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lui dans de pareilles

il y

circonstances, et qu'il aura une récompense digne de ses services quand il aura rempli le temps nécessaire pour vous, répétez-lui que je suis on ne peut pas plus content de ses services, et qu'il n'y a pas d'occasion plus belle de me servir; que c'est à lui à rassembler les débris d'un bâtiment en ruine; que c'est à lui de le ressusciter de ses cendres; que vous sentez bien que sa charge est très-pesante; mais qu'avec de l'esprit et du courage, comme il en a, réussira beaucoup mieux que d'autres, et qu'il en aura toute la gloire. Vous entrerez après cela dans des détails sur notre com→ merce; vous lui marquerez que c'est de sa vigilance que dépend sa ruine ou la certitude de revenir dans l'état le plus florissant où il ait jamais été, comme l'ouverture de la mer Noire peut nous le prouver. Enfin, vous le louerez de sa prévoyance à opposer le catholicisme au rit grec, et vous lui ajouterez qu'il ne pouvoit rien faire qui me fût plus agréable, et que je l'exhorte à continuer

LOUIS.

OBSERVATIONS

Sur la première lettre.

Cette lettre et la suivante, qui étoient entre les mains du comité secret de la Convention, en 1792, ont été déjà publiées; mais les ayant trouvées dans cette nouvelle collection, comme elles contiennent des particularités curieuses, j'ai cru qu'elles ne pourroient qu'ajouter un plus grand intérêt à cet ouvrage.

Il y a peut-être beaucoup moins de sujet d'être surpris de ce qu'on a appelé la trahison de M. de Thugut, qu'on ne pourroit se l'imaginer au premier abord: on ne peut du moins trouver extraordinaire qu'un espion de la France monarchique fût un des membres dirigeans de la coalition formée contre la France républicaine. Les ministres, comme tous les autres hommes, se laissent guider par les motifs les plus puissans; et, comme l'intérêt personnel est en général le grand mobile de ceux qui figurent dans les premières places, nous ne devons pas nous étonner que M. de

Thugut ait servi alors le cabinet de Vienne avec autant de sincérité qu'il avoit servi la France jusqu'à ce moment, quoique ce n'aie pas été avec autant de succès. Ce genre de politique, que la vertueuse indignation d'un écrivain anglais a si justement voué à l'opprobre et à l'exécration publique, en lui donnant le nom expressif de scélératesse usée, étoit trop à la mode à l'époque où cette lettre fut écrite, pour mériter une censure aussi rigoureuse et si nous éprouvons ce même sentiment, dans ce siècle régénéré, il faut aussi se souvenir, qu'au moment où M. de Thugut étoit l'espion de la cour de France, dans ce même pays d'où il est aujourd'hui l'ex-ministre, cette espèce de scélératesse n'étoit pas limitée aux seuls subalternes, quelque usée qu'elle puisse être actuellement.

On a beaucoup parlé de l'influence de l'Autriche, et de l'existence d'un comité autrichien en France, qui en dirigeoit le gouvernement depuis le commencement de la révolution en 1789, jusques à la chute du trône en 1792; et probablement on a été trop loin. Les causes qui déterminèrent la cour à une opposition qui lui fut si funeste, ne sont pas.

assez cachées, pour qu'on ait besoin de profondes recherches pour les découvrir. Il n'existe aucune preuve que le cabinet de Versailles ait été gouverné par celui de Vienne pendant le dernier règne, si ce n'est vers sa fin; et il y a beaucoup de raisons de penser que le premier étoit toujours sur ses gardes sur toutes les tentatives de l'Autriche à cet égard. On voit, dans cette lettre, Louis XVI donnant des instructions à son ministre sur la manière de diriger les négociations secrètes de M. de Thugut, que les uns qualifient d'espionnage, pendant que d'autres leur donnent le nom de trahison; et il paroît qu'on prenoit beaucoup de précautions pour que la reine ne soupçonnât jamais rien de ces mystérieuses transactions.

Tout le monde convient qu'à cette époque on essaya de former un parti autrichien à la cour de France, et le soin extrême que prend le jeune monarque de prémunir son ministre, ne laisse aucun lieu d'en douter. Louis XVI étoit parvenu, au moins, à neutraliser cette faction, s'il n'avoit pu réussir à l'anéantir tout-à-fait, en changeant les ministres à son

avènement ; et particulièrement en choisissant M. de Vergennes, qu'on regardoit comme sincèrement attaché aux vrais principes de l'ancienne politique française, dans toute leur pureté, et tels qu'ils existoient avant qu'ils eussent été altérés et corrompus par le système autrichien de l'abbé de Bernis et du duc de Choiseuil.

Quelques marques de foiblesse que le roi ait montrées en d'autres occasions, rien ne peut surpasser la fermeté avec laquelle il s'opposa toujours aux efforts réitérés qu'on ne cessa de faire pour l'engager à plier sous le joug de l'Autriche. Il conservoit soigneusement le souvenir des instructions qu'il avoit reçues du Dauphin son père; et, outre qu'elles étoient gravées profondément dans son esprit, les ministres qui avoient sa confiance, M. de Vergennes et M. de Maurepas, ne négligeoient aucune occasion d'empêcher que ces impressions premières ne s'affoiblissent.

La reine avoit été élevée, avec autant de soin, par une mère ambitieuse, dans des idées entièrement opposées; mais son éloquence

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