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Séance du 30 décembre.-M. Brissot lit un très-long discours, et qui est fréquemment interrompu par des applaudissemens, sur la nécessité de la guerre d'attaque; il le termine par une exhortation aux vrais patriotes de se soumettre à la loi, et de ne jamais se permettre d'attaquer en rien la constitution.

› Cette exhortation paraît à MM. Robespierre et Danton une critique et une inculpation faite aux orateurs et écrivains de la société, à cause de l'espèce d'affectation qui leur paraît y être. Ils s'élèvent pour demander le changement de ce passage dans l'impression que l'on arrête du discours. La plus vive chaleur se répand dans toute la société pendant cette discussion, au milieu de laquelle M. Brissot, rendant le plus éclatant témoignage à l'attachement de la société et de M. Robespierre pour la constitution, il s'engage à rédiger la fin de son discours de manière à ce qu'elle ne laisse aucun doute sur ses intentions. >

PROVINCES.

Avignon. - La réunion du comtat à la France par le décret de la constituante (septembre 1791), n'arrêta point la guerre civile dans ce malheureux pays. Les médiateurs français, l'abbé Mulot surtout, furent accusés d'avoir toujours toléré, souvent provoqué et même ordonné les meurtres qui avaient été commis à Avignon depuis leur venue. Pour connaître et exposer la vérité dans la discussion ouverte là-dessus, il faudrait dépouiller un immense dossier, et en extraire plusieurs volumes. Les faits se présentent ainsi : Sous la constituante, l'abbé Maury attaque l'abbé Mulot, et les patriotes le défendent; sous la législative, Royou continue cette attaque, et les Jacobins la commencent. Robespierre et l'Ami du roi sont du même avis sur le compte du médiateur. Ajoutez à cette contradiction que les deux partis avignonnais entre lesquels ont lieu tant de sanglantes représailles se disent patriotes l'un et l'autre. Nous donnerons en son temps (9 février 1792) le rapport fait sur les dénonciations de Rovère contre Mulot; et lorsque Jourdan coupe-tête, l'auteur des plus effrayans massacres, sera tradnit devant le tribunal révolution

naire, nous trouverons dans la procédure l'histoire de ses crimes. Aujourd'hui nous nous contenterons de transcrire le procès-verbal de la journée du 16 octobre, fameuse par la mort de l'Escuyer. Cette pièce fut transmise à l'assemblée législative par Rovère et Tissot, députés d'Avignon.

Procès-verbal de la commune d'Avignon, du dimanche 16 octobre.

Des propos séditieux avaient été tenus assez publiquement depuis quelques jours par des personnes connues pour être des ennemis de la constitution. Ce matin on a vu en divers endroits des affiches dont l'objet était directement d'exciter le peuple à se révolter contre l'administration provisoire de la commune. On répandait dans le public que la statue de la Sainte-Vierge qui existe dans l'église des Cordeliers, était devenue rouge depuis quelques jours, et qu'elle avait versé des larmes. Un attroupement s'est formé dans l'église des Cordeliers; une partie des attroupés s'est emparée des portes de la ville, dont ils avaient saisi les clés, et a retourné les canons sur la ville, et nous avons appris que M. Lescuyer, notaire, secrétaire-greffier de la commune et électeur, venait d'être conduit dans l'église des Cordeliers par des gens armés. Une proclamation de nous signée, dont l'objet était de rappeler les citoyens attroupés à l'observation de la loi, qui permet seulement la voie des pétitions, et d'inviter les citoyens attroupés, s'ils en avaient quelqu'une à nous adresser, de le faire paisiblement et sans troubler l'ordre public, n'a pas pu être entendue au milieu de ce désordre. M. le colonel de la garde nationale avait rassemblé sa troupe; un détachement nombreux était sorti du fort, précédé de deux pièces de canon, avec ordre de dissiper cet attroupement et de ramener la tranquillité dans la ville, en employant les moyens les plus doux qu'il serait possible; de fortifier la garde des portes de la ville; de pourvoir à la sûreté des citoyens, et sauver, s'il était temps, M. Lescuyer. Des patrouilles fréquentes et nombreuses ont été répandues dans les différens quartiers de la ville. Le détachement, à son retour, nous a rapporté que l'infortuné Lescuyer était, à l'arrivée de la

troupe dans l'église des Cordeliers, étendu par terre au bas du maître-autel; qu'il avait encore un souffle de vie; mais qu'il était couvert de blessures faites principalement à la tête par des coups de sabre; que la poitrine et le bas-ventre étaient écrasés de coups de bâton et de coups de pieds; qu'après l'avoir assassiné, on lui a volé ses boucles, sa montre et l'argent qu'il avait sur lui; que le détachement l'a lui-même transporté à l'hôpital, l'a placé dans une chambre particulière, et a fait appeler M. Paunard fils, maître en chirurgie, pour lui administrer les secours de son art.

