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OBSERVATIONS

Sur la quarante-troisième lettre.

MONSIEUR fut plus heureux que le roi son frère. M. de Bouillé ne s'étoit pas chargé de l'escorter jusqu'aux frontières, aussi il les atteignit sans obstacles et sans danger. Le tableau que le roi fait de sa situation est touchant; mais le catalogue des maux qui l'accabloient, se termina par celui qui étoit le plus réel, non pas probablement dans le même sens que l'infortuné monarque l'entendoit; qu'il n'avoit pas même le droit de se plaindre.

Il faut avouer que l'assemblée traita son roi fugitif, avec une générosité sans exemple et funeste. Il avoit évidemment violé, de son côté, le pacte social; et il avoit, en quelque manière, déclaré lui-même son abdication. L'assemblée avoit décrété, au moment de son évasion, que le pouvoir exécutif étoit suspendu entre les mains duroi; elle décréta, ensuite, que cette suspension subsisteroit jusqu'à ce qu'on pût lui présenter l'acte constitutionnel, aussi

tôt

tôt que la constitution seroit terminée. Après avoir mis ainsi le roi hors d'état de faire du mal, elle décréta eneore qu'on ne pouvoit pas le mettre en accusation pour celui qu'il avoit déjà fait ; mais elle ajouta cependant quelques clauses comminatoires à la constitution, dont la première étoit que si le roi se rétractoit, après avoir prêté serment à la constitution, on le considéreroit comme ayant abdiqué.

Le roi ayant annullé virtuellement, par sa fuite, tous les sermens réitérés qu'il avoit prêté en différentes occasions, et ayant perdu la confiance publique, l'assemblée se crut obligée de le garder plus étroitement qu'on n'avoit fait auparavant; et on pouvoit le considérer alors, comme une espèce de prisonnier d'Etat, jusqu'à ce que la constitution fût terminće, ce qui eut lieu environ deux mois après son retour. A cette époque il jura de nouveau, avec la même sincérité, de la maintenir et de la défendre, et recouvra alors sa liberté.

VOL. I.

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LETTRE XLIV.

A Monsieur.

27 Octobre, 1791.

Le rapprochement dont vous m'entre tenez, mon cher frère, est basé sur un pres◄ tige auquel je ne puis ajouter aucune croyance. Ce qui se passe sous mes yeux me démontre que les principes qu'on puisa dans la théorie de la politique, s'éclipsent dans l'exécution. D'ailleurs comment combattre les sophismes et les prétentions des novateurs ? ..

La reine

persévère dans son courage; sa fermeté semble augmenter plus notre position de◄ vient accablante. Ce qui nous entoure me paroît bien foible pour lutter avec succès contre la tourbe de nos ennemis. Je ne saurois trop vous engager à donner l'exem ple de la circonspection. On épie des prétextes; il faut tâcher de paralyser, par notre prudence, les trames du crime,

Vous connoissez, mon cher frère, l'immuabilité de mes tendres sentimens pour

Vous

LOUIS.

OBSERVATIONS

Sur la quarante-quatrième lettre.

CETTE lettre du roi suppose un plan formé, par son frère, d'une coalition de partis en France en faveur des vues de la cour. Ce projet étoit peut-être sage; et si une pareille coalition eût été fondée sur des principes solides et raisonnables, il est possible qu'avec une certaine prudence on eût pu faire marcher la nouvelle constitution, malgré les secousses désorganitrices que la révision lui avoit données. Le roi regarde ce projet non-seulement comme très-difficile quant au principe, mais même comme impraticable, puisqu'il n'avoit aucun moyen d'exécution pour aucun plan quel conque. « Ce qui nous entoure me paroît biea

foible pour lutter contre la tourbe de mes ennemis. » Tous ceux qui liront l'histoire de cette époque, dans l'ouvrage de M. Bertrand de Molleville, qui étoit alors un des ministres du roi, se convaincront aisément de la vérité et de la justesse de cette observation. Il y avoit peut-être, dans la nouvelle assemblée législative, plus de gens d'une imagination vive, que d'un jugement solide; mais il suffit de lire les détails, qu'on trouve dans cette histoire, de la politique des Tuileries, et de la conduite de ses agens, pour être convaincu que si l'assemblée législative ne fut pas toujours aussi respectueuse que M. Bertrand de Molleville l'eût désiré, ce manque de respect ne doit pas être tant attribué à son peu d'attachement à la constitution, qu'à la connoissance qu'on avoit alors du souverain mépris que les ministres, quiavoient la confiance du roi, avoient pour cette constitution, ainsi que M. Bertrand de Molleville lui-même l'a avoué depuis. Entouró 3 au-dedans, par des agens si mal disposés, il n'est pas étonnant que le roi se trouvát si foible. Et si on y joint les agens sur le Rhin qui travailloient si efficacement à la perte de celui pour qui ils prétendoient avoir

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