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pourrait entraîner, rassembler ou retenir hors des limites du royaume, qu'il voit non-seulement avec douleur, mais avec un profond mécontentement, une conduite qui trouble la tranquillité publique, objet constant de ses efforts, et qui paraît avoir pour but d'attaquer les lois qu'il a consacrées par son acceptation solennelle.

› Ceux-là seraient étrangement trompés qui supposeraient au roi une autre volonté que celle qu'il a publiquement manifestée, et qui feraient d'une telle erreur le principe de leur conduite et la base de leur espoir. De quelques motifs qu'ils aient pu la couvrir à leurs propres yeux, il n'en existe plus aujourd'hui: le roi leur donne, én exerçant sa prérogative sur des mesures de rigueur dirigées contre eux, une preuve de sa liberté, qu'il ne leur est permis ni de méconnaître ni decontredire; et douter de la sincérité de ses résolutions lorsqu'ils sont convaincus de sa liberté, ce serait lui faire injure.

Le roi n'a point dissimulé la douleur que lui ont fait éprouver les désordres qui ont eu lieu dans le royaume, et il a longtemps cherché à croire que l'effroi qu'ils inspiraient pouvait seul retenir hors de leurs foyers un si grand nombre de citoyens; mais on n'a plus le droit d'accuser les troubles de sa patrie lorsque par une abseuce concertée et des rassemblemens suspects, on travaille à entretenir dans son sein l'inquiétude et l'agitation; il n'est plus permis de gémir sur l'inexécution des lois et sur la faiblesse du gouvernement lorsqu'on donne soi-même l'exemple de la désobéissance, et qu'on ne veut pas reconnaître pour obligatoires les volontés réunies de la nation et de son roi.

› Aucun gouvernement ne peut exister si chacun ne reconnaît l'obligation de soumettre sa volonté particulière à la volonté publique: cette condition est la base de tout ordre social et la garantie de tous les droits; et soit qu'on veuille consulter ses devoirs ou ses intérêts, peut-il en exister de plus réels pour des hommes qui ont une patrie, et qui laissent dans son sein leurs familles et leurs propriétés, que celui d'en respecter la paix,

d'en partager les destinées, et de prêter son secours aux lois qui veillent à sa sûreté.

› La constitution, qui a supprimé les distinctions et les titres, n'a point exclu ceux qui les possédaient des nouveaux moyens d'influence et des nouveaux honneurs qu'elle a créés, et si, loin d'inquiéter le peuple par leur absence et par leurs démarches, ils s'empressaient de concourir au bonheur commun, soit par la consommation de leurs revenus au sein de la patrie qui les produit, soit en consacrant à l'étude des intérêts publics l'heureuse indépendance des besoins que leur assure leur fortune, ne seraientils pas appelés à tous les avantages que peuvent départir l'estime publique et la confiance de leurs concitoyens?

Qu'ils abandonnent donc des projets que réprouvent la raison, le devoir, le bien général, et leur avantage personnel! Français qui n'avez cessé de publier votre attachement pour votre roi, c'est lui qui vous rappelle dans votre patrie; il vous promet la tranquillité et la sûreté au nom de la loi, dont l'exécution suprême lui appartient; il vous les garantit au nom de la nation, avec laquelle il est inséparablenient uni, et dont il a reçu des preuves touchantes de confiance et d'amour. Revenez ; c'est le vœu de chacun de vos concitoyens; c'est la volonté de votre roi. Mais ce roi, qui vous parle en père, et qui regardera votre retour comme une preuve d'attachement et de fidélité, vous déclare qu'il est résolu de défendre par tous les moyens que les circonstances pourraient exiger, et la sûreté de l'empire qui lui est confiée, et les lois, au maintien desquelles il s'est attaché sans re

tour.

› Il a notifié ses intentions aux princes ses frères; il en a donné connaissance aux puissances sur le territoire desquelles se sont formés des rassemblemens de Français émigrés: il espère que ses instances auront auprès de vous le succès qu'il a droit d'en attendre. Mais, s'il était possible qu'elles fussent vaines, sachez qu'il n'est aucune réquisition qu'il n'adresse aux puissances étrangères, qu'il n'est aucune loi juste, mais vigoureuse, qu'il ne soit résolu d'adopter plutôt que de vous voir sacrifier

plus long-temps à une coupable obstination le bonheur de vos concitoyens, le vôtre, et la tranquillité de votre pays!

> Fait à Paris, le 12 novembre 1791.

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Leure du roi aux princes français, ses frères.

Paris, le 16 octobre 1791.

J'aurais cru que mes démarches auprès de vous, et l'acceptation que j'ai donnée à la constitution, suffisaient, sans un acte ultérieur de ma part, pour vous déterminer à rentrer dans le royaume, ou du moins à abandonner les projets dont vous paraissez être occupés. Votre conduite, depuis ce temps, devant me faire croire que mes intentions réelles ne vous sont pas bien connues, j'ai cru devoir à vous et à moi de vous en donner l'assurance de ma propre main.

