moyen d'y satisfaire, puisque le quartiermaître n'a pas touché un sol sur la masse d'entretien, d'habillement, équipement, armement, etc. Je dois vous observer que les hussards n'ont pas touché d'engagement et qu'il n'a pas été possible de les faire pourvoir de ce que l'on appelle petite monture, qui comprend: brosses, étrille, sacs, bridon d'abreuvoir, etc., que de plus ils n'ont encore aucune masse de linge et chaussure.

Je ne saurais trop vous renouveler, Citoyen Ministre, mes instances pour faire remédier le plus tôt possible, à l'abandon total de ce régiment, dont les officiers sont victimes. Cette demande m'est par mon zèle pour le bien général, et mes observations par l'expérience de 40 années de service, dont 34 dans la cavalerie.

dictée

A Frankenthal, ce 14 février 1793,

an 2o de la République.

Le maréchal de camp employé

à l'armée des Vosges,
LAFARELLE.

2 DIVISION.

Citoyen Ministre,

Conformément à vos ordres, j'ai l'honneur de vous adresser l'état de situation de l'escadron de guerre, ainsi que de fond des Hussards de la Liberté en garnison au fort Louis du Rhin; depuis que j'ai été chargé de la revue de ce régiment, en février, il s'est fort éloigné de la division à laquelle je suis attaché, ce qui occasionne un retard dans l'envoy de ces états que je trouve imparfaits. Ce régiment est dans ce moment sans quartier-maître; il est, je pense, urgent d'y envoyer des officiers supérieurs et quelques-uns instruits de la comptabilité et autres parties. Tous les individus en général qui

composent ce corps sont remplis de zèle, de patriotisme et ils ne demandent que d'être instruits par des officiers qui connaissent les service et détails des troupes à cheval. Le capitaine Boué, commandant l'escadron de guerre détaché sur les bords du Rhin près de Mannheim, a servi longtemps dans la cavalerie; il me paraît susceptible d'un grade supérieur et capable d'établir dans ce régiment l'ordre sur les différents détails de comptabilité, service, manœuvres, etc. Frankenthal, ce 21 mars 1793,

[merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Le Carnet de la Sabretache manquerait à ses obligations spéciales s'il ne s'efforçait pas de reconstituer la physionomie et l'uniforme primitifs des Hussards de la Liberté. Le carton du 7° bis, aux Archives, fournit à cet égard deux documents: la suite du mémoire du citoyen Rutteau déjà cité et le procès-verbal d'une revue extraordinaire passée le 26 juin 1793 par le capitaine d'infanterie Graffard, faisant fonction de commissaire des guerres. Il ressort des deux pièces, que le corps ne débuta pas à l'armée avec le brillant uniforme de hussards porté depuis par lui. Sa tenue, bien qu'ornée de tresses, ne comportait même pas les parties caractéristiques de l'uniforme de cette arme: pelisse, ceinture et sabretache, mais les hommes étaient coiffés du bonnet à la hussarde.

Le lieutenant-colonel Rutteau affirmait dans son mémoire avoir délivré à ses cavaliers, en nombre égal au complet réglementaire de 486 hommes, les effets suivants :

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Il n'avait pu fournir que 72 paires de pistolets, sans mousquetons, 288 manteaux, 400 vestes et pantalons d'écurie (valant ensemble 20 # 15 s.), 406 sabres, 8 trompettes et un guidon.

Le reste des effets, y compris les gibernes, était encore à délivrer. Quant à la qualité des fournitures, le chef de corps faisait observer que le régiment ayant été présenté complètement habillé à la revue du 27 octobre 1792, aucune réclamation ne se produisit. Il ajoutait :

«Or, si étant à Paris et à Saint-Germain, sous les yeux du ministre, sous les yeux même de l'Assemblée nationale, personne n'a porté aucune plainte, je demande s'il est possible d'attendre au bout de huit mois pour se plaindre de la non validité des effets délivrés, lorsqu'une troupe a fait une route de vingt-neuf jours et que depuis son arrivée à Langenkandel, à Spire, Ottelstadt, Duttenoffen et autres lieux, elle a toujours été cantonnée, qu'une grande partie a même été former l'avant-garde de l'armée et que la plupart ont couché sur la paille, et cela dans un corps nouvellement créé d'hommes dont la majorité n'a jamais servi! Suivant la loi de création, devais-je fournir 2 habits, 2 vestes, 2 pantalons et 2 paires de bottes ? Non certes! Si nous eussions été troupe de ligne, les hussards auraient touché un engagement, alors on aurait pu former une masse, alors seulement on eût pu leur fournir une seconde paire de bottes. >>

Mais les constatations faites le 26 juin 1793, par le capitaine Graffard, constituaient, comme on va le voir, une réplique écrasante:

« D'après le plus strict examen fait homme par homme, nous avons reconnu qu'il existait un grand nombre d'habits de tricot, d'autres d'un drap très gros et dont la corde est extrêmement lâche et qu'il n'y a qu'un très petit nombre d'habits faits avec du drap d'une qualité convenable et qu'enfin les uns et les autres n'étaient pas dans le cas de faire au delà de six semaines. Nous estimons donc qu'il doit être fourni à ce régiment, scavoir :

400 habits,

800 pantalons,

350 gilets d'écurie,

400 bonnets de police,

350 manteaux,
450 porte-manteaux,
Et 400 gilets écarlate.

« PreviousContinue »