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bler ses troupes aux frontières de Russie. La diète | Lacretelle et Bertrand de Molleville, ont déjà es

Polonaise détermina aussi le secours à donner à ces mêmes musulmans que Sobieski avait vaincus devant Vienne cent ans auparavant. La Suède s'arma de nouveau, et tout annonça qu'un orage, plus violent que le premier, allait bientôt éclater sur la Russie, et bouleverser tout l'Orient.

Catherine, qui avait cru pouvoir résister, en 1786, avec l'alliance des Autrichiens, ne jugea pas devoir conjurer seule cette tempête plus alarmante. Les succès de ses armées achetés par des flots de sang, les avaient d'ailleurs presque autant affaiblies que des défaites. Au moment où l'Europe s'y attendait le moins, où ses partisans tremblaient pour elle, la czarine sut prendre un parti décisif; profitant des ouvertures de médiation de l'Angleterre, elle fit remettre des notes très-pacifiques à toutes les cours, et Repnin conclut en effet, à Galatz, des préliminaires avec les Turcs, qui, au moment le plus critique, furent fort surpris de recouvrer plus qu'ils n'avaient osé demander, et d'en être quittes pour la cession du petit district d'Oczacow, consacrée par le traité définitif de Jassy (janvier 1792). Telle fut la fin d'une guerre dont l'intérêt disparaît maintenant à nos yeux par l'importance de celle qui devait bientôt embraser l'Occident, mettre tous les trônes en péril, occuper et agiter les quatre parties du monde.

CHAPITRE II.

quissé de main de maître, les traits principaux de ces événements. Si leurs raisonnements different quelquefois entre eux, s'ils se sont ressentis de leur situation personnelle et de l'influence de l'esprit du temps, on ne peut se dissimuler, néanmoins, les droits que ces historiens ont acquis à l'estime de la postérité, et le lecteur éclairé saura trouver, entre leurs assertions, le terme moyen convenable, pour asseoir ses jugements.

Avant de procéder à cet examen, il ne sera pas inutile d'indiquer les principes qui nous serviront de guides; s'ils nous mettent en butte aux critiques de tous les partis, ce sera une preuve qu'ils sont dépouillés d'exagération.

Nous respectons ces doctrines de vraie liberté qui sont si propres à élever le cœur de l'homme, mais qui ont si souvent égaré sa tête. Nous estimons ces citoyens de toutes les conditions qui, animés par ces brillantes théories, ont voulu faire le bonheur et la gloire de leur pays en les y propageant. Nous sommes même convaincu, que, si un peuple pouvait s'isoler des autres, l'application de ces dogmes deviendrait pour lui un besoin préférable au repos et à la prospérité intérieure. Mais nous pensons aussi que, dans le labyrinthe politique où l'Europe semble jetée depuis le règne de CharlesQuint, un État doit conserver toute sa force, non-seulement pour faire face aux ennemis extérieurs, mais encore pour ne pas les exciter, par des discordes intestines, à intervenir dans des intérêts qui devraient leur être étrangers. Une administration vigoureuse dans ses formes, limitée par un

Coup d'œil sur les causes et les premiers événements de très-petit nombre de principes fondamentaux, mais

la révolution.

Pour présenter le tableau complet de ces scènes extraordinaires, il faudrait un talent que nous sommes loin de posséder.

Notre projet est d'indiquer seulement les catastrophes principales qui signalèrent la chute de l'antique monarchie française, afin que nos lecteurs puissent rattacher les opérations des armées, avec ce qui se passait dans l'intérieur, et de ne pas séparer des faits qui se lient essentiellement par leurs combinaisons comme par leurs résultats.

Des écrivains plus habiles que nous, Ségur,

composée d'hommes généreux et libéraux, paraît donc la seule qui garantisse l'ordre au dedans, la considération et la force au dehors, l'indépendance envers et contre tous. Une telle administration loin d'être incompatible avec les maximes de liberté civile et d'égalité en droits politiques, seules théories de gouvernement que la raison doive admettre, pourrait être regardée comme la meilleure garantie de ces droits précieux.

Si les discussion à la tribune contribuent au perfectionnement de l'administration publique, quand les législateurs sont animés d'un grand dévouement national, elles semblent d'autant plus nuisibles et

dangereuses lorsqu'ils sont dominés par un esprit | volontés des citoyens; car sa puissance se compose des forces individuelles, et celles-ci résident dans la volonté de l'homme plutôt que dans ses bras.

