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Siege de la Republique, leurs vûës fuperieures ne s'arrêteront pas à la confideration de ce feul Interêt, quelque grand qu'il paroiffe à la Compagnie. Ils verront d'abord, qu'il n'eft pas fondé en justice, & c'eft quelque. chofe, fur tout pour un Etat, à qui il importe beaucoup de ne pas laiffer croire qu'il cherche à s'agrandir, & à s'enrichir par des voyes illegitimes. Après cela ils feront fans doute reflexion , que l'affermiffement de cette Barriere, qu'ils croyent fi néceffaire à la fûreté de leur Etat, & qu'ils ont enfin fi avantageufement établie, ne s'accorde pas avec les deffeins de leur Compagnie des Indes contre celle d'Oftende. Leurs Traitez les mettent en Poffeffion des principales Places du Païs, & leur affurent un fubfide ennuel de 1250. mille Florins pour fubvenir aux fraix de leur Garde, & entretien, outre & par deffus les Interêts de plufieurs Millions, qui leur étoient dûs par obligation avec hypotheque ou autrement du Roi Charles II. & de leur propre administration durant la derniere Guerre; de forte qu'ils ont les Places, & que le Païs leur doit fournir, & leur fournit réellement, tout l'Argent, qu'il faut pour les entretenir. Ce font là de grands avantages, & il faut avouer, que Meffieurs les Etats fçavent bien faire leurs Traitez. Mais de quoi leur ferviront-ils ces avantages, fi au même tems, qu'ils exigent de fi groffes Sommes d'un Païs 'fi petit, ils prennent foin encore de lui fermer toutes les Portes du Commerce? Car enfin le Pais-Bas Autrichien n'eft pas une Mine d'Or, & il eft bien certain, que fi l'on continue d'en faire paffer les efpeces au dehors, par toutes fortes

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de Canaux, fans permettre qu'elles y rentrent de quelque autre côté, l'épuisement fuivra bien-tôt, & alors on n'en pourra plus rien tirer du tout. Au contraire il faudra y envoyer. Nous attendons ici une Reponse; on nous dira, que nous errons dans le Fait, que les Sommes promises à LL. HH. PP. par le Traité de Barriére ne fortent point du Païs, & qu'étant destinées à l'entretien des Places, & au payement des Garnifons, elles y font dépensées, à mefu re qu'elles y font reçûës. Cela eft vrai, du moins en partie, à l'égard de la Solde journaliere de l'Officier, & du Soldat. Mais cette Solde, ne fait pas toute la dépenfe de l'entretien des Pla& des Garnifons. Il y a encore les Habits, les Armes, & les Munitions de Guerre, & de bouche, qu'on y envoye de Hollande, qui même n'y payent aucun Droit d'entrée, ni de paffage. D'ailleurs ce Canal n'eft pas le feul, par où l'Argent s'en va; le Poiffon fec & falé, dont on ne fçauroit fe paffer, à caufe des jours d'abftinence, qui tous ensemble vont à cinq mois de l'année, & les autres befoins de la Vie, en font bien fortir davanta➡ ge, & ne le portent pas tout en Hollande. It y en va auffi une bonne partie en France, en Angleterre, & ailleurs. Les autres Confiderations, qui fe pouroient ajouter à celle-ci, & qui en font des fuites naturelles, ne sçauroient échaper aux lumieres de LL. HH. PP. qui connoiffent parfaitement le Païs, fes Forces, fes befoins, & à quoi il peut leur être bon. On fe contentera de dire pour la feconde fois, que toutes ces chofes là bien examinées, ne les pore teront jamais à conclure, que leur Interêt soit de lui fermer entierement les voyes du Com

