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les

ordres du Roi et des ministres. Le pouvoir exécutif n'avait aucun moyen de surveiller les administrateurs populaires, et d'exiger l'observation des lois, puisque les procureurs des communes; procureurs syndics de districts et les procureurs généraux de département étaient nommés par le peuple : le Roi pouvait, il est vrai, annuler les actes de ces diverses administrations et suspendre les administrateurs; mais c'était au Corps Législatif seul qu'il appartenait de confirmer ou de lever cette suspension, de dis soudre ces administrations et d'en renvoyer devant les tribunaux criminels les membres qui ne pouvaient être révoqués ni destitués que par suite de forfaiture jugée: combinaison dé sastreuse qui, plaçant tout le Gouvernement dans une Chambre élective unique, et dans des administrations populaires, et isolant le pouvoir royal, le laissait sans force, sans consi dération, sans possibilité de faire exécuter les lois, et rendait cependant les ministres respon sables de leur inexécution; l'anarchie en fut la suite inévitable.

Par une contradiction bien singulière, la constitution républicaine de l'an 5, accorda au Directoire ce que la constitution prétendue monarchique de 1791 avait refusé au Roi. Le

Directoire eut des commissaires à sa nomination, révocables à sa volonté, près des administrations municipales et départementales, et il put en destituer les administrateurs.

Par cette constitution de l'an 3, l'administration des municipalités changea encore une fois de forme, il y eut une municipalité centrale de canton, et chaque commune eut un agent municipal et un adjoint; la réunion des agens municipaux forma la municipalité de canton. Cependant, les communes depuis cinq mille jusqu'à cent mille âmes, conservèrent une municipalité particulière, celles au dessus de cent mille âmes en eurent plusieurs; c'est de cette époque que date la division de Paris en douze municipalités.

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La constitution de l'an 8 et le sénatus-consulte du 16 thermidor an 10, rétablirent une administration municipale par commune composée d'un maire, d'adjoints et d'un conseil municipal; le nombre de ces divers administrateurs est réglé suivant la population des villes. Les maires et adjoints ne sont plus électifs; le chef de l'État, dans les villes de cinq mille âmes et au dessus, les choisit dans les conseils municipaux; il nomme aussi les membres de ces conseils sur une liste double de

candidats présentée par les assemblées de canton, qui sont obligées de les choisir parmi les cent plus imposés du canton.

Les préfets nomment, comme bon leur semble, les maires, les adjoints et les conseillers municipaux des communes au dessous de cinq mille âmes.

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Enfin, par une nouveauté tout-à-fait contraire aux usages des tems les plus reculés, le maire gouverne seul; les adjoints qui rempla cent les échevins ne forment plus avec lui un conseil délibérant sur les intérêts de la com mune, ils ne peuvent exercer que les fonctions qu'il leur délégue. J'aurai bientôt l'occasion de prouver combien cet ordre est vicieux.

Tel est le dernier état de l'organisation municipale, c'est celle qui nous régit aujourd'hui. Examinons si elle doit être conservée, cherchons les principes qui doivent nous guider dans cette matière, et qui peuvent servir de base à une bonne organisation des administrations municipales et départementales.

CHAPITRE II.

Administration Municipale.

Il faut d'abord reconnaître que l'administration des communes rurales ne peut pas être dirigée par les mêmes règles que celles des villes et bourgs. On conçoit facilement qu'un village de quatre à huit cents âmes, n'a pas besoin d'une forme d'administration aussi compliquée qu'une ville de cinquante mille âmes. Les besoins sont moins nombreux, les intérêts plus simples, un seul administrateur peut être chargé de les gérer avec l'assistance d'un adjoint et sous l'inspection d'un conseil de notables; ajoutons que ce qui résulte de la nature même des choses, devient indispensable par la difficulté de trouver des agens en état de bien régir ces mêmes intérêts, quelque peu compliqués qu'ils soient. Aussi, en tout tems, il y a eu des différences essentielles entre l'administration des communes rurales et celle des villes. L'Assemblée Constituante, elle-même, qui cherchait à ramener tout à l'égalité, avait décidé positivement que, dans les communes où il n'y aurait que trois agens municipaux, le maireaurait

seul l'administration. Or, la plupart des communes rurales étaient dans ce cas. Les ordonnances de 1764 et de 1765, ne concernaient que les villes et bourgs, et il n'y est pas fait mention des communes rurales. La loi du 28 pluviose an 8, et le sénatus consulte du 10 thermidor an 10, établissent aussi une différence entre les communes de cinq mille âmes et celles au dessous. Nous avons vu que dans les premières, l'assemblée de canton présente les candidats au conseil municipal dont les membres ainsi que les maires et adjoints sont nommés par le chef de l'État; tandis que, dans les secondes, la nomination des maires, adjoints et membres du conseil municipal est déférée aux préfets, sans présentation des membres de ce conseil. Je ne m'occuperai donc que de l'administration municipale des villes et bourgs de deux mille âmes et au dessus; l'organisation des communes rurales me paraissant devoir différer en quelques points, est susceptible de devenir la matière d'un examen particulier et d'une loi spéciale, qui sera plus facile à faire lorsque la loi concernant les grandes communes aura été rendue et exécutée. C'est en agissant avec cette sage lenteur que l'on peut espérer de parvenir à une bonne organisation.

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