Toute la science du pouvoir consiste donc à disposer, le plus possible, des volontés des gouver

détermine sa volonté, c'est à bien connaître celle des citoyens, qu'un gouvernement habile et sage doit appliquer sa principale étude. Sans croire que l'opinion soit l'unique souveraine du monde, il faudrait toutefois méconnaître les premiers éléments d'administration, pour ne pas convenir qu'elle ajoute un poids inouï à la puissance que les dépositaires de la force publique tiennent entre leurs mains. Qui sait créer l'opinion, la diriger, ou seulement la comprendre, possède donc, selon nous, les principes les plus nécessaires du grand art de régner.

de caste ou de parti. Il ne faut point oublier que, si les débats des parlements anglais ont contribué à la gloire de la Grande-Bretagne, les diètes polonaises ont perdu la patrie des Jagellons, des Sobieski, comme le sénat de Carthage perdit Anni-nés. Or, comme c'est l'opinion de l'homme qui bal. Il est sans doute difficile d'éviter tous les écueils dans les grands chocs d'opinions et d'intérêts qui enfantent les révolutions; cependant il est des règles générales qu'on ne peut méconnaître : ces discussions seront toujours moins susceptibles d'exaltation et de danger, en les confiant à deux chambres subordonnées à l'initiative du gouvernement et restreintes à des intérêts de législation intérieure; car, si les questions d'État sont rarement traitées avec profondeur, dans le calme du cabinet, par quelques conseillers choisis sur l'élite de toute une nation, par des hommes qui tiennent tous les fils de l'administration générale, comment pense-t-on les faire traiter par acclamation, dans une seule as-phie sentent la nécessité de marcher avec leur sièsemblée de 5 ou 600 personnes, dont la plus petite partie, bien que consacrée à l'étude des lois, est encore étrangère aux combinaisons des grands intérêts publics?

On ne nous accusera pas, pour professer de semblables opinions, d'être partisan du despotisme; nous avons donné des preuves du contraire; il ne faut pas penser non plus que nous rejetions tout gouvernement représentatif; cette forme peut garantir une monarchie des désordres d'une cour vicieuse, comme celle du régent et de la fin de Louis XV. Mais il convient que ces grands corps délibérants ne soient pas trop fréquemment assemblés; qu'ils se persuadent que les législateurs doivent éclairer la marche du gouvernement et non gouverner par eux-mêmes; qu'ils doivent avertir sans jamais renverser. Enfin il importe de bien se pénétrer de cette vérité, qu'une administration médiocre est préférable à une révolution, ou même à une administration orageuse.

Nous avons dit que le premier besoin d'un gouvernement est d'être vigoureux par la nature de ses institutions: mais pour être réellement fort, il ne suffit pas toujours de s'être approprié un grand pouvoir et de compter un grand nombre de baïonnettes; il semble qu'un gouvernement a d'autant plus de force qu'il obtient plus d'empire sur] rles

Les princes éclairés du flambeau de la philoso

cle, et lorsqu'ils voient le fleuve de l'opinion prêt à déborder, ils n'ont pas l'aveugle témérité de l'ar. rêter dans son cours : ils lui préparent, ils lui creusent au contraire des canaux, où son onde divisée s'épanche et circule doucement, emportant avec elle et répandant de toutes parts ses principes vivifiants qui font éclore les germes les plus précieux, et fertilisent les plus arides plages.

Jamais monarque ne fut, sous ce rapport, dans une position plus heureuse et plus difficile à la fois que Louis XVI; aucun ne professa des principes plus philanthropiques et ne fut plus malheureusement victime de son propre ouvrage. S'il mérita le titre de restaurateur et de bienfaiteur de la monarchie, on est fondé à croire d'un autre côté qu'il se laissa trop souvent entraîner par de perfides conseils. Bien des hommes d'État ont pensé que si ce prince eût suivi franchement le vœu de l'opinion publique, assez prononcé pour qu'il ne pût s'y méprendre; et s'il eût marché sans détour, dans le sens des intérêts de la nation, en sacrifiant ceux de caste, une ordonnance conforme à l'esprit du temps et au besoin des peuples, eût suffi pour empêcher l'explosion révolutionnaire qui bouleversa la France, et mit en feu l'Europe entière.

