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fleurs de lis, qui servoit de tapis de pied au roi, et un bureau devant lui; avec lui plusieurs conseillers d'état et maîtres des requêtes, qui se sont aussi placés sur deux bancs, dans le parquet, devant les bas siéges, étant au-dessous des pairs laïques.

Les places occupées ordinairement par les présidents de la cour, par les conseillers de grand'chambre, par les présidents des enquêtes et requêtes, par les conseillers desdites enquêtes et requêtes, et autres officiers de la cour, étant demeurées vacantes.

Le roi s'étant assis et couvert, M. le garde des sceaux a dit, par son ordre, que sa majesté commandoit que l'on prît séance, après quoi, le roi ayant ôté et remis son chapeau, a dit :

a Messieurs, je vous ai assemblés pour vous dire que j'ai pris » la résolution de rétablir dans leurs fonctions les anciens mem»bres de mon parlement : ce bienfait est une preuve de ma ten»>dresse pour mes sujets; mais je ne perds point de vue que leur »> tranquillité et leur bonheur exigent que je conserve mon auto>> rité dans toute sa plénitude.

>> Vous connoîtrez plus amplement ma volonté par ce que vous » dira mon garde des sceaux. »

M. le garde des sceaux étant ensuite monté vers le roi, agenouillé à ses pieds, et descendu, remis à sa place, assis et couvert, a dit :

« Le roi permet qu'on se couvre. »

Après quoi M. le garde des sceaux a dit :

<< Messieurs, sa majesté donne dans ce moment une marque » éclatante de sa bonté; mais elle ne perd point de vue que la jus>> tice doit en régler les effets.

» Les circonstances fâcheuses dans lesquelles s'étoit trouvé le » roi son aïeul, de glorieuse mémoire, avoient malheureusement rendu nécessaires les mesures que ce monarque avoit prises » pour assurer à ses peuples l'administration de la justice sans au»cune interruption.

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» Les officiers du parlement, privés pendant long-temps de la » confiance du roi, ont sans doute réfléchi sur la nature de leurs » devoirs et sur l'obligation dans laquelle sont les magistrats de régler leur conduite sur les lois, de modérer les transports de >> leur zèle (quelque pur qu'il soit), afin qu'il ne puisse jamais » les égarer, et de donner à tous les sujets de sa majesté l'exemple » de la soumission la plus parfaite.

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C'est dans cette confiance que le roi donne aujourd'hui un » libre cours aux effets de la bienfaisance qui lui est naturelle.

› Le nombre des offices du parlement seroit trop considérable si le roi, en rappelant les anciens membres de cette cour à leurs fonctions, laissoit subsister les offices nouvellement créés; par cette considération, sa majesté a pris la résolution de suppri>mer tous les offices créés dans le parlement par l'édit du mois »d'avril 1774.

»Mais en supprimant ces offices, l'intention du roi n'est pas de ›laisser sans état des magistrats qui ont donné au feu roi des »preuves de leur soumission à ses volontés et de leur zèle pour le bien de son service; sa majesté veut au contraire qu'ils reçoivent en ce jour le témoignage de la justice qu'elle rend à l'utilité de leurs services.

Le roi Louis XV, par d'importantes considérations, avoit créé le grand conseil en 1771; des motifs de nécessité avoient engagé le feu roi à le supprimer. Sa majesté a résolu de rétablir ce tribunal; et comme une grande partie des magistrats qui le composoient sont au nombre des titulaires des offices nouvellement créés dans le parlement que le roi supprime aujourd'hui, sa majesté les rappelle à leurs premières fonctions, > et leur associe ceux qui avoient partagé avec eux les soins de l'administration de la justice dans le parlement.

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» L'étendue des états soumis à la domination du roi ayant mis les rois prédécesseurs de sa majesté dans l'obligation d'éta» blir plusieurs parlements dans les différentes provinces du royaume, la multitude immense des affaires leur avoit fait sen»tir la nécessité d'établir des tribunaux pour juger en leur nom "et sans appel certaines matières relatives à la répartition des »subsides et à la conservation des finances; ils avoient aussi confié à ces tribunaux, établis sous le nom de cour des aides, le soin d'empêcher que l'on ne donnât atteinte à la perception des droits du roi, et que les préposés à cette perception n'abusassent de l'autorité royale pour vexer les particuliers.

