Page images
PDF
EPUB

foupçonneux que de confeiller que le Royaume foit fur fes gardes, afin qu'il ne tombe pas dans un cas fi perilleux.

Pour ce qui regarde le million de Roubles qu'on dit que la Cour de Ruffie offre, perfonne ne fait encore au jufte, combien il en vient, mais cette fomme fera aparemment comme un appas, pour nous faire mieux goûter les autres conditions, c'est-à-dire les refus de l'Alliance avec la France & l'Angleterre, & la nouvelle Armée en Finlande. Nous pouvons juger par ce qui eft dit cideffus, fi nous pouvions prendre cet argent, fans prejudicier à la fûreté du Royaume, & s'il nous en reviendra quelque utilité, ou fi l'on ne veut pas plûtôt acheter de la Suede même, les fers & les chaînes qui lui font destinées, jufqu'à ce que, par ces deffeins artificieux, on foit parvenu à nous mettre hors d'état de nous faire craindre, & que l'on puiffe même manquer aux promef fes pecuniaires qu'on nous aura faites.

vi. Objection. Ce n'eft pas feulement la Ruffie que nous éloignons de nous par l'acceffion au Traité de Hanovre, mais nous rifquons encore de perdre l'amitié de l'Empereur Romain, dont la fincerité a paru au Traité de Stockholm, & à laquelle nous fommes redevables des obftacles que la Cour d'Angleterre & de Pruffe ont trouvé à l'égard de l'inveftiture des conquêtes que ces Puiffances ont faites fur nous. Qui nous repondra même que la Cour de Vienne juftement jaloufe de nos liaisons avec la France & l'Angleterre ne facrifie au Roi de Pruf

fe le refte de la Pomeranie pour le detacher du Traité d'Hanovre.

Reponse. L'Amitié de Sa Majefté Imperiale & Catholique ne nous eft pas indifferente, mais elle ne doit pas prevaloir fur ce que nous devons à nous même, ni nous faire choquer les Puiffances qui font intereffées à nous affifter, qui font fituées plus près, & plus en état que toute autre de le faire contre ceux qui voudroient ou qui pourroient troubler le repos dont nous jouiffons. Si notre acceffion au Traité de Hanovre dont le but eft la paix & la tranquilité generale en Europe, bleffoit la Cour de Vienne, elle feroit foupçonnée avec raison que fon Traité avec l'Imperatrice, qui a mis toutes les autres Cours en mouvement, cache des deffeins dont l'acceffion y pourroit être prejudiciable, & qui renverferoit notre grand principe, qui est la durée de notre repos. C'est à l'invitation que les Puiffances contractantes du Traité d'Hanovre nous ont faites & non à l'attention que la Maifon d'Autriche prête à nos affaires delabrées, que nous devons fon acceffion fubite à notre Traité de Stockholm avec la Ruffie, nous la lui avons demandée jufques là inutilement pendant plufieurs années, & nous y aurions toujours rencontré les mêmes froideurs, fi les mefures que ces deux Couronnes ont eu fujet de prendre, ne lui avoient donné une chaleur de reverberation; Auffi n'est-ce pas la fenfibilité de cette même Maison pour nos pertes en Allemagne, qui en retarde les inveftitures pour les Rois d'Agleterre & de

Pruffe,

Pruffe, mais il faut l'attribuer à l'ancienne politique de la Cour de Vienne & à la conduite qu'on a remarqué qu'elle a tenu en tout tems à l'égard des autres Cours, dont les principes font de tirer en longueur les affaires qu'on lui remet pour être decidées felon les loix & les conftitutions de l'Empire, & de faire languir après les moindres faveurs, qu'elle fait valoir pour la plûpart au delà de leur jufte prix, afin de tenir dans la dependance le plus long-tems qu'elle peut, ceux qu'elle croit ne s'en pouvoir paffer.

