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premiers frais. On trouvait dans cette feuille 1789. tout ce qui avait été dit dans chaque

séance et jusqu'aux expressi ons les plus fugitives; rien absolument n'était oublié. Comme les recettes du Logographe ne pouvaient couvrir ses dépenses, MM. de Lameth et leurs amis s'étant rapprochés du roi, le déterminèrent à faire un fonds pour le soutenir, en lui fesant entendre que la publication de tous les propos, au moins inconsidérés, qu'on tenait alors au corps législatif, ne pouvaient produire qu'un très-bon effet pour le maintien ou la restauration de l'autorité royale. Aussi les auteurs du 10 août détruisirent-ils le Logographe, comme un échotrop fidèle de toutes les sottises qu'ils voulaient avoir le privilége de dire, sans qu'on eût le droit de les publier.

Outre ces feuilles qui paraissaient tous les jours, et rendaient un compte plus ou moins étendu, et chacune à leur manière, des délibérations de l'assemblée, il en était d'autres qui ne paraissaient qu'à la fin de chaque semaine, ou qui ne s'occupaient de l'assemblée que pour attaquer ou préconiser ses membres et ses opérations, suivant qu'elles étaient utiles ou opposées au système qu'ils s'étaient chargés de faire valoir. Au

nombre des journaux hebdomadaires, on trouve le Courrier de Brabant, et celui in- 1789.

titulé Révolutions de Paris, l'un et l'autre

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quer tous les excès qui se commettaient alors. Le Courrier de Brabant était rédigé par Camille-Desmoulins (1). Le journal des Révolutions de Paris, qui portait le nom de Prudhomme, marchand papetier, fut commencé par un auteur peu connu, nommé Tournon (2), qui le rédigea pendant trèspeu de temps; il fut ensuite confié à un jeune homme nommé Loustalot (3), dont la manière d'écrire annonçant sans doute beaucoup de talens, mais cependant beaucoup moins forte que violente, fit la fortune du papetier.

Dans les rangs opposés au journal signé Prudhomme, on voyait celui intitulé les Actes des Apôtres, entrepris par M. Pelletier, qui était en même temps un des ré

(1) Guillotiné en 1794, et par suite des délibérations de la convention dont il était membre.

(2) Guillotiné en 1794.

(3) Mort dans les premières années de la révolu tion.

1789.

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dacteurs; les autres étaient MM. le marquis de Champcenetz (1), le comte de Rivarol (2), le vicomte de Mirabeau (3), le marquis de Bonnay, et beaucoup d'autres qui lui envoyaient des articles. Cette feuille était un recueil de facéties, de sarcasmes, d'anecdotes scandaleuses et piquantes, de traits mordans contre les principes de la révolution et ses partisans les plus remarqués.

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Le journal les Actes des Apôtres se fesait très-gaîment, et le plus ordinairement chez le restaurateur Beauvilliers, où les personnes dont on vient de parler se réunissaient souvent. Il n'est point d'écrits qui aient plus contrarié, plus tourmenté les amis de la révolution que les Actes des Apôtres; aussi n'est-il pas de moyens qu'ils n'aient mis en usage pour le détruire entièrement. Quelques-unes de ces feuilles trouvées chez quelqu'un, étaient un motif plus que suffisant

(1) Guillotiné.

(2) Retiré en Prusse.

(3) Mort en 1792.

pour le faire assassiner. La Feuille Villageoise, rédigée par l'ex-jésuite Cérutti, le 1789. député Rabaut Saint-Etienne, et un littérateur nommé Grouvelle, (1) était destinée à expliquer la révolution aux habitans des campagnes, et à leur faire goûter les nouvelles institutions. Cette feuille inégale dans sa rédaction, parce que ses auteurs étaient fort loin d'avoir un égal mérite, est beaucoup moins violente que ses émules dans le développement du même système.

Le Journal de la Cour et de la Ville, rédigé en grande partie par le chevalier de SaintMéard, fut un répertoire de bonnes et de mauvaises plaisanteries, de traits malins et sanglans contre les opérations révolutionnaires et ceux qui les avaient imaginées. L'auteur qui a échappé au massacre de septembre, parure espèce de prodige,a publié sur ces massacres un petit ouvrage extrêmement précieux; il caractérise les hommes et les chose, et découvre dans l'ame de ces assas

(1) Le premier, mort; le second, guillotiné; et le troisième, ambassadeur en Danemarck pendant le temps de la révolution appclé celui de la terreur, est aujourd'hui membre du corps législatif sous le gouvernement consulaire.

1789.

sins des sentimens que, jusqu'à ce jour, la nature n'avait peut-être pas encore dévoilés.

Mais les journaux qui provoquèrent nettement l'assassinat, furent l'Orateur du Peuple, rédigé par Fréron (1), et l'Ami du Peuple, publié par Marat (2). Il est impossible de calculer les effets qu'ont produits sur le petit peuple, ces feuilles toutes dégoûtantes de sang: le dernier de ces individus, sur-tout, maniaque sans talent, espèce de fou enragé qu'il faut avoir vu et entendu pour s'en faire une idée, était devenu la divinité de la populace, et quoiqu'il ne fût qu'un instrument dans les mains de personnages plus adroits, il parvint à les faire tous trembler, sans se douter lui-même de sa prodigieuse puissance.

D'un autre côté, ceux qui dans les derniers temps de l'assemblée voulurent maintenir la nouvelle constitution, imaginèrent

(1) D'abord administrateur des hôpitaux de Paris, sous le gouvernement consulaire, et ensuite inspecteur - général des octrois ou droits d'entrée de cette ville.

(2) Assassiné par mademoiselle Charlotte Corday, sous le règne de la convention dont il était membre.

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