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vince. Les correspondances des sociétés et des clubs pourraient nous fournir des détails curieux; mais ces pièces ont péri pour la plupart, sinon tout entières. L'Orateur du peuple nous a conservé la nouvelle suivante, encore la publiait-il parce que le personnage dont il s'agit venait d'être dénoncé à l'assemblée nationale. Un trait qui honore le corps électoral de Caen, c'est qu'au moment où l'assemblée ouvrit sa première séance, M. le curé de Sommervieu proposa de ne point commencer les opérations que M. Fauchet ne se fùt rendu à son poste d'électeur. Cette motion, vivement applaudie, ne trouva pas un seul opposånt; un mouvement d'enthousiasme s'empara de l'assemblée : tous les membres se rendirent en corps à l'évêché, et le respectable prélat fut conduit en triomphe à la salle du corps électoral. Le cortége était précédé des tambours et de la musique de la garde nationale. › (L'Orateur du peuple, t. 7, no XLVI.)

Nous avons un moyen sûr de suppléer à ce défaut de pièces, relativement aux opérations électorales des provinces. Le chiffre exact des nouveaux députés qui se firent recevoir aux Jacobins, et la proportion selon laquelle y concourent les départemens, va nous servir à connaître comment l'esprit révolutionnaire était réparti en France, chez les citoyens actifs. Il ne faut pas oublier que les députés dont nous allons transcrire les noms, et qui, au début de la législative, composaient l'extrémité gauche, ne tardèrent pas à se diviser en montagnards et en girondins.

Le 9 octobre, les dernières réceptions données par le journal des débats de la société des Jacobins, élèvent à cent trente-six le nombre des nouveaux députés admis par le club. Les feuilles suivantes, pendant tout le trimestre, ne mentionnent aucune réception nouvelle. Voici les noms des députés et celui des départemens qui les avaient élus.

Paris. Broussonnet; Brissot; Monneron; Filassier; Condorcet. - Les autres députés, non Jacobins, étaient : Garan de Coulon; Lacépède; Pastoret; Beauvais de Préau; Bigot de Préameneu; Gouvion; Cretté de Palluel; Gorguereau; Thorillon; Hérault de Séchelles; l'abbé Mulot; Godard; Quatremère de Quincy; Bos

T. XII.

cary; Ramond; Robin; Debry; Teilh-Pardaillan. Les huit suppléans furent: MM. Lacretelle; Alleaume; Clavières; Kersaint; de Moy, curé; Dussaulx; Billecoq; Colard, curé.

Ain. Deydier.
Allier. Boisrot.
Arriége. Calvet.

Aveyron. Bourzès.

Bouches-du-Rhône. Granet; Archier; Gasparin; Antonelle;

Pellicot.

Calvados. Fauchet; Dubois; Lomont; Castel; Bonnet-deMeautry.

Cantal. Teillard; Guittard.

Charente. Lafaye-des-Rabiers; Bellegardé.

Charente-Inférieure. Niou.

Corrèze. Brival.

Côte-d'Or. Bazire; Oudot; Lambert.

Côtes-du-Nord. Rivaollan; Morand; Massey.

Creuse. Huguet (évêque); Voysin; Cornudet; Ballet; Laumond. Dordogne. Taillefer.

Doubs. Verneret.

Eure. Lebrun.

Gard. Giraudy.

Gironde. Vergniaud; Guadet; Sers; Grangeneuve; Gensonné;

Jay.

Hérault. Cambon; Brun; Reboul.

Ille-et-Vilaine. Sebire.

Indre-et-Loir. Cartier.

Landes. Méricamp; Lucas; Baffoigne; Lonné ; Dyzez.

Loir-et-Cher. Brisson; Chabot; Lemaître; Frécine.

Loire-Inférieure. Coustard.

Loiret. Lejeune.

Lot. Ramel.

Maine-et-Loire. Delaunay; Dehoulières; Merlet; Choudieu;

Menuau.

Marne. Thuriot; Gobillard.

Haute-Marne. Dévaraignes; Becquey; Valdruche.

Meurthe. Foissey; Carez; Levasseur.

Meuse. Jean-Moreau; Manehand; Lolivier; Tocquot.
Morbihan. Andrein; Lequinio.

Nord. Lejosne; Duhem; Lefebvre.

Oise. Coupé (prêtre); Tronchon; Goujon; Calon; Gérardin; Lucy.
Pas-de-Calais. Carnot (aîné); Carnot (jeune); Haudouart.
Puy-de-Dôme. Couthon; Romme; Maignet (prêtre); Soubrany.
Basses-Pyrénées. Lostalot.

Bas-Rhin. Massenet.

Haut-Rhin. Delaporte; Ritter; Rudler.

Rhône-et-Loire. Blanchon; Thévenet.

Saône-et-Loire. Journet; Gelin.

Seine-et-Oise. Bassal (prêtre); Haussemann; Lecointre; Courtin.

Seine Inférieure. Lucas; Albitte l'aîné.

Somme. Goubet; Saladin; Rivery.

Tarn. Lasource; Esperon.

Var. Isnard; Granet.