» Le rétablissement des anciens magistrats du parlement et du grand conseil entraîne, par une conséquence nécessaire, celui de la cour des aides de Paris et de la cour des aides dé Clermont-Ferrand.

Toutes ces cours établies dans leur état primitif rendent abso»lument inutile l'existence des conseils supérieurs dans l'ancien ressort du parlement de Paris et dans les provinces qui y ont été ajoutées en 1771, et relativement auxquelles le roi a pareillement résolu de rétablir l'ordre judiciaire tel qu'il étoit aupa

» ravant, à la réserve de quelques changements utiles au bien de » ses sujets.

» Mais la justice et la bonté du roi ne lui permettent pas d'aban» donner les officiers qui, depuis 1771, ont rendu la justice en » son nom dans ces tribunaux. Sa majesté, en leur conservant >> les priviléges attachés aux offices dont ils ont été privés par les >> circonstances, se propose de répandre sur eux d'autres bienfaits. » L'intention du roi est donc de rétablir le parlement, le grand » conseil, la cour des aides de Paris, celle de Clermont-Ferrand, » et tous les officiers attachés à ces cours, et de rendre au bu»reau trop négligé son ancienne constitution, afin que le public » puisse en retirer les mêmes avantages.

» Le roi ayant observé que chacun de ces parlements a un res» sort considérable, et qu'il est souvent très onéreux à ceux de » ses sujets qui sont dans le cas de recourir à sa justice souve»raine, de se déplacer à grands frais pour l'obtenir, sur des con>> testations dont l'objet, quoique important pour eux, est d'une > valeur que ces faux-frais peuvent égaler, quelquefois surpasser, » sa majesté a résolu d'augmenter le pouvoir des présidiaux.

»Sa majesté a pareillement observé que tous les malheurs dont » elle veut que la mémoire soit ensevelie pour jamais n'ont eu » d'autre source que la négligence dans l'observation des ancien>> nes ordonnances; en conséquence, elle a formé la résolution de » rassembler dans une même loi les dispositions de celles des »rois prédécesseurs concernant la discipline intérieure des cours >> et les enregistrements, d'y ajouter des articles nécessaires pour suppléer à ce qui avoit été omis dans les anciennes ordonnances, » et pour remédier aux inconvénients que les rédacteurs de ces >> lois anciennes n'avoient pas pu prévoir.

»>Telles sont, messieurs, les volontés du roi sa majesté a » voulu vous les expliquer avant de rappeler auprès d'elle les an>>ciens officiers de son parlement.

>>> Les intérêts du roi et ceux de ses sujets sont les mêmes, et »ne peuvent ni ne doivent jamais être séparés; c'est une vérité » dont vous êtes pénétrés.»

M. le garde des sceaux ayant cessé de parler, le roi a dit :

« Messieurs, je suis assuré de votre attachement et de votre >> zèle pour donner à tous mes sujets l'exemple de la soumis» sion. »

Après quoi le roi a ordonné au grand maître des cérémonies d'aller en la chambre de Saint-Louis ordonner aux officiers du

parlement de se rendre à l'instant auprès de sa majesté, et à M. Gilbert, greffier en chef, de l'accompagner.

Le grand maître des cérémonies s'étant transporté dans la chambre de Saint-Louis avec M. Gilbert, greffier en chef, conformément aux ordres du roi, a dit :

Messieurs, le roi vous ordonne de vous rendre à l'instant dans la grand'chambre, où sa majesté vous appelle auprès d'elle. »

Messire Étienne-François d'Aligre, chevalier, premier; MM. Lefèvre, Bochart, de Lamoignon, Pinon, de Gourgues, Lepelletier, Lepelletier-Rosambo, Joly, présidents, revêtus de leurs manteaux, tenant leurs mortiers à la main.