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merce. Quand on veut conserver un Pais il faut en conferver les Habitans, on ne doit pas les priver des feuls moyens, qui leur ref tent pour fubfifter, & qui leur font communs avec tous les autres Peuples de la Terre. Cette Conduite pouvoit être fondée en raison, du tems des anciennes inimités, dont le pauvre Païs Autrichien fut enfin la Victime. Mais ce tems-là, n'est plus. L'Empereur est ami de l'Etat. Le Traité de Barriere établit entre eux une Union d'Interêt fort étroite, dont le PaisBas eft le lien. On a cru cette Union neceffaire, & aparemment, on le croit encore. Il eft donc à propos de la cultiver. Les deux Compagnies de Hollande s'écrient en vain, que celle d'Oftende veut empieter für leur Commerce. Il eft noroire, qu'elle ne prétend pas les exclurre d'un feul Port, ni leur empêcher l'envoi d'un feul Vaiffeau, ni les expulfer de la moindre de leurs Poffeffions. Elle n'en a ni la force, ni la volonté. Ce font les Compagnies de Hollande, qui demandent hautement, que celle d'Oftende foit abolie; que l'Empereur retire fon Octroi; & qu'il ne foit permis à aucun Habitant du Païs-Bas Autrichien de faire Commerce aux Indes. Voilà le Fait, que tous les Déguisemens du monde ne fçauroient changer. Quant aux moyens, dont les Compagnies de Hollande prétendent fe fervir pour impofer à tous les Païs-Bas Autrichiens une loi fi dure, & fi contraire au Droit naturel, nous croyons les avoir fuffisamment réfutez dans toute notre feconde Section, à laquelle nous ne pouvons que nous raporter.

§. IV. Sur

S. IV.

Sur les Affiftances réciproquement données & reçues, entre l'Auguste Maifon d'Autriche, & les Hauts & Puiffans Etats Généraux des Provinces Unies; pour fervir de Réponse aux Reproches qui fe répandent fans aucun fondement, au fujet du Commerce d'Oftende.

TOus fommes perfuadez, que les Dil

1. Nou

cours imprudens. & indifcrets, dont on fe plaint ici, ne tirent point leur fource des Confeils de Leurs Hautes Puiffances, ni de ceux des autres Etats de l'Union, ni d'aucun College de Gouvernement. Le long fejour que nous avons fait en Hollande, ne nous permet pas d'ignorer, de combien de fageffe leurs déliberations font toûjours accompagnées. Et nous avons lieu d'efperer qu'elles ne prendront point en mauvaise part, ce que nous avons à dire fur ce fujet, par raport à leurs Alliances avec la Très- Augufte Maifon d'Autriche, & aux grands & confiderables avantages qu'elles en ont toûjours retirez; car malgré tout ce qui fe débite dans leurs Provin ces, nous fommes affurez, qu'elles n'en ont rien oublié, & qu'elles en gardent une justere connoiffance.

II. Commençons par la Triple Alliance de l'an 1668., qui eft ordinairement comptée pour

la

la prémiere Alliance de Meffieurs les Etats, en faveur du Roi Charles II., Prédeceffeur de Sa Majefté Impériale & Catholique, dans la Souveraineté du Païs- Bas Autrichien. II eft vrai, qu'elle fauva ce Païs des mains du Roi de France, armé pour s'en emparer, & qu'elle fut en partie cause du deffein, que ce Prince forma enfuite de tourner contre eux mêmes fon reffentiment, & fes forces. Mais fi on prend bien garde à toute la fuite des mefures; que Leurs Hautes Puiffances prirent en cette affaire, on fera obligé de reconnoitre, que l'Interêt de l'Espagne n'y fut pas fort confideré, & qu'elles n'y eurent guères d'autres vûës que celles de conserver entre elles, & la France, une certaine étendûë dë Païs, qui avec les Places, pût leur fervir de Barriere en tout tems, contre cette puissante & redoutable Couronne. Les Espagnols preffez du péril; leur demandoient du fecours avec inftance, ils leur expofoient la juftice de leur Cause, dont on étoit d'ailleurs affez co nvaincu, & ils joignoient de vives représentations fur l'Interêt, que la République de voit prendre à leur converfation. Mais Meffieurs les Etats ne jugerent point à propos de s'engager dans une Guerre pour l'amour d'eux. Ils étoient amis de la France; ils préferoient fon amitié à toute autre, & toute leur Négociation avec elle fut commencée & finie fur le pied d'obliger l'Espagne, bongré malgré qu'elle en eut, à en paffer par ce qui feroit convenu entr'eux. C'eft là l'Efprit, & lé contenu formel de la Triple Alliance, à la quelle on attacha trois Articles féparez, portant, que la Renonciation de la Reine de France

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