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» C'est vous, Citoyens Sénateurs, qui avez pressenti ce grand évènement, qui l'avez préparé, et dont la décision que désire avec tant d'ardeur la France attentive, va donner le mouvement aux élans généreux de la grande Nation.

» Mais les pères de la patrie doivent commander à l'enthousiasme du sentiment. Vous avez émis un vou solemnel pour que le Gouvernement de la République fût confié à NAPOLÉON, Empereur héréditaire. Vous avez désiré que nos institutions fussent en même tems perfectionnées, pour assurer à jamais le règne de la liberté et de l'égalité. Les mesures qui doivent garantir et les droits de la Nation et la durée de l'Empire héréditaire, vous sont aujourd'hui présentées dans les formes prescrites par les constitutions de la République. Le projet de sénatus-consulte qui les renferme est sous vos yeux; l'orateur du Gouvernement vous en a développé les motifs : vous avez pu en méditer la nature, en rechercher les résultats, en observer les liaisons.

» Vous avez sur tout étudié ces.rapports secrets qui lient les unes autres les différentes parties de ces nombreuses dispositions.

» Ils peuvent échapper à des yeux vulgaires ces rapports qui font concourir au même but tant de moyens divers, qui rapprochent tant

d'objets éloignés, qui fortifient tant de ressorts, qui modèrent tant de mouvemens, et qui établissent dans le tout cette correspondance, cette harmonie et cet équilibre, garans de la stabilité.

» Mais qui sait mieux que vous, Citoyens Sénateurs, que les grandes institutions ne peuvent être bien jugées que d'en haut; qu'en cherchant à perfectionner un détail, on dénature souvent l'ensemble; et que tant de lois n'ont produit des effets opposés à ceux que l'on attendait, que parce que dans leur examen on n'avait considéré qu'une face, on n'avait écouté qu'une crainte, on n'avait consulté qu'une espérance?

» Votre commission a donc cru superflu de vous retracer des dispositions que vous connaissez, des motifs chacun de vous a pesés, des mesures dont vous avez vu l'enchaî

nement.

que

» Vous avez dû remarquer, Citoyens Sénateurs, avec quelle attention on a prévu tous les évènemens qui auraient pu, en rendant le droit de succéder douteux et l'hérédité incertaine, exposer la patrie à ces guerres désastreuses dont elle a tant souffert, et ramener ces calamités effroyables sous lesquelles nos pères braves, mais malheureux contemporains de l'infortuné Charles VI, ont vu la

France

d'en

France presque expirante par les coups fans dénaturés de la mère commune, et par ceux d'un ennemi audacieux et perfide.

» L'ordre prescrit pour la succession à l'Empire, présente le nom du sage que la patrie reconnaissante a vu à Lunéville et dans les murs d'Amiens, faire briller du doux éclat de la paix, l'olivier consolateur que lui avait remis la main triomphante de son auguste frère; et celui de ce jeune Louis, qui, compagnon de l'Hercule français, dès l'âge le plus tendre, et combattant près du héros de l'Europe, de l'Afrique et de l'Asie, dans les plaines de l'Italie, sur les rives du Nil, et non loin des ruines de l'antique Sidon, a pu de bonne heure accoutumer ses yeux à tout l'éclat de la gloire.

» En ordonnant que les pères de la patrie régleront avec le chef suprême de l'Empire, l'éducation des princes appelés à gouverner un jour la République, la loi fondamentale de l'Etat assure à nos neveux, que les premières pensées de ceux qui devront perpétuer leur bonheur, seront pour les devoirs que leur imposera la patrie, et leurs premières affections pour le peuple qui aura élevé leur race sur le pavois impérial.

» Admis de bonne heure dans cette enceinte et dans celle du conseil d'Etat, ils y trouveront au milieu des nombreux résultats d'une longue

expérience, cette suite imposante de maximes fondamentales et sacrées, qui ne se développent et ne se conservent que dans les Corps dont le renouvellement est insensible, et qui donnent aux institutions, et tant de durée, et tant de force, et tant de majesté.

» La régence établie avec prévoyance, n'étant jamais ni usurpée, ni contestée, ni livrée à des mains trop faibles ou étrangères, ne confère le pouvoir de conserver qu'en enchaî nant l'autorité qui tendrait à détruire.

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» De grandes dignités ajoutant à la splendeur du trône, en fortifient la base sans pouvoir l'ébranler, en détournent la foudre dans des tems orageux, donnent aux conseils plus de maturité, peuvent, en écartant toute barrière funeste, ne laisser aucune pensée utile perdue pour l'Empereur, aucune action vertueuse perdue pour l'Etat, aucune affection de l'Empereur perdue pour le peuple; offrent aux plus grands services la plus brillante palme; ne deviennent l'objet de toutes les ambitions, que pour les éloigner de tout dessein pervers; n'inspirent les grands projets et les grandes actions, qu'en forçant à maintenir la constitution de l'Etat, et n'élèvent des citoyens dans un rang éclatant, que pour faire voir de plus loin le triomphe de l'égalité.

Toutes les fois qu'un nouveau prince prend

les rênes du gouvernement, un serment solemnel lui rappelle ses devoirs, les droits inviolables de la propriété, et tous les autres droits imprescriptibles du peuple.

» Le dépôt sacré de la liberté individuelle et de la liberté de la presse, est rémis au Sénat plus spécialement que jamais....

» Et dans quelles mains pourrait-il être plus en sûreté ?

»Ne trouve-t-on pas dans le Sénat : le nombre, qui, par la diversité des opinions, des affections et des intérêts, écarte de la majorité tous les genres de séduction; l'âge, qui fait taire toutes les passions devant celle du devoir; la perpétuité, qui ôte à l'avenir toute influence dangereuse sur le présent; l'étendue de l'autorité et la prééminence du rang, qui délivrent des illusions funestes l'ambition satisfaite ?

» La liberté sainte devant laquelle sont tombés les remparts de la Bastille, déposera donc ses craintes; l'homme d'Etat sera satisfait; et les ombres illustres du sage l'Hôpital, du grand Montesquieu et du vertueux Malesherbes, seront consolées de n'avoir pu que proposer l'heureuse institution que consacre le sénatusconsulte.

» Les difficultés relatives aux opérations des collèges électoraux, ne pouvant être résolues qu'avec l'intervention du Sénat, le vœu du

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