› M. François-Marie-Camille de Rosilly, de la ville d'Auray, département du Morbihan, passant aujourd'hui en cette ville pour se rendre à Marseille, s'est trouvé par hasard auprès de l'église des Cordeliers dans le temps de ce mouvement. Se livrant aux impulsions de la loyauté et de la générosité, si naturelles aux Français, il a voulu parler le langage de la loi, et a osé élever la voix au milieu du tumulte; mais il a failli être la victime de son courage et de l'humanité qui l'inspirait. Il a été arrêté, traduit dans le chœur, gardé à vue, menacé de coups de sabre et de la lanterne; il a été couché en joue. Enfin, il a été résolu qu'il serait détenu jusqu'à ce qu'on eût pris à son égard de plus amples informations, et qu'on eût puni de mort M. Lescuyer, dont il a entendu plusieurs fois demander la tête. Ensuite on a annoncé à ce Français voyageur que le malheureux Lescuyer venait de périr, et que son tour allait venir. Enfin il a été laissé en liberté, et il est venu faire sa déposition devant le juge.

› Nous avons cru devoir instruire M. l'abbé Mulot, l'un des médiateurs de la France, et M. Ferrière, commandant des troupes de ligne, de ce qui venait de se passer. Nous avons écrit à l'un et à l'autre, que nous avions dissipé l'attroupement, et que nous avions fait des dispositions qui nous assurent que la tranquillité publique ne sera plus troublée, que les amis de la constitution ne seront plus assassinés; et que, dans ce moment, tout était dans l'ordre.

› M. Paunard, maître en chirurgie, nous a fait passer, sur les six heures du soir, son rapport sur l'état dangereux où se trou

vait M. Lescuyer; et peu de temps après, sa mort nous a été annoncée. Nous n'avons cessé, pendant toute la journée, de veiller avec soin au maintien de la tranquillité, et nous avons donné des ordres pour l'assurer durant la nuit, que nous nous proposons de passer dans la maison commune.

› Le 17, à trois heures du matin, nous avons été avertis que les séditieux venaient de forcer les prisons, et en avaient fait sortir quelques prisonniers. Nous avons pris de nouvelles mesures pour assurer la tranquillité publique et la sûreté des accusés. ›

N. B. Comme nous n'avons pas dû commencer le volume par la liste des députés à la constituante, nous la donnons ici avec celle des députés à la législative.

DES DÉPUTÉS AUX ÉTATS-GÉNÉRAUX DE 1789,

CONVOQUÉS PAR LE ROI LOUIS XVI.

CLERGÉ.

ALLAIN, recteur de Josselin, Evêché de St.-Malo.

ANDELAU (d'), prince-abbé de Murbach. Baill. de Colmar et Sche

lestat.

ANTROCHE (César d' ), évêque de Condom. Sén. de Nérac.

ARGENTRE (Duplessis d'), évêque de Limoges, abbé de Waux-deCernay, diocèse de Paris, et de Saint-Jean-d'Angely, diocèse de Saintes, premier aumônier de Monsieur, frère du roi, en survivance. Sén. de Limoges.

AUBERT, curé de Couvignon. Baill. de Chaumont en Bassigny.

AUBRY, curé de Véel. Baill. de Bar-le-Duc.

AURY, curé d'Hérisson. Sén. de Moulins.

AYROLES, curé de Reirevigne. Sén. du Quercy.

BALLARD, curé du Poiré. Sén. du Poitou.

BALORE (Cortois de), évêque de Nimes. Sén. de Nîmes et Beau

caire.

BANASSAT, curé de St.-Fiel. Sén. de Guéret.

BARBOTIN, curé de Prouvy. Hainault.

BARBOU, curé d'Ile-lès-Villenoy. Baill. de Meaux.

BARGEMONT (de Villeneuve ), chantre, comte, chanoine de St.-Vic

tor-lès-Marseille. Sén. de Marseille.

BARMOND (Perrotin de ), abbé, conseiller-clerc au parlement de Paris. Ville de Paris.

BASTIEN, curé de Xeuilley. Baill. de Toul.

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