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Prussiens, et qui comprenaient parfaitement que leur annexion à la Pologne leur serait profitable sous tous les rapports.

L'Empereur ménageait sa cavalerie. Blücher, au contraire, aimait parader avec la sienne en qui il avait espoir et confiance. Le héros prussien eût peut-être changé d'avis si nous, Polonais, avions marché à l'avant-garde, mais comme il voyait toujours l'infanterie française devant lui, il tendit un piège et attira l'infanterie; ou plutôt le maréchal Ney, qui s'avançait imprudemment avec la division d'infanterie Maison, tomba dans une embuscade de cavalerie prussienne.

Peut-être qu'après cette leçon la cavalerie marcha en tête. Je me souviens que sous Leignitz, où de grandes plaines s'étendent sur le côté gauche de la route, nous avons manœuvré assez longtemps avant d'atteindre notre quartier de nuit ; c'était un couvent catholique où je passai la nuit avec le chef Jerzmanowski.

A Neumarkt, déjà près de Breslau, je fus de nouveau de service près de Napoléon. Avec les chasseurs de la Garde, nous célébrâmes la solennité de la signature de la suspension d'armes, suspension qui ne réalisait pas notre espoir d'un prompt retour en Pologne... mais nous donnait le temps d'accroître et de mettre en ordre les forces de Napoléon et peut-être de les renforcer par les garnisons des forts polonais.

Nous revinmes donc triomphants en Saxe avec un regain d'espoir pour la grande cause qui faisait le but de notre vie.

A Dresde, tous les jours un escadron était de service auprès de l'Empereur; mais le régiment lui-même était cantonné depuis Stolpen jusqu'à Schandau, au delà de ce que l'on appelle la Suisse

saxonne.

Le prince Krasinski et notre major, le prince Radziwill, organisaient mutuellement des fêtes ravissantes, surtout des excursions en bateau sur l'Elbe dont les rives étaient illuminées. Des feux d'artifice partaient des bateaux qu'on voyait voler sur les eaux comme animés par la musique des chants nationaux. Tout cela entretenait dans le régiment la gaieté, la confiance et un dévouement sans bornes.

Cependant, malgré la suspension d'armes, signée le 4 juin, les alliés ne se pressaient pas de licencier leurs partisans qui faisaient

toutes sortes d'expéditions, principalement sur la rive gauche de l'Elbe. C'est pour cette raison que Napoléon envoya le général Arrighi, duc de Padoue, qui nettoya la Saxe du Nord, avec une partie de la division du général Dombrowski. C'est alors qu'eut lieu la mémorable rencontre avec Tchernychef dans laquelle périt le vaillant Kostanecki, chef d'escadron des lanciers transvistuliens, ainsi que le colonel d'infanterie Malczewski. Le chef de bataillon Skrzynecki se fit remarquer pour sa belle conduite.

A cette époque, on parla beaucoup de cet engagement très glorieux pour les armes polonaises, mais, malgré d'actives recherches, il m'est impossible de retrouver aujourd'hui la moindre mention de ce fait; j'attire sur lui l'attention du lecteur, quoique ce combat ne fasse pas partie des actions du régiment dont j'écris l'histoire. Notre régiment fut aussi envoyé pour suivre à la piste et combattre les partisans ennemis, mais du côté opposé, dans les environs d'Altenbourg. A peine étions-nous revenus de Silésie que, sous les ordres du chef Jerzmanowski, je pris part à une expédition semblable. Tant que les alliés n'eurent pas licencié leurs partisans, nous eûmes avec eux des rencontres, notamment à Freiberg et sous Penig. Au retour de l'Empereur à Dresde, différentes faveurs et récompenses furent accordées à notre régiment. Moi-même, comme l'un des capitaines les plus âgés, sinon comme le plus ancien, je fus nommé chef d'escadron le 17 juillet 1813.

P. M.

Note concernant le 3 régiment de Chevau-ligers de la Garde.

Le 3 régiment de Chevau-légers de la Garde, formé en vertu d'un décret rendu à Wilna le 5 juillet 1812, fut organisé en partie dans cette ville, en partie à Varsovie par le général de brigade Konopka qui, de major au 1 régiment, avait été nommé colonel du 3o.

Ce corps était composé de jeunes volontaires polonais ou lithuaniens; malheureusement, le général Konopka, en marche pour rejoindre l'armée avec les deux premiers escadrons, fut attaqué à

Slonim par les Russes, battu et fait prisonnier, ainsi qu'un major, un chef d'escadron, un adjudant-major sortant du 1er régiment, etc. Le commandement du reste du régiment fut alors donné au major Tanski.

Le 12 janvier 1813, le maréchal Bessières, duc d'Istrie, décida que le régiment du major Tanski serait placé à la suite du 1er chevau-légers polonais sous les ordres du colonel-major Dautancourt.

Le 14 du même mois, le 1er régiment, suivi du 3, quitta les environs de Bromberg et arriva le 18 à Posen.