Mais il était dans la destinée du roi martyr de

la noblesse.

prouver au monde, que le désir du bien est insuf- | appartenu, les hommes de honne foi conviendront fisant sur le trône, quand il n'est point accompa- que ces désastres étaient du moins inutiles, puisgné de cette perspicacité d'esprit et de cette force qu'on aurait pu obtenir, dès le mois d'août 1789, d'âme, nécessaires pour l'opérer: au moindre ob- tout ce qui a été consacré par la charte de 1815. stacle on vit ce faible monarque s'arrêter ou rétro- Partant de ces bases, nous pensons que si les grader; et, faute de prendre, pour point d'appui, Français se fussent contentés du gouvernement des la masse de la nation, source de toute force et de Vergennes, des Turgot et des Necker, sauf la contoute puissance, il ne sut triompher ni de l'oppo- cession de principes généraux, le tiers état eût sition intéressée des parlements, ni du coupable reconquis ses droits; les nobles, abandonnant quelégoïsme du clergé, ni des prétentions surannées de ques priviléges, eussent conservé leurs fortunes, de beaux noms et l'influence naturelle qu'ils assurent dans les affaires. Alors la France, délivrée du démon des discordes, eût sauvé ses belles colonies, sa marine et son commerce: elle eût maintenu ses heureuses alliances avec l'Espagne, ses traités avec la Russie, l'Autriche et l'Amérique; ramené la Hollande à ses intérêts naturels, et délivré l'Inde. Enfin recueillant tout le fruit de la guerre d'Amérique, elle eût rejeté l'Angleterre au rang dont elle n'aurait jamais dû sortir. La gloire des armées françaises a couvert un moment les ruines de la révolution; mais, malgré les occasions qu'elle donna à Carnot et à quelques républicains de déployer une grande énergie, à Bonaparte et à Moreau de développer leurs talents, on ne doit point disconvenir que ses suites, sous le rapport de la politique extérieure, seront un sujet éternel de regret pour l'Eu

Cependant, si l'on peut faire quelques reproches à ce prince, on ne peut méconnaître, jusque dans ses fautes, la magnanimité qui le caractérise: s'il aima son peuple et consentit à lui donner des institutions nouvelles, dut-il paraître étrange que son amour pour le bien et la justice lui ait fait prendre à cœur les intérêts de cette classe nombreuse qui servait la monarchie depuis sa fondation? L'histoire impartiale ne doit pas oublier que Louis XVI, traité par les exagérés de Coblentz comme un roi jacobin, fut assassiné par les démagogues pour avoir conspiré contre le peuple; ces deux jugements, portés par les partis extrêmes, seront le témoignage le plus évident de sa modération et de l'envie qu'il eut de concilier les intérêts de toutes les classes de la nation.

C'est donc aux meneurs exagérés de ces deux rope entière. On paya chèrement la fatale expépartis qu'il faut imputer les maux de la révolution.rience de cette vérité, que les phrases et les formes Nous gémissons, avec tous les amis de la France ne constituent pas les libertés et les franchises d'un et de l'humanité, sur les déplorables excès qui ont empire; car la France, libre sous Louis XVI, fut ensanglanté ce pays. Nous ne pouvons nous défen- couverte, au nom des droits de l'homme, d'une dre d'un sentiment d'indignation en songeant à ces nuée de tyrans odieux; et, même aux plus beaux insensés, dont les discours furibonds, partis du jours de l'assemblée constituante, on ne fut guère haut de la tribune nationale, ont soulevé tant de plus libre que sous le ministère de Turgot, puispassions au dedans et tant de résistances au dehors. que le despotisme de parti avait succédé à celui Qui pourrait se rappeler sans horreur, ces jours de de caste. Enfin, à part quelques principes consadeuil et d'épouvante, où les plus fidèles défenseurs crés, tels que l'abolition des priviléges du 4 août des principes, confondus dans la même proscrip- 1789, l'égalité d'impôts, le droit pour les Français tion avec leurs ennemis, se virent livrés ensemble qui servent bien leur patrie d'arriver aux emplois à la hache révolutionnaire? Si les Français, por- civils et militaires, tout ce qui arriva pendant la tant aujourd'hui leurs regards au dehors de leurs révolution fut abusif, et ne répondit point à l'atfrontières et par delà l'Océan, peuvent éprouver tente qu'on s'en était formée. L'assemblée adopta d'amers regrets, ils doivent aussi trouver quelque de bonnes lois partielles, mais ses travaux consticonsolation à voir consacrer ces mêmes principes tutionnels, portant l'empreinte d'une démocratie pour la conquête desquels ils ont fait tant de sa- outrée, préparèrent les événements désastreux qui crifices; et quel que soit le parti auquel ils aient suivirent. Les prétentions de la noblesse oligar

TOME 1.