› Lorsque j'ai accepté, sans aucune modification, la nouvelle constitution du royaume, le vœu du peuple et le désir de la paix m'ont principalement déterminé ; j'ai cru qu'il était temps que les troubles de la France eussent un terme; et voyant qu'il était en mon pouvoir d'y concourir par mon acceptation, je n'ai pas balancé à la donner librement et volontairement: ma résolution est invariable. Si les nouvelles lois exigent des changemens, j'attendrai que le temps et la reflexion les sollicitent: je suis déterminé à n'en provoquer et à n'en souffrir aucun par des moyens contraires à la tranquillité publique et à la loi que j'ai acceptée.

> Je crois que les motifs qui m'ont déterminé doivent avoir le même empire sur vous. Je vous invite donc à suivre mon exemple. Si, comme je n'en doute pas, le bonheur et la tranquillité de la France vous sont chers, vous n'hésiterez pas à concourir par votre conduite à les faire renaître en faisant cesser les inquiétudes qui agitent les esprits, vous contribuerez au rétablissement de l'ordre, vous assurerez l'avantage aux opinions sages et modérées, et vous servirez efficacement le bien, que votre éloignement et les projets qu'on vous suppose ne peuvent que contra

Je donnerai mes soins à ce que tous les Français qui pourront rentrer dans le royaume y jouissent paisiblement des droits que la loi leur reconnaît et leur assure. Ceux qui voudront me prouver leur attachement ne balanceront pas. Je regarderai l'attention sérieuse que vous donnerez à ce que je vous marque comme une grande preuve d'attachement envers votre frère et de fidélité envers votre roi, et je vous saurai gré toute ma vie de m'avoir épargné la nécessité d'agir en opposition avec vous, par la résolution invariable où je suis de maintenir ce que j'ai annoncé. >> Signé, Louis.

Lettre du roi à Louis-Stanislas-Xavier, prince français, frère du roi.

Paris, le 11 novembre 1791.

« Je vous ai écrit, mon frère, le 16 octobre dernier, et vous avez dù ne pas douter de mes véritables sentimens. Je suis étonné que ma lettre n'ait pas produit l'effet que je devais en attendre. Pour vous rappeler à vos devoirs, j'ai employé tous les motifs qui devaient le plus vous toucher. Votre absence est un prétexte pour tous les malveillans, une sorte d'excuse pour tous les Français trompés, qui croient me servir en tenant la France entière dans une inquietude et une agitation qui font le tourment de ma vie. La révolution est fiuie, la constitution est achevée, la France la veut, je la maintiendrai ; c'est de son affermissement que dépend aujourd'hui le salut de la monarchie. La constitution vous a donné des droits; elle y a mis une condition que vous devez vous håter de remplir. Croyez-moi, mon frère, repoussez les doutes qu'on voudrait vous donner sur ma liberté. Je vais prouver par un acte bien solennel, et dans une circonstance qui vous intéresse, que je puis agir librement. Prouvez-moi que vous êtes mon frère et Français, en cédant à mes instances. Votre véritable place est auprès de moi; votre intérêt, vos sentimens vous conseillent également de venir la reprendre; je vous y invite, et, s'il le faut, je vous l'ordonne. >

Signé, Louis.

Lettre du roi à Charles-Philippe, prince français, frère du roi.

Paris, 11 novembre 1791.

« Vous avez sûrement connaissance du décret que l'assemblée nationale a rendu relativement aux Français éloignés de leur patrie; je ne crois pas dévoir y donner mon consentement, aimant à me persuader que les moyens de douceur rempliront plus efficacement le but qu'on se propose, et que réclame l'intérêt de l'État. Les diverses démarches que j'ai faites auprès de vous ne peuvent vous laisser aucun doute sur mes intentions ni sur mes vœux. La tranquillité publique et mon repos personnel sont intéressés à votre retour. Vous ne pourriez prolonger une conduite qui inquiète la France et qui m'afflige, sans manquer à vos devoirs les plus essentiels. Épargnez-moi le regret de concourir à des mesures sévères contre vous; consultez votre véritable intérêt; laissez-vous guider par l'attachement que vous devez à votre pays, et cédez enfin au vou des Français et à celui de votre roi. Cette démarche de votre part sera une preuve de vos sentimens pour moi, et vous assurera la continuation de ceux que j'ai toujours eus pour vous. ›

Signé, Louis..

Réponse de Monsieur au roi.

Coblentz, le 3 décembre 1791.

SIRE, mon frère et seigneur,

Le comte de Vergennes m'a remis, de la part de votre majesté, une lettre dont l'adresse, malgré mes noms de baptême qui s'y trouvent, est si peu la mienne, que j'ai pensé la lui rendre sans l'ouvrir. Cependant, sur son assertion positive qu'elle était pour moi, je l'ai ouverte, et le nom de frère que j'y ai trouvé ne m'ayant plus laissé de doute, je l'ai lue avec le respect que je dois à l'écriture et au seing de votre majesté. L'ordre qu'elle contient de me rendre auprès de la personne de votre majesté, n'est pas l'expression libre de sa volonté, et mon honneur, mon devoir, ma tendresse même, me défendent également d'obéir. Si votre majesté veut connaître tous ces motifs plus en détail, je la supplie de se rappeler ma lettre du 10 septembre dernier. Je la supplie

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