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Un tel établissement de succession cause mille révolutions, et rend le trône aussi chancelant que la succession est arbitraire....

<<< Lorsque la succession est établie par une loi fondamentale, un seul prince est le successeur, et ses frères n'ont aucun droit réel ou apparent de lui disputer la couronne. On ne peut présumer ni faire valoir une volonté particulière du père. Il n'est donc pas plus

du Gouvernement, ou plutôt >Pierre la partagea avec Sophie, qui s'était rendue maîtresse absolue de l'esprit de Jean. Dans la suite, Pierre faisant le siége de Précop, rson régiment même se mutina. Les officiers les plus considérables prirent part à la sédition; la désunion se mit - dans l'armée, et il fallut que Pierre songeât à la retraite sans avoir rien exécuté. Dès qu'il fut de retour, il prétendit sa sœur avait été la principale cause de la réque bellion, et il la fit enfermer en 1688 dans le monastère de Novodievitz, où elle mourut en 1704 ; il fit aussi mourir → quelques nobles et fit publiquement, dans les marchés et dans les rues de Moscow, hacher en pièces douze -mille Strélitz, comme des bêtes sauvages. Depuis, il ad→ ministra seul les affaires publiques, et il ne laissa à son infrère de la souveraineté que les honneurs et le titre.

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Le 25 juin 1710, il fit condamner à mort son fils Alexis Petrowitz, qu'il avait eu d'Eudoxia Federowna, sa première femme, pour avoir voulu conspirer contre

question d'arrêter ou de faire mourir le frère du roi, que quelqu'autre sujet que ce soit.

<< Mais dans les États despotiques, où les frères du prince sont également ses esclaves et ses rivaux, la prudence veut que l'on s'assure de leurs personnes; surtout dans les pays mahométans, où la religion regarde la victoire ou le succès comme un jugement de Dieu; de sorte que personne n'y est souverain de droit, mais seulement de fait.

sa vie. Un grand nombre de personnes de l'un et l'autre sexe, périrent comme prévenus d'avoir favorisé cette conspiration; et, le 5 février 1722, il publia un ukase ou édit, portant qu'il dépendrait toujours du souverain règnant de disposer du trône en faveur de qui il voudrait, et même de déposer celui qu'il aurait nommé, s'il le jugeait, dans la suite, incapable de porter la couronne. Lorsque ce prince mourut, la couronne passa à sa seconde femme, Catherine, laquelle règna plusieurs années et mourut sur le trône, quoique le Czar eût des filles de ce second mariage. Ce fut le second exemple qu'une femme eût gouverné la Moscovie. Rien de semblable n'était arrivé depuis Olka, mère du troisième Grand-Duc, laquelle, après la mort de son fils, règna avec courage, mais avec inhumanité. La Czariné Catherine mourut le 15 mai 1727: outre un fils nommé Alexiowitz, qui fut tué au berceau d'un coup de tonnerre, elle avait eu deux filles, du Czar Pierre,

L'ambition est bien plus irritée dans les États où des princes du princes du sang voient que, s'ils ne montent pas sur le trône, ils seront renfermés ou mis à mort, que parmi nous où les princes du sang jouissent d'une condition qui, si elle n'est pas si satisfaisante pour l'ambition, l'est peut-être plus pour les désirs modérés.

« Les princes des États despotiques ont toujours abusé du mariage. Ils prennent ordinairement plusieurs femmes, surtout dans la partie du monde où le despotisme est pour ainsi dire naturalisé, qui est l'Asie. Ils en ont tant d'enfans, qu'ils ne peuvent guère avoir d'affection pour eux, ni ceux-ci pour leurs frères.

<«<La famille règnante ressemble à l'État : elle est trop faible, et son chef est trop fort; eile paraît étendue, et elle se réduit à rien. Artaxerxès fit mourir tous ses enfans (a) pour avoir conjuré contre lui. Il n'est pas vraisemblable que cinquante enfans conspirent contre leur père; et encore moins qu'ils conspirent, parce qu'il n'a pas voulu céder sa concubine

(a) Voy. Justin.

à son fils aîné. Il est plus simple de croire qu'il y a là quelque intrigue de ces sérails d'Orient; de ces lieux où l'artifice, la méchanceté, la ruse règnent dans le silence, et se couvrent d'une épaisse nuit; où un vieux prince, devenu tous les jours plus imbécille, est le premier prisonnier du palais » (a).

Qui ne voit pas qu'en effet sous un Gouvernement despotique, il ne peut exister de principes et de règles sur quelque point que ce soit. Tout y dépend des événemens et des circonstances; tout y est vague, incertain, arbitraire ce qui est utile dans un temps, y est défavorable et nuisible dans un autre.

« Le despotisme, dit Fergusson, est une monarchie corrompue, dans laquelle il reste en apparence une cour et un prince, mais où toute subordination de rangs est détruite, où l'on dit au sujet qu'il n'a point de droits, qu'il ne peut rien posséder en propre ni remplir aucune place indépendamment de la volonté actuelle et momentanée du prince. Cette doctrine est fondée sur les maximes de la con

(a) Esprit des Lois, liv. v, chap. XIV.

Tome IX.

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quète; elle se prêche le fouet et l'épée à la main; elle est reçue à l'aide de l'épouvante, des chaînes, des emprisonnemens. La crainte est alors la disposition qui rend le sujet propre à occuper sa place; mais le souverain qui présente si hardiment aux autres l'appareil de la terreur, a des raisons plus que suffisantes de garder une bonne part de ce sentiment pour lui-même. Cette méthode avec laquelle il tran che sur les droits des autres, bientôt on l'applique à la discussion de ses propres droits; et il comprend que ce pouvoir qu'il avait tant à cœur d'augmenter et de conserver, n'avait pour fondement qu'un fantôme imaginaire, semblable aux fortunes chimériques de son peuple, un être de raison, un caprice désordonné » (a).

Dans une Monarchie bien constituée, les choses sont tout autres : les principes reconnus et posés d'avance, particulièrement les règles relatives à la transmission des droits de la Couronne, n'y sont pas inutiles; elles sont

(a) Essai sur l'Histoire de la société civile, tom. 1, chap. x, pag. 195.

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