Vendée. Goupilleau; Morisson; Thierriot; Gaudin ('prêtre);

Gaudin, négociant; Musset (curé).

Vienne. Ingrand.

Vosges. André; Vosgien; Dieudonné.

Yonne. Moreau; Rougier de la Bergerie; Gréau.

La liste sur laquelle nous avons composé la nôtre, se trouve dans les n° LXXI, LXXII et LXXIVdu journal des Jacobins, elle ne mentionne pas les départemens auxquels appartenaient les députés. Elle est d'ailleurs faite sans aucun soin, pleine de fautes d'orthographe, répétant plusieurs fois les mêmes noms : nous l'avons rectifiée. Le nombre des députés jacobins s'accrut à peine, durant le premier trimestre de la Législative. Le journal du club ne permet pas le doute à cet égard. Au début de la séance du 19 décembre, la motion d'une liste générale fut faite, et plusieurs demandèrent qu'on ajoutât aux noms des membres leurs qualifications, principalement celle de député. «Il faut, disaient-ils,

montrer à la France quels sont ceux des représentans de la nation qui, attachés réellement aux droits du peuple, au maintien de la constitution, se sont inscrits dans la société ; et quels sont ceux qui, s'étant étayés du crédit des sociétés affiliées pour se faire nommer députés, n'osent pas, par des considérations timides, s'y faire présenter, ou bien après s'y être fait inscrire s'en sont éloignés. On remarque, dit le rédacteur, que le nombre de ceux-ci est infiniment peu considérable. Après de longs débats, la question fut ajournée. (Journal des débats du club, no CXIV.)

ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

DU 1er OCTOBRE 1791 AU 1er MAI 1792.

Présidens de l'assemblée. - Du 1er au 3 octobre 1791, M. Batauld, président d'âge; du 3 au 17, M. Pastoret; du 17 au 30, M. Ducastel; du 30 octobre au 15 novembre, M. Vergniaud; du 15 au 28, M. Viénot-Vaublanc; du 28 novembre au 10 décembre, M. Lacepède; du 10 au 26, M. Lémontey; du 26 décembre.au 8 janvier 1792, M. François de Neufchâteau; du 8 au 22, M. Daverhoult; du 22 janvier au 5 février, M. Guadet; du 19 février au 4 mars, M. Dumas; du 4 au 18, M. Guyton-Morveau; du 18 mars au 2 avril, M. Gensonné; du 2 au 15, M. Dorizy; du 15 au 29, M. Bigot de Préameneu.

Nous avons dit, en commençant l'histoire de l'assemblée législative, que, pendant les sept premiers mois de sa durée, une seule question exerça sans intermittence l'activité parlementaire. A l'intérieur, à l'extérieur, partout la contre-révolution est à la guerre, et nous allons voir chacun de ses contacts avec la révolution être un défi ou une hostilité directe, une suite d'escarmouches précédant la bataille rangée.

Nous ne saurions trop le répéter : parce que la constituante n'eut ni le sentiment ni la science du principe révolutionnaire, parce que ce principe ne fut pas son acte de foi, il en résulta

qu'elle ne découvrit ni le centre de l'ancien régime, ni le centre du nouveau ; il en résulta qu'elle ne sut jamais où frapper pour détruire, où fonder pour bâtir.

La constituante avait tenté de mettre l'Europe dans une fausse position. En France, au lieu de regarder la révolution comme un devoir de notre nationalité, et d'en ouvrir, d'en ordonner même l'accomplissement à toutes les classes de la société, elle jugea que la révolution était un droit, et elle en prit possession au nom de la classe bourgeoise. Elle divisa donc la nation, plus qu'elle n'était divisée par les douanes de province à province, par la diversité des coutumes, par toutes les séparations matérielles qu'elle trouva à son avènement ; car l'unité royale coordonnait au moins cette variété en un système un.

La division opérée par la constituante fut une véritable désorganisation. Elle ne modifia pas tant le pouvoir d'un seul, et les priviléges des hautes classes, qu'elle ne rompit l'identité nationale elle-même, le fonds commun sans lequel il n'y avait plus de France. Si la révolution eût été à ses yeux ce qu'elle était réellement, un grand devoir auquel manquaient, depuis près de quatre siècles, l'Église catholique, et depuis Richelieu, les chefs français, elle eût montré à chacune des classes qu'elle était appelée à transformer, les immenses sacrifices auxquels elles devaient concourir, et chacune eût été en demeure d'y choisir une part. Alors les élémens sociaux eussent été dans leur vraie position, se touchant par le même devoir, unis dans la même obligation morale.

Loin de là, la constituante voulut unir par le droit, c'est-àdire par ce qui individualise et sépare. Il s'ensuivit que les aristocrates, les Actifs et les Passifs, furent dans une fausse position les' uns à l'égard des autres, et tous à l'égard de la révolution. Parlant pour les Actifs, la constituante dit aux aristocrates: Vous pouvez être citoyens actifs aujourd'hui, si vous voulez ; donc vous devez être avec nous. Aux Passifs, elle dit: Vous pouvez devenir un jour citoyens actifs, donc vous devez être avec nous. Les Aristocrates lui répondirent: Nous avons et nous

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