Toutefois, ce fut seulement le 11 avril, dans la plaine en avant et au-dessous de Friedberg, sur la rive gauche de la petite rivière qui tombe à une lieue de là dans la Wetter, que les lanciers du 3o furent définitivement incorporés dans le 1" régiment par le colonel-major Dautancourt, conformément à un décret impérial du 22 mars, en présence du général Lefebvre des Noëttes et de l'inspecteur aux revues Clairac. C'est de l'arrivée du reste de ces cavaliers lithuaniens que parle Zaluski.

Aux termes du décret du 5 juillet 1812, l'uniforme du 3 régiment de Chevau-légers de la Garde dut être le même que celui du 1" régiment, « avec cette différence que les boutons seront de métal jaune ». Pour rester en harmonie avec le métal des boutons, toute la passementerie fut en or ou en laine jaune, au lieu d'être en argent ou en fil blanc comme dans le 1er.

Nous devons communication de la tenue des trompettes de ce régiment à M. B. Gembarzewski, l'auteur de la planche jointe au présent article, qu'il a bien voulu composer pour le Carnet, d'après une curieuse suite de dessins d'uniforme laissée par un officier polonais contemporain.

(A suivre.)

Gal V.

Dans sa première réunion de ce mois, le Comité de la Sabretache a nommé membres de la Société :

MM. Bourderiat, chef d'escadrons au 23° régiment de dragons; Choulot (de), capitaine au 87° régiment d'infanterie; colonel Clément, commandant le 35° régiment d'artillerie; Coquelin (Émile), collectionneur; commandant Courtade, chef d'état-major de la 19 brigade d'artillerie; comte Charles de Diesbach; marquis d'Imécourt; Julienne (Paul); Laissement, artiste peintre; Le Roy Ladurie, capitaine à l'état-major du 6 corps; Maichain (Louis), officier de réserve; Metz-Noblat (de), lieutenant au 1er régiment étranger; Montgascon (de), lieutenant au 28a régiment d'infanterie; Montherot (de), secrétaire d'ambassade; D' Pernet; lieutenantcolonel Petitgrand; Pillois (Louis), officier de réserve; vicomte Gaston de Saporta; Schæffer, chef d'escadrons à la Garde républicaine; Tourné, chef d'escadron au 35 régiment d'artillerie; Trẻmont (de), capitaine au 2o régiment de cuirassiers; Vallières (des), capitaine au 14 régiment de chasseurs; Viollar (Pierre), officier de réserve.

Dans la seconde réunion ont été nommés :

MM. comte Raymond de Beauchamp, chef d'escadron d'artillerie territoriale; Bidault (Henri); Calvière (Paul), archiviste à l'ambassade de France à Saint-Pétersbourg; Carré (Albert), directeur de l'Opéra-Comique; comte Guy de Chabot, ancien capitaine de cavalerie; Esclaibes d'Hust (d'), lieutenant au 9 régiment de cuirassiers; Esparbès (Georges d'); Fougeras-Lavergnolle, lieutenant au 21o régiment de chasseurs; Isnards (des), lieutenant au 1er rẻgiment de cuirassiers; D'Jacquot, aide major territorial; Jouvencel (de), ancien capitaine de cavalerie; Magnier (A.), docteur en droit; D' Pozzi, sénateur; Rocquemont (de), chef d'escadrons au 2o régiment de cuirassiers; Seré de Rivières, capitaine au 5 régiment d'infanterie; baron Sipière; comte de Suzannet.

31 mars 1898.

Le Secrétaire-Trésorier.

Le Gérant: A. MILLOT.

LE RÉCIT DE LANGERON

SUR LA

BATAILLE DE PARIS (30 MARS 1814)

On ne saurait dire que les Mémoires de Langeron sont inconnus nombre de travailleurs les ont feuilletés aux archives des Affaires étrangères; nombre d'historiens les ont mis à profit. M. Thiers en particulier, dans un temps où les documents militaires étaient moins en honneur qu'aujourd'hui, leur a fait les plus larges et les plus libres emprunts.

Pourtant l'ensemble de ces volumineux manuscrits est demeuré inédit. La raison en est sans doute que, si les Souvenirs de Langeron présentent un incontestable intérêt, son personnage attire. infiniment moins. Emigré de la première heure, il a couru toute sa carrière en Russie, et les principaux services qu'il a rendus l'ont été contre son pays.

Cent ans écoulés constituent cependant une prescription historique suffisante pour qu'on puisse tirer ces documents du secret des archives et les produire au grand jour. Pour en signaler à nos lecteurs tout l'intérêt littéraire, rappelons que Langeron fut cet écrivain de marque dont on joua à Paris la comédie le Duel (en 1789); il collabora aux Actes des apótres' avec Peltier et Champcenetz.

1. Un pamphlet périodique contre la Constituante, quelque chose comme le Charivari du temps.

CARNET DE LA SABRET. - N° 64.

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