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journal estagréablement écrit, et sur un ton de persiflage qui l'a fait rechercher. Les Jacobins 1759 qu'il tournait en ridicule continuellement, n'oublièrent pas de le faire assassiner par leur tribunal révolutionnaire. On a dit, non sans quelque raison, que l'ardeur inconsidérée que ces journalistes mirent à la défense du roi, fut aussi fatale à ce malheureux prince que toutes les calomniés débitées contre lui par ceux qui écrivaient dans un sens diamétralement opposé.

Dans les partis mixtes, inais cependant plus rapprochés du système constitutionnel de 1791, on trouve la Gazette Universelle, entreprise par MM. Boyer (1) et Cerisier. Ce journal n'est pas très-bien écrit, mais il est bien fait; il a la tournure particulière qui fait la fortune de ces sortes d'ouvrages; aussi la sienne a-t-elle été complète.

Au nombre des journaux révolutionnaires, nous avons oublié de placer celui rédigé par

(1) M. Boyer a été guillotiné en 1794, comme un des auteurs des conspirations imaginaires fabriquées par les tyrans de ce temps-là. M. Cerisier est retiré dans son pays. La Gazette Universelle est une des feuilles les plus heureuses de la révolution; elle est encore aujourd'hui très-répandue, sous le nom de Publiciste.

N. Gorsas (1), d'abord sous le titre de Cour1789. rier de Versailles, et ensuite sous celui de Courier de Paris et des Départemens. Cette feuille n'est point mal écrite, mais elle se distingue par la plus extrême violence.

Il y a eu aussi quelques journaux qui essayèrent le ton d'impartialité, et ne purent réussir, quoique rédigés par des hommes de beaucoup de talens. Tel fut le journal des Impartiaux, entrepris par M de ClermontTonnerre (2) et Fontanes, et auquel devaient concourir d'autres personnes d'un mérite non moins distingué; ce journal n'exista que quelques semaines. Les Annales Monarchiques écrites dans le même esprit par l'abbé Delasalle, sont également restées sans succès. Ce n'est pas le savoir-faire qui pouvait espérer de réussir alors, s'il n'était pas en même temps le faire du jour. C'est par cette raison que le Spectateur, journal très

(1) Guillotiné sous la convention dont il était membre.

(2) Le premier a été assassiné le 10 août 1792; le second est occupé aujourd'hui par le ministre de l'intérieur.

bien fait, dont M. Decharnois (1) était l'auteur, sé fit à peine remarquer.

Quelques autres journaux parfaitement nuls, réussirent plus facilen ent; tels sont ceux qui rendaient, le soir même, compte des débats de l'assemblée; mais ils durent leur fortune à la curiosité du moment. De ce nombre est le Journal Sans Réflexions, publié sous le nom d'Etienne Feuillant. Le Journal des Débats, entrepris par le député Gauthier de Biauzat, s'est aussi soutenu assez avantageusement; c'est un tableau étendu et fidèle, mais sec, des opérations de l'assemblée! il a subsisté jusqu'en 1800, sous cette forme, qu'il a entièrement changée à cette époque. Le Journal des Débats avait beau

1789.

coup de rapport avec le Moniteur et le Logographe, immenses feuilles, aussi volumineuse que celles qu'on publie en Angleterre. Le Moniteur a toujours été écrit dans le sens du parti dominant, quel qu'en fût l'esprit, soit tyrannique, soit modéré; c'est ce qui l'a sauvé des naufrages nombreux qui ont englouti presque tous les autres. Le Moni teur, commencé au mois de novembre 1789, doit sa fortune à une petite feuille appelée

(1) Assassiné dans les prisons le 2 septembre 1792.

Le Bulletin, qui rapportait à peu près tex1789. tuellement les principaux débats de l'assem

blée constituante. Le Bulletin avait paru dans les premiers temps de la formation de cette assemblée: il était rédigé par M. Maret (r. Le libraire qui avait entrepris le Moniteur, s'arrangea avec M. Maret, qui en fut le principal rédacteur jusqu'au 10 août, et lui donna la forme qu'ila conservée, M. Mejean (2) avait aussi travaillé au Bulletin, et a de même aidé M. Maret, son ami, dans la rédaction du Moniteur, et Mirabeau, dans celle du Courrier de Provence. Le même auteur ré

digea ensuite particulièrement une feuille intitulée Assemblée nationale, exclusivement destinée aux travaux de l'assemblée. Ce journal qui remplissait très-bien son titre, a cependant eu peu de succès. On doit encore placer au nombre des journaux dont la fortúne n'a pas répondu à leur mérite, celui qui portait le nom de Courrier de Madon, rédigé par M. Dinocheau, député à l'assem

(1) Aujourd'hui secrétaire-d'état sous le gouvernement consulaire.

(2.) -Aujourd'hui secrétaire général du département de la Seine.

blée nationale: ce journal était das le sens de la révolution, mais on n'y trouve rien de 17violent, et jamais ce ton déclamateur, ce parlage furieux, qui étaient alors si communs.

Le Logographe était plus volumineux et plus exact encore que le Moniteur; il fut imaginé en 1790, par MM. Adrien Duport, de Lameth et autres députés du parti le plus révolutionnaire de l'assemblée. Ils avaient eu cette idée pour se mettre à l'abri des sarcasmes que leurs adversaires lançaient à chaque instant contr'eux, pour arrêter leurs cris, leurs interpellations, pour déjouer enfin tous les stratagèmes qu'ils mettaient en usage pour paralyser leurs opérations. Il était naturel de croire que des hommes, la plupart d'une haute distinction, qui desiraient être respectés, craindraient de rendre toute l'Europe spectatrice de débats où souvent eux-mêmes ne se respectaient guères, n'aimeraient pas voir imprimées les expressions incohérentes, et peu décentes souvent, que l'irréflexion et la violence leur arrachaient. Le Logographe eut une partie du résultat qu'on avait attendu; il rendit pendant quelque temps Passemblée un peu plus circonspecte. no collar.

Ceux qui Pavaient conçu, en firent les

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