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chique, les abus de toute espèce qui s'étaient in- | L'antique constitution de la monarchie n'existait troduits, pouvaient être des motifs de réforme; plus; on ne trouvait, à sa place, que des ordonmais, pour restaurer le royaume, il fallait bien se nances tombées en désuétude, un besoin vague de garder d'y introduire l'anarchie. changement et un défaut complet d'harmonie entre les différents ordres de l'État, ou entre les différentes classes de la société.

Les écrits du 18e siècle répandirent de grandes lumières et des vérités bien séduisantes, mais d'autant plus dangereuses, lorsqu'elles sont semées sur un sol volcanique.

La noblesse, ayant successivement perdu une partie de ses droits envers la couronne, voulut conserver ses priviléges sur la bourgeoisie. Un tiers état, enrichi par l'industrie et par le commerce, éclairé par les écrits contemporains, demanda, de son côté, à prendre part aux honneurs et aux bénéfices de l'État dont il supportait toutes les charges; bien différent de la multitude du 15° siècle, il ne pouvait être mené comme elle.

Si ce point de vue, fruit d'une cruelle expérience des hommes et des choses, n'est pas du goût de chaque lecteur, nous aimons à nous persuader qu'il aura l'assentiment de ceux qui ont profondément réfléchi sur les institutions des peuples. Peut-être se sera-t-on trompé quelquefois sur l'application de ces principes; s'il en était ainsi, on trouverait ces erreurs pardonnables en songeant combien il est rare, malgré une impartialité absolue, de voir toujours juste sur des événements contemporains. Une dernière réflexion achèvera cette profession de foi, elle est relative aux armées françaises : si le tribunal impassible de la postérité a déjà voué à l'opprobre les barbares qui noyèrent le berceau de la république dans des flots de sang, s'il est même difficile qu'il s'arme d'indulgence pour les excès de quelques hommes distingués d'ailleurs par | leurs talents, il approuvera d'autant mieux le tribut d'éloges que nous nous sommes fait un devoir de payer aux braves qui, sans s'arrêter à la forme de gouvernement sous laquelle gémissait leur pays, se sont dévoués noblement à sa défense; à ceux qui ont eu le courage de servir les comités et la convention pour sauver l'honneur et l'indépendance nationale. Quoique l'auteur de ces lignes ne soit point Français, il ne se rappellera jamais sans émotion, le généreux enthousiasme dont les soldats de cette époque furent animés à la voix de la patrie; ce sentiment commande le respect de tous les siècles. Afin de remplir, aussi bien que possible, le cadre étroit de cet aperçu, on ne recherchera point les causes de la révolution au delà du 18 siècle; il suffira d'indiquer celles qui agirent immédiate-stitutions adaptées à l'esprit du temps, semblaient ment sur son explosion.

Le cardinal de Richelieu avait porté le dernier coup à l'anarchie féodale; Louis XIV poussant les choses plus loin, renversa les assemblées nationales, et concentra dans la royauté tout ce que le prestige de la magnificence, l'amour de la gloire et la force de l'autorité, pouvaient avoir d'empire sur les Français. Sous ses successeurs, la dignité royale fut d'abord décréditée, puis sourdement minée par l'opposition permanente des grandes magistratures.

La religion, fondée sur un rite suranné et décrédité, au lieu de reposer sur les beaux préceptes de la morale chrétienne, fut bientôt attaquée ouvertement, et ne put l'être en vain, quand ses ministres donnaient l'exemple du scandale public.

Le choc de tant de passions ne manque pas de produire un esprit universel de fronde, un mépris presque général pour l'ordre de choses existant. Les parlements mettent toute leur gloire à lutter sans cesse contre la cour, la petite noblesse veut rivaliser avec la grande, la robe avec l'épée, la bourgeoisie avec tous ceux dont les vices autorisent ses plaintes et dont les ridicules sont devenus l'objet de ses risées. La révolution semble dès lors inévitable.

Un roi soldat, un monarque en même temps fort, énergique et magnanime, ou de nouvelles in

les seuls remèdes à opposer à cette crise et les seuls moyens d'éviter une explosion. Louis était le véritable père de son peuple, mais le prince le moins fait pour le tirer de l'abîme. On pouvait done aisément prévoir que la France, agitée par des intérêts si divers, ne manquerait pas d'éclater, dès que la moindre occasion s'en présenterait; elle ne se fit pas attendre longtemps; le désordre des fi nances et le déficit de quelques millions vinrent bouleverser l'univers.

