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1789.

<< nation a montrée, dans tous les temps, au « ministre des finances que ses acclamations << ont rappelé, vous autorise suffisamment, « ce me semble, à lui en montrer une illi« mitée dans les circonstances où nous nous «< trouvons. Acceptez ses propositions sans « les garantir, puisque vous n'avez pas le « temps de les juger; acceptez-les de con<«< fiance dans le ministre, et croyez qu'en « lui déférant cette espèce de dictature pro« visoire, vous remplissez vos devoirs de « citoyens et de représentans de la nation..

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M. Necker réussira, et nous bénirons ses « succès, que nous aurons d'autant mieux préparés, que notre déférence aura été plus entière, et notre confiance plus do« cile. Que si, à ce que Dieu ne plaise, le premier ministre des finances échouait dans << sa pénible entreprise, le vaisseau de l'état <<< recevrait sans doute une grande secousse << sur l'écueil où son pilote chéri l'aurait laissé « toucher; mais ce heurtement ne nous découragerait pas : vous seriez là, messieurs, « votre crédit serait intact, et la chose pu« blique resterait toute entière. »

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Mirabeau fut chargé de rédiger le décret qui devait légaliser le plan du ministre; il le fit de cette manière :

L'assemblée nationale délibérant sur le « discours du par le premier ministre des « finances, à la séance du 24 septembre, ouï « le rapport du comité des finances, frappée << de l'urgence des besoins de l'état, et de l'im« possibilité d'y pourvoir assez promptement,si « elle se livre à un examen approfondi et dé« taillé des propositions contenues dans ce « discours; considérant que la confiance sans bornes que la nation entière a témoignée « à ce ministre, l'autorise, et lui impose en quelque sorte l'obligation de s'abandonner « entièrement à son expérience et à ses lu« mières, a décrété et décrète d'adopter << textuellement les propositions du premier « ministre des finances..

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Les amis de M. Necker ne virent dans ce décret que l'intention bien claire de faire échouer le plan, et de perdre le ministre, et ils le dirent assez haut pour que Mirabeau se orût obligé de réclamer, et de faire entendre qu'on avait mal saisi ses idées; ce qu'il fit dans une assez longue réplique, toujours sur le ton dérisoire, et dont la conclusion fut la même. M. de Lally-Tolendal, qui était sous tous les rapports l'ami et le partisan de M. Necker, critiqua la manière malveillante dont il était attaqué, et de

1783.

manda que son système fût approuvé, et 1789. la rédaction du décret à rendre, renvoyée

au comité des finances. A ces mots, Mirabeau se leva encore, et prononça le discours sui

vant:

« Au milieu de tant de débats tumultueux, << ne pourrai-je donc pas ramener la delibé<< ration à un petit nombre de questions bien simples?

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Daignez, messieurs, daignez me répon« dre...... Le premier ministre des finances << ne vous a-t-il pas offert le tableau le plus effrayant de notre situation actuelle?

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« Ne vous a-t-il pas dit que tout délai «< aggravait le péril? qu'un jour, une heure << un instant pouvait le rendre mortel?

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«< Avons-nous un plan à substituer, à celui « qu'on nous propose? Oui, a crié quelqu'un dans l'assemblée. Je conjure celui qui répond oui, de considérer que son plan «< n'est pas connu; qu'il faut du temps pour « le développer, l'examiner, le démontrer; « que, fût-il immédiatement soumis à notre « délibération, son auteur a pu se tromper; « que, fût - il exempt de toute erreur on. « peut croire qu'il s'est trompé ; que quand << tout le monde a tort, tout le monde a raison; qu'il se pourrait donc que l'auteur de cet

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<< constances.

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« autre projet, même en ayant raison, eût << tort contre tout le monde, puisque sans « l'assentiment de l'opinion publique, le plus << grand talent ne saurait triompher des cirEt moi aussi, je ne crois pas les moyens de M. Necker les « meilleurs possibles; mais le ciel me pré<< serve, dans une situation si critique, d'op« poser les miens aux siens! Vainement je << les tiendrais pour préférables: on ne rivalise << pas en un instant une popularité prodi« gieuse, conquise par des services éclatans; « une longue expérience, la réputation du premier talent de financier connu, et s'il <«< faut tout dire, des hasards, une destinée « telle qu'elle n'échut en partage à aucun << mortel. Il faut donc en revenir au plan de « M. Necker.

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« Oh! si des déclarations moins solemnelles « ne garantissaient pas notre respect pour « la foi publique, notre horreur pour in« fáme mot de banqueroute, j'oserais scruter « les motifs secrets, et peut-être, hélas ! ignorés de nous-mêmes, qui nous font si imprudemment reculer au moment de pro« clamer l'acte d'un grand dévouement, cer«tainement inefficace, s'il n'est pas rapide et « vraiment abandonné! Je dirais à ceux qui

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1789.

1789.

e

a se familiarisent avec l'idée de manquer
« aux engagemens publics, par la crainte de
« l'excès des sacrifices, par la terreur de
T'impôt..... Qu'est-ce donc
Qu'est-ce donc que la ban-
« queroute, si ce n'est le plus cruel, le plus
inique, le plus inégal, le plus désastreux
« des impôts?.... Mes amis, écoutez un
« mot, un seul mot.

« Deux siècles de déprédations et de brigandages ont creusé le gouffre où le royaume «est près de s'engloutir. Il faut le combler, « ce gouffre effroyable. Eh bien! voici la liste « des propriétaires français. Choisissez parmi « les plus riches, afin de sacrifier moins de

citoyens; car ne faut-il pas qu'un petit << nombre périsse pour sauver la masse da peuple? Allons, ces deux mille notables

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possèdent de quoi combler le déficit. Ra«inenez l'ordre dans vos finances, la paix «et la prospérité dans le royaume; frappéz, «immolez sans pitié ces tristes victimes, "précipitez-les dans l'abyme, il va se referkamer. Vous reculez d'horreur!.... «Hommes inconséquens hommes pusillani«mes! eh! ne voyez-vous donc qu'en décré« tant la banqueroute, ou, ce qui est plus << odieux encore, en la rendant inévitable « sans la décréter, vous vous souillez d'un

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