M Séguier, Joly de Fleury, Barentin, avocats et procureurs généraux du roi, tous revêtus de leurs robes et chaperons d'écarlate.

MM. Pierre Gilbert, greffier en chef, etc., tous aussi revêtus de leurs robes et chaperons d'écarlate, étant entrés:

Le roi ayant ôté et remis son chapeau, a dit :

Messieurs, le roi, mon très honoré seigneur et aïeul, forcé "par votre résistance à ses ordres réitérés, a fait ce que le main»tien de son autorité et l'obligation de rendre la justice à ses sujets exigeoient de sa sagesse.

»Je vous rappelle aujourd'hui à des fonctions que vous n'au»riez dû jamais quitter; sentez le prix de mes bontés, et ne les »oubliez jamais.

Vous entendrez la lecture d'une ordonnance, dont les dispo»sitions sont prises dans la lettre et dans l'esprit de celles des rois mes prédécesseurs; je ne souffrirai jamais qu'il y soit porté »la moindre atteinte; mon autorité, le bien de la justice, le bonheur et la tranquillité de mes peuples, exigent également qu'elle soit observéc.

D

Je veux ensevelir dans l'oubli tout ce qui s'est passé, et je verrois avec le plus grand mécontentement des divisions intes»tines troubler le bon ordre et la tranquillité que je veux faire régner dans mon parlement. Ne vous occupez que du soin de »remplir vos fonctions, et de répondre à mes vues pour le bonheur de mes sujets, qui sera toujours mon unique objet.

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» Attendu les circonstances, j'ordonne que dans ce moment le sieur Hue de Miroménil fasse les fonctions de chancelier; le » sicur Joly de Fleury, celles de procureur général; le sieur Ba»rentin, celles d'avocat général; le sieur Séguier celles d'avocat

» général; et le sieur d'Aligre, celles de premier président de 'mon » parlement, et que chacun prenne sa place accoutumée. »

Et, conformément au commandement de sa majesté, ils se sont placés, savoir :

MM. les présidents sur le bánc où ils siègent au conseil en la grand'chambre du parlement.

Les conseillers d'honneur, présidents aux enquêtes et requêtes, et les conseillers de grand'chambre, sur les trois bancs couverts de tapisserie formant l'enceinte du parquet.

Les conseillers des enquêtes et requêtes sur les bancs qu'ils occupent ordinairement au lit de justice.

M. Antoine-Louis Séguier, avocat; M. Guillaume-FrançoisLouis Joly de Fleury, procureur général; M. Charles-LouisFrançois de Paule Barentin, avocat, ont pris la place que les gens du roi occupent au lit de justice, et qui est répondante à celle qu'ils occupent toutes les chambres assemblées.

M. Gilbert, greffier en chef, a pris sa place à côté de la forme où étoient les secrétaires d'état.

Le premier et principal commis greffier de la cour, pour la grand'chambre, à côté du greffier en chef.

Les secrétaires de la cour ont pris la forme derrière.

Le premier huissier a pris le siége qui lui est destiné à l'entrée du parquet.

genoux

M. le garde des sceaux est monté vers le roi, s'est mis à à ses pieds, pour prendre les ordres de sa majesté, redescendu et remis à sa place, a dit :

D

« Le roi permet qu'on se couvre. »

M. le garde des sceaux s'étant couvert, á dit:

« Messieurs, le roi a jugé à propos de donner un édit

pour vous

» rétablir dans vos fonctions. Sa majesté ordonne que lecture en

>> soit faite présentement, les portes ouvertes, par M. Gilbert, qu'elle a commis à cet effet.

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>>Que je suis heureux d'être dans ce moment l'organe de sa » volonté suprême. »

Les portes ont été ouvertes, M. Gilbert s'est approché de M. le garde des sceaux, qui lui a remis l'édit dont il a fait lecture. Ensuite M. le garde des sceaux a dit :

« M. d'Aligre, faisant les fonctions de premier président, le wroi vous permet de parler. »>

Après quoi, M. le premier président et tous les présidents et

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