Si la Suede n'avoit pas des preuves incontestables de la jaloufie de cette Cour par raport à notre établiffement en Allemagne depuis la Paix de Weftphalie, qui nous mettoit en état de foutenir avec vigueur la Religion proteftante contre les atteintes qu'on a voulu fi fouvent lui donner, nous n'aurons qu'à nous reffouvenir de fa contenan ce dans les tems qu'on nous depouilla en der nier lieu de ces dernieres Provinces, nous avions beau alors implorer la juftice du chef fuprême de l'Empire contre l'oppreffion de nos ennemis, les fecours de l'Angleterre dont la Cour de Vienne alloit avoir befoin, pour garantir fes Etats en Italie, la rendirent fourde à nos clameurs. Ces faits detruifent les préjugez que la confervation du refte de notre Pomeranie depend principalement de l'amitié de l'Empereur pour nous & de notre deference pour lui. Ils nous pourroient plutôt faire aprehender que fi la Cour de Vienne peut fe prêter à l'agrandiffement du Roi de Prufle pour fes vûes & l'attirer dans fon parti par l'appas de ce refte de notre Pomera

S 4

nie,

nie, qu'elle n'ait plus de Scrupule de fe fervir de cette amorce feduifante pour la tenter qu'elle en a eu d'engager le Roi de Dannemarck dans le Traité de Vienne par l'offre de la garantie pour le Duché de Sleswick; en ce cas pouvons-nous nous affurer mieux de la Cour de Pruffe & la mettre hors de tentation de prêter l'oreille à des offres pareilles, qu'en accedant au Traité de Hanovre, en vertu duquel nos poffeffions en Allemagne feront garanties par des Puiffances qui non-feulement font en état de nous y maintenir, mais encore en ont la volonté & y font intereffées.

VII. Objection. L'Acceffion au Traité de Hanovre eft incompatible avec les engagemens que nous avions pris avec la Ruffie par l'Article fecret du Traité de Stockholm, par raport à l'affaire de la reftitution de Sleswick en faveur de fon Alteffe Royale & pouvonspous abandonner avec bienfeance les interêts d'un Prince qui fe voit depouillé du plus beau morceau de fes Etats en haine de l'attachement qu'il a eu pour nous.

Reponse L'incompatibilité qu'on trouve à prefent entre le Traité de Stockholm & notre acceffion au Traité de Hanovre, eft fondée fur le fens trop étendu qu'on donne à celui-là, & fur des confequences peu fuivies qu'on donne à celui-ci. La Suede felon les intentions de fes Etats n'a jamais pris fur elle par l'article fecret du Traité de Stockholm des obligations plus fortes que de vouloir employer les bons Offices & prendre avec d'autres Puiffances des mefures amiables pour effectuer la restitution du Duché de Sleswick.

Elle

Elle n'a même pu s'engager plus avant fans contrevenir directement à fon Traité de Paix avec le Dannemarck. Les declarations que les Miniftres de Suede, en confequence des intentions de nos Etats, ont fait dans les Cours étrangeres, alarmées par le faux fens qu'on avoit donné à ce même Article du Traité de Stockholm, n'ont pas été équivoques & n'ont pas dû flâter la Ruffie que nous pourrions entrer dans fes vues. Puis donc que la France & l'Angleterre garantiffent au Dannemarck le Duché de Sleswick, & qu'il eft dit en termes exprès dans ledit Article fecret du Traité de Stockholm, que ces Puiffances garantes concourront avec nous dans l'affaire de la reftitution de Sleswick, & puis qu'outre cela ces Couronnes ont le plus de poids auprès du Roi de Dannemerck; que chaque homme droit & impartial juge donc, fi nous ferons mieux valoir nos bons offices, auprès de la France & de l'Angleterre en accedant au Traité de Hanovre, ou en refufant d'y entrer? Naturellement nous devons croire, que par les liaisons que nous allons fortifier avec ces Puiffances, nous les porterons plus aifement à prendre à cœur des interêts de Son Altefle Royale, & à rendre le Danemarck plus traitable, fur tout s'il plaifoit à Son Alteffe Royale de feconder nos inftances par des manieres, convenables & des menagemens neceffaires, plutôt que de tâcher de nous engager dans les mesures qui expofent le repos > dont le Royaume à tant de befoin & le remettent en danger d'être troublé.

[ocr errors]

De plus, quel prejudice notre acceffion au

S5

Traité

« PreviousContinue »