Depuis les guerres ruineuses de Louis XIV, les | et l'on ne peut pas plus nier les avantages de cette finances se trouvaient dérangées. Le système de méthode que méconnaître ses dangers dans des Law leur avait porté le dernier coup; celui de l'abbé temps de troubles. Son compte rendu appela pour Terray avait ébranlé le crédit public sans faire le ainsi dire la discussion publique sur les intérêts bien qu'on s'en était promis. La moitié des revenus les plus élevés de l'administration; mais si, en le de l'État était absorbée par l'intérêt de la dette, publiant, il perdit la confiance de la cour, si elle tandis que l'application d'une somme pareille à la l'accusa de vouloir se populariser par ambition et marine, eût suffit pour la recréer et chasser les aux dépens de l'autorité royale, sa retraite n'en fut Anglais des deux Indes. On préféra par économie pas moins un mal. n'avoir ni vaisseaux, ni soldats, ni considération, afin de payer, plus exactement, deux cent cinquante millions aux créanciers de l'État. La guerre d'Amérique, la plus heureuse que la France ait soutenue, occasionna un déficit d'un milliard; et des taxes déjà très-nombreuses, mais mal réparties, ne laissaient aucune espérance de le remplir, à moins de donner de nouvelles bases à la répartition des impôts directs: la plupart des terres, c'est-à-dire celles de la noblesse et du clergé, étaient injustement exemptes, et il s'agissait de les faire contri-ques sages, une gravité imperturbable et une grande buer également.

Necker obligé de quitter le ministère des finances, fut remplacé par M. de Calonne, qui administra ce département jusqu'en 1787, M. de Vergennes étant toujours chargé des relation extérieures.

La réunion de ces deux hommes semblait assurer une navigation paisible au vaisseau de l'État. Le premier d'un esprit vif, pénétrant, d'une éloquence peu commune, était, il est vrai, souvent entraîné par une imagination trop ardente; mais l'autre, sans être un génie extraordinaire, avait des vues politi

habitude des négociations. Ce dernier mourut malheureusement au mois de février 1787, et fut remplacé par le comte de Montmorin.

Turgot le tenta avant la guerre; les parlements et le clergé s'y opposèrent, moins sans doute par intérêt pécuniaire, que pour conserver des prérogatives consacrées par d'antiques préjugés : c'était l'orgueil de caste aux prises avec l'intérêt national, et de tous les obstacles que peut éprouver une ré-affaires, de puissants auxiliaires pour le renverser. forme, le plus difficile à vaincre.

Le vertueux ministre se retira et fut d'abord remplacé par Clugny, ensuite par Necker. Ce dernier, dont la destinée fut si extraordinaire, était doué d'un esprit supérieur; on lui doit de justes hommages comme administrateur libéral et philanthrope, mais comme ministre de Louis et chargé de veiller aux destinées d'une brillante monarchie, il encourut le reproche d'imprudence.

Dans un siècle où l'esprit de fronde envers l'au torité était une vertu publique, quels qu'en fussent d'ailleurs le motif et la forme, il fallait beaucoup de génie et de force pour tenir d'une main sûre les rênes de l'État : et sans doute qu'alors un Richelieu eût mieux valu qu'un philosophe genevois, pour arracher à tous les partis les concessions nécessaires, et sauver l'immense édifice social confié

à ses soins.

Le système de Necker était de commander à l'opinion générale, par la publicité des opérations,

Dès lors le contrôleur des finances resta seul en butte aux menées d'une foule d'ambitieux, qui trouvaient dans la position générale des esprit et des

Il n'avait point le genre de talent convenable pour lutter contre la masse d'obstacles qui lui étaient opposés ; et les vices de son administration mirent le comble à son malheur en ouvrant un vaste champ aux accusations de ses ennemis. Ils lui reprochèrent la dilapidation des deniers, que Necker prétendait avoir laissés dans l'état le plus prospère.

Cependant l'esprit de fronde augmente chaque jour; l'opinion publique s'exalte de plus en plus; les désordres de l'administration vont toujours croissant. Le roi effrayé par l'impossibilité d'opérer le bien au milieu de tant d'oppositions, désire plaire à tous, et ménager tous les intérêts